Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Décision

La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[1] Le demandeur cherche à interjeter appel de la décision de la division générale dans laquelle la division générale avait conclu que le défendeur souffrait d’une invalidité grave et prolongée et qu’il était admissible à une pension d’invalidité du RPC.

[2] Le défendeur avait suivi plusieurs blessures lors d’un accident de la route, et la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu qu’il continue de souffrir de douleur chronique et de limitations physiques qui le rendent incapable de régulièrement détenir une occupation véritablement rémunératrice. Le défendeur avait le fardeau de prouver qu’il était invalide le 31 décembre 2012 ou avant cette date qui est la date de fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA) fondée sur ses cotisations au RPC. La division générale avait conclu que le défendeur s’était acquitté du fardeau de la preuve.

[3] Le demandeur n’est pas d’accord avec les conclusions de la division générale selon lesquelles le défendeur n’a pas la capacité de travailler régulièrement. Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur en concluant que le défendeur était incapable d’exercer un emploi sédentaire ou comportant des tâches légères, malgré le fait qu’il était incapable de fréquenter l’université à temps plein avec succès.

[4] Plus précisément, le demandeur soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, conformément à l’alinéa 58(10)c) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), car elle n’a pas tenu compte des éléments de preuve au dossier dont elle était saisie qui portaient sur le taux horaire de présence du défendeur aux cours, son temps de déplacement pour se rendre à ses cours ainsi que le temps qui allouait à ses études et à sa préparation. Le demandeur soutient également que la division générale a accordé trop de poids au fait que le défendeur avait reçu plusieurs mesures d’adaptation de l’université afin de terminer ses études, et il cite que toutes les mesures d’adaptation qu’il a reçues seraient d’ordinaire fournies également dans un environnement de travail.

Question en litige

[5] L’argument du demandeur selon lequel l’assiduité du défendeur à l’école démontre une capacité à exercer un emploi sédentaire ou comportant des tâches légères confère-t-il à l’appel une chance raisonnable de succès?

Critère juridique

[6] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS, « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « [e]lle accorde ou refuse cette permission. »

[7] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[8] Aux termes du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Analyse

[9] Le demandeur soutient que le fait que le défendeur ait obtenu avec succès un diplôme universitaire prouve qu’il a une capacité de travail et que la division générale a commis une erreur en concluant que son succès à l’école était possible uniquement grâce aux mesures d’adaptation qu’il avait reçues de la part de l’université. Le demandeur soutient que la division générale a conclu à tort que les mêmes mesures d’adaptation ne seraient pas offertes au défendeur dans la plupart des environnements de travail.

[10] La preuve relative à la scolarité du défendeur est énoncée aux paragraphes 36 à 39 de la décision de la division générale. La division générale a conclu que le défendeur avait fréquenté l’école au début de 2012 et qu’il avait obtenu son diplôme en 2015. La division générale a reconnu que la capacité de fréquenter l’école peut parfois être considérée comme étant des éléments de preuve solide d’une capacité de travail. Cependant, bien qu’il soit vrai que les études puissent parfois équivaloir à une capacité de travailler, l’on ne peut pas conclure d’emblée que les études équivalent toujours à une capacité de travail. Évaluer une capacité de travail à la lumière de la présence d’une personne à l’école dépend toujours des faits propres à chaque cas.

[11] En l’espèce, la division générale a tenu compte d’un certain nombre de facteurs au moment d’évaluer la gravité de l’invalidité du défendeur. La division générale n’a pas considéré les études du défendeur isolément ou comme étant un facteur déterminant au moment d’évaluer la gravité de son invalidité. La division générale a également évalué les limitations physiques du défendeur, lesquelles ont perduré depuis son accident de la route, et elle a également tenu compte de sa santé mentale selon les rapports. La division générale a conclu que ses conditions physiques et mentales avaient contribué grandement au fait que le défendeur avait besoin de mesures d’adaptation lorsqu’il fréquentait l’école, ainsi qu’au fait que ces conditions limiteraient également de manière considérable la capacité du défendeur d’exercer une occupation rémunératrice de manière régulière et prévisible.

[12] Le demandeur laisse entendre que la division générale a omis de tenir compte du fait que le défendeur, comme le révèlent ses attestations scolaires, devait être présent pour un total de 15 heures en salle de classe et 15 heures de laboratoire par semaine. Le demandeur soutient que cela permet de conclure à une capacité de travail de 25 heures par semaine. En plus des heures de classe, il aurait été tenu de se déplacer pour aller à l’université et d’investir du temps pour étudier et pour se préparer à ses cours. J’estime que la division générale a correctement traité de cette question au paragraphe 59 : [traduction] « [...] l’appelant se présentait à des cours d’une heure avec des pauses entre les cours. Il étudiait à la maison, à son rythme, et ne consacrait pas beaucoup de temps pour étudier. Lorsqu’il revenait à la maison après ses cours, il se reposait pendant 5 à 6 heures. Il ressentait une grande douleur. »

[13] La division générale a également conclu que le défendeur a uniquement été capable de terminer ses études grâce à de grandes mesures d’adaptation pour lui permettre de fréquenter l’école. Au paragraphe 59 de son analyse, le membre note également que, [traduction] « [b]ien qu’il ne soit pas rare que des mesures d’adaptations soit accordées à un étudiant, il n’est pas réaliste de s’attendre à ce qu’une personne reçoive, dans un marché commercial, les mesures d’adaptation accordées à l’appelant – notamment, un stationnement spécial, un mobilier à usage spécial, un logiciel qui lui permet de dicter au lieu de taper et qui lui lit les documents, du temps supplémentaire pour terminer des tâches et la capacité de lire en position allongée comme il le faisait lorsqu’il étudiait à la maison. » Il y a un élément de preuve, sous la forme d’une lettre provenant de l’un de ses professeurs, à l’appui du fait que le défendeur a été incapable de rédiger son examen de mi-session et son examen final dans le cadre de l’un de ses cours à cause de son état de santé, et il a alors été en mesure de terminer le cours grâce à une exemption et la moyenne de ses autres notes dans ce cours.

[14] Le demandeur a fait valoir que le défendeur recevrait des mesures d’adaptation raisonnable dans tout environnement de travail semblable à celles qu’il a reçues à l’école. Le demandeur se fonde sur la Loi canadienne sur les droits de la personne et sur la Loi sur les droits de la personne de l’Île-du-Prince-Édouard pour présenter cet argument. Cependant, j’estime que la division générale s’est basée adéquatement sur l’ensemble de la preuve pour en arriver à sa décision. Bien que tous les employeurs aient l’obligation légale de prendre des mesures d’adaptation « raisonnables » afin de fournir aux personnes ce dont elles ont besoin pour exercer leur travail, j’estime que la division générale n’a pas commis d’erreur en déterminant que les mesures d’adaptation fournies au défendeur étaient « considérables » et nécessaires afin qu’il soit en mesure de terminer ses études et j’estime qu’il ne s’agit pas là d’une déformation ou d’une mauvaise interprétation de la preuve. J’estime également que la division générale n’a pas tiré de conclusions erronées lorsqu’elle a évalué et apprécié la preuve. Il était également du ressort de la division générale, à titre de juge des faits, de conclure que les mesures d’adaptation fournies par l’université dépassaient celles auxquelles l’on pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’un employeur offre dans un environnement de travail compétitif.

[15] Le demandeur a fait valoir que la division générale a conclu à tort que le défendeur n’avait pas la capacité de travailler dans un environnement de travail compétitif de manière régulière et prévisible, ce qui constitue une conclusion de fait erronée, conformément à l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS. J’estime que l’évaluation qu’a faite la division générale de la preuve dont elle était saisie ne constitue pas une conclusion de fait erronée pouvant être considérée comme ayant été tirée de façon abusive ou arbitraire. Je peux uniquement considérer les motifs d’appel correspondant aux moyens d’appel énoncés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. Ce paragraphe ne me permet pas d’examiner ou d’apprécier à nouveau la preuve, et je ne suis pas habilitée à modifier les conclusions de la division générale pour la simple raison que j’aurais tranché la question différemment. C’est le rôle de la division d’appel d’examiner le dossier sous-jacent et de déterminer si la division générale a omis de tenir compte de certains éléments de preuve, si elle a mal interprété la preuve ou si la division générale a fait fi d’éléments de preuve qu’elle aurait dû considérer afin de rendre sa décision. La permission d’en appeler devrait normalement être accordée si cet examen du dossier sous-jacent démontre que la preuve n’a pas fait l’objet d’un examen adéquat (Joseph c. Canada (Procureur général), 2017 CF 391).

[16] Le demandeur ne m’a pas convaincue qu’il y a une cause défendable relative à la question de déterminer si la division générale a commis une erreur en concluant que, malgré le fait que le défendeur fréquentait l’école, il n’avait pas la capacité de travailler. En l’absence de toute preuve d’erreur de fait, je ne modifierai pas la conclusion de la division générale selon laquelle le défendeur a été en mesure de terminer ses études uniquement à cause des mesures d’adaptations considérables. Il ne serait pas capable de travailler de manière régulière et prévisible, car le fait qu’il ait fréquenté l’école avec le type de mesures d’adaptation qu’il a reçues de démontre pas une capacité de travail. La décision de la division générale appartient aux issues possibles et acceptables.

Conclusion

[17] La demande est rejetée.

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