Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal), où l’on concluait qu’elle était inadmissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC).

[2] Les moyens pour en appeler à la division d’appel sont ceux prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[3] Conformément au paragraphe 56(1) de la LMEDS, il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. Le paragraphe 58(2) prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Dans ce contexte, une chance raisonnable de succès revient à « soulever des motifs défendables qui pourraient éventuellement donner gain de cause à l’appel » : Osaj c. Canada (Procureur général), 2016 CF 115, paragraphe 12.

[4] La question dont je suis saisie consiste à déterminer si l’appel de la demanderesse a une chance raisonnable de succès.

Contexte

[5] La demande de pension d’invalidité du RPC de la demanderesse a été présentée le 31 octobre 2013. Le défendeur a rejeté cette demande initialement et après révision.

[6] La demanderesse a interjeté appel à l’encontre de la décision de révision devant la division générale. Une audience a été tenue par vidéoconférence.

[7] Dans les motifs transmis le 12 avril 2016, le membre de la division générale a jugé que la date de fin de la période minimale d’admissibilité (PMA) était le 31 décembre 2014. Il a examiné la preuve médicale des spécialistes et a conclu qu’elle ne faisait pas montre d’une condition médicale diagnostiquée d’une gravité si grande que la demanderesse serait incapable de retourner au travail. Il a souligné que les examens objectifs, dont une IRM de la colonne cervicale, des radiographies, un tomodensitogramme, une évaluation audiométrique et gastro-intestinale, n’ont pas démontré une invalidité grave (paragraphe 36).

[8] Au paragraphe 38 des motifs, le membre de la division générale a établi sa justification pour avoir accordé plus de poids aux avis médicaux des spécialistes plutôt qu’à celui du chiropraticien de la demanderesse. Il a souligné que le chiropraticien de la demanderesse, le Dr Kanwischer, avait dit que la demanderesse était probablement incapable de retourner au travail, mais il n’avait pas abordé sa capacité fonctionnelle générale à travailler dans le cadre d’un emploi sédentaire ou à temps partiel, et il n’a pas mentionné si son avis était en lien avec un retour à l’emploi précédent ou à un emploi quelconque. Le membre a aussi souligné que le Dr Kanwischer n’avait pas commenté le manque d’examens objectifs pour appuyer la liste considérable des maux de la demanderesse, pour lesquels il a mentionné qu’une [traduction] « étiologie précise n’était pas indiquée ».

[9] Le membre a souligné, en citant Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117, que s’il y a preuve d’une capacité de travail, l’appelante doit ne pas avoir réussi en raison de son état de santé. Il a conclu que la demanderesse possédait un niveau résiduel considérable par rapport à sa capacité à travailler, mais qu’elle n’avait pas déployé d’efforts pour trouver un emploi ou pour se recycler (paragraphes 41-42). Il a jugé que les maux de la demanderesse étaient d’un niveau très limité par rapport au fonctionnement ou à la tolérance pour s’asseoir, se tenir debout, marcher, soulever des charges, transporter des charges, s’étirer et se plier, et qu’ils n’étaient pas étayés par les renseignements médicaux ou les examens objectifs. Il a souligné que la demanderesse avait enduré une position assise pendant une longue période pendant l’audience et qu’elle n’a pas prétendu avoir une capacité cognitive insuffisante pour se recycler ou pour être embauchée dans le cadre d’un travail léger ou sédentaire, adapté à ses limitations (paragraphe 42). Il a jugé que la demanderesse n’avait pas tenté de trouver un autre emploi et ne s’était pas impliquée d’une façon quelconque pour se recycler depuis son arrêt de travail.

[10] Le membre de la division générale a jugé que le témoignage de la demanderesse n’était pas crédible. À cet égard, il a déclaré ce qui suit [traduction] :

[34] Le Tribunal est sceptique par rapport au témoignage de la demanderesse. Plusieurs incohérences existent entre son témoignage et les renseignements médicaux. Elle a témoigné que personne ne l’a examinée, écoutée ou aidée. Le Tribunal juge qu’il s’agit d’une déclaration exagérée et contraire à la déclaration du Dr Reebye sur le fait que l’appelante a été examinée de façon approfondie par des neurochirurgiens et par des ORL qualifiés, et aucune cause musculosquelettique ou neurologique n’a été décelée pour les maux. Le Tribunal n’accepte pas que le spécialiste Dr Reebye a refusé de lire son dossier et juge qu’il s’agit d’une exagération de l’appelante. L’appelante a présenté des renseignements concernant une capacité grandement limitée à tolérer la position assise, et pourtant, le Tribunal a observé que l’appelante a pu demeurer assise pendant une longue période lors de l’audience.

[11] Le membre n’était pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que la demanderesse souffrait d’une invalidité grave conformément aux critères établis dans le RPC, à la date de fin de la PMA, ou avant, et il a rejeté l’appel.

Observations

[12] Dans sa demande de permission d’en appeler, la demanderesse affirme ce qui suit [traduction] : « J’en appelle parce que je n’ai exagéré aucun renseignement. J’ai juré de dire la vérité au début de mon audience. » De cette information, je conclus que la demanderesse considère que le membre a erré en jugeant que son témoignage n’était pas crédible.

[13] La demanderesse a aussi déclaré : « Le Tribunal a interprété les rapports nébuleux de médecins qui m’ont vue de façon inexacte. Je comprends que ces situations avec les médecins comme celle avec le Dr Reebye semblent irrégulières. Mais ma condition n’est pas atypique, ce qui a mené à des références, des diagnostics et même des traitements incorrects par les médecins. »

[14] Le fondement des allégations de la demanderesse concerne le fait que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, des allégations qui cadrent avec l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS.

Analyse

[15] La demanderesse est en désaccord avec l’examen que la division générale a fait de la preuve médicale. Elle croit également que le membre a erré en tirant une conclusion négative par rapport à sa crédibilité.

[16] Je n’ai pas décelé un fondement pour lequel il serait justifié de douter de l’examen que le membre a fait de la preuve médicale. Il a révisé la preuve médicale en détail et a tiré des conclusions d’après son examen de la preuve. Il a présenté un fondement rationnel pour avoir accordé plus d’importance à la preuve des spécialistes plutôt qu’à celle du chiropraticien de la demanderesse, le Dr Kanwischer. À l’égard de la conclusion négative sur la crédibilité de la demanderesse, le membre a présenté un fondement réfléchi au soutien de sa suspicion par rapport à son témoignage, dont la description se trouve au paragraphe 34 des motifs.

[17] L’examen et l’appréciation de la preuve et la communication de conclusions quant à la crédibilité sont des fonctions qui relèvent strictement du juge des faits. Un appel à la division d’appel ne représente pas une occasion de débattre à nouveau de la question et d’espérer obtenir une conclusion différente : Marcia c. Canada (Procureur général), 2016 CF 1367. La demanderesse n’a pas présenté de fondement pour établir que le membre de la division générale a commis une erreur susceptible de contrôle. Je conclus que les arguments de la demanderesse n’ont pas de chance raisonnable de succès en appel.

[18] La demanderesse fait aussi valoir qu’elle a eu droit [traduction] « à des références, des diagnostics et même des traitements incorrects par les médecins ». L’argument de la demanderesse à cet égard ne cadre pas avec l’un des moyens d’appel du paragraphe 58(1) de la LMEDS. Il incombait à la demanderesse d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave conformément aux critères du RPC, à la fin de la PMA, ou avant. Si elle croyait que sa preuve médicale était fondée sur « des références, des diagnostics et même des traitements incorrects par les médecins », elle était libre d’obtenir d’autres traitements et rapports médicaux qui pouvaient servir de preuve. Je conclus que cet argument ne confère pas à l’appel une chance raisonnable de succès.

[19] Dans sa demande de permission d’en appeler, la demanderesse affirme avoir été en attente d’un rendez-vous à la B.C. Women’s Hospital and Health Centre depuis deux ans. Elle affirme aussi [traduction] : « On vient de me donner un rendez-vous le 21 juin 2016 avec une interniste, D. C. MacCllom [sic]. Elle a diagnostiqué ma situation et m’a décrite comme une invalide inapte au travail. Elle me recommande donc de participer à la Changepain Clinic à Vancouver. »

[20] Les observations présentées par la demanderesse en ce qui concerne l’attente d’un rendez-vous à la BC Women’s’ Hospital and Health Centre et ce que l’interniste aurait pu affirmer juste avant le dépôt de la demande de permission d’en appeler ne sont pas des éléments pertinents pour les questions dont je suis saisie dans le cadre de la présente demande de permission d’en appeler. Quoi qu’il en soit, ces déclarations représentent de nouveaux éléments de preuve, lesquels ne peuvent pas être acceptés dans le cadre de la présente demande. Comme la Cour fédérale l’a récemment confirmé dans l’affaire Parchment v. Canada (Procureur général), 2017 CF 354, au paragraphe 23 : [traduction] « Pour examiner l’appel, la division d’appel dispose d’un mandat limité. Elle ne possède pas la compétence de tenir une nouvelle audience [...]. De plus, elle ne tient pas compte de nouveaux éléments de preuve. » Ces principes s’appliquent à l’étape de la permission d’en appeler ainsi qu’à l’étape de l’appel.

[21] J’ai gardé à l’esprit la décision de la Cour fédérale dans l’affaire Griffin c. Canada (Procureur général), 2016 CF 874, dans laquelle le juge Boswell a fourni des directives sur la façon dont la division d’appel devrait traiter les demandes de permission d’en appeler :

[20] Il est bien établi que c’est à la partie demandant l’autorisation d’interjeter appel qu’il incombe de produire l’ensemble des éléments de preuve et des arguments requis pour satisfaire aux exigences du paragraphe 58(1) : voir, par exemple, Tracey, précitée, au paragraphe 31; voir aussi Auch c. Canada (Procureur général), 2016 CF 199 (CanLII), au paragraphe 52, [2016] ACF no 155. Malgré tout, les exigences du paragraphe 58(1) ne doivent pas être appliquées de façon mécanique ou superficielle. Au contraire, la division d’appel devrait examiner le dossier et déterminer si la décision a omis de tenir compte correctement d’une partie de la preuve : voir Karadeolian c. Canada (Procureur général), 2016 CF 615 (CanLII), au paragraphe 10, [2016] ACF no 615.

[22] J’ai examiné le dossier et je n’ai relevé aucun exemple dans la décision où la division générale n’aurait pas tenu compte de façon adéquate d’un élément de preuve.

[23] Je conclus que la demanderesse n’a pas présenté un motif d’appel susceptible de donner gain de cause à l’appel.

Décision

[24] Je suis convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. La demande est par conséquent rejetée.

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