Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le demandeur est né au Cambodge, pays où il a travaillé comme pêcheur. Il est venu au Canada en 1989 et, depuis ce moment-là, il a occupé l’emploi de cuisinier et il a travaillé dans les domaines de la fabrication d’automobiles et de l’installation de fenêtres. Il a dit avoir chuté d’une échelle en juillet 2012 et il a cessé de travailler le mois suivant en raison de ses blessures. Il a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) en août 2014, mais sa demande a été rejetée par le défendeur, le ministre de l’Emploi et du Développement social, tout comme sa demande de révision. Il a ensuite interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada, qui a tenu une audience par vidéoconférence en avril 2017, mais l’appel a ensuite été rejeté.

[2] En juin 2017, le demandeur a présenté la demande de permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal. Pour les motifs décrits ci-dessous, j’ai décidé d’accorder la permission d’en appeler.

Cadre juridique

[3] Le Tribunal est créé et régi par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). La Loi sur le MEDS établit un certain nombre de différences importantes entre la division générale du Tribunal et la division d’appel de celui-ci.

[4] Tout d’abord, la division générale est tenue d’examiner et d’apprécier l’ensemble de la preuve présentée, y compris les nouveaux éléments de preuve qui n’ont pas été pris en considération par le ministre au moment où il a rendu ses décisions antérieures. En revanche, la division d’appel est plus axée sur les erreurs particulières que la division générale aurait pu commettre. Plus particulièrement, la division d’appel peut intervenir dans une décision de la division générale seulement si l’une des erreurs prévues au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS a été établie, soit que :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] Une deuxième différence importante établie par la Loi sur le MEDS est que la plupart des appels instruits devant la division d’appel doivent suivre un processus en deux étapes :

  1. La première étape est connue comme étant l’étape de la permission d’en appeler. Il s’agit d’une étape préliminaire ayant pour but de filtrer les causes n’ayant aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 1. Le critère juridique que les demandeurs doivent respecter à cette étape est minime : existe-t-il un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appelNote de bas de page 2?
  2. Si la permission d’en appeler est accueillie, le dossier se rend à la seconde étape, qui est connue comme étant celle de l’examen sur le fond. C’est à l’étape de l’examen sur le fond que les appelants doivent démontrer qu’il est plus probable que le contraire que la division générale ait commis au moins une des trois erreurs possibles prévues au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. L’expression « plus probable que le contraire » signifie que les appelants ont un critère juridique supérieur à satisfaire à la seconde étape par rapport au critère juridique de la première étape.

[6] L’appel est maintenant à l’étape de la permission d’en appeler, ce qui signifie que la question que je dois me poser est celle de savoir s’il existe un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel. Il incombe au demandeur de démontrer que ce critère juridique a été satisfaitNote de bas de page 3.

Analyse

[7] Dans sa demande de permission d’en appeler, le demandeur soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance (AD1). Plus particulièrement, le demandeur prétend que la division générale a :

  1. commis une erreur soit en accordant trop d’importance aux notes cliniques de Dr Tong (GD13) ou en omettant d’accorder suffisamment d’importance au formulaire « Limitations à la participation » qu’il a rempli le 9 octobre 2014 (GD2-87);
  2. omis d’accorder suffisamment d’importance au rapport du psychiatre traitant du demandeur, Dr Lo, qui a seulement commencé à traiter le demandeur après la fin de la période minimale d’admissibilité (GD2-55);
  3. omis d’accorder suffisamment d’importance à l’importante barrière linguistique, à l’instruction limitée et au manque de compétences transférables du demandeur.

[8] Le ministre n’a présenté aucune observation relativement à la question de savoir si la permission d’en appeler devrait être accordée.

Prétendues erreurs de fait

[9] D’un côté, la Cour fédérale a reconnu que la permission d’en appeler devrait être normalement refusée si les demandeurs cherchent seulement à faire de nouveau valoir leur avis ou à faire apprécier la preuve de nouveauNote de bas de page 4. D’un autre côté, la Cour fédérale a également conclu que le Tribunal n’est pas pris au piège par les moyens d’appel précis qui sont soulevés et qu’il doit examiner la preuve sous-jacente et la comparer à la décision faisant l’objet d’un examenNote de bas de page 5. Si une preuve importante a possiblement été ignorée ou mal interprétée, la permission d’en appeler doit normalement être accueillie, et ce malgré des problèmes techniques concernant la demande de permission d’en appeler.

[10] Selon mon examen de la preuve documentaire, je suis convaincu que la permission d’en appeler devrait être accordée en l’espèce, puisque la division générale a possiblement mal interprété les notes cliniques de Dr Tong, qu’elle a ensuite utilisées afin d’amoindrir les conclusions tirées dans d’autres rapports médicaux (GD2-63 et GD2-87). Au paragraphe 37 de la décision de la division générale, par exemple, celle-ci s’est fondée sur les notes cliniques de Dr Tong pour conclure que le sommeil et l’humeur du demandeur s’étaient améliorés et que sa douleur avait diminué. Cependant, dans quelle mesure les notes cliniques de Dr Tong révèlent-elles la portée de ces changements et la façon dont ceux-ci représentent la capacité du demandeur à travailler? Sans trancher cette question, je suis néanmoins convaincue qu’il existe un motif défendable prévu à l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS selon lequel l’appel pourrait avoir gain de cause.

[11] Étant donné que j’ai accordé la permission d’en appel à ce motif, je ne suis pas tenu de tenir compte des autres questions soulevées par le demandeur. Néanmoins, toutes les questions soulevées par le demandeur peuvent faire l’objet d’un examen à la seconde étape de l’instance (à savoir l’étape de l’examen sur le fond), tant et aussi longtemps qu’elles concernent le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDSNote de bas de page 6.

[12] Il convient de souligner à ce stade que rien dans cette décision ne présume du résultat de l’appel sur le fond. C’est à l’étape de l’examen sur le fond que le demandeur devra démontrer qu’il est plus probable que le contraire que la division générale ait commis au moins une des trois erreurs prévues au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[13] La demande de permission d’en appeler est accordée. Dans le cadre des autres observations que les parties pourraient présenter, celles-ci sont également invitées à formuler des commentaires sur la question de savoir si une audience (c.-à-d. par téléconférence, par vidéoconférence ou en personne) devrait être tenu à l’étape de l’examen sur le fond.

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