Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision datée du 13 mai 2016 rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal), laquelle concluait qu’elle était inadmissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler (demande) auprès de la division d’appel du Tribunal le 8 août 2016.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[3] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission », et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ». La décision relative à une demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience au fond et constitue un premier obstacle que le demandeur doit franchir, mais cet obstacle est inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audience sur le fond relative à un appel.

[4] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ». Afin que la demande soit accordée, la demanderesse doit établir qu’il existe un motif défendable pouvant accorder gain de cause à l’appel proposé afin que la permission d’en appeler soit accordée (Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 1999 CanLII 8630). La question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si un appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 ACF 41, Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63).

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[6] La demanderesse soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire lorsqu’elle a conclu que la preuve de la demanderesse avait été [traduction] « minée » par son incapacité à se souvenir de dates. En fait, ses oublis sont attribuables à son invalidité.

[7] La demanderesse soutient que la division générale a rendu une conclusion de fait erronée en concluant qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve au dossier au moment de la date de fin de la période minimale d’admissibilité (PMA) ou avant cette date appuyant une conclusion selon laquelle la demanderesse était invalide selon le RPC.

[8] La demanderesse soutient également que la division générale a rendu une conclusion de fait erronée en concluant que Dr Khan n’avait aucune connaissance personnelle relativement au fait que la dépression de la demanderesse datait d’avant 2006.

Analyse

[9] J’aborderai la deuxième observation de la demanderesse énoncée au paragraphe 7 ci dessus avant de fournir mon analyse des autres arguments. J’aborde cet argument d’abord, car la demanderesse a joint à sa demande de permission d’en appeler une lettre de Dr Dhanji datée du 12 juillet 2016. Il s’agit d’un nouvel élément de preuve qui ne figurait pas au dossier dont disposait la division générale. La demanderesse a présenté le nouvel élément de preuve pour appuyer sa demande d’appel, et la lettre fourni des précisions supplémentaires concernant le trouble médical de la demanderesse, le pronostic et l’avis sur la capacité à travailler de la demanderesse de 2001 à 2004.

[10] Les audiences devant la division d’appel ne sont pas des audiences de novo. La division d’appel ne peut pas tenir compte d’éléments de preuve qui ne figuraient pas dans le dossier dont disposait la division générale; un appel devant la division d’appel; un appel devant la division d’appel n’est pas considéré comme l’occasion d’instruire un nouveau procès. L’article 58 de la Loi sur le MEDS énonce les moyens d’appel, et la division d’appel est limitée à l’examen des appels en fonction de ces trois moyens. La présentation de nouveaux éléments de preuves n’est pas l’un des moyens prévus à l’article 58 pour lesquels l’appel peut être accueilli (voir Belo Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100). Par conséquent, pour décider si la permission d’en appeler doit être accordée, la division d’appel ne peut pas examiner la lettre de Dr Dhanji. La permission d’en appeler n’est pas accordée suivant ce moyen d’appel.

[11] Pour retourner au premier argument présenté par la demanderesse à l’appui de sa demande de permission d’en appeler, comme il est déclaré au paragraphe 6 ci-dessus, la demanderesse a fait valoir que la division générale a commis une erreur en concluant que la fiabilité de sa preuve avait été minée par son incapacité à se souvenir de dates. La demanderesse soutient que la division générale aurait dû reconnatre que ses oublis étaient attribuables à son invalidité et que, lorsqu’elle a déterminé si la demanderesse s’était acquittée du fardeau de la preuve, la division générale n’aurait pas dû [traduction] « pénaliser » la demanderesse en ce qui a trait à son incapacité à se souvenir de certaines dates.

[12] Après avoir écouté l’ensemble de l’enregistrement de l’audience devant la division générale et examiné l’ensemble de la preuve documentaire, je n’estime pas que, durant l’audience ou selon la preuve versée au dossier, la division générale a [traduction] « pénalisé » la demanderesse parce qu’elle a eu de la difficulté à se souvenir de dates. Même si je souligne que la division générale reconnaît que le [traduction] « témoignage [de la demanderesse] a été miné par son incapacité à se souvenir de dates », je n’estime pas que la division générale s’est fondée sur ce fait pour déterminer si la demanderesse s’était acquittée du fardeau de la preuve.

[13] La norme de preuve à laquelle la demanderesse doit satisfaire est la norme civile de preuve; elle doit prouver ses allégations « selon la prépondérance des probabilités ». Cela signifie que la demanderesse doit démontrer qu’il est plus probable que le contraire qu’elle était invalide à la date de fin de sa PMA ou avant cette date, à savoir le 31 décembre 2006. La division générale a conclu que la demanderesse ne s’était pas acquittée du fardeau de la preuve à cet égard et que les motifs principaux de cette conclusion sont énoncés aux paragraphes 36, 38 et 40 de la décision. Voici ces paragraphes, en partie :

[traduction]

[36] [...] En mars 2014, Dr Dhanji a déclaré appuyer la demande de pension d’invalidité de l’appelante en se fondant sur le diagnostic de discopathie dégénérative de la colonne lombaire qui semble être non chirurgicale. Elle était « présentement incapable de travailler ». D’après ces renseignements médicaux rédigés par Dr Dhanji, le Tribunal ne peut pas conclure que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de sa PMA.

[38] Le rapport de Dr Khan a été rédigé neuf ans après la date de fin de la PMA de l’appelante. Cependant, comme il est mentionné ci-dessus, l’appelante a déclaré avoir commencé à consulter Dr Khan en 2009. Il n’avait donc aucune connaissance personnelle du fait que la dépression de l’appelante a commencé en 2002 ou des effets de cette dépression, le cas échant, sur sa capacité à détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur à la date de fin de la PMA. Par conséquent, le Tribunal accorde peu d’importance à la preuve de Dr Khan concernant le début de la dépression de l’appelant ou son effet sur la capacité de l’appelante à détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur.

[40] [...] Tous les éléments de preuve médicale présentés par l’appelante étaient postérieurs à la date de fin de la PMA et, selon l’analyse du Tribunal, ils appuient bel et bien la demande de pension d’invalidité de l’appelante. Selon la preuve résumée ci-dessus, le Tribunal estime que l’appelante n’a pas présenté une preuve médicale confirmant que ses médecins la jugeaient régulièrement incapable de détenir un emploi véritablement rémunérateur.

[14] Je reconnais que la preuve médicale versée au dossier fait état de plusieurs problèmes de santé, y compris des troubles de la mémoire et un certain oubli. Cependant, l’incapacité de la demanderesse à se souvenir de dates dans le cadre de son témoignage de vive voix ou ses oublis n’étaient pas un facteur dans la conclusion de la division générale selon laquelle la demanderesse n’avait pas établi que, plus probablement que le contraire, elle était invalide à la date de fin de la PMA ou avant cette date. La division générale a fondé sa conclusion sur une décision selon laquelle la preuve médicale versée au dossier n’appuyait pas une conclusion selon laquelle la demanderesse était invalide selon le RPC. Il y avait une preuve médicale objective insuffisante datée peu avant la date de fin de la PMA ou après cette date pour appuyer l’allégation de la demanderesse selon laquelle elle était invalide à cette date ou avant celle-ci. La preuve médicale qui abordait son état de santé vers la date de fin de la PMA n’a pas été jugée objective, car le médecin qui a offert son avis sur l’état de santé de la demanderesse à ce moment-là a commencé à la traiter trois ans après la date de fin de la PMA et que cette personne n’avait aucune connaissance réelle de l’état physique de l’appelant vers la date de fin de la PMA pour appuyer son avis. La demanderesse a présenté une lettre de Dr Dhanji à la division d’appel dans laquelle celui-ci tente de combler l’absence d’éléments de preuve durant la période précédant la date de fin de la PMA, mais, pour les motifs qui ont déjà été mentionnés, je ne suis pas en mesure de tenir compte des nouveaux éléments de preuves pour décider si la permission d’en appeler doit être accordée en l’espèce.

[15] Je n’estime pas que la demanderesse a soulevé un moyen d’appel conférant à l’appel une chance raisonnable de succès, et la permission d’en appeler n’est pas accordée au motif que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée en déclarant que la preuve de la demanderesse était [traduction] « minée » par ses oublis.

[16] Finalement, la demanderesse a soutenu que la conclusion de la division générale selon laquelle Dr Khan n’avait aucune connaissance personnelle du fait que la demanderesse était atteinte de dépression et que celle-ci avait des répercussions sur sa capacité à travailler constituait une conclusion de fait erronée. Dans son observation, la demanderesse fait valoir que Dr Khan avait en fait commencé à traiter sa dépression avant 2006, mais elle n’a mentionné aucune preuve au dossier pour appuyer cette déclaration.

[17] J’ai examiné la preuve versée au dossier, et, comme l’a conclu la division générale, il existe une preuve médicale de Dr Khan faisant état que la demanderesse est atteinte de dépression et qu’elle est par conséquent incapable de travailler. Cependant, la demanderesse a déclaré dans son questionnaire relatif aux prestations du RPC qu’elle n’avait pas commencé à consulter Dr Khan avant 2009. Aucun des rapports médicaux versés au dossier de Dr Khan ne date d’avant 2006. En fait, une lettre datée du 24 mars 2016 et rédigée par Dr Khan fait état qu’il connaît la demanderesse depuis 2010.

[18] Je n’estime pas que le dossier comprend une preuve objective et fiable appuyant l’argument selon lequel Dr Khan avait commencé à traiter la dépression de la demanderesse avant 2006. Je n’estime pas non plus que la division générale a commis une erreur en rendant la même décision. Cet argument ne présente pas de chance raisonnable de succès en appel.

[19] La permission d’en appeler est refusée au motif que la division générale a commis une erreur en concluant que Dr Khan n’avait aucune connaissance personnelle relativement à la dépression de la demanderesse avant 2006.

Conclusion

[20] La demande est rejetée.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.