Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’en appeler d’une décision rendue le 19 mai 2016 par la division générale, qui a statué qu’il n’était pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada, comme elle avait conclu qu’il n’était pas atteint d’une invalidité « grave » à l’échéance de sa période minimale d’admissibilité, le 31 juillet 2013, ou avant cette date.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Analyse

[3] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs d’appel invoqués se rattachent aux moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale a confirmé cette approche dans Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

[5] Le demandeur a déposé une série d’observations à l’appui de sa demande, dont certaines étaient plus cohérentes que d’autres. Dans la demande initiale, il a soutenu que la division générale n’avait pas observé un principe de justice naturelle et, aussi, qu’elle n’avait pas [traduction] « observé la Constitution [Loi] du Canada ». Dans une réponse au Tribunal de la sécurité sociale relative à sa demande, il a fait savoir qu’il interjetait aussi appel parce que la division générale avait commis une erreur de droit. Il n’a cependant pas précisé comment la division générale aurait commis une telle erreur ou comment elle n’aurait pas observé un principe de justice naturelle ou la Charte canadienne des droits et libertés.

[6] Le demandeur a aussi déposé :

  • ADN1D : un [traduction] « Avis de défense d’intrusion »;
  • ADN1H : la carte professionnelle de son médecin de famille;
  • ADN1J : une copie d’une lettre adressée au défendeur pour l’informer qu’il souhaitait que [traduction] « le serment de Sa Majesté soit respecté » (il a aussi affirmé qu’il avait autorisé des individus sur sa propriété mais qu’ils n’avaient pas voulu suivre ses règles [traduction] « pour prouver le statut et respecter la Constitution du Canada », ce qui avait lourdement porté atteinte à sa famille et lui-même);
  • AD1N1L : une lettre adressée au Tribunal d’appel de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail concernant ses demandes d’indemnisation pour blessure;
  • ADN1M : une lettre des Tribunaux de justice sociale Ontario l’informant que son dossier auprès du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario avait été clos;
  • ADN1N : une lettre datée du 30 mars 2017 du Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP) l’informant que son dossier avait été clos. Le TCDP ne pouvait pas accepter sa plainte comme il n’avait pas rempli les exigences prévues à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[7] Ces autres observations ne soulèvent aucun des moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS et, à dire vrai, aucune d’entre elles ne semble revêtir la moindre pertinence dans le cadre de cet appel ou de sa demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

a) Droits constitutionnels

[8] Le demandeur n’a pas précisé de quelle façon ses droits constitutionnels garantis par la Charte canadienne des droits et libertés auraient pu être brimés.

[9] Le paragraphe 20(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit ce qui suit :

(1) Lorsque la validité, l’applicabilité ou l’effet, sur le plan constitutionnel, d’une disposition du Régime de pensions du Canada, de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, de la Loi sur l’assurance-emploi, de la partie 5 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social ou de leurs règlements est mis en cause devant le Tribunal,Note de bas de page 1 la partie qui soulève la question :

  1. a) dépose auprès du Tribunal un avis qui contient :
    1. (i) la disposition visée,
    2. (ii) toutes observations à l’appui de la question soulevée;
  2. b) au moins dix jours avant la date fixée pour l’audition de l’appel ou de la demande, signifie aux personnes mentionnées au paragraphe 57(1) de Loi sur les Cours fédérales un avis énonçant la question et dépose auprès du Tribunal [de la sécurité sociale du Canada] une copie de l’avis et la preuve de sa signification.

[10] Le demandeur n’a pas rempli les exigences de base relatives au dépôt d’un avis conformément au Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Qui plus est, il n’est pas suffisant pour une partie de simplement prétendre que ses droits constitutionnels ont été brimés, sans fournir de précisions ou de spécifications. La division d’appel n’exercera habituellement pas son pouvoir discrétionnaire pour tenir compte d’arguments d’ordre constitutionnel pour la première fois en appel si ces arguments n’ont pas été invoqués devant la division générale et examinés par celle-ci, surtout si aucun document de preuve ou conclusion de fait ne traite des questions soulevées par l’appelant : C.F. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2016 TTSDASR 86. J’ai examiné les observations du demandeur et je constate qu’il n’a soulevé aucune question relative à la Charte canadienne des droits et libertés devant la division générale. À ce stade, un demandeur ne devrait normalement pas être autorisé à invoquer des arguments fondés sur la Charte sur cette question s’il ne les avait pas invoqués dans le cadre de son appel devant la division générale.

b) Principe de justice naturelle

[11] La justice naturelle vise à assurer qu’un appelant bénéficie d’une occasion juste et raisonnable de présenter sa cause et d’une audience équitable, et que la décision rendue soit impartiale et exempte d’une crainte ou d’une apparence raisonnable de partialité. Cela dit, le demandeur n’a pas précisé comment la division générale n’aurait pas observé l’un ou l’autre des principes de justice naturelle. Même si le demandeur a été invité par le Tribunal à étayer ses prétentions en fournissant des preuves et des observations, il n’a pas précisé de quelle façon il aurait été privé d’une audience équitable ou d’une occasion juste et raisonnable de présenter sa cause, ni de quelle façon le membre aurait fait preuve de partialité à son détriment.

[12] J’ai écouté l’enregistrement de l’audience devant la division générale. Le membre a offert au demandeur toutes les occasions possibles de présenter des preuves et des observations. Le ton du membre tout au long de l’audience était celui d’une personne patiente, courtoise et respectueuse, et ce, même quand le demandeur a soulevé des questions qui n’étaient pas particulièrement pertinentes à l’instance. Rien ne permet de croire que le membre aurait dérogé à la norme à laquelle on s’attend de la part d’un membre.

c) Erreur de droit

[13] Malgré les nombreuses demandes du Tribunal à cet effet, le demandeur n’a pas précisé sa prétention voulant que la division générale avait commis une erreur de droit.

[14] Même si le demandeur n’a invoqué aucune des erreurs susceptibles de contrôle prévues au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, je vais examiner la preuve médicale parallèlement à la décision de la division générale. Après tout, la Cour fédérale a mis en garde le Tribunal contre une application trop mécanique du libellé de l’article 58 de la Loi sur le MEDS quand il exerce sa fonction de gardien. Dans Karadeolian c. Canada (Procureur général), 2016 CF 615, la Cour fédérale a écrit ce qui suit, au paragraphe 10 : « Si des éléments de preuve importants ont été laissés de côté ou possiblement mal interprétés, l’autorisation d’interjeter appel doit habituellement être accordée, peu importe l’existence de déficiences techniques dans la demande d’appel. »

[15] J’ai examiné la preuve qui a été présentée à la division générale. Il y a très peu d’éléments de preuve documentaire préparés à l’époque où a pris fin la période minimale d’admissibilité. La division générale a reconnu que le demandeur souffrait d’une douleur à la jambe depuis plusieurs années et qu’il devait composer avec certaines limitations fonctionnelles lorsqu’il faisait du travail manuel. Des dossiers médicaux préparés en 2013 ont révélé que le demandeur s’était blessé à la cheville au travail, et que du naproxène lui avait été prescrit pour cette blessure. Mis à part une consultation auprès de son médecin de famille en octobre 2013, il n’a visiblement pas consulté d’autres prestataires de soins de santé, et rien ne donne à penser qu’il aurait effectué des examens de suivi ou reçu des traitements pour un quelconque problème de santé vers la fin de sa période minimale d’admissibilité. La division générale a aussi noté que le médecin de famille du demandeur lui avait prescrit du naproxène en mai 2015, mais mis à part cela, rien ne permettait de croire que des analgésiques plus puissants lui auraient été prescrits. La division générale a mené une analyse « réaliste » et a tenu compte de la situation particulière du demandeur. Mon examen du dossier d’audience ne révèle pas que la division générale aurait ignoré ou possiblement mal interprété des éléments de preuve importants.

[16] À moins qu’une possible erreur susceptible de contrôle prévue au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS ait été cernée, les décisions de la division générale appellent une déférence considérable : Hussein c. Canada (Procureur général), 2016 CF 1417.

Conclusion

[17] Pour les raisons que je viens d’expliquer, je ne suis pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès. La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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