Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] L’intimé a reçu la demande de pension d’invalidité présentée par l’appelante en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) le 4 septembre 2015. L’appelante prétendait être invalide en raison d’une douleur aux épaules, aux coudes, au canal carpien du poignet gauche, au bas du dos et à la hanche gauche. L’intimé a rejeté la demande au stade initial et après révision. L’appelante a fait appel de la décision de révision devant le Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

[2] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, l’appelante doit répondre aux exigences prévues au RPC. Plus précisément, elle doit être déclarée invalide au sens du RPC à l’échéance de sa période minimale d’admissibilité (PMA) ou avant cette date. Le calcul de la PMA est basé sur les cotisations que l’appelante a versées au RPC. Le Tribunal constate que la PMA de l’appelante a pris fin le 31 décembre 1998.

[3] L’audience a été tenue par téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. L’appelante sera la seule partie qui participe à l’audience.
  2. Les questions en litige ne sont pas complexes.
  3. Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[4]  Les personnes suivantes ont participé à l’audience : l’appelante, Y. B.; et son représentant, Roderick Lesperance.

[5] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal a décidé que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC.

Preuve

Preuve de l’appelante

[6] L’appelante a témoigné en son propre nom. Elle avait 41 ans à l’échéance de sa PMA, et 60 ans en date de l’audience. Elle a terminé une 12e année et un diplôme collégial en gestion internationale des affaires. L’appelante a écrit, dans son questionnaire relatif aux prestations d’invalidité daté du 26 juillet 2015, qu’elle avait occupé son dernier emploi dans une usine d’assemblage de véhicules automobiles du 22 août 1994 au 11 octobre 1995. L’appelante a témoigné qu’elle avait travaillé pour la dernière fois dans les cantines/cafétérias de différents établissements pendant six mois, elle qu’elle n’avait plus travaillé depuis. L’état de compte de l’appelante au RPC confirme que 2002 était la dernière année où elle avait réalisé des gains et versé des cotisations au RPC.

[7] L’appelante a témoigné qu’elle avait travaillé comme ouvrière pour General Motors (GM), d’abord à son usine de Xr, de septembre 1989 et jusqu’à sa fermeture en 1991, puis à son usine d’assemblage de X, jusqu’à la fermeture de celle-ci en 1992. Pendant sa mise à pied, après la fermeture de l’usine de X, l’appelante avait travaillé comme serveuse au Casino de X, puis GM l’avait réaffectée, en août 1994, à une usine d’assemblage à X. Avant son embauche chez GM en 1989, l’appelante avait notamment travaillé comme technicienne de surface dans un hôpital, serveuse et barmaid, de 1980 à 1989.

[8] L’appelante a noté, dans son questionnaire, qu’elle avait arrêté de travailler en raison d’une blessure subie au travail. Elle a affirmé qu’elle n’était plus capable de travailler en raison de son état de santé depuis le 11 octobre 1995, soit sa dernière journée de travail à l’usine de X de GM. Elle a noté dans son questionnaire et témoigné que les déficiences l’empêchant de travailler étaient une douleur aux épaules, aux coudes, au poignet gauche, au dos et à la hanche gauche. Elle a affirmé qu’elle s’était blessée au travail aux épaules et aux coudes. Elle a témoigné que les déficiences touchant son poignet gauche, son dos et sa hanche gauche étaient apparues après l’échéance de sa PMA, c’est-à-dire après le 31 décembre 1998. Elle reconnaît que ces problèmes de santé ne l’empêchaient pas de travailler en date de sa PMA.

[9] L’appelante a dit qu’elle s’était blessée aux épaules et aux coudes en septembre 1994 et en août 1995. Elle avait continué à travailler après chacune de ces blessures, ce qui, selon elle, avait aggravé son état et l’avait conduite à arrêter de travailler, le 11 octobre 1995. L’appelante a qualifié d’exigeantes, sur le plan physique, ses tâches chez GM.

[10] De 1996 à 2001, l’appelante a fait du perfectionnement scolaire en participant au programme de réintégration au travail auprès de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT). À partir de 1996, elle a fréquenté l’école secondaire pendant un an et demi, et a terminé son programme d’équivalences secondaires. Elle a par la suite suivi un programme collégial de six mois en informatique, puis a suivi un programme collégial de trois ans en gestion. Elle a dit avoir obtenu un diplôme collégial en gestion internationale des affaires après avoir terminé le programme de recyclage. L’appelante a témoigné qu’elle avait dû, dans le cadre du perfectionnement scolaire de niveau secondaire faisant partie du programme de réintégration au travail, aller à des cours pendant cinq à six heures par jour, à raison de cinq jours par semaine. Elle a dit qu’elle assistait toujours aux cours prévus et qu’elle faisait environ cinq à six heures de devoirs par jour, après ses cours.

[11] L’appelante a témoigné qu’elle avait cherché du travail après avoir terminé son programme collégial de recyclage. Elle n’avait pas réussi à trouver un emploi dans le domaine des affaires internationales. Elle avait décroché et occupé pendant six mois, en 2002, un emploi auprès d’une entreprise qui exploitait différentes cafétérias. Ses tâches consistaient notamment à préparer la nourriture et à débarrasser les tables. Elle a témoigné qu’elle devait faire quatre quarts de travail de cinq à huit heures chacun par semaine. Elle a affirmé qu’elle travaillait les quarts qui lui étaient attribués, et qu’elle faisait des quarts supplémentaires lorsqu’ils étaient disponibles. Elle a dit qu’elle était capable d’assumer les fonctions de cet emploi. Elle a cessé de travailler puisque son opération à l’épaule droite d’octobre 2002 approchait, elle n’a pas travaillé depuis.

[12] L’appelante a témoigné qu’elle n’a pas cherché d’emploi après avoir arrêté de travailler dans les cantines/cafétérias en 2002. L’état de santé de l’appelante s’est détérioré après la fin de son programme de recyclage, en 2001, et après son emploi dans les cantines/cafétérias, en 2002. À ce sujet, elle a subi des opérations à l’épaule droite en octobre 2002, à l’épaule gauche en novembre 2005, au coude gauche en juin 2008, au canal carpien gauche en 2011, et de nouveau à l’épaule gauche en septembre 2016. Elle a affirmé qu’elle avait fait un peu de physiothérapie après chacune de ces interventions chirurgicales.

Preuve médicale

[13] Le docteur Musgrove, qui était le médecin de famille de l’appelante depuis plus de 30 ans, a rempli le rapport médical du 10 août 2015 accompagnant la demande de prestations de l’appelante. Il posait les diagnostics suivants : arthrite au genou gauche, sciatique du côté gauche, discopathie lombaire et arthrite facettaire, myalgie dorsale, et tendinopathie chronique de l’épaule gauche. Il a noté que l’appelante était atteinte d’une tendinopathie chronique aux deux épaules depuis 1994, même si elle avait subi deux opérations à l’épaule droite, fait de la physiothérapie, reçu des injections de cortisone, et pris des anti-inflammatoires. Il a noté que les antécédents de l’appelante comprenaient aussi une libération du canal carpien droit, effectuée en 2011, et une discopathie lombaire s’accompagnant d’une sciatique à gauche, depuis juillet 2012. Le docteur Musgrove a rapporté qu’il avait commencé à traiter l’appelante pour son principal problème de santé en février 2012. Il a noté que l’amplitude du mouvement de l’épaule gauche et la colonne lombaire était restreinte et douloureuse chez l’appelante, et était accompagnée d’une douleur qui irradiait dans sa fesse et sa jambe gauche, ce qui est typique de la sciatique. Il a précisé que l’appelante ne prenait actuellement aucun médicament et qu’elle pouvait prendre au besoin de l’Advil ou de l’Aleve, offerts en vente libre. Notant que les symptômes de l’appelante persistaient depuis de nombreuses années malgré les opérations et les traitements, le docteur Musgrove a affirmé qu’il était peu probable que les symptômes de l’appelante s’améliorent drastiquement à ce stade-ci. Il ne s’attendait pas à ce que l’appelante se rétablisse au point où elle serait capable de reprendre un quelconque emploi rémunérateur.

[14] Le 21 décembre 1995, le docteur Stecko, chirurgien orthopédiste, a rapporté qu’il avait examiné l’appelante pour des problèmes aux épaules qui étaient apparus au travail en septembre 1994, et pour une douleur au coude droit. L’impression clinique du docteur Stecko était qu’elle était atteinte d’un conflit sous-acromial bilatéral. Il a noté que les rayons X de son épaule droite révélaient un acromion de type 1, et que les rayons X de son coude droit étaient normaux.

[15] Le 31 octobre 2016, le docteur Stecko a rapporté à la CSPAAT que l’appelante était toujours aux prises avec des problèmes persistants au membre supérieur droit. Il a noté qu’elle avait toujours un coincement léger à l’épaule droite, et qu’un test de percussion du coude était positif. Il a fait savoir qu’il allait refaire une étude de conduction nerveuse.

[16] Le 10 février 1997, le docteur Stecko a rapporté que l’étude de conduction nerveuse de l’appelante était normale. Il a noté la présence de problèmes persistants au membre supérieur droit, qu’il croyait attribuables à sa surutilisation. Il a écrit qu’il recommandait l’appelante pour une thérapie auprès du Centre de réadaptation du dos.

[17] Le 27 février 1997, monsieur Barrios, physiothérapeute au Centre de réadaptation du dos, a rapporté que l’appelante se plaignait alors d’une douleur à l’épaule droite qui aurait débuté en 1994, et d’une douleur au coude droit, qui aurait selon elle commencé en juin 1996, après son opération au coude de transposition du nerf cubital. Il a rapporté que l’appelante prenait alors du Tylenol 3. Il a noté une amplitude de mouvement complète et indolore au niveau du coude et du poignet. Monsieur Barrios a rapporté que la douleur que ressentait l’appelante à l’épaule droite était typique du conflit sous-acromial, et que sa douleur au coude droit était sûrement une douleur post-opératoire.

[18] Le 16 juillet 1997, le docteur Stecko a également rapporté que l’appelante éprouvait un inconfort persistant au niveau du membre supérieur droit.

[19] Le 27 mai 1998, le docteur Stecko a rapporté qu’il avait de nouveau examiné l’appelante pour des problèmes persistants touchant son coude droit. Il a noté qu’elle l’avait d’abord consulté plusieurs années auparavant, qu’elle avait subi une transposition du nerf cubital, et qu’elle avait continué à se plaindre d’une douleur après l’opération. Il a précisé que l’appelante recevait des injections de cortisone et que les études récentes de conduction nerveuse étaient normales. Le docteur Stecko a noté que la douleur de l’appelante était localisée au niveau de l’épicondyle médial. Le docteur Stecko posait un diagnostic d’épicondylite médicale, et a précisé qu’un rendez-vous avait été pris pour que l’appelante subisse une épitrochléectomie.

[20] Dans son protocole opératoire daté du 25 juin 1998, le docteur Stecko a écrit que l’appelante avait subi une épitrochléectomie du côté droit ce jour-là.

[21] Le 3 septembre 1998, le docteur Stecko a rapporté à la CSPAAT que l’appelante avait toujours une douleur et une sensibilité persistantes au coude, et une légère restriction dans une extension complète. Il a noté que l’appelante allait suivre une thérapie.

[22] Aucun rapport médical n’a fait suite au rapport du 3 septembre 1998 du docteur Stecko, avant le rapport du 3 août 2004 du docteur Koppert.

[23] Le docteur Koppert, chirurgien orthopédiste, a rapporté, le 3 août 2005, que l’appelante avait été examinée pour une douleur à l’épaule et au bras. Il a noté qu’elle avait travaillé pour la dernière fois en août 2002, dans une cantine. Il a spécifié qu’elle avait subi une opération à l’épaule droite en octobre 2002 en raison de changements dégénératifs légers à modérés affectant son articulation acromio-claviculaire. Il a noté que l’appelante fréquentait alors le Collège Saint-Clair et que ses médicaments actuels étaient le Tylenol Extra fort. Il est écrit, dans des rapports subséquents du docteur Koppert, que l’appelante se plaignait d’une douleur à l’épaule gauche, et que des injections de cortisone lui avaient été administrées pour la soulager temporairement. Il a écrit que l’appelante avait subi une décompression sous-acromiale par acromioplastie à l’épaule gauche, le 7 novembre 2005.

[24] Le 13 février 2006, le docteur Koppert a rapporté que l’appelante avait fait des progrès constants au cours des trois mois ayant suivi son opération à l’épaule gauche.

[25] Le 24 octobre 2006, le docteur Koppert a rapporté que l’appelante continuait à éprouver de l’inconfort, un an après son opération à l’épaule gauche. Il a noté qu’elle avait une légère névrite cubitale avec des symptômes intermittents et qu’elle n’avait aucun déficit neurologique important. Il a rapporté que l’appelante n’avait pas travaillé longtemps et que, si elle reprenait un emploi, elle allait avoir besoin de restrictions appropriées afin de protéger ses épaules, son d’épicondylite médicale, et sa névrite cubitale gauche. Il a noté que l’appelante avait reçu son congé et n’était plus prise en charge.

[26] Le dossier contient différents rapports ayant été produits après le rapport du 24 octobre 2006 du docteur Koppert. Tous les rapports ont été examinés. Comme la PMA de l’appelante s’est terminée le 31 décembre 1998, les rapports portant sur la nature prolongée de ses problèmes au coude et à l’épaule droite, qui étaient présents avant l’échéance de sa PMA, sont pertinents. Les autres rapports, qui traitaient de sa douleur au dos, au genou et à l’épaule gauche et de son syndrome du canal carpien, ne sont pas pertinents puisque ces problèmes sont apparus après l’échéance de la PMA de l’appelante.

[27] Il a été demandé, au représentant de l’appelante, s’il y avait des rapports médicaux au dossier qui traitaient de la capacité de travail de l’appelante durant sa PMA, ou si de tels rapports existaient. Il a affirmé qu’il y avait des rapports de l’époque de la PMA qui traitaient de restrictions permanentes quant à l’utilisation de son membre supérieur droit. Il a reconnu que le rapport du médecin de famille de l’appelante, produit en date du 10 août 2015 — plus de 17 ans après l’échéance de sa PMA —, était le seul autre rapport qui traitait de la capacité de travail de l’appelante.

Observations

[28] L’appelante prétend qu’elle est admissible à une pension d’invalidité parce que son invalidité est à la fois grave et prolongée. Elle affirme qu’elle souffrait d’une douleur aux épaules et aux coudes avant d’arrêter de travailler à l’usine en octobre 1995, et qu’elle est aussi atteinte de douleurs au poignet, à la hanche gauche et au bas du dos, qui sont apparues après l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 1998, et qu’il lui est donc impossible de travailler sur une base régulière depuis octobre 1995, peu importe l’emploi.

[29] L’intimé a soutenu que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité parce qu’elle n’était pas atteinte d’une invalidité grave et prolongée à l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 1998, ou avant cette date.

Analyse

Critère d’admissibilité à une pension d’invalidité

[30] L’appelante doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable, soit selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était invalide au sens du RPC à l'échéance de sa PMA ou avant cette date.

[31] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Pour être admissible à une telle pension, un requérant doit :

  1. a) ne pas avoir atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne pas toucher une pension de retraite du RPC;
  3. c) être invalide;
  4. d) avoir versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la PMA.

[32] Conformément à l’alinéa 42(2)a) du RPC, une personne est considérée comme invalide si elle est déclarée atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Grave

[33] L’appelante a arrêté de travailler dans une usine d’assemblage de véhicules automobiles en octobre 1995 en raison d’une douleur à son épaule droite et aux coudes. Elle a ensuite fréquenté l’école de façon régulière pendant cinq ans, de 1996 à 2001. Selon la preuve de l’appelante, elle allait à l’école de cinq à six heures par jour, cinq jours par semaine, et faisait aussi de cinq à six heures de devoirs par jour après ses cours. Elle a terminé son programme d’équivalences secondaires et a obtenu un diplôme d’études collégiales en gestion.

[34] Dans Stratton c. MDS (17 octobre 2006), CP 24370 (CAP), la Commission d’appel des pensions a conclu que le fait que monsieur Stratton avait fréquenté l’école pendant deux ans révélait qu’il était capable de faire du travail sédentaire ou léger.

[35] Après cinq ans de perfectionnement scolaire, l’appelante a obtenu un emploi manuel dans des cafétérias/cantines en 2002. Pendant six mois, elle a occupé cet emploi qu’elle a qualifié d'exigeant, et qui supposait de cuisiner, de nettoyer, de rester debout longtemps et de soulever des objets. Selon la preuve de l’appelante, on lui donnait des quarts de cinq à huit heures chacun quatre jours par semaine en 2002, et elle travaillait toujours les quarts prévus et faisait même des heures supplémentaires, lorsqu’elles étaient disponibles. Elle a témoigné qu’elle était capable de s’acquitter des tâches de son poste dans les cafétérias/cantines. Elle avait arrêté de travailler vu l’imminence de son opération à l’épaule.

[36] Le critère relatif à la gravité doit être évalué dans un contexte réaliste (Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248). Cela signifie que le Tribunal doit, pour déterminer si une personne est atteinte d’une invalidité grave, tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie.

[37] Le critère permettant d’évaluer si une invalidité est « grave » ne consiste pas à déterminer si la personne souffre de graves affections, mais plutôt à déterminer si son invalidité l’empêche de gagner sa vie. La gravité d’une invalidité n’est pas fondée sur l’incapacité d’une personne d’occuper son emploi habituel, mais plutôt sur son incapacité de détenir une occupation véritablement rémunératrice (Klabouch c. Canada (Développement social), 2008 CAF 33).

[38] Dans Watson c. MDRH (29 septembre 1999), CP 8040 (CAP), la Commission d’appel des pensions examiné un appel formé par monsieur Watson, qui souffrait d’une importante blessure au genou, entraînant douleur et déséquilibre. Avant sa blessure, monsieur Watson travaillait comme ouvrier. La Commission d’appel des pensions a déclaré ceci : « […] [O]n ne peut s’attendre à ce que M. Watson soit capable d’exercer une activité physique épuisante. Sa mobilité est sérieusement limitée. […] [U]n genou défectueux ne semble guère une raison suffisante pour exclure une personne de tous les emplois. Des travailleurs avec un bras ou une jambe en mauvais état, et même dans certains cas totalement inutilisable, réussissent à se trouver un travail adapté. » La Commission d’appel des pensions a conclu que l’incapacité de monsieur Watson, qu’elle avait jugée chronique et de nature prolongée, n’était pas grave au point de constituer une invalidité au sens du RPC.

[39] Dans Butler c. MDS (27 avril 2007), CP 21630 (CAP), la Cour d’appel des pensions s’est penchée sur un appel formé par madame Spencer, qui souffrait de douleur chronique au cou, aux épaules et au dos. La Commission d’appel des pensions s’est exprimée comme suit : « Comme la Commission l’a souvent conclu dans le passé, la douleur chronique ou la fibromyalgie ne constituent pas à proprement parler des affections invalidantes au point d’empêcher un patient d’effectuer quelque travail que ce soit. En effet, comme on l’a également constaté, la vaste majorité des personnes atteintes sont en mesure de continuer à travailler, maîtrisant leur douleur grâce à des médicaments, à des traitements passifs, à la pratique d’exercices réguliers et, dans certains cas, à des thérapies visant le contrôle de la douleur. »

[40] La question que doit trancher le Tribunal n’est pas de savoir si l’appelante est présentement atteinte d’une invalidité grave et prolongée ni de savoir si elle l’est devenue après l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 1998. La question est de savoir si l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée avant l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 1998.

[41] Aucun rapport médical produit à l’époque de la PMA du 31 décembre 1998 ne traite de la capacité de travail de l’appelante, mis à part de certaines limitations/restrictions fonctionnelles touchant ses épaules et son coude droit.

[42] L’appelante est parvenue à terminer un long programme de perfectionnement scolaire qu’elle avait commencé en 1996, soit avant l’échéance de sa PMA du 31 décembre 1998, et poursuivi pendant cinq ans et demi, durant lesquels elle a terminé un programme d’équivalences secondaires et obtenu un diplôme collégial en finances internationales. L’appelante a par la suite occupé régulièrement un emploi pendant six mois, qu’elle a quitté en raison d’une intervention chirurgicale imminente.

[43] Le Tribunal a conclu que la participation de l’appelante à un programme de perfectionnement scolaire de cinq ans et demi et sa réussite de celui-ci, ainsi que l’emploi manuel de rythme intensif qu’elle a subséquemment occupé pendant six mois, démontrent qu’elle possédait une capacité de travail à l’époque de sa PMA et par la suite. Le Tribunal a conclu que l’état de santé de l’appelante ne l’empêchait pas de faire du travail de type léger ou sédentaire à l’échéance de sa PMA ou avant cette date. Le Tribunal a donc conclu que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave à l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 1998, ou avant cette date.

[44] L’état d’un requérant doit être évalué dans son ensemble. Toutes les détériorations doivent être examinées, pas seulement les détériorations les plus importantes ou la détérioration principale (Bungay c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 47).

[45] Le Tribunal convient que l’état d’un requérant doit être évalué dans son ensemble. Cela dit, les détériorations à prendre en considération sont celles qui existaient à l’échéance de la PMA du requérant ou avant cette date, et non celles qui sont apparues après sa PMA.

[46] Pour conclure que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave, le Tribunal a tenu compte des facteurs établis dans Villani, notamment du fait que l’appelante était relativement jeune a l’échéance de sa PMA (41 ans), de sa vaste expérience de travail, de sa maîtrise de l’anglais et de ses études notables. Il est aussi noté dans Villani que quiconque éprouve des problèmes de santé n’a pas forcément droit à une pension d’invalidité. La décision précise qu’une preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu’une preuve des efforts déployés pour trouver un emploi et de l’existence des possibilités d’emploi. À cet égard, l’appelante a réussi à terminer un long programme de recyclage, ce que le Tribunal estime comparable à une capacité d’occuper un emploi de type sédentaire, et être la preuve de cette capacité, et a travaillé régulièrement pendant plusieurs mois par la suite. Rien ne révèle que l’appelante a été incapable de trouver et de conserver un emploi pour des raisons de santé à l’époque de sa PMA ou depuis celle-ci.

[47] Le Tribunal reconnaît que la douleur chronique de l’appelante donne lieu à certaines limitations. Comme l’ont noté les décisions Watson c. MDRH et Butler c. MDS, la vaste majorité des personnes atteintes de douleur chronique, ou vivant avec un bras en mauvais état, réussissent à trouver un emploi adapté et sont en mesure de continuer à travailler, maîtrisant leur douleur grâce à des médicaments, à des traitements, à la pratique d’exercices réguliers et, dans certains cas, à des thérapies visant le contrôle de la douleur. 

[48] C’est à l’appelante qu’il incombe de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle est admissible à une pension d’invalidité du RPC. Le Tribunal est d’avis que l’appelante n’est pas parvenue à démontrer qu’elle était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 1998, ou avant cette date. Le Tribunal conclut que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave à l’échéance de sa PMA ou avant cette date.

Prolongée

[49] Comme le Tribunal a conclu que l’invalidité n’était pas grave, il n’est pas nécessaire de déterminer si elle était de nature prolongée.

Conclusion

[50] L’appel est rejeté.

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