Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demanderesse sollicite la permission d’en appeler de la décision rendue par la division générale le 11 mai 2016. La division générale a conclu que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada, après avoir établi que son invalidité n’était pas « grave » à la fin de sa période minimale d’admissibilité le 31 décembre 2010.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès ?

Analyse

[3] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence ;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] La demanderesse prétend que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées ci-après qu’elle a tirées sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] Avant d’accorder la permission d’en appeler, il me faut être convaincue qu’au moins un des motifs invoqués se rattache à l’un des moyens d’appel admissibles et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale du Canada a confirmé cette approche dans Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

(a) Capacité à travailler

[6] La demanderesse soutient que la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit en déterminant qu’elle avait toujours conservé une certaine capacité à travailler. Elle prétend que cette conclusion est erronée, car elle est basée sur une présomption à savoir qu’elle doit être la principale fournisseuse de soins à ses enfants parce que son époux continue de travailler. Elle affirme que la division générale n’a pas examiné les éléments de preuve et n’a pas compris qu’en fait son époux fait la majeure partie des tâches parentales et est aussi responsable des tâches ménagères. En effet, elle indique que son époux a dû quitter son emploi dans une usine pour prendre un emploi plus flexible qui lui permettrait de prendre les responsabilités parentales et domestiques. La demanderesse ajoute que sa belle-sœur donne de l’aide.

[7] Aux paragraphes 12 et 13, la division générale expose la preuve relative à la famille de la demanderesse et à la situation domestique comme suit :

  1. [12] La demanderesse témoigna à savoir que son mari travaille comme chauffeur de taxi, car ses heures de travail sont plus flexibles. Avant cela, il travaillait dans une usine, mais il avait toujours des problèmes avec son patron parce qu’il prenait des congés pour s’occuper de sa femme. Il s’occupe de toutes les tâches domestiques incluant de s’occuper des bébés avec un peu d’aide de sa sœur. La demanderesse ajouta que son mari voulait désespérément des enfants et qu’il l’aurait laissée si elle n’avait pas accepté d’en adopter.
  2. [13] La demanderesse affirma qu’elle souffre de dépression causée par la douleur, l’infertilité et les pressions familiales. Elle n’est pas capable de cuisiner pour son mari, de faire les tâches domestiques ou de s’occuper de ses enfants. Son mari se met en colère contre elle. Avant son accident de la route, elle était capable de travailler, de faire à manger et de s’occuper de la maison, malgré le fait qu’elle avait des douleurs associées à de l’endométriose et des douleurs au dos.

[8] La demanderesse a clairement attesté qu’elle n’est pas capable de cuisiner, de faire des tâches domestiques ou de s’occuper de ses enfants.

[9] Ensuite, dans son analyse, la division générale écrit : [traduction] « bien qu’elle attesta qu’elle avait de l’aide de son mari et de sa belle-sœur, son mari travaille toujours comme chauffeur de taxi. S’occuper de deux enfants en bas âge est une énorme responsabilité et demande beaucoup de temps et d’efforts. »

[10] Malgré le témoignage de la demanderesse à savoir qu’elle n’est pas capable de cuisine, de faire des tâches ménagères ou de s’occuper de ses enfants, la division générale a conclu que la demanderesse non seulement ne consacrait pas de temps et d’effort à s’occuper des enfants, mais elle présumait être nécessairement la principale fournisseuse de soins pour eux. La division générale n’a pas tiré de conclusions explicites en ce qui a trait à l’importance de la participation du mari et de la belle-sœur dans le soin des enfants, mais, lorsqu’elle écrit que la demanderesse recevait « de l’aide », elle détermina nettement que leurs rôles étaient secondaires à celui de la demanderesse.

[11] La demanderesse a soulevé une cause défendable selon laquelle la division générale pourrait avoir mal interprété la preuve à cet égard. Je suis donc convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

(b) Invalidité prolongée

[12] La demanderesse a invoqué plusieurs autres motifs en appui à sa demande de permission d’en appeler. La Cour d’appel fédérale a indiqué, dans l’arrêt Mette v. Canada (Procureur général), 2016 CAF 276, qu’il n’est pas nécessaire que la division d’appel traite de tous les moyens d’appel invoqués par un demandeur. Comme j’ai déjà accordé la permission d’en appeler, il n’est pas nécessaire d’examiner chaque moyen d’appel à ce stade, même si je vais examiner l’argument de la demanderesse selon lequel la division générale aurait dû évaluer si son invalidité était prolongée à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité.

[13] Une invalidité est « prolongée » que si on considère qu’elle va vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. Bien que la demanderesse fait valoir que la division générale a erré en concluant que ses limites ne sont pas de nature continue et indéfinie, il demeure qu’en ayant établi que l’invalidité de la demanderesse n’était pas grave, la division générale a aussi déterminé qu’il n’était pas nécessaire de tirer une conclusion sur le critère du caractère prolongé.

[14] Le critère relatif à l’invalidité comporte deux volets, et un requérant qui ne satisfait pas à l’un ou l’autre des aspects de ce critère en deux volets n’aura pas satisfait aux exigences relatives à l’invalidité conformément au Régime de pensions du Canada. Il n’est pas nécessaire de procéder à une analyse sous l’angle du caractère prolongé alors que la demanderesse n’a pas démontré qu’elle était gravement invalide. La Cour d’appel fédérale a affirmé ce qui suit au paragraphe 10 de l’arrêt Klabouch c. Canada (Développement social), 2008 FCA 33 :

[...] Les deux exigences de l’alinéa 42(2)a) du [Régime de pensions du Canada] sont cumulatives, de sorte que si un demandeur ne satisfait pas à l’une ou l’autre condition, sa demande de pension d’invalidité en vertu du [Régime de pensions du Canada] sera rejetée.

[15] La Cour fédérale a confirmé dans l’affaire McCann c. Canada (Procureur général), 2016 CF 878, que « […] le fait de traiter d’un seul élément du critère et de ne pas rendre de conclusion sur le second […] ne constitue pas une erreur […] ». La Cour fédérale a conclu que l’argument de monsieur McCann, selon lequel la division d’appel aurait dû lui accorder la permission d’en appeler puisque la division générale n’avait pas examiné le caractère « prolongé » faisant partie du critère relatif à l’invalidité, était voué à l’échec.

[16] Parce que la division générale avait conclu que la demanderesse n’était pas gravement invalide, il n’est pas nécessaire de déterminer si l’invalidité de la demanderesse pourrait être considérée comme prolongée. Cette question ne soulève pas une cause défendable.

Conclusion

[17] La demande de permission d’en appeler est accueillie, bien que cette décision ne présume aucunement du succès de l’appel.

[18] Conformément au paragraphe 58(5) de la LMEDS, la demande de permission d’en appeler est ainsi assimilée à un avis d’appel. Dans les 45 jours suivant la date de cette décision, les parties peuvent a) soit déposer des observations auprès de la division d’appel, b) soit déposer un avis auprès de la division d’appel précisant qu’elles n’ont pas d’observations à déposer. Les parties peuvent joindre des observations concernant le mode d’audience à privilégier pour l’instruction de l’appel (ex. téléconférence, vidéoconférence, en personne ou basée sur les observations écrites présentées par les parties) avec les observations sur le fond de la cause en appel.

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