Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Introduction

[1] L’appelant a fait une demande de pension d’invalidité du Régime de pension du Canada (RPC) en août 2014. Il avait atteint 65 ans en juillet 2010.

[2] L’intimé a rejeté cette demande initialement et après révision.

[3] L’appelant a interjeté appel de cette décision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) en juin 2016.

[4] Le 5 décembre 2016, la division générale a rejeté sommairement l’appel sur le motif que l’appelant n’avait pas satisfait au critère relatif à l’admissibilité pour une pension d’invalidité du RPC, à savoir, d’être âgé de moins de soixante-cinq ans (RPC, alinéa 44(1)b)).

[5] L’appelant a présenté une demande d’interjeter appel de la décision de la division générale le 17 janvier 2017, dans le délai prescrit.

[6] Les motifs d’appel de l’appelant peuvent être résumés comme suit :

  • a) Il a eu des problèmes d’incapacité depuis le 20 septembre 2000.
  • b) Il a atteint 65 ans le 22 juillet 2010 et a commencé à recevoir une pension de retraite du RPC.
  • c) Il désire recevoir une pension d’invalidité pour la période du 20 septembre 2000 au 22 juillet 2010.
  • d) C’est son « assurance » qu’il a payée pendant 48 ans.
  • e) Il avait fait une demande de pension d’invalidité précédemment.

[7] L’intimé n’a pas présenté d’observations à la division d’appel. L’intimé a rejeté la demande de l’appelant, car une personne ne peut pas être déclarée invalide avant la période de 15 mois qui précède la date de la demande. En l’espèce, la date la plus tôt où l’appelant aurait pu être considéré invalide est en mai 2013. En mai 2013, l’appelant avait déjà plus de 65 ans. Par conséquent, il ne satisfaisait pas aux critères d’admissibilité pour une pension d’invalidité.

[8] Cet appel a été tranché sur la foi du dossier pour les motifs suivants :

  • a) Le membre de la division d’appel avait déterminé qu’il n’était pas nécessaire de tenir une autre audience.
  • b) Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale exige que l’appel se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[9] La division d’appel doit décider si elle devrait rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale, confirmer, infirmer ou modifier la décision rendue par la division générale.

Droit applicable et analyse

[10] L’appelant interjette appel de la décision de la division générale, datée du 5 décembre 2016, de rejeter sommairement son appel selon le motif qu’elle était convaincue que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès.

[11] Aucune permission d’en appeler n’est requise dans le cas des appels interjetés conformément au paragraphe 53(3) de la Loi sur le MEDS, car un rejet sommaire de la part de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit. Comme il a été établi qu’il n’est pas nécessaire de tenir une autre audience, cet appel à la division d’appel sera instruit aux termes de l’alinéa 37a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[12] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS établit les seuls moyens d’appel qui sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[13] Les dispositions pertinentes sont les alinéas 44(1)b) et 42(2)b) du RPC.

Critère juridique relatif aux rejets sommaires

[14] Le paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS permet à la division générale de rejeter sommairement un appel si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[15] Selon le paragraphe 59(1) de la Loi sur le MEDS, la division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division d’appel.

[16] En l’espèce, la division générale énonce correctement le fondement législatif lui permettant de rejeter l’appel de façon sommaire en citant le paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS, au troisième paragraphe de sa décision.

[17] Toutefois, il n’est pas suffisant de reprendre le libellé du paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS traitant des rejets sommaires si l’on n’applique pas cette disposition comme il se doit. Après avoir établi le fondement législatif, la division générale doit aussi préciser le critère juridique applicable puis appliquer le droit aux faits.

[18] Au paragraphe 2 de sa décision, la division générale a demandé [traduction] « si l’appel devrait être rejeté sommairement ».

[19] La décision de la division générale n’indique pas le critère juridique qui a été appliqué pour conclure qu’il convenait de rejeter l’appel de façon sommaire.

La décision de la division générale

[20] Bien que la division générale n’ait pas énoncé le critère juridique qu’elle a appliqué, elle a cependant expliqué ce sur quoi elle s’est fondée pour rejeter l’appel de façon sommaire :

[11] Le Tribunal a été créé par la législation et, en tant que tel, il n’a que les pouvoirs qui lui ont été conférés par la loi. Le Tribunal doit interpréter et mettre en application les dispositions telles qu’elles sont établies dans le RPC.

[12] En l’espèce, il est techniquement impossible pour l’appelant d’être admissible à une pension d’invalidité du RPC. Selon le RPC, un critère d’admissibilité à la pension d’invalidité du RPC est d’être âgé de moins de 65 ans (alinéa 44(1)b) du RPC). L’appelant a demandé une pension d’invalidité du RPC en août 2014. L’observation de l’appelant ne laisse pas entrevoir une incapacité mentale à présenter la demande avant cette date. Selon le RPC, il ne pouvait pas être déclaré invalide avant la période de 15 mois précédant la date de sa demande. En l’espèce, si déclaré invalide, la date la plus tôt à laquelle son invalidité pourrait être déterminée est mai 2013 (RPC alinéa 42(2)b)). Il avait déjà plus de 65 ans en mai 2013.

[13] Par conséquent, le Tribunal estime que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès

[21] Puisque le membre de la division générale n’a pas précisé le critère juridique applicable aux rejets sommaires et parce qu’il n’a pas appliqué ce critère aux faits, la décision de la division générale est fondée sur une erreur de droit.

[22] Le critère juridique applicable aux rejets sommaires est la première question à laquelle il faut répondre. La question suivante serait celle visant à déterminer si une erreur de droit (ou un autre type d’erreur) a été commise dans la décision rendue par l’intimé sur les questions précises.

[23] En raison de l’erreur de droit commise par la division générale qui porte sur la question préliminaire du critère juridique applicable aux rejets sommaires, la division d’appel doit faire sa propre analyse et déterminer si elle doit rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale, confirmer, infirmer ou modifier la décision (arrêt Housen c. Nikolaisen, [2002] RCS 235, 2002 CSC 33 au paragraphe 8, et paragraphe 59(1) de la LMEDS).

Critère juridique à appliquer pour un rejet sommaire

[24] Bien que la division générale ait erré en n’indiquant pas et en n’appliquant pas le critère juridique applicable, les paragraphes 11 et à 12 de la décision rendue par la division générale sont corrects, et j’accepte les conclusions qui y sont présentées.

[25] L’appelant conteste le fait qu’il n’a pas reçu six mois de pension d’invalidité du RPC, qu’il considère lui sont dus, car il a eu des [traduction] « problèmes d’invalidité » depuis 2000.

[26] Bien que l’expression « aucune chance raisonnable de succès » n’ait pas été définie davantage dans la Loi sur le MEDS, aux fins de l’interprétation du paragraphe 53(1) de cette loi, c’est une notion qui est utilisée dans d’autres domaines du droit et qui a fait l’objet de décisions antérieures de la division d’appel.

[27] Il semble se dégager trois tendances de décisions précédemment rendues par la division d’appel relativement à des appels de rejets sommaires de la division générale et elles sont :

  • a) J. S. c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 715; C. D. c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 594; M. C. c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 237; et J. C. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 596. Le critère juridique suivant a été appliqué : est-il évident et manifeste, sur la foi du dossier, que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou les arguments qui pourraient être produits à l’audience? Ce critère est énoncé par la Cour d’appel fédérale dans les arrêts Lessard-Gauvin c. Canada (Procureur général), CAF 147, Sellathurai c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CAF 1, et Breslaw c. Canada (Procureur général), 2004 CAF 264.
  • b) C.S. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 974; A.P. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 973; A.A. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 1178. Dans ces décisions, la division d’appel a appliqué un critère juridique articulé différemment soit de savoir s’il y a une « question donnant matière à procès » et s’il y a un fondement quelconque à la demande, et ce, en qualifiant le cause d’« absolument sans espoir » et de « faibles », pour déterminer s’il était approprié de rejeter l’appel de façon sommaire. Dès qu’il existe un fondement factuel suffisant à l’appui de l’appel et que le résultat n’est pas « manifestement clair », alors il n’est pas opportun de rendre une décision de rejet sommaire. Il ne conviendrait pas non plus de rejeter de façon sommaire un appel dont le fondement est faible, car un tel appel suppose forcément d’évaluer le fond de l’affaire, et d’examiner et d’apprécier la preuve produite.
  • c) K. B. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2015 TSSDA 929. Dans cette décision, la division d’appel n’a fait aucune référence claire à un critère juridique à l’exception de sa citation du paragraphe 53(1) de la Loi sur le MEDS.

[28] J’estime que l’application des deux critères que j’ai énoncés aux paragraphes 27 a) et b) de la présente décision mène au même résultat en l’espèce, à savoir que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il est évident et manifeste à la lecture du dossier que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou arguments qui pourraient être présentés lors d’une audience. Il est également évident qu’il ne s’agit pas ici d’une affaire au fondement « faible », mais bien d’une affaire « sans aucun espoir » de succès, car une évaluation du bien-fondé de l’affaire ou un examen de la preuve n’est pas requis.

[29] Ni la division générale ni la division d’appel du Tribunal ne peut modifier les dispositions législatives du RPC.

[30] Selon le RPC, un critère d’admissibilité à la pension d’invalidité du RPC est de ne pas avoir atteint 65 ans. Parce que l’appelant fit sa demande en août 2014, la date la plus tôt à laquelle il aurait pu être déclaré invalide est 15 mois précédant la date de la demande, soit en mai 2013. Il avait déjà plus de 65 ans en mai 2013.

[31] L’application des alinéas 44(1)b) et 42(2)b) RPC est déterminante pour cet appel.

[32] Après avoir examiné l’avis d’appel de l’appelant, les observations des parties, le dossier de la division générale ainsi que sa décision et les décisions précédemment rendues par la division d’appel relativement à des rejets sommaires, et après avoir appliqué le critère juridique applicable à un rejet sommaire, je rejette, par la présente, cet appel.

Conclusion

[33] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.