Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] La demanderesse sollicite la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 27 décembre 2016. Il avait déterminé que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pension du Canada. La division générale a conclu que son invalidité n’était pas « grave » à la date ou avant la date de fin de sa période minimale d’admissibilité, le 31 décembre 2013.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Analyse

[3] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs d’appel se rattachent à l’un des moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale a confirmé cette approche dans la décision Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300. La demanderesse soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] La demanderesse affirme que la division générale n’a pas tenu compte de ses caractéristiques personnelles comme son âge, son niveau d’instruction et ses aptitudes linguistiques dans un contexte « réaliste » en déterminant si elle était gravement invalide et régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. C’est le critère qui a été articulé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248.

[6] Dans l’arrêt Villani, il est indiqué qu’un décideur doit adopter une approche « réaliste », c’est-à-dire qu’il doit tenir compte de la situation particulière de l’appelant, par exemple son âge, son niveau de scolarité, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de vie au moment d’évaluer si l’appelant est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. La Cour d’appel fédérale a également déclaré que l’examen des circonstances entourant la situation du demandeur est une question de jugement sur laquelle on se doit d’être hésitant à intervenir. Par conséquent, si la division générale a appliqué le critère Villani et que l’appelant (dans ce cas la demanderesse) conteste simplement la manière dont l’évaluation a été réalisée, je devrais éviter d’intervenir.

[7] La demanderesse fait valoir que, si la division générale avait tenu compte de son âge, son niveau d’instruction et ses aptitudes linguistiques limitées en anglais, ainsi que sa déficience psychique, il aurait été évident que son état de santé l’empêchait de faire tout travail.

[8] La demanderesse souligne les avis médicaux suivants :

  • Le 4 mars 2011, son psychiatre a diagnostiqué une dépression majeure avec des caractéristiques psychotiques.
  • En février 2014, un autre psychiatre indiqua que la demanderesse déclara avoir des crises de panique hebdomadaires. Il diagnostiqua un trouble de panique et un trouble dépressif majeur avec un pronostic défavorable.

[9] La demanderesse soutient qu’elle souffre d’effets secondaires, tels que de la fatigue et des étourdissements, qui proviennent de la prise des médicaments pour traiter ses problèmes mentaux. La demanderesse déclare que les derniers traitements avec un troisième psychiatre (O’Brien) ne semblent pas avoir été bénéfiques et [traduction] «  par conséquent, des traitements plus intensifs ne seraient pas appropriés à ce point-ci.  » En résumé, je comprends que la demanderesse fait essentiellement valoir que la division générale a omis de tenir compte de fait qu’elle ne se conforme pas aux recommandations de traitement. Dans l’arrêt Lalonde c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 211, la Cour fédérale d’appel a déterminé que le contexte « réaliste » signifie aussi que le décideur doit évaluer si le refus de traitement d’une demanderesse est raisonnable et quel impact ce refus peut avoir sur son statut d’invalidité advenant que ce refus soit considéré déraisonnable.

[10] La division générale a déclaré ce qui suit :

[traduction]

[40] [...] À cause de ses limites dans son expression, toutefois le Tribunal est en accord avec les observations de l’appelante voulant que les principes énoncés dans l’arrêt Villani soient pertinents dans l’évaluation de la gravité de cette appelante.

[41] Cependant, un examen minutieux de la preuve mène le Tribunal à conclure qu’une analyse détaillée dans un contexte «  réaliste  » tel que dans l’arrêt Villani n’est pas nécessaire dans ce cas-ci. Même si l’appelante avait établi à première vue et avec succès une invalidité grave, elle aurait toujours l’obligation de corriger son état de santé en suivant un traitement approprié et recommandé. Pour les raisons qui suivent, le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas réussi à remédier à ses problèmes de santé et par conséquent elle ne peut être considérée comme invalide grave.

[42] L’obligation de remédier, dans le contexte des demandes de prestations d’invalidité du RPC, a été confirmée de plusieurs manières par les cours fédérales, le Tribunal et par les prédécesseurs du Tribunal. Dans l’arrêt Kambo c. Canada (Développement des ressources humaines), 2005 CAF 353, la Cour d’appel fédérale déclare qu’il incombe personnellement aux prestataires de collaborer à leurs soins de santé. Dans ce dossier, l’appelante avait reçu l’avis médical de faire davantage d’exercices et d’activités physiques, mais avait sans raison elle avait évité de le faire et avait adopté un style de vie presque complètement sédentaire.

[11] La division générale constata que les fournisseurs de soins de santé de l’appelante avaient indiqué qu’elle suivait son traitement, prenait ses médicaments et se rendait à ses rendez-vous. Cependant, la division générale a aussi noté que plusieurs fournisseurs de soins de santé avaient recommandé qu’elle fasse de l’exercice et de la réhabilitation avec un ergothérapeute. Elle remarqua que [traduction] « de l’exercice [avait] été recommandé à plus d’une occasion. » La division générale a aussi constaté qu’au moins deux psychiatres différents avaient recommandé certaines formes de perfectionnement ou formation professionnelle, incluant de la formation langagière. La division générale indiqua que, principalement, l’appelante avait arrêté et ne recevait plus de traitement psychiatrique [traduction] « rigoureux depuis plusieurs mois. » Bien que l’appelante ait laissé deux messages à un psychiatre, la division générale constata que c’était inadéquat et déraisonnable dans les circonstances.

[12] La demanderesse a expliqué les raisons qui font qu’elle ne suit plus de traitement psychiatrique. Elle expliqua qu’elle n’en voyait pas l’utilité et qu’elle ne trouvait pas qu’il soit approprié de continuer avec tout traitement psychiatrique, parce que jusqu’à maintenant elle percevait qu’il n’y avait que peu d’améliorations. Mis à part le fait qu’il ne semble pas y avoir de preuve au dossier de la division générale pour supporter son affirmation voulant qu’il soit futile de continuer les traitements psychiatriques, il reste à déterminer si la division générale considéra que les explications de la demanderesse pour son refus des autres recommandations de traitements sont raisonnables et quel impact son refus de se soumettre à un traitement peut avoir sur son statut d’invalidité.

[13] La division générale a considéré si les explications de la demanderesse justifiant qu’elle n’ait pas fait d’exercice étaient valables. La division n’a pas été convaincue que la douleur au pied présumée de la demanderesse représentait une explication raisonnable d’éviter de faire de l’exercice. En outre, il est noté que la demanderesse indiqua qu’en septembre 2015 elle pouvait marcher 45 minutes et qu’elle pouvait faire de l’exercice sans ressentir une douleur exacerbée à son pied. La division générale constata que la demanderesse était incapable d’expliquer pourquoi elle avait arrêté ses traitements avec l’ergothérapeute. En mai 2014 et en juillet 2015, son psychiatre recommanda qu’un spécialiste en réadaptation évalue sa capacité à travailler, mais elle n’a pas été évaluée depuis 2012. Il avait aussi considéré qu’elle soit référée à un programme de traitement de jour en santé mentale à un hôpital local. Toutefois, aucun arrangement n’a été fait. Bien que la demanderesse ait pu s’attendre à ce que le psychiatre fasse les démarches pour l’évaluation par le spécialiste en réadaptation et pour le programme de jour en santé mentale, il est clair que de manière générale la division générale a déterminé que différentes formes de traitements, particulièrement l’exercice, aurait été bénéfique pour la demanderesse si elle en avait fait et qu’il était déraisonnable de sa part de ne pas en faire. La division générale cita des exemples où la demanderesse [traduction] «  à plusieurs reprises ignora de faire les traitements recommandés, ne fit pas d’effort adéquat ou ne donna pas suite aux consultations potentielles.  » La division générale nota que ses docteurs avaient remarqué qu’elle ne manquait pas ses rendez-vous, mais la division générale constata qu’elle ne suivait pas les recommandations ou les suggestions faites durant ces rendez-vous.

[14] La division générale était au fait et a appliqué les principes juridiques énoncés dans les arrêts Villani et Lalonde. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[15] Compte tenu des considérations qui précèdent, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

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