Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La prorogation du délai et la permission d’en appeler sont refusées.

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler relativement à la décision rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) le 12 juillet 2016. La division générale a tenu une audience par vidéoconférence et statué que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC), parce qu’elle n’était pas atteinte d’une invalidité « grave » avant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA), soit le 31 décembre 2013.

[2] Le 7 février 2016, après le délai prévu à l’alinéa 57(1)b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), la demanderesse a présenté une demande incomplète de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal. Après avoir reçu une demande de renseignements supplémentaires, la demanderesse a complété sa demande de permission d’en appeler le 21 février 2017.

Question en litige

[3] La division d’appel doit déterminer s’il convient de proroger le délai de présentation de la demande de permission d’en appeler.

Droit applicable

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

[4] Conformément à l’alinéa 57(1)b) de la LMEDS, une demande de permission d’en appeler doit être présentée dans les 90 jours suivant la date à laquelle le demandeur reçoit communication de la décision. Au titre du paragraphe 57(2), la division d’appel peut proroger d’au plus un an le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler.

[5] La division d’appel doit tenir compte des critères énoncés dans la jurisprudence et les soupeser. Voici les critères établis par la Cour fédérale dans l’affaire Canada c. GattellaroNote de bas de page 1 :

  1. a) le demandeur fait preuve d’une intention persistante de poursuivre l’appel;
  2. b) le retard a été raisonnablement expliqué;
  3. c) la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie;
  4. d) la cause est défendable.

[6] Le poids qu’il faut accorder à chacun des facteurs énoncés dans l’affaire Gattellaro variera et, dans certains cas, d’autres facteurs aussi seront pertinents. La considération primordiale est celle de savoir si l’octroi d’une prorogation de délai serait dans l’intérêt de la justice : Canada c. LarkmanNote de bas de page 2.

[7] Conformément aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la LMEDS, il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission. La division d’appel accorde ou refuse cette permission. Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[8] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier:
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond. C’est un premier obstacle que le demandeur doit franchir, mais cet obstacle est inférieur à celui auquel elle devra faire face à l’audience relative à l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, un demandeur n’a pas à prouver ses arguments.

[10] La Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le demandeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada c. HogervorstNote de bas de page 3; Fancy c. CanadaNote de bas de page 4.

Régime de pensions du Canada

[11] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne reçoit pas une pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la PMA.

[12] Le calcul de la PMA est important, car une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au moment où sa PMA a pris fin ou avant cette date.

[13] Au titre de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est réputée être atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Observations de la demanderesse

[14] Dans la demande de permission d’en appeler datée du 2 février 2007 et présentée à la division d’appel, la représentante autorisée de la demanderesse a informé le Tribunal que les observations de sa cliente étaient en retard qu’il y avait eu une détérioration notable de l’état de la demanderesse depuis la décision rendue par la division générale. Le 12 décembre 2016, elle a subi une chirurgie d’urgence (décompression articulaire à la hanche droite), et les dossiers médicaux joints et produits par Dr Omar Khan font état qu’il y avait seulement 35 pour 100 des chances que la procédure soit un succès. La demanderesse a maintenu que son état satisfaisait aux critères prévus par le RPC relativement à une invalidité grave et prolongée.

[15] Le 10 février 2017, le Tribunal a informé la demanderesse que sa demande comportait des motifs insuffisants. Dans une lettre datée du 21 février 2017, la représentante de la demanderesse a reconnu la demande du Tribunal de documents supplémentaires et elle a fait valoir que la division générale a commis une erreur grave concernant les faits figurant dans le dossier d’appel. Elle a réitéré qu’il y avait eu une détérioration notable de l’état de sa cliente depuis le rejet de la division générale le 13 juillet 2016. La demanderesse avait reçu un diagnostic de nécrose avasculaire précoce et subi une décompression chirurgicale à l’articulation de la hanche droite en décembre 2016. Elle s’est retrouvée atteinte d’une invalidité grave l’empêchant de travailler.

Analyse

[16] J’estime que la demande de permission d’en appeler a été présentée après le délai prescrit de 90 jours. Selon le dossier, la division générale a rendu sa décision le 12 juillet 2016, et le Tribunal a reçu la demande incomplète de permission d’en appeler devant la division d’appel présentée par la demanderesse le 7 février 2017. La demande a seulement été complétée deux semaines plus tard, soit 224 jours après l’envoi par la poste de la décision de la division générale et bien après le délai de 90 jours pour le dépôt prévu au paragraphe 57(1) de la LMEDS.

[17] Pour déterminer si j’accorde un délai supplémentaire pour interjeter appel, j’ai examiné et soupesé les facteurs établis dans l’affaire Gattellaro.

Intention constante de poursuivre l’appel

[18] Même si la demanderesse a seulement présenté une demande de permission d’en appeler complète plus de quatre mois après l’expiration du délai prévu par la loi, je suis prêt à présumer qu’elle avait l’intention continue de poursuivre l’appel, mais qu’elle en a été empêchée en raison de la maladie.

Explication raisonnable du retard

[19] La représentante de la demanderesse a soutenu qu’elle a présenté une demande tardive de permission d’en appeler en raison d’une détérioration soudaine de son état de santé. Je suis prêt à donner le bénéfice du doute à la demanderesse sur cette question et j’accepte cette explication concernant le retard.

Préjudice à l’autre partie

[20] Il est peu probable que la prorogation du délai pour interjeter appel cause préjudice aux intérêts du défendeur étant donné la période relativement courte qui s’est écoulée depuis l’expiration du délai prévu par la loi. Je ne crois pas que la capacité du défendeur à se défendre, vu ses ressources, serait indûment amoindrie si la prorogation du délai était accordée.

Cause défendable

[21] Les observations de la demanderesse consistent en une récapitulation des éléments de preuve et des arguments qui ont déjà été présentés à la division générale. Malheureusement, la division d’appel n’a pas comme mandat d’instruire de nouveau des demandes de pension invalidité sur le fond. Bien que les demandeurs ne sont pas tenus de prouver les moyens d’appel qu’ils invoquent à l’étape de la demande de permission d’en appeler, ils doivent néanmoins décrire certains fondements rationnels qui cadrent avec les moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Il ne suffit pas à un demandeur de simplement déclarer qu’il est n’est pas d’accord avec la décision de la division générale, pas plus qu’il ne lui suffit d’exprimer sa conviction persistante que ses problèmes de santé le rendent invalide au sens du RPC.

[22] En l’absence d’une allégation précise d’erreur, je dois conclure que les moyens d’appel prétendus de la demanderesse sont si généraux qu’ils correspondent à une demande de trancher de nouveau l’ensemble de la demande. Si elle demande que je révise et évalue à nouveau la preuve pour substituer ma décision à celle de la division générale, et cela, en sa faveur, je suis dans l’impossibilité de le faire. Je n’ai compétence que pour déterminer si l’un de ses motifs d’appel se rattache aux moyens d’appel admissibles du paragraphe 58(1) et si l’un d’eux confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[23] La demanderesse a également présenté un certain nombre de rapports médicaux pour accompagner sa demande de permission d’en appeler : certains avaient déjà été présentés à la division générale, et d’autres ont été produits après que la décision a été rendue. Je ne suis pas en mesure d’en tenir compte étant donné les limitations prévues au paragraphe 58(1) de la LMEDS, qui ne confère aucun pouvoir d’évaluation des demandes de pension d’invalidité sur le fond de la part de la division d’appel. Une fois qu’une audience a pris fin, il y a très peu de raisons qui justifieraient de soulever d’autres points ou des points nouveaux. Un demandeur pourrait envisager de présenter à la division générale une demande d’annulation ou de modification de sa décision. Cependant, il faudrait que ce demandeur se conforme aux exigences de l’article 66 de la LMEDS et des articles 45 et 46 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Non seulement le demandeur doit respecter des échéances et des exigences strictes pour obtenir gain de cause dans le cadre d’une demande d’annulation ou de modification, mais il doit également démontrer que chacun des faits nouveaux est essentiel et qu’il n’aurait pu être connu au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnable.

Conclusion

[24] Après avoir soupesé les facteurs susmentionnés, j’ai conclu que l’affaire n’est pas un cas où il convient d’accorder une prorogation du délai de 90 jours pour interjeter appel. J’ai conclu que l’explication de la demanderesse concernant sa demande tardive de permission d’en appeler est raisonnable et j’ai présumé qu’elle avait l’intention continue de poursuivre l’appel. J’ai également considéré qu’il était peu probable qu’une prorogation du délai cause préjudice aux intérêts du défendeur. Cependant, je ne peux pas trouver une cause défendable en appel, et ce dernier facteur a été déterminant. J’estime qu’il ne sert à rien d’accueillir cette demande afin de présenter un appel complet qui est voué à l’échec.

[25] Compte tenu des facteurs de l’affaire Gattellaro et dans l’intérêt de la justice, je refuse la prorogation du délai pour interjeter appel au titre du paragraphe 57(2) de la LMEDS.

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