Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision datée du 17 octobre 2016, rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal), dans laquelle il a été déterminé qu’elle était inadmissible à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC).

[2] Conformément au paragraphe 56(1) de la Loi sur le Ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel du Tribunal sans permission. Le paragraphe 58(1) prévoit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Le paragraphe 58(2) prévoit que la demande de permission d’en appeler est rejetée si la division d’appel est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[3] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audition au fond de l’affaire. Ainsi, l’étape de la demande de permission d’en appeler représente un obstacle différent et considérablement moins difficile à franchir qu’un appel sur le fond; la demanderesse doit présenter au moins un moyen d’en appeler prévu au paragraphe 58(1) de la LMEDS qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès, car à cette étape, la demanderesse doit établir sa cause selon la prépondérance des probabilités : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 1999 CanLII 8630 (CF). Dans le contexte de la demande de permission d’en appeler, une chance raisonnable de succès signifie que l’appel proposé pourrait avoir gain de cause sur la base de certains motifs défendables : Osaj c. Canada (Procureur général), 2016 CF 115; Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41.

Décisions antérieures

[4] La demande de pension d’invalidité du RPC de la demanderesse a été rejetée par le défendeur initialement et après révision. La demanderesse a porté cette décision en appel auprès de la division générale.

[5] Dans sa décision, le membre de la division générale a conclu que la date de fin de la période minimale d’admissibilité (PMA) de la demanderesse était le 31 décembre 2016, date qui se situe après l’audience devant la division générale. Le membre a correctement noté que puisque la date de fin de la PMA était dans le futur, elle devait décider s’il était plus probable qu’improbable que la demanderesse soit atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC, à la date de l’audience ou avant cette dateNote de bas de page 1. Le membre a conclu que la demanderesse n’était pas atteinte d’une invalidité grave aux termes du paragraphe 42(2) du RPC et a rejeté l’appel.

Observations

[6] Dans cette demande, l’avocate de la demanderesse soutient que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou qu’elle a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, une allégation qui correspond à l’alinéa 58(1)a) de la LMEDS. Elle soutient également que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire, et sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, une allégation qui correspond à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS.

[7] Plus précisément, l’avocate de la demanderesse soutient que la division générale :

  1. a mal cité la preuve du Dr Veluri en concluant qu’il avait avisé la demanderesse d’aller de l’avant avec les plans portant sur la recherche d’un autre type d’emploi;
  2. a mal cité et a dénaturé la preuve concernant les congés médicaux de la demanderesse, et a particulièrement omis de tenir compte du fait que la demanderesse a reçu des prestations d’invalidité de longue durée (ILD) de l’assurance collective de son employeur jusqu’en janvier 2014;
  3.  a tiré des conclusions défavorables relativement à la sensibilité de la demanderesse au traitement, et ce, en l’absence de tout élément de preuve médicale à l’appui de telles conclusions et à l’encontre d’éléments de preuve accablants à l’appui d’une mauvaise réaction au traitement;
  4. a omis de tenir compte des éléments de preuve de la demanderesse relativement au manque de ressources médicales et financières, ce qui l’empêchait de participer à des séances de counseling ou de gestion de la douleur.

[8] Les allégations a) à c) se rattachent à l’alinéa 58 (1)c) de la LMEDS, car elles constituent des allégations selon lesquelles la division générale aurait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans que la division générale n’ait tenu compte des éléments portés à sa connaissance. La dernière allégation, si elle est établie, constituerait une erreur de droit se rattachant à l’alinéa 58(1)c) ainsi qu’une erreur de droit se rattachant à l’alinéa 58(1)b) de la LMEDS, vraisemblablement fondée sur le fait que les principes prévus par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), [2002] 1 RCF 130, 2001 CAF 248 n’auraient pas été appliqués correctement.

Analyse

Manquement à un principe de justice naturelle

[9] D’abord, pour ce qui est de l’allégation selon laquelle la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou qu’elle a commis une erreur de compétence, il incombe à la demanderesse d’établir que cet argument a une chance raisonnable de succès. Cependant, la demanderesse n’a présenté aucune observation sur ce que la division générale aurait censé avoir fait qui irait à l’encontre de l’alinéa 58(1)a) de la LMEDS, et n’a fourni aucun élément à l’appui de cette allégation. Je conclus que cet argument n’a aucune chance raisonnable de succès.

[10] J’examinerai maintenant chacune des allégations précises qui ont été décrites au paragraphe 7 précédent.

Preuve du Dr Veluri

[11] La demanderesse soutient que la division générale [traduction] « a mal cité la preuve du Dr Veluri lorsqu’elle a conclu qu’il avait avisé la patiente d’aller de l’avant avec les plans portant sur la recherche d’un autre type d’emploi ».

[12] Le Dr Veluri, un psychiatre, a rencontré la demanderesse à une reprise, et a procédé à un examen médical indépendant. Dans son rapport daté du 14 avril 2016, sous la section [traduction] « Recommandations de traitement », il a écrit ce qui suit :

[traduction]

La psychothérapie devrait mettre l’accent sur des stratégies cognitivo-comportementales et de soutien. L’accent devrait être mis sur elle et sur l’acceptation de sa situation actuelle, et aller de l’avant avec ses plans d’avenir, ce qui comprend également le fait de se chercher un autre type d’emploi. La psychothérapie devrait également l’aider à gérer ses symptômes liés à la douleur. La meilleure façon de le faire est à l’aide d’un programme de traitement de la douleur, lequel tient également compte d’autres modalités de gestion de la douleur comme les médicaments et les injectionsNote de bas de page 2. [mis en évidence par la soussignée]

[13] Le membre de la division générale a traité de ce problème à deux endroits de ses motifs. Au paragraphe 33 de la section de ses motifs qui portait sur l’examen de la preuve documentaire, le membre a affirmé ce qui suit :

[traduction]

[33] Le Dr Veluri est d’avis que la perte de son emploi a causé sa dépression, son anxiété et sa frustration, et a changé le cours de sa vie en raison de la perte de poste dans une petite ville, ainsi que financièrement. Elle prend une petite dose d’Effexor à laquelle elle ne réagit pas bien. Il a été recommandé d’augmenter la dose graduellement et d’ajouter du clonazépam. Elle devrait mettre l’accent sur des stratégies cognitivo-comportementales et de soutien, et devrait aller de l’avant avec ses plans d’avenir, ce qui comprend également le fait de se chercher un autre type d’emploi. La psychothérapie devrait l’aider à gérer sa douleur, et un programme de traitement de la douleur est recommandé. Elle est présentement totalement invalide, ce qui l’empêche de détenir toute occupation rémunératrice, et cela perdurera pendant un certain temps. [mis en évidence par la soussignée]

[14] Au paragraphe 48, dans la section de l’analyse de ses motifs, le membre a écrit ce qui suit :

[traduction]

[48] Le Dr Veluri a été consulté à une reprise pour l’obtention d’un avis médicojuridique. Il n’est pas le spécialiste traitant en psychologie. Il a noté qu’elle devrait mettre l’accent sur la TCC [thérapie cognitivo-comportementale] et sur des stratégies de soutien, ce qu’elle fait. Il a également noté qu’elle devrait aller de l’avant avec ses plans d’avenir, ce qui comprend se chercher un autre type d’emploi. Il a recommandé un programme de traitement de la douleur, et à ce sujet, l’appelante a témoigné qu’elle n’avait aucun plan. [mis en évidence par la soussignée]

[49] Le Dr Veluri a affirmé qu’elle était totalement invalide, ce qui l’empêche de détenir toute occupation rémunératrice, et que cela perdurera pendant un certain temps, avec des chances d’amélioration qui dépendront de la mise en œuvre des recommandations de traitement. Le Tribunal n’accepte pas le fait que l’appelante ne répondait pas au traitement, l’une des raisons principales sur laquelle était fondé l’avis du Dr Veluri. Aussi, l’appelante ne s’est pas conformée à ses recommandations, puisqu’elle n’avait aucun plan pour une clinique antidouleur et qu’elle ne reçoit pas d’autres traitements psychologiques.

[15] Je ne constate aucune erreur susceptible de révision dans la façon dont le membre a fait référence à la preuve du Dr Veluri. De plus, pour que cela corresponde à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS, il aurait fallu que la division générale ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, ce qui, à mon avis, ne s’est pas produit. Le membre n’a fait aucune référence à la question de savoir si le Dr Veluri avait recommandé un retour un travail dans son analyse et sa conclusion pour tenter de déterminer si la demanderesse était atteinte d’une invalidité grave, aux paragraphes 50 à 57 de ses motifs. Par conséquent, elle n’a pas fondé sa conclusion concernant la question du caractère grave sur une constatation faite en lien avec la preuve du Dr Veluri. J’estime que la demanderesse n’a pas soulevé de cause défendable en ce qui a trait à cet aspect de la preuve.

Congés médicaux et prestations d’ILD de l’employeur

[16] L’avocate de la demanderesse soutient que le membre de la division générale a déformé et mal interprété la preuve portant sur les congés médicaux de la demanderesse, et a particulièrement omis de tenir compte du fait que la demanderesse a reçu des prestations d’ILD de l’assurance collective de son employeur jusqu’en janvier 2014. L’avocate de la demanderesse soutient que ces prestations faisaient l’objet d’un différend à la date de l’audience devant la division générale.

[17] Le membre de la division générale a fait référence à la question de l’assiduité au travail de la demanderesse dans son examen de la preuve documentaire, où elle a indiqué ce qui suit :

[traduction]

[28] Dans un questionnaire de l’employeur reçu le 6 novembre 2015 provenant de l’Hôpital de S. R. F., il est noté que l’appelante a travaillé à temps plein du 10 juillet 1989 jusqu’à la date de fin de paiement, soit le 19 août 2013, et a été mise à pied. Son assiduité était bonne, et aucune absence n’a été notée pour cause médicale. La qualité de son travail était satisfaisante. Elle n’avait besoin d’aucune mesure d’adaptation particulière ou d’aide de ses collègues. Aucune de ses conditions médicales n’affectaient sa capacité de remplir les exigences de l’emploi. Le procès-verbal de transaction ci-joint révélait que son emploi a pris fin le 24 janvier 2012 en raison de restructurations. Elle a reçu une indemnité de départ. Il a été noté que l’employeur estimait qu’elle était une employée dévouée, fiable et possédant beaucoup de connaissances. Les fonctions de son poste en tant que superviseure de la comptabilité consistait en de la gestion du matériel, notamment les calendriers de livraison et les offres, la rémunération, les ressources humaines et les comptes créditeurs. [mis en évidence par la soussignée]

[18] J’ai examiné le questionnaire de l’employeurNote de bas de page 3 et la description du membre sur ce qui est exact dans les propos de l’employeur se trouvant dans le questionnaire de l’employeur.

[19] Au paragraphe 52 des motifs, le membre note correctement que selon Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117, lorsqu’il existe des éléments de preuve à l’appui d’une capacité de travail, une personne doit démontrer que ses efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé. Il semble que le membre ait conclu que la demanderesse avait la capacité de travailler, puis qu’elle ait conclu qu’elle n’avait pas démontré qu’elle n’avait pas réussi à obtenir ou à conserver un emploi en raison de sa dépression ou de la douleur au cou (au paragraphe 55). Cependant, bien que le membre se soit fondé sur le questionnaire de l’employer pour conclure que la demanderesse avait une capacité de travail, le questionnaire porte sur la période de temps au cours de laquelle la demanderesse occupait un emploi. Elle a eu deux accidents de voiture après la fin de son emploi, et le membre ne semble pas avoir examiné les répercussions de ces accidents sur la capacité de travail. Le membre n’a pas non plus discuté du poids qu’elle a accordé au questionnaire en lien avec la preuve relative aux questions physiques et psychologiques auxquelles la demanderesse a fait face après que son emploi ait pris fin. Par conséquent, en gardant à l’esprit le seuil inférieur auquel le demandeur doit satisfaire pour que la permission d’en appeler soit accueillie, je suis convaincue qu’elle a soulevé une cause défendable en ce qui a trait à une erreur possible souscrivant à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS, selon laquelle le membre de la division générale, lorsqu’elle a examiné la capacité de travail de la demanderesse, aurait interprété incorrectement la preuve concernant les congés médicaux de la demanderesse lorsqu’elle avait un emploi.

[20] L’avocate soutient également que le membre a omis de tenir compte du [traduction] « fait que la demanderesse a reçu des prestations d’ILD de l’assurance collective de son employeur jusqu’en janvier 2014, prestations qui faisaient l’objet d’un différend à la date de l’audience de l’appel ».

[21] Déterminer si une personne est admissible à des prestations d’ILD prévues par un contrat n’est pas pertinent à la question à savoir si un demandeur de pension d’invalidité du RPC est considéré comme étant « invalide » au sens du RPC, puisque la définition d’invalidité dans le cadre d’une pension d’invalidité du RPC est régie uniquement par les termes de la loi. La Commission d’appel des pensions, prédécesseure de la division d’appel, a abordé la question dans la décision Heller-Pereira c. Ministre du Développement social (26 mai 2004), CP18522 (CAP) :

Les dispositions d’autres régimes publics et privés prévoyant des pensions d’invalidité ou d’autres paiements périodiques similaires sont différentes de ce dont il s’agit ici. Les règles législatives déterminant l’admissibilité au bénéfice d’une pension d’invalidité en vertu du Régime sont strictes et inflexibles. La présente Commission, constituée différemment, a souligné, à plusieurs reprises, notamment par exemple, dans la décision Dorion c. ministre du Développement des ressources humaines, CP10672, 2000, que le seuil applicable pour une pension d’invalidité en vertu du Régime est élevé et draconien, peut-être l’un des plus élevés, sinon le plus élevé, pour toute loi de ce genre en Amérique du Nord.

[22] Par conséquent, la preuve portant sur la question à savoir si la demanderesse était admissible au bénéfice ou si elle remettait en cause son admissibilité aux prestations sous le régime d’ILD par l’entremise de son employeur précédent n’était pas pertinente pour trancher la question dont était saisie la division générale. Je conclus que cet argument n’a aucune chance raisonnable de succès.

Réponse au traitement

[23] L’avocate de la demanderesse soutient que le membre de la division générale a tiré des conclusions défavorables au sujet de la sensibilité de la demanderesse au traitement, et ce, en l’absence de tout élément de preuve médicale à l’appui d’une telle conclusion et contrairement aux éléments de preuve accablants à l’appui d’une mauvaise réaction au traitement. Bien qu’il incombe à la demanderesse de démontrer que cet argument confère à l’appel une chance raisonnable de succès, son avocate n’a pas identifié les éléments de preuve sur lesquels elle s’est fondée pour tirer la conclusion selon laquelle la demanderesse avait eu une mauvaise réaction au traitement.

[24] Dans ses motifs, le membre de la division générale a identifié les éléments de preuve sur lesquels elle avait fondé sa conclusion selon laquelle la demanderesse réagissait au traitement. Au paragraphe 42 de ses motifs, le membre a fait référence au rapport du Dr Kos qui a conclu que l’anxiété de la demanderesse avait diminué considérablement en 2013 en raison de massages et de traitements chiropratiques. Au paragraphe 43, le membre a noté les éléments de preuve de la demanderesse selon lesquels le traitement qu’elle a reçu du Dr Blain (psychologue) et de Marion Crow (conseillère) l’a aidé à acquérir des compétences pour surmonter des problèmes, des techniques de relations et d’autres outils pour lui venir en aide. Au paragraphe 44, le membre a noté l’affirmation de madame Crow selon laquelle la demanderesse avait mentionné en 2014 qu’elle n’a pas souffert d’anxiété depuis longtemps. Le membre a également fait référence au témoignage de la demanderesse ainsi qu’aux documents de madame Crow démontrant que le traitement a réussi. Le membre a expliqué pourquoi elle a préféré la preuve de madame Crow (qui a traité la demanderesse pendant trois ans) plutôt que la preuve du Dr Veluri (qui a rencontré la demanderesse qu’une seule fois). Au paragraphe 46 des motifs, le membre a examiné l’historique des médicaments prescrits à la demanderesse et a conclu, au paragraphe 47, que les médicaments étaient considérés comme étant efficaces et raisonnables par les médecins de la demanderesse, puisqu’ils n’ont pas modifié leur dose ou le type de médicament depuis plusieurs années.

[25] En tant que juge des faits, le membre de la division générale a respecté la portée de sa compétence en évaluant la preuve et en tirant des conclusions de faits. Bien qu’il se puisse que la demanderesse ne soit pas d’accord avec la conclusion tranchée sur cette question, ce n’est pas le rôle de la division d’appel d’apprécier de nouveau la preuve. Au paragraphe 10 de l’arrêt Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82, la Cour d’appel fédérale a abordé le sujet des rôles respectifs du juge des faits et du tribunal d’appel :

[...] le poids accordé à la preuve, qu’elle soit orale ou écrite, relève du juge des faits. Ainsi, une cour qui entend un appel ou une demande de contrôle judiciaire ne peut pas en règle générale substituer son appréciation de la valeur probante de la preuve à celle du tribunal qui a tiré la conclusion de fait contestée.

[26] Il y avait des éléments de preuve à l’appui de la conclusion du membre de la division générale selon laquelle la demanderesse répondait au traitement. Il incombe à la demanderesse d’établir que l’appel a une chance raisonnable de succès. Selon moi, elle ne s’est pas acquittée de ce fardeau en ce qui a trait à ce motif. J’estime que l’appel n’a aucune chance de succès selon ce motif.

Ressources financières

[27] L’avocate de la demanderesse soutient que la division générale a omis de tenir compte des éléments de preuve de la demanderesse relativement au manque de ressources médicales et financières, ce qui l’empêchait de participer à des séances de counseling ou de gestion de la douleur.

[28] Pour les motifs qui suivent, je conclus que cet argument ne confère pas à l’appel une chance raisonnable de succès.

[29] Il revient à la division générale, dans les cas appropriés, de tenir compte de l’omission ou du refus d’un demandeur de suivre le traitement recommandé comme partie intégrante de l’analyse prévue dans l’arrêt Villani afin de déterminer si l’invalidité d’un demandeur est grave : Lalonde c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 211. Cependant, en l’espèce, même si le membre a bel et bien indiqué au paragraphe 49 que la demanderesse n’avait pas suivi la recommandation du Dr Veluri, cela n’avait eu aucune incidence sur son analyse et sa conclusion, aux paragraphes 50 à 57, portant sur la question à savoir si son invalidité était grave.

[30] L’alinéa 58(1)c) de la LMEDS prévoit qu’il est fondé d’interjeter appel si la division générale a basé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. En l’espèce, le membre de la division générale a conclu que la demanderesse n’avait pas suivi les recommandations du Dr Veluri qui étaient de suivre davantage de séances de counseling psychologique et de gestion de la douleur. Elle a fondé cette conclusion sur le témoignage de la demanderesse, lequel n’est pas contesté par la demanderesse dans sa demande. Plutôt, la demanderesse affirme que le membre aurait dû avoir tenu compte de son manque de ressources médicales et financières. Cependant, puisque le membre n’a pas fondé sa décision, selon laquelle l’invalidité de la demanderesse n’était pas grave, sur sa conclusion selon laquelle la demanderesse n’avait pas suivi les recommandations du Dr Veluri, la question à savoir si la demanderesse avait les moyens financiers nécessaires pour suivre le traitement n’a pas été abordée dans l’analyse et n’était pas pertinente à l’analyse.

[31] Pour cette raison, je suis convaincue que la demanderesse n’a pas soulevé de cause défendable en ce qui a trait à une possible erreur de droit qui souscrirait aux alinéas 58(1)b) et c) de la LMEDS en lien avec l’observation selon laquelle la demanderesse manquait de ressources médicales ou financières, ce qui l’aurait empêchée d’assister à des séances de counseling ou de gestion de la douleur.

[32] Avant de clore le sujet, je tiens à souligner que, à ce que je sache, les tribunaux n’ont pas tranché sur la question à savoir si la capacité d’un demandeur de payer pour le traitement recommandé est pertinente à l’analyse prévue dans l’arrêt Villani. Pour sa part, la division d’appel a soutenu dans une décision que même si une demanderesse a présenté des éléments de preuve manifestes qu’elle n’a pas les moyens financiers nécessaires pour suivre une certaine thérapie, la division générale aurait le droit d’en faire fi, puisque les difficultés financières ne représentent pas un élément pertinent à prendre en considération dans la détermination d’une admissibilité à une pension d’invalidité : V. T. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2017 TSSDASR 29. Finalement, je tiens à souligner qu’en l’espèce, le membre n’a tiré aucune conclusion à savoir si la demanderesse avait les moyens financiers nécessaires pour être en mesure de suivre le traitement recommandé ou si le traitement recommandé serait offert par le système de santé public.

Conclusion

[33] Je conclus que l’appel de la demanderesse a une chance raisonnable de succès au motif qu’il est possible que le membre de la division générale, au moment d’effectuer son analyse pour déterminer si la demanderesse avait une capacité de travail, ait mal interprété la preuve concernant les congés médicaux de la demanderesse lorsqu’elle occupait son emploi. J’accorde la permission d’en appeler selon ce motif.

[34] La permission d’en appeler est refusée selon les autres motifs soulevés dans la demande de permission d’en appeler reproduits aux paragraphes 7a) à c) et d), et au paragraphe 7b) en ce qui a trait à l’argument selon laquelle la division générale a omis de tenir compte du fait que la demanderesse avait reçu des prestations d’ILD par l’intermédiaire de l’assurance collective de son employeur jusqu’en janvier 2014. Comme je l’ai expliqué dans les motifs de la décision, ces motifs d’appel ne confèrent pas à l’appel une chance raisonnable de succès.

[35] Conformément à l’article 42 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, dans les 45 jours suivant la date à laquelle la permission d’en appeler est accordée, les parties peuvent a) soit déposer des observations auprès de la division d’appel, b) soit déposer un avis auprès de la division d’appel précisant qu’elles n’ont pas d’observations à déposer.

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