Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 30 janvier 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a statué qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) n’était pas payable à la demanderesse. L’audience a été tenue au moyen de questions et de réponses écrites, soit le mode d’audience réclamé par la demanderesse.

[2] Le Tribunal a conclu que la période minimale d’admissibilité de la demanderesse (PMA) avait pris fin le 31 décembre 2011, que la demanderesse avait arrêté de travailler en mai 2009 en raison d’un traumatisme médullaire, et que, même si elle avait fait du réentraînement au travail pour son ancien emploi, ce qui avait été infructueux, elle n’avait pas essayé de reprendre un emploi, quel qu’il soit, après avoir subi son traumatisme médullaire. Le Tribunal a conclu que, même si la preuve médicale révélait des restrictions qui avaient une incidence sur la capacité de la demanderesse à travailler, la preuve ne permettait pas de conclure qu’elle était incapable d’occuper tous les emplois, notamment les options d’emploi sédentaire.

[3] La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler (demande) à la division d’appel du Tribunal le 27 mars 2017. La demande était incomplète comme les moyens d’appel que la demanderesse souhaitait invoquer n’étaient pas clairs. Le 31 mars 2017, le Tribunal a demandé à la demanderesse de fournir de plus amples renseignements de façon à compléter sa demande, et le Tribunal a reçu plus d’information de sa part en conséquence, le 20 avril 2017.

Question en litige

[4] La division d’appel doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Permission d’en appeler

[5] Conformément aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[6] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que la demande de permission d’en appeler est rejetée si la division d’appel est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Une cause défendable en droit est une cause qui a une chance raisonnable de succès (voir Fancy c. Canada (Procureur général), 201 CAF 63).

Moyens d’appel

[7] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[8] La demanderesse soutient que la division générale a (i) ignoré la preuve médicale qui appuyait son admissibilité à une pension d’invalidité; (ii) manqué à un principe de justice naturelle du fait qu’elle n’a pas communiqué avec son témoin proposé et qu’elle ne lui a pas posé de questions; et (iii) fourni des motifs inadéquats, puisque le paragraphe 34 de sa décision semble être un copier-coller d’un gabarit : il fait référence à son invalidité en utilisant le mauvais pronom.

Analyse

Erreur reprochée : preuve médicale ignorée

[9]  La demanderesse prétend que la division générale a ignoré la preuve médicale qui appuyait son admissibilité à une pension d’invalidité. Elle soutient que la division générale est arrivée à la conclusion qu’elle était capable d’occuper un emploi sédentaire sans tenir compte de la preuve médicale portée à sa connaissance, et qu’elle a donc une chance raisonnable de succès de prouver que l’erreur décrite à l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS a été commise.

[10] Plus précisément, la demanderesse soutient que la division générale n’a pas tenu compte du rapport médical daté du 12 novembre 2010 de son médecin de famille, le docteur Campbell. La lettre conclut que la demanderesse :

[traduction]

[…] a participé à un programme d’enseignement tertiaire, et les résultats démontrent qu’elle a toujours des symptômes et des restrictions fonctionnelles. Elle n’a pas atteint les objectifs requis pour les exigences de l’emploi. J. S. est incapable d’occuper tout type de travail, en raison de son invalidité permanente et de son incapacité à soulever des charges, à se tenir debout et à s’asseoir pour des périodes prolongées. [mis en évidence par la soussignée]

[11] La division générale a mis l’accent sur le rapport et les conclusions du docteur Campbell, comme on le voit ci-dessus, au paragraphe 14 de sa décision, dans la section de la preuve. La division générale a affirmé ce qui suit au paragraphe 29 de sa décision :

[traduction]

Le Tribunal note que le médecin de famille de l’appelante a fait savoir en novembre 2010 qu’elle était incapable de reprendre tout type d’emploi. Dans le rapport de congé produit en août 2010 par Summit Physiotherapy, il était écrit que l’appelante avait participé à un programme de réadaptation pendant huit semaines et à un programme de réentraînement au travail pendant quatre semaines, et que, même si ses symptômes s’étaient améliorés, elle n’avait pas atteint les objectifs requis pour pouvoir reprendre les fonctions de son ancien emploi. La preuve démontre aussi que le médecin de famille de l’appelante rapportait encore en février 2014 que l’appelante était incapable d’occuper tout type d’emploi qui nécessite de rester assis ou debout de façon prolongée ou de soulever un poids supérieur à 20 livres, ce qui révèle au Tribunal que l’état de l’appelante avait connu une certaine amélioration depuis sa PMA. Le Tribunal juge que, même si la preuve révèle que l’appelante était incapable de reprendre son ancien emploi, la preuve médicale ne permet pas de conclure qu’elle était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Bien que les médecins de l’appelante ont établi des limites quant à ses capacités relatives au travail, le Tribunal ne peut conclure avec certitude qu’elle est incapable d’occuper tout type de poste, y compris des postes sédentaires. [mis en évidence par la soussignée]

[12] Le docteur Campbell a clairement fait savoir que la demanderesse était incapable de faire tout type de travail, mais la division générale a conclu que la preuve médicale ne révélait pas qu’elle était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. L’opinion exprimée par le docteur Campbell en date du 12 novembre 2010 représentait à tout le moins une certaine preuve que la demanderesse était incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Il est difficile de dire la valeur exacte que la division générale a accordée à cette preuve, et pourquoi. On peut affirmer que la conclusion de la division générale relativement à la capacité de travail de la demanderesse représentait une erreur conformément au sous-alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS. La division générale pourrait avoir tiré cette conclusion sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, soit de la preuve du 12 novembre 2010 du docteur Campbell.

Autres erreurs présumées

[13] Comme la demanderesse a soulevé une erreur possible conformément au paragraphe 58(1) de la Loi MEDS, la division d’appel n’a pas besoin, à ce stade, d’examiner les autres motifs qu’elle a invoqués. En application du paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS, il n’est pas nécessaire d’examiner individuellement chacun des motifs d’appel pour les accepter ou les rejeter (voir Mette v. Canada (Procureur général), 2016 CAF 276).

[14] La demanderesse n’est pas restreinte dans sa capacité à invoquer les autres motifs qu’elle a soulevés au titre des alinéas b) et c) ci-dessus.

[15] La demanderesse n’est pas restreinte dans sa capacité à invoquer les autres motifs qu’elle a soulevés au titre des alinéas b) et c) ci-dessus. La division d’appel pourrait tirer profit d’observations supplémentaires sur ces moyens, y compris des observations relatives à l’applicabilité des causes Kouama c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 1852, et Newfoundland and Labrador Nurses' Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), [2011] 3 RCS 708, 2011 CSC 62, [2011] 3 RCF 708, et tout autre jurisprudence pertinente.

Conclusion

[16] Vu le caractère intempestif de certaines des observations que la demanderesse a présentées à la division d’appel, et le fait qu’elle n’est plus représentée, il convient de préciser, avant que cette affaire se poursuive, que de nombreux requérants vivent avec des limitations (et/ou de la douleur) associées à leurs incapacités, et se voient refuser une pension d’invalidité en application du RPC. Cela ne remet en cause ni les personnes ni leur état de santé. Il s’agit uniquement d’un effet de la norme élevée à laquelle les requérants doivent satisfaire afin d’établir que leur invalidité est « grave et prolongée » au sens de la loi, et ainsi d’être admissibles à une pension d’invalidité (voir Gaudet c. Canada (Procureur général), 2013 CAF 254).

[17] La demanderesse a une chance raisonnable de succès en vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. La demande est accueillie. La présente décision accordant la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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