Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

L’appel est accueilli.

Introduction

[1] L’appel porte sur une décision rendue le 26 août 2016 par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal), qui a statué que l’appelant n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) puisqu’il n’était pas atteint d’une invalidité « grave » durant sa période minimale d’admissibilité (PMA), laquelle a pris fin le 31 décembre 2011.

[2] La permission d’en appeler a été accordée le 8 juin 2017 au motif que la division générale pourrait avoir rendu une décision entachée d’une erreur de droit.

Aperçu

[3] L’appelant a fait une demande de prestations d’invalidité du RPC le 6 août 2014. Dans sa demande, il a déclaré qu’il avait 57 ans et détenait un baccalauréat en arts. Durant plus de 12 ans, il a conduit un taxi comme travailleur indépendant, un emploi qu’il a abandonné en novembre 2011 à cause d’une recrudescence de douleurs dorsales en plus d’autres problèmes de santé.

[4] L’intimé a initialement refusé la demande et, après révision, au motif que l’invalidité de l’appelant n’était pas grave à la date de fin de la PMA. Le 24 août 2015, l’appelant a interjeté appel de ce refus devant la division générale.

[5] Dans une lettre datée du 6 juillet 2016, la division générale notifia l’appelant qu’une audience ne serait pas tenue et que son affaire serait instruite selon les documents au dossier. Le 4 août 2016, le représentant de l’appelant a inscrit son objection à savoir que l’appel soit instruit de cette manière et il demanda qu’une audience soit tenue, soit en personne ou par vidéoconférence, invoquant les raisons suivantes :

  • La division générale est un organisme juridictionnel qui décide d’affaires individuelles et basées sur les faits par un processus d’opposition. Des protections procédurales plus importantes sont requises lorsque, en l’espèce, faire appel à la division d’appel ne se fait pas de plein droit et une demande de permission d’en appeler doit être accordée. Si elle est accueillie, de nouveaux éléments de preuve ne peuvent être soumis à cette étape et les appelants doivent se fonder sur ceux produits à la première instance.
  • La protection des procédures est d’autant plus importante dans une situation comme celle de l’appelant, où il a fait la demande d’une source majeure de remplacement de salaire sur la base d’une invalidité et que cette demande lui a été refusée. Une décision basée sur l’admissibilité à la prestation d’invalidité du RPC a un impact important sur les demandeurs qui sont déjà désavantagés par leur handicap.
  • Si la division générale avait déterminé correctement la portée de l’invalidité de l’appelant, il aurait été nécessaire d’évaluer l’impact qu’à sa maladie sur lui. La seule manière de l’avoir fait aurait été de s’assurer que l’appelant était capable de l’expliquer dans ses propres mots. L’efficacité dans les procédures ne l’emporte pas sur la nécessité d’obtenir une justice naturelle.
  • L’objet de cet appel, la maladie et l’invalidité, est délicat et l’appelant profiterait d’une audience en personne pour discuter de telles questions. De plus, la division générale bénéficierait de voir personnellement l’appelant.

[6] L’appelant ne reçut pas de réponse à son objection avant le délai pour soumettre des documents du 12 août 2016. Par conséquent, son représentant déposa des observations écrites sur la question à savoir si l’appelant souffrait d’une invalidité grave et prolongée.

[7] Le 26 août 2016, la division générale a rendu sa décision. Elle rejeta l’appel, concluant que peu d’éléments de preuve objectifs appuyaient la thèse de l’appelant selon laquelle tant sa condition physique et que mentale étaient le résultat de son invalidité.  La décision n’a pas fait mention des observations de l’appelant sur un mode d’audience approprié.

[8] Le 30 novembre 2016, dans les délais fixés, le représentant de l’appelant a présenté une demande de permission d’en appeler à la division d’appel. Dans ma décision du 8 juin 2017, j’ai accordé la permission d’en appeler, car j’ai trouvé qu’il y avait une chance de succès raisonnable sur la base de tous les motifs invoqués.

[9] Le 21 juillet 2017, l’intimé a soumis une lettre dans laquelle il consentait à ce que l’affaire soit renvoyée à la division générale pour qu’une nouvelle audience soit tenue par un autre membre.

[10] J’ai décidé qu’il n’était pas nécessaire de tenir audience de vive voix et que l’appel pouvait être instruit sur le fondement du dossier documentaire pour les raisons suivantes :

  1. l’intimé a accepté que la demande de pension d’invalidité de l’appelant soit instruite de nouveau sur le fond ;
  2. le dossier est complet et ne nécessite aucune clarification ;
  3. Ce mode d’audience respecte les exigences du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement TSS) à savoir qu’il doit procéder de façon la plus informelle et expéditive que le permettent les circonstances, l’équité et la justice naturelle.

Droit applicable

Régime de pensions du Canada

[11] L’alinéa 44(1)b) du RPC établit les conditions d’admissibilité à la pension d’invalidité du RPC. Pour être admissible à la pension d’invalidité, un appelant :

  1. (a) doit avoir moins de 65 ans ;
  2. (b) ne doit pas toucher de pension de retraite du RPC ;
  3. (c) doit être invalide ;
  4. (d) doit avoir versé des cotisations valables au RPC pendant au moins la PMA.

[12] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa PMA ou avant cette date.

[13] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence ;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[14] Selon le paragraphe 59(1) de la LMEDS, la division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale

[15] Selon l’article 21 du Règlement TSS, la division générale peut tenir une audience selon plusieurs modes, y compris au moyen de questions et réponses écrites, par téléconférence, par vidéoconférence ou par comparution en personne des parties.

Questions en litige

[16] Les questions que je dois trancher sont les suivantes :

  1. Est-ce que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle en décidant de ne pas tenir une audience de vive voix préférant plutôt un examen documentaire ?
  2. La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’appliquer le critère du « contexte réel » établi dans l’arrêt Villani c. CanadaNote de bas de page 1, exigeant qu’une évaluation de la gravité de l’invalidité soit faite dans le contexte de l’âge de l’appelant, son niveau de scolarité et ses expériences de travail ?

Observations

Violation présumée du droit de l’appelant à être entendu

[17] L’appelant soutient qu’à cause de la nature de sa maladie et du constat de la division générale voulant que la preuve médicale ne fût pas objective, un témoignage oral était un élément absolument essentiel dans l’examen de son appel. En le privant de son droit à témoigner en personne ou par vidéoconférence, la division générale n’a pas observé un principe fondamental de justice naturelle.

[18] L’appelant a réaffirmé ses allégations à savoir qu’une audience en personne, ou du moins par vidéoconférence, devant la division générale aurait dû être tenue. Une des raisons centrales de la division générale pour rejeter l’appel semble être qu’elle avait estimé que les éléments de preuve médicale objectifs n’étaient pas suffisants pour corroborer l’avis du médecin de famille de l’appelant. Par conséquent, il était essentiel que l’appelant puisse lui-même témoigner. Les éléments de preuve médicale ne devraient pas seuls déterminer si le demandeur souffre d’une invalidité sévère et prolongée, particulièrement lorsque les symptômes prédominants sont liés à la douleur. Une attention doit être portée à la nature subjective de l’invalidité et, dans la plupart des cas, ceci requiert une évaluation du témoignage. Une audience de vive voix aurait permis à l’appelant de discuter de l’intensité et de la fréquence de ses symptômes ainsi que du contexte réel de ses difficultés à retourner au travail. L’appelant note que la division d’appel a souvent confirmé cette approche, comme l’a fait son prédécesseur, la Commission d’appel des pensions. Ceci revient à dire que la nature et la crédibilité du témoignage oral de l’appelant peuvent avoir une valeur probante suffisante pour l’emporter sur l’absence de preuve médicale clinique objective.

Défaut allégué d’appliquer les principes del’arrêt Villani

[19] L’appelant soutient que la division générale a erré en droit en n’appliquant pas comme il se doit le critère du « contexte réaliste » énoncé dans la cause Villani qui requiert qu’un décideur tienne compte explicitement de l’âge, du niveau de scolarité et des antécédents professionnels pour déterminer la sévérité de l’invalidité invoquée. En l’espèce, la division générale a déterminé que le seul facteur pertinent à l’employabilité de l’appelant était son âge, et elle n’a pas justifié comment ce facteur était pertinent dans cette détermination. L’appelant mentionne que son expérience de travail aurait dû être considérée, car il affirme qu’il était incapable de faire un travail physique, mais aussi des travaux sédentaires comme son emploi antécédent de conducteur de limousine. L’appelant reconnaît que la division générale a résumé ses antécédents professionnels hâtivement dans sa décision, mais que ceux-ci n’ont joué aucun rôle dans l’analyse.

Analyse

[20] L’intimé a maintenant recommandé que la division d’appel renvoie l’affaire devant la division générale, au seul motif que l’intérêt de l’appelant en ce qui a trait à l’équité des procédures peut ne pas avoir été respecté. Je suis d’accord avec les parties pour dire que la procédure devant la division générale a été entachée, et que la meilleure réparation est de statuer de nouveau sur le fond quant à la demande de pension d’invalidité du RPC présentée par l’appelant.

Mode d'audience

[21] L’appelant affirme qu’en décidant d’instruire son appel seulement sur la foi d’un examen documentaire plutôt qu’en permettant toute forme de témoignage, la division générale a manqué à un principe de justice naturelle en le privant de son droit de présenter sa défense complète. Je suis normalement réticent à interférer avec le pouvoir discrétionnaire de la division générale de décider du mode d’audience le plus approprié, mais en l’espèce je crois qu’il y a un motif valable de faire une exception.

[22]   Le Règlement TSS accorde aux deux divisions du Tribunal un grand pouvoir discrétionnaire concernant le mode d’audience qu’elles estiment adéquat. Selon l’article 21 du Règlement TSS, la division générale peut tenir une audience selon un des nombreux modes, y compris au moyen de questions et réponses écrites, par téléconférence, par vidéoconférence ou par comparution en personne des parties. L’utilisation du mot « peut » dans le texte, en l’absence d’autre qualificatif ou condition, signifie que la division générale a le pouvoir discrétionnaire de prendre cette décision. Cependant, une telle discrétion doit être exercée dans le respect des règles d’équité procédurale. La Cour suprême du Canada a conclu sur cette question dans l’affaire Baker c. CanadaNote de bas de page 2, en établissant qu’une décision qui touche les droits, les privilèges ou les biens d’une personne suffit pour entraîner l’application de l’obligation d’équité. Le concept d’équité procédurale est toutefois variable et est évalué dans le contexte particulier de chaque cas. L’arrêt Baker énumère ensuite un certain nombre de facteurs à considérer pour décider de la nature de l’obligation d’équité s’appliquant dans un cas particulier, y compris la nature de la décision prise, l’importance de la décision pour la personne visée, les attentes légitimes de la personne qui conteste la décision et les choix de procédure que l’organisme fait lui-même, particulièrement quand la loi laisse au décideur la possibilité de choisir ses propres procédures.

[23] En l’espèce, je n’ai aucun doute que l’appelant considérerait son appel pour des prestations d’invalidité important, et par conséquent, digne de procédures s’approchant d’une audience [traduction] « entière », complète avec un témoignage de vive voix. Comme le représentant de l’appelant l’a noté, une audience devant la division générale est habituellement la chance finale de fournir la preuve dans une demande de pension d’invalidité pour qu’elle soit évaluée selon son bien-fondé. Les conclusions ont été faites sur les prétentions de douleur dorsale chronique et de diminution de niveau d’énergie à la suite d’un infarctus du myocarde (IM). Bien que les maladies soient souvent diagnostiquées par des analyses de laboratoire et des résultats d’imagerie, l’intensité subjective des symptômes de l’appelant et leur effet sur sa capacité de travailler durant sa PMA ne peuvent être documentés facilement et, à mon avis, seraient mieux transmis par un témoignage de vive voix sans filtre.

[24] Comme le juge en chef Dickson de la Cour suprême le souligna dans une affaire antérieure mettant en cause la Commission d’appel de l’immigration (maintenant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada)Note de bas de page 3 :

Je ferai cependant remarquer que, même si les auditions fondées sur des observations écrites sont compatibles avec les principes de justice fondamentale pour certaines fins, elles ne donnent pas satisfaction dans tous les cas. Je pense en particulier que, lorsqu’une question importante de crédibilité est en cause, la justice fondamentale exige que cette question soit tranchée par voie d’audition. Les cours d’appel sont bien conscientes de la faiblesse inhérente des transcriptions lorsque des questions de crédibilité sont en jeu et elles sont donc très peu disposées à réviser les conclusions des tribunaux qui ont eu l’avantage d’entendre les témoins en personne [...]. Je puis difficilement concevoir une situation où un tribunal peut se conformer à la justice fondamentale en tirant, uniquement à partir d’observations écrites, des conclusions importantes en matière de crédibilité.

[25] Dans le paragraphe 1 de sa décision, la division générale proposa plusieurs motifs pro forma pour décider d’instruire un appel sur la foi du dossier :

  1. Le membre a déterminé qu’il n’était pas nécessaire de tenir une autre audience.
  2. Les questions en litige ne sont pas complexes.
  3. L’information au dossier est complète et ne nécessite aucune clarification.
  4. La crédibilité n’est pas un enjeu principal.
  5. Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent.

[26] Selon moi, à l’exception des affaires où la loi exclut sans équivoque l’admissibilité, la crédibilité est, à un certain point, presque toujours une question en litige pour les demandes de pension d’invalidité du RPC. Et celle-ci dépend souvent des rapports subjectifs de symptomatologie du demandeur. L’appelant, comme plusieurs dans sa position, fait valoir qu’il est invalide malgré ce que certains rapports médicaux peuvent suggérer et il affirme que son témoignage de vive voix aurait été pertinent et aurait constitué un complément précieux au dossier documentaire. Je suis convaincue que le refus de la division générale d’entendre son témoignage a entraîné un manquement à l’équité procédurale.

Arrêt Villani

[27] L’appelant fait valoir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’appliquer le critère du « contexte réaliste ». Selon moi, cette observation est fondée. Bien que dans sa décision la division générale ait correctement résumé le principe de l’arrêt Villani, il semble qu’elle ne l’ait pas appliqué aux circonstances particulières de l’appelant. Au paragraphe 22 de sa décision, on peut lire :

[traduction]

Le critère de gravité doit être analysé dans un contexte réaliste [...]. Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie. Le seul facteur pertinent dans cette situation est que l’appelant avait 57 ans au moment où il a fait sa demande. Cependant, il faut préciser qu’il était plus jeune de 5 ans lorsqu’il a arrêté de travailler en novembre 2009.

[28] Il n’est pas suffisant de citer simplement la jurisprudence ; le jugement des faits doit aussi tenir compte de manière équitable de la situation particulière du demandeur. En l’espèce, il n’est pas clair si la division générale a cru que l’âge de l’appelant était un obstacle à sa participation au marché du travail. De toute manière, je note que la division générale n’a pas expliqué pourquoi elle conclut que l’âge de l’appelant était le « seul » critère pertinent de l’arrêt Villani, quand un survol rapide du dossier montre que J. C. émigra de l’Inde à l’âge adulte, un fait qui n’est pas mentionné dans la décision. Je crois qu’il est dans le domaine du possible que la maîtrise de l’anglais de l’appelant, ses antécédents de travail et la valeur perçue de ses diplômes auraient une incidence sur sa capacité de trouver et conserver un emploi véritablement rémunérateur.

Considérations additionnelles

[29] Bien que l’appelant n’ait pas soulevé d’autres questions en litige, je voudrais faire quelques observations additionnelles sur la décision de la division générale.

La justification de la division générale était-elle suffisante ?

[30] La justification de la division générale est présentée sur seulement sept pages (incluant la page titre) dont la plupart contiennent un résumé des éléments de preuve documentaire, la jurisprudence et les observations écrites des parties.  Il y a une page sur le critère de sévérité, mais plus de la moitié de cette section est utilisée pour énumérer superficiellement la jurisprudence. Avec seulement, à proprement parler, des quelques phrases qui restent pour l’analyse, je crois qu’il y a plus d’une cause défendable à savoir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle en ne donnant pas suffisamment de motifs de rejet de l’appel de l’appelante. Particulièrement si on considère les omissions apparentes et les inconsistances suivantes.

Conclusions du Dr Safieh

[31] Au paragraphe 25 de sa décision, la division générale a écrit ce qui suit :

[traduction]

L’appelant affirme que sa santé mentale est un problème. Encore une fois, il n’y a pas d’éléments de preuve médicale objectifs pour étayer cette affirmation. Il n’y a pas de demande de consultation faite à un spécialiste en soins en santé mentale ; pas plus qu’une mention de l’état de santé mentale de l’appelant dans les lettres du Dr Safieh de 2015 et 2016.

[32] Plus bas, la mention semble venir de la lettre du Dr Safieh datée du 4 janvier 2016. Toutefois j’ai noté, contrairement à la conclusion de la division générale, que le médecin de famille de l’appelant faisait en fait référence à des problèmes de santé mentale :

[traduction]

Tous les problèmes de santé de J. C. sont considérés être grave. Ils se sont tous exacerbés mutuellement et les principaux problèmes cardiaques et dorsaux ont conduit à d’autres problèmes médicaux graves. Ces problèmes de santé incluent des maux de dos, des douleurs à la poitrine, de l’hypertension, des maux de tête, de l’anxiété/de la dépression et des problèmes de mémoire (aussi associés à la dépression)... Comme affirmé, J. C. est incapable de faire un quelconque travail depuis qu’il ne peut plus faire aucune activité physique ou mentale à quelque titre [mis en évidence par le soussigné].

[33] Ceci suggère que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait e rronée, contrairement à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS.

Problèmes cardiaques

[34] Les documents fournis dans la demande de l’appelant d’août 2014 indiquent que ses problèmes cardiaques, autant que ses problèmes dorsaux, sont une composante significative de sa demande de pension d’invalidité. Malgré ceci, la division générale ne mentionna aucun des symptômes (telles de la faiblesse et de la douleur à la poitrine) liés à l’IM de l’appelant dans son analyse. Bien qu’un juge des faits est présumé avoir examiné l’ensemble des éléments portés à son attention, je suis convaincu que la division générale n’a pas considéré la totalité des éléments de preuve pertinents.

Évidence de la gravité

[35] À paragraphe 23, la division générale a écrit : « les éléments de preuve médicale n’ont pas démontré un état de santé grave qui l’[l’appelant]aurait empêché de travailler au moment où sa PMA a pris fin, le 31 décembre 2011. »

[36] Je reconnais que c’est le rôle de la division générale d’évaluer la preuve fournie pour déterminer si l’invalidité de l’appelant est « grave ». Toutefois, un juge des faits ne peut conclure catégoriquement sans détailler le raisonnement qui l’y a mené. C’est particulièrement important lorsque, comme dans cette affaire, la preuve existe et qu’à première vue celle-ci est contradictoire avec la conclusion tirée. Je me réfère à l’IRM de la colonne lombaire du 25 janvier 2011 qui nota « une sténose du canal rachidien » en L4-5. Selon moi, en affirmant qu’il n’y avait pas preuve de « gravité », la division générale avait le devoir d’agir équitablement en considérant cet élément de preuve manifestement contradictoire.

Conclusion

[37] Pour les motifs exposés précédemment, l’appel est accueilli.

[38] L’article 59 de la LMEDS énonce la réparation que la division d’appel peut accorder pour un appel. Pour prévenir toute crainte de partialité, il convient en l’espèce de renvoyer l’affaire à la division générale pour qu’une nouvelle audience soit tenue devant un membre différent de la division générale.

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