Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demanderesse cherche à obtenir la permission d’en appeler relativement à la décision de la division générale datée du 30 janvier 2017, qui a conclu que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. La division générale a également conclu que la demanderesse n’était pas atteinte d’une invalidité grave au sens du Régime de pensions du Canada à la fin de sa période minimale d’admissibilité le 31 décembre 2016. La demanderesse soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Analyse

[3] Au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il est prévu que les seuls moyens d’appels sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[4] Avant d’accorder la permission d’en appeler, il me faut être convaincue que les motifs pour en appeler se rattachent au moins à l’un des moyens d’appel énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale a confirmé cette approche dans la décision Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300.

a) Erreur de droit prétendue

[5] La demanderesse fait valoir que la division générale a commis une erreur de droit, mais elle n’a pas précisé son allégation à cet égard autrement qu’en déclarant que la division générale a fondé sa décision [traduction] « sur le mauvais article de la demanderesse ». La demanderesse voulait probablement dire [traduction] « le mauvais article du Régime de pensions du Canada ». La division générale a renvoyé aux alinéas 44(1)b) et 42(2)a) du Régime de pensions du Canada comme étant les dispositions qui prévoient les critères d’admissibilité à la pension d’invalidité et qui définissent l’invalidité grave et prolongée. Pour évaluer l’admissibilité de la demanderesse à la pension d’invalidité, la division générale s’est fondée sur ces alinéas. Je ne constate aucune erreur de la part de la division générale en me fondant sur ces alinéas.

[6] J’ai également examiné la décision de la division générale et je ne constate aucune erreur à la lecture du dossier. La division générale a bien évalué la question de savoir si la demanderesse était atteinte d’une invalidité grave et prolongée. Elle a examiné l’ensemble de la preuve médicale et elle a évaluait la question de savoir si l’invalidité de la demanderesse rendait celle-ci régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[7] La demanderesse laisse entendre que la division générale n’a tenu compte ni fait qu’elle est incapable de demeurer en position assise ou debout ou d’accomplir une tâche de nature répétitive, ni du fait que sa douleur nuit à sa concentration.

[8] Il est bien établi dans la jurisprudence qu’un décideur n’est pas tenu de mentionner chaque élément de preuve dont il dispose, car le décideur est présumé avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve : Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82. Cette présomption peut être réfutée si un demandeur peut établir que la preuve avait une telle valeur probante que le décideur se devait de l’analyser.

[9] Cela étant dit, je constate que la division générale a bel et bien tenu compte de la preuve. Elle a énoncé le témoignage de la demanderesse à cet égard et a souligné que certains éléments de preuve de la demanderesse n’étaient pas appuyés par le dossier documentaire. Au paragraphe 25, la division générale a souligné le questionnaire de la demanderesse dans lequel elle avait déclaré qu’elle pouvait demeurer en position assise pendant trois ou quatre heures. La division générale a également fait remarquer que, selon la demanderesse, sa concentration était minée par ses médicaments contre la douleur, et ce même si elle avait en fait déclaré que sa concentration [traduction] « pouvait être influencée par la consommation de médicaments contre la douleur » (GD2-70). La demanderesse n’a fait aucunement mention de problèmes relativement à la position debout à ce moment-là. Au paragraphe 54, la division générale a souligné que, lorsque le médecin de famille de la demanderesse a produit un rapport d’état de santé en 2015, il n’était aucunement fait mention de problème concernant la concentration ou la mémoire.

[10] Même s’il y avait d’autres éléments de preuve concernant la capacité de la demanderesse à demeurer en position assise et debout ou à se concentrer, la division générale a clairement préféré une preuve considérée comme étant indépendante, fiable, corroborante et non intéressée. Il est évident que la division générale a préféré la preuve de la demanderesse dans le questionnaire relativement à sa capacité à demeurer en position assise et debout et que, même si la demanderesse a déclaré dans le questionnaire que les médicaments contre la douleur pouvaient nuire à sa concentration, la division générale a conclu qu’il ne s’agissait pas d’un problème marqué, car le médecin de famille l’aurait souligné dans le rapport d’état de santé.

[11] La division générale a également examiné l’invalidité du demandeur dans un contexte réaliste. La division générale a également tenu compte de la question de savoir si la demanderesse avait raisonnablement suivi les recommandations de traitement et si le refus de suivre les recommandations était déraisonnable, et de l’incidence sur son état de santé.

[12] La division générale a cerné les articles applicables du Régime de pensions du Canada et elle a bien effectué son évaluation de la demanderesse.

[13] Essentiellement, la demanderesse est en désaccord avec l’évaluation et l’interprétation de la preuve médicale par la division générale et elle me demande d’effectuer ma propre évaluation. Une certaine mesure de déférence s’impose à l’égard de la division générale. En tant que principal juge des faits, la division générale est la mieux placée pour évaluer la preuve et en tirer des conclusions, et pour déterminer si, après avoir tenu aussi compte de la preuve médicale de façon cumulative, elle pouvait conclure que l’invalidité d’un appelant était grave et prolongée à la date marquant la fin de la période minimale d’admissibilité ou avant cette date, et qu’elle allait vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. De plus, le paragraphe 58(1) de la LMEDS prévoit des moyens d’appel limités seulement. Il n’autorise pas une nouvelle appréciation ou évaluation de la preuve : Tracey, précité.

a) Prétendue inobservation d’un principe de justice naturelle

[14] La demanderesse affirme que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, a outrepassé sa compétence ou a refusé de l’exercer : Plus particulièrement, elle prétend qu’un document et qu’un rapport médical et qu’elle avait présentés ne figuraient pas dans le dossier d’appel dont disposait la division générale.

[15] Il n’était pas évident de connaître les documents qui ne figuraient pas dans le dossier d’appel. La division générale a déclaré que, à titre de question préliminaire, la demanderesse a tenté de présenter deux ensembles de documents au Tribunal. Ces ensembles comprenaient des rapports du physiothérapeute de la demanderesse pour la période du 22 mars 2016 au 19 avril 2016 (GD10), et les dossiers de la clinique de traitement de la douleur de Dr Cheema pour la période d’octobre 2013 à août 2016 (GD11). La division générale a examiné ces dossiers et a conclu qu’ils étaient pertinents et elle les a donc admis à titre de preuve. Évidemment, ces documents ont été présentés à la division générale. En effet, la division générale a renvoyé à ces documents tout au long de la décision, plus particulièrement aux paragraphes 21, 27, 31, 32, 33 et 34.

[16] La demanderesse a joint une copie d’une note médicale datée du 22 février 2017 et rédigé par Dr Gupta à un rapport d’imagerie par résonance magnétique produit le 25 janvier 2017. Elle laisse entendre que ces deux dossiers auraient pu avoir un effet persuasif sur la division générale. Il semble que la demanderesse laisse entendre que ces deux documents particuliers ne figuraient pas dans le dossier d’audience dont disposait la division générale.

[17] Dans sa note du 22 février 2017, Dr Gupta a déclaré ce qui suit au sujet de la demanderesse : [traduction] « […] est incapable d’effectuer tout type d’emploi en raison de ses graves troubles de douleur chronique. Les restrictions et les limitations sont permanentes. » Il semble que des extraits de la note aient été coupés (AD1A-6).

[18] L’examen par IRM a été comparé à un examen antérieur effectué le 23 avril 2010. Selon le récent examen de janvier 2017, les conclusions étaient pire aux niveaux des vertèbres C4-C5, C5-C6 et C6-C7 de la colonne cervicale de la demanderesse.

[19] L’audience devant la division générale a eu lieu le 9 janvier 2017. Le rapport d’examen par IRM et la note médicale de Dr Gupta ont été produits après l’audience et, dans le cas de la note de Dr Gupta, après que la division générale avait déjà rendu sa décision. En fait, il semble que la demanderesse a d’abord produit ces documents à la mi-avril 2017, soit environ deux mois et demi après que la division générale avait rendu sa décision. Rien ne démontre que la demanderesse avait déjà demandé de présenter des dossiers médicaux supplémentaires ou qu’elle avait informé la division générale qu’elle prévoyait obtenir et présenter des dossiers médicaux supplémentaires. Par conséquent, je ne vois aucun fondement dans les allégations de la demanderesse selon lesquelles la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou qu’elle a autrement été privée de la chance de présenter sa cause de façon complète et équitable parce que certains des dossiers médicaux ne figuraient pas dans le dossier d’audience dont disposait la division générale. La division générale n’avait pas accès à ces dossiers médicaux au moment de l’audience ou peu après celle-ci pour la simple raison qu’ils n’avaient pas encore été produits. Je ne suis pas convaincue qu’un appel fondé sur ce moyen a une chance raisonnable de succès.

b) Nouveaux éléments de preuve

[20] Au même moment, la demanderesse reconnaît que l’examen par IRM effectué le 24 janvier 2017 constitue de nouveaux éléments de preuve.

[21] Le dépôt de nouveaux éléments de preuve n’est généralement pas permis en appel, conformément à l’article 5 de la LMEDS. Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. O’Keefe, 2016 CF 503, au paragraphe 28, le juge Manson a conclu ce qui suit :

Le critère pour obtenir la permission d’en appeler et la nature même de l’appel ont changé en vertu des articles 55 et 58 de la LMEDS. À la différence d’un appel présenté devant l’ancienne [Commission d’appel des pensions], qui était une audience de novo, un appel devant la [division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale] n’autorise pas le dépôt de nouveaux éléments de preuve et se limite aux trois moyens d’appel énumérés à l’article 58.

[22] Dans l’affaire Cvetkovski c. Canada (Procureur général), 2017 CF 193, le juge Russel a conclu au paragraphe 31 que [traduction] « de nouveaux éléments de preuve sont acceptés qu’en des situations limitées [...] ». Plus récemment, dans la décision Glover v. Canada (Procureur général), 2017 CF 363, la Cour fédérale a adopté et confirmé les motifs établis dans O’Keefe, et concluait que la division d’appel n’avait pas erré en refusant de tenir compte des nouveaux éléments de preuve liés à cette affaire dans le contexte d’une demande de permission d’en appeler. La Cour a aussi souligné que la LMEDS prévoit à l’article 66 les dispositions permettant à la division générale d’annuler ou de modifier une décision pour laquelle de nouveaux éléments de preuve sont présentés par l’entremise d’une demande.

[23] Selon les faits dont je dispose, je ne suis pas convaincue qu’il existe des motifs me convainquant d’admettre les dossiers médicaux, car rien ne démontre que ceux-ci constituent une des exceptions prévues. Comme la Cour fédérale l’a conclu, un appel devant la division d’appel ne permet généralement pas la présentation de nouveaux éléments de preuve.

[24] Je souligne que, dans l’affaire Glover, la Cour fédérale a déclaré que la LMEDS prévoit des dispositions à l’article 66 de la LMEDS afin que la division générale puisse annuler ou modifier une décision si de nouveaux éléments de preuve sont présentés dans le cadre d’une demande. Toutefois, des délais et exigences très stricts sont prévus à l’article 66 de la LMEDS. Par exemple, l’article exige aussi qu’une demande démontre que les faits nouveaux sont des faits essentiels qui, au moment de l’audience, ne pouvaient être connus malgré l’exercice d’une diligence raisonnable. Le paragraphe de la LMEDS prévoit qu’une demande d’annulation ou de modification doit être présentée au plus tard un an après la date où la décision en question avait été communiquée.

Conclusion

[25] Compte tenu des facteurs susmentionnés, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

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