Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 16 mars 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) n’était pas payable.

[2] La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler (demande) devant la division d’appel du Tribunal le 16 juin 2017.

Question en litige

[3] La division d’appel doit décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Permission d’en appeler

[4] Aux termes des paragr. 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. La division d’appel accorde ou refuse cette permission d’en appeler.

[5] Le paragr. 58(2) de la LMEDS prévoit que la demande de permission d’en appeler est rejetée si la division d’appel est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Une cause défendable en droit est une cause qui a une chance raisonnable de succès (voir Fancy c. Canada (Procureur général), 201 CAF 63).

Moyens d’appel

[6] Conformément au paragr. 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[7] La demanderesse s’appuie sur les trois moyens d’appel prévus au paragr. 58(1) de la LMEDS.

[8] La demanderesse fait valoir que la division générale a tiré des conclusions de fait erronées de manière abusive ou arbitraire comme prévu à l’al. 58(1)c) de la LMEDS. Elle indique que la division générale s’appuya sur une conclusion de fait relative au traitement approprié pour la fibromyalgie de la demanderesse qui n’est pas fondée sur les éléments de preuve présentés à l’audience soit par les rapports médicaux ou le témoignage. La demanderesse soutient qu’il n’y avait pas d’élément de preuve d’expert traitant de la fibromyalgie dans la preuve documentaire.

[9] La demanderesse fait valoir que la division générale identifia d’autres options possibles de traitement pour la demanderesse qui pourraient améliorer son fonctionnement sans s’appuyer sur des éléments de preuve que de ces options de traitement puissent en fait aider dans la gestion de son état.

[10] La demanderesse fait valoir que la division générale a commis une erreur de droit en rendant sa décision comme prévu à l’al. 58(1)b) de la LMEDS. La demanderesse indique que la division générale s’est appuyée sur le fait qu’elle travaillait à temps partiel pour conclure qu’elle était capable de travailler. La division générale n’a pas tenu compte correctement de la question de savoir si elle avait la capacité de détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur.

[11] La demanderesse soutient que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle comme prévu l’al. 58(1)a) de la LMEDS, car la liaison téléphonique durant l’audience par la téléconférence était mauvaise et qu’il a été difficile pour la demanderesse de présenter pleinement sa cause.

Analyse

[12] Il est pour le moins défendable de soutenir que la décision de la division générale contient des erreurs prévues au paragr. 58(1) de la LMEDS.

[13] La division générale indiqua que c’est la capacité de travailler et non le diagnostic ou la description de la maladie qui permet de déterminer si une invalidité est grave au sens du RPC (paragr. 34). La division générale a reconnu que la demanderesse souffre de fibromyalgie et indiqua ensuite que « la fibromyalgie pouvait toutefois être gérée par des médicaments et de l’activité physique » (paragr.37). La décision continue en ajoutant ce qui suit (paragr. 40) :

[traduction]

Le diagnostic de fibromyalgie de l’appelante remonte à 2002 et ses symptômes d’arthrite rhumatoïde et de syndrome du côlon irritable durent depuis longtemps. Elle a été référée et a été suivie par des consultants et des spécialistes pendant longtemps. Toutefois, comme il est souligné par le défendeur, la fibromyalgie en soi n’est pas une maladie invalidante et il y a une multitude de traitements, de thérapies, de recommandations et de programmes qui aident avec succès à la gestion de la maladie. L’éducation et l’activité physique sont généralement conseillées comme ça a été le cas pour l’appelante.

[14] La demanderesse soutient qu’il n’y avait pas d’élément de preuve d’expert au dossier qui traitent de la fibromyalgie et qu’aucune indication que l’éducation et l’activité physique avaient explicitement été conseillées à la demanderesse. Il est pour le moins défendable que la division générale ait commis ici une erreur prévue aux al. 58(1)b) ou c) en s’appuyant sur de l’information qui avait été « soulignée » par le défendeur relativement à l’état de la demanderesse plutôt que de s’appuyer sur une preuve déterminant si la demanderesse était incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[15] La décision de la division générale indique également que la demanderesse avait trouvé que quelques traitements aidaient, mais qu’elle n’avait pas les moyens de se permettre certains d’entre eux (paragr.44). La décision de la division générale ajoutait : [traduction] « Le Tribunal est conscient que des difficultés financières ne sont pas pertinentes à une déclaration d’invalidité. De plus, il y existe des options de traitement qui n’ont pas encore été essayées par la demanderesse qui pourraient l’aider davantage à gérer ses problèmes de santé. » Lorsque la division générale conclut qu’une demanderesse ne s’est pas conformée à un traitement, elle doit analyser si ce manquement avait une incidence sur son statut d’invalidité et, si c’est le cas, si de ne pas s’être conformé était raisonnable (Lalonde c. Canada (Ministre du développement des ressources humaines), 2002 CAF 211). Cette analyse n’est pas claire du tout à l’examen de la décision de la division générale et ceci peut constituer une erreur de droit en vertu de l’al. 58(1)b) de la LMEDS. Il n’est pas clair sur quelle compétence la division générale s’est appuyée pour déterminer que la situation financière de la demanderesse n’était pas pertinente au bien-fondé de ne pas se conformer à un traitement.

[16] Il est pour le moins défendable que la division générale ait commis une erreur de droit selon l’al. 58(1)b) de la LMEDS en se fondant sur l’emploi à temps partiel de la demanderesse comme preuve que son invalidité n’était pas sévère. La division générale nota que la capacité « de détenir un emploi à temps partiel, de s’acquitter de fonctions adaptées ou d’occuper un emploi sédentaire peut empêcher une déclaration d’invalidité, car elle indique une capacité de travailler » (paragr. 42). Il n’y a pas d’analyse sur la question de savoir si et pourquoi l’incapacité ne pouvait toujours pas être considérée « régulière » malgré le travail fait, et si ce travail était « véritablement rémunérateur » au sens du RPC (comme il est exigé par la décision dans l’arrêt D’Errico c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 95). Manquer à ces étapes dans l’analyse juridique peut constituer une erreur prévue à l’al. 58(1)b) de la LMEDS.

[17] Étant donné qu’il existe plusieurs erreurs possibles conformément au paragr. 58(1) de la LMEDS, la division d’appel n’a pas besoin, à cette étape, de considérer tous les motifs soulevés par la demanderesse. Conformément au paragr. 58(2), il n’est pas nécessaire d’examiner individuellement chaque motif d’appel pour les accepter ou les refuser (voir Mette v. Canada (Procureur général), 2016 CAF 276). La demanderesse n’est pas limitée dans sa capacité de poursuivre les divers moyens d’appel soulevés dans sa demande.

[18] Si la demanderesse continue de s’appuyer sur les arguments que la division générale a manqué à un principe de justice naturelle, toute observation future devrait indiquer si une objection à ce manquement a été faite à l’audience. De plus, si la demanderesse ne s’est pas opposée à ce manquement à l’audience, y aurait-il eu une renonciation implicite à toute perception d’un manquement à la justice naturelle (voir Hennessey c. Canada, 2016 CAF 180, paragr. 21; Benitez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 491, paragr. 204 à 220; Mohammadian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] 3 RCF 371, paragr. 25)?

Conclusion

[19] La demande est accordée. La présente décision d’accorder la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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