Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Aperçu

[1] L’intimé a reçu la demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) de l’appelante le 9 octobre 2015. L’appelante a prétendu être invalide parce qu’elle ne peut pas utiliser du tout son bras en raison de la douleur constante; son bras et son poignet gauches ont été fracturés et nécessitent une chirurgie. L’intimé a rejeté la demande initialement et après révision. L’appelante a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, la partie appelante doit satisfaire aux exigences prévues dans le RPC. Plus précisément, la partie appelante doit avoir été déclarée invalide au sens du RPC au plus tard à la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la date de fin de la PMA est fondé sur les cotisations de la partie appelante au RPC. Le Tribunal constate que la PMA de l’appelante prend fin le 31 décembre 2015.

[3] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. le service de vidéoconférence est disponible à une distance raisonnable de la région où réside l’appelante;
  2. Il y a des lacunes dans l’information au dossier ou il est nécessaire d’obtenir des clarifications;
  3. Les services d’une traductrice sont requis, et l’expérience montre que la traduction est plus exacte et plus efficace lorsque la traductrice ou le traducteur et la partie appelante sont dans la même pièce.

[4] Les personnes suivantes ont assisté à l’audience : E. T., appelante, Alexandra Victoros, avocate; Melita Popic, interprète.

[5] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal a décidé que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC.

Preuve

[6] L’appelante avait 57 ans à l’échéance de sa PMA. Elle a obtenu un diplôme d’études secondaires en Hongrie. Elle a travaillé comme toiletteuse de chiens pendant 10 ans en Hongrie, et elle exploitait sa propre entreprise. Elle est arrivée au Canada en 1998 lorsqu’elle avait 20 ans. À son arrivée au Canada, elle a passé six mois à suivre des cours d’anglais langue seconde.

[7] L’appelante a affirmé avoir travaillé grâce aux services d’une agence de placement temporaire et avoir été placée dans des usines. Les affectations changeaient tous les trois mois en moyenne. Elle a ensuite travaillé dans des restaurants, notamment comme plongeuse, jusqu’à ce qu’elle tombe sur la glace en 2012 et qu’elle se casse un bras.

[8] Elle a mentionné avoir eu besoin d’une chirurgie deux semaines après la chute et avoir fait de la physiothérapie. Elle a souligné que la CSPAAT avait été impliquée, et qu’elle avait été affectée à un poste à raison de 30 heures semaine, et que le nombre d’heures avait ensuite été ramené à 20 heures. Elle a mentionné qu’elle avait été incapable de reprendre un travail d’usine, et qu’elle avait de la difficulté à travailler dans une franchise de restauration rapide (Swiss Chalet). L’appelante a mentionné qu’une partie du problème découlait du fait que l’employeur insistait pour qu’elle exécute des tâches en dehors de ses limitations, ce qui a fait qu’elle n’a plus été capable de continuer à travailler à cet endroit après six mois.

[9] L’appelante a travaillé à Arby’s où elle a fait des sandwichs pendant environ un mois en 2015. Elle n’a pas été embauchée comme employée permanente à Arby’s parce que, comme elle l’a affirmé, son employeur lui a dit qu’elle était trop lente. Elle a présenté une demande d’emploi à la chaîne de restaurants X et a passé des entrevues et un examen; on lui a dit que les emplois exigeaient l’utilisation des deux mains. Elle ne croit pas qu’elle pourrait respecter un horaire si elle était capable de trouver un emploi adapté à ses limitations. Elle a aussi affirmé avoir [traduction] « peur de l’échec » et que cela interfère avec sa capacité de trouver et de conserver un emploi.

[10] L’appelante a affirmé avoir posé sa candidature à d’autres postes, par exemple au Village des valeurs, mais que le travail exigeait de soulever des objets et était au-delà de ses capacités. Elle souhaitait poursuivre une carrière dans le domaine des soins aux personnes âgées, mais elle n’a pas été capable d’obtenir un emploi. Elle a fait du bénévolat au service de garde d’enfants d’une église à raison d’une journée par semaine pendant environ trois mois. Elle était incapable de soulever les enfants, et ce poste de bénévole a donc pris fin. Elle a affirmé avoir été informée qu’elle devrait vivre avec sa douleur.

[11] Elle a mentionné que les doigts de sa main gauche ne lui permettent pas de tenir quoi que ce soit. Elle ne pourrait pas utiliser sa main gauche pour taper sur un clavier. Elle a mentionné n’avoir jamais occupé d’emploi sédentaire.

[12] L’appelante a mentionné qu’elle a peur de conduire. Elle a également souligné qu’elle a des problèmes de sommeil depuis l’accident et qu’elle ne se sent pas reposée. Elle a mentionné qu’elle consulte un psychologue sur une base hebdomadaire depuis un an et qu’elle trouve cela utile. Elle a dit avoir reçu un diagnostic de trouble dépressif majeur et de syndrome de douleur chronique.

[13] Le Dr Chan a rempli un formulaire d’évaluation des capacités fonctionnelles le 17 avril 2014 autorisant l’appelante à retourner au travail, avec comme restriction d’éviter d’utiliser sa main gauche. En mai 2015, le Dr Chan a de nouveau rédigé une restriction quant à l’utilisation de sa main gauche.

[14] Le Dr Schuringa, chirurgien orthopédique, a rapporté le 19 avril 2012 que l’appelante avait souffert d’une fracture intra-articulaire du radius distal gauche. À part cela, elle était en bonne santé et en bonne forme et ne présentait pas de problèmes de santé majeurs.

[15] En avril 2014, la Marche des dix sous a rédigé un rapport d’évaluation psychoprofessionnelle. Sous la rubrique de l’analyse des résultats d’évaluation, on peut lire que dans l’ensemble, sur la base de ses résultats actuels aux tests, ses options d’emploi se limitent présentement à des emplois de premier échelon; avant d’occuper un emploi de premier échelon, on lui recommande de participer à une formation en alphabétisation et à un recyclage scolaire afin d’améliorer ses compétences en mathématique. En raison de sa faible capacité en lecture et en orthographe et pour recycler [sic] l’information, il faudrait s’attendre à ce qu’elle ait besoin d’une période beaucoup plus longue que la moyenne pour acquérir des compétences. L’appelante a révélé qu’elle n’avait pas consulté de praticien en santé mentale à ce jour et elle a précisé qu’elle ne souhaitait pas s’engager dans ce type de traitement.

[16] En mai 2014, le Dr Moro, chirurgien orthopédiste, a noté que l’appelante avait subi récemment une entorse au poignet gauche et que son poignet gauche lui causait des douleurs chroniques secondaires à une arthrite post-traumatique. Il a estimé qu’elle n’avait pas besoin de subir une autre chirurgie et qu’elle ne devait pas travailler en dehors de ses restrictions permanentes. En novembre 2015, le Dr Moro a noté que les restrictions permanentes étaient de ne pas être exposée au froid, de restreindre la manipulation d’objets à ceux de poids léger et d’utiliser seulement à l’occasion sa main gauche pour agripper des objets, les tirer ou les pousser.

[17] En juin 2014, Altum Health a noté que l’appelante avait subi une entorse au poignet gauche et que son poignet gauche lui causait des douleurs chroniques secondaires à une arthrite post-traumatique découlant d’une fracture du radius distal intra-articulaire antérieure. Il a été souligné qu’elle travaillait 20 heures par semaine et faisait des tâches modifiées, mais qu’elle estime que le travail est trop exigeant et qu’elle se sent coincée entre la CSPAAT et l’employeur.

[18] L’évaluation des lacunes par le spécialiste en transition professionnelle, datée du 25 août 2014, mentionnait des lacunes cognitives et recommandait des cours d’anglais langue seconde spécialisés axés sur le milieu professionnel. Les précautions physiques qui sont notées sont d’utiliser seulement à l’occasion la main gauche pour agripper, pousser ou tirer des objets, de limiter le soulèvement d’objets à 20 livres ou moins et de ne pas s’exposer au froid. Il a été estimé qu’elle était apte à exécuter des tâches légères ou sédentaires.

[19] Le groupe d’alphabétisation de la région de Waterloo a présenté un rapport d’étape le 6 mars 2015. Le rapport montre que l’appelante démontrait de la confiance en elle dans les quatre compétences (lecture, expression, écoute et écriture). Il était également noté qu’en travaillant quotidiennement sur des documents en anglais, elle continuait à faire preuve d’une meilleure compréhension des documents et à fournir plus facilement des réponses tant à l’oral qu’à l’écrit. Elle montrait aussi des progrès satisfaisants dans sa formation sur la CNP et les compétences essentielles, et était capable de démontrer les compétences acquises pendant les séances pratiques avec un certain succès. Son stage, avec sa formation continue, s’est avéré être un arrangement très bénéfique pour ses progrès d’apprentissage. Il a été souligné qu’un point à améliorer consistait à trouver une façon de se concentrer sur ses études et de gérer sa vie personnelle de manière à ce qu’elle n’interfère plus avec son apprentissage tant dans la salle de classe qu’à la maison. Le rapport d’étape mentionnait également qu’elle continuait à éprouver des difficultés avec les cours d’informatique et qu’elle avait besoin de plus de pratique et de répéter des tâches pour acquérir de la confiance.

[20] Un rapport de placement daté du 17 juillet 2015 soulignait que l’appelante avait cherché un emploi sans succès jusqu’à présent. Elle était emballée par une possibilité d’emploi comme préposée aux soins pour les personnes âgées. Elle a refusé une occasion de poser sa candidature à un poste de caissière en raison de la distance à parcourir et parce qu’elle n’était pas sûre de vouloir travailler avec de l’argent comptant. Le 14 juillet 2015, l’appelante a mentionné qu’elle croyait pouvoir travailler comme préposée au nettoyage des bureaux ou exécuter des tâches légères d’un point de vue physique. Ses restrictions consistaient à ne pas être exposée au froid, à ne pas essayer d’atteindre des objets placés en hauteur avec sa main gauche, et à limiter l’activité prolongée et répétée de son bras gauche, notamment pour agripper, pousser avec vigueur, tirer et faire des mouvements de torsion.

[21] Selon le Dr Chan, dans ses notes cliniques d’octobre, les radiographies de la main et du poignet gauches montraient une détérioration accrue et laissaient croire à un début d’arthrose après entorse grave scapholunaire.

[22] Le rapport médical standard a été rédigé par le Dr Chan, médecin de famille, le 29 octobre 2015. Sous la rubrique Diagnostic, on peut lire : Statut post-fracture distale du poignet gauche avec déformation en palier intra-articulaire. Lésion périlunaire non diagnostiquée; contracture des doigts. Possibilité d’arthrose du poignet après entorse grave scapholunaire et instabilité dorsale du segment intercalaire (aussi appelée DISI). Pronostic : réservé. Observations physiques et limitations fonctionnelles : difficulté à utiliser la main gauche pour les activités de la vie quotidienne, incapable d’utiliser sa main gauche pour travailler. Traitement : essayé la physio et les médicaments. Chirurgie en avril 2012, mais n’a pas résolu ses problèmes, les résultats ont été faibles.

[23] L’imagerie médicale de l’avant-bras gauche faite le 21 septembre 2015 ne montrait pas d’anomalie osseuse importante; main et poignet – clou chirurgical métaphysaire radius dorsal et irrégularité corticale du radius distal et remodelage osseux lié à une fracture du radius distal antérieure traitée par chirurgie.

[24] La Dre Carleton a rapporté les résultats d’une électromyographie et d’un test de conduction nerveuse au médecin de famille le 23 octobre 2015. Elle estimait que les tests faits sur le bras gauche étaient normaux et ne présentaient aucune preuve de lésion nerveuse. Elle a aussi écrit qu’il n’y avait aucune preuve directe de lésion nerveuse liée à sa fracture originale. La douleur semble être son symptôme principal et elle pourrait avoir une dystrophie sympathique réflexe bien qu’il n’y ait pas de changement de la couleur de sa peau.

[25] Le Dr Peng, de la clinique spécialisée du programme des mains et des poignets de la CSPAAT, a effectué une évaluation le 16 décembre 2015. Le médecin a noté certaines préoccupations concernant le syndrome douloureux régional complexe. L’évaluation mentionnait que l’appelante ne peut pas soulever d’objets lourds, et que bien qu’elle soit droitière, elle avait besoin d’utiliser sa main gauche pour son travail. La douleur au poignet gauche avait une incidence sur sa capacité à exécuter son travail de plongeuse. Le Dr Peng concluait que l’impression clinique globale était qu’elle n’avait pas le syndrome douloureux régional complexe. Elle a suggéré des analgésiques à base d’opioïdes et du Venlafaxine pour soulager le stress. L’examen physique a montré un déclin de son poignet et de sa capacité d’extension, mais pas de douleur dans la région métacarpienne et carpométacarpale. Il n’y a pas de douleur le long des tendons ni de sensibilité de l’os scaphoïde, et aucune sensibilité cutanée anormale n’a été relevée.

[26] Un rapport d’évaluation exhaustif du programme des services spécialisés liés aux fonctions et à la gestion de la douleur de la CSPAAT a été préparé le 20 janvier 2016. L’appelante ne ressentait pas de douleur précise le jour de l’évaluation. Elle a déclaré que lorsque la douleur est présente, elle est aiguë et intermittente. Elle a évalué sa douleur à 0/10 ce jour-là, et à 5/10 dans les pires moments, avec une moyenne de 4/10. Elle n’a pas ressenti de douleur ou d’inconfort lorsque l’évaluateur a touché sa main et son poignet gauches. Le psychologue et le médecin de l’équipe ont noté un trouble dépressif majeur de gravité modérée, un trouble de la douleur, de la douleur chronique au poignet et à l’épaule gauches et des facteurs de stress psychosociaux comme des problèmes financiers et du stress lié à la CSPAAT. La note à l’évaluation globale du fonctionnement (EGF) était de 55-60. Les précautions fonctionnelles étaient une exposition limitée au froid, une manutention de charges limitée, une utilisation occasionnelle seulement de sa main gauche pour agripper ou pousser des objets.

[27] Une recommandation vers des services en travail social a été notée le 18 janvier 2016, avec un rendez-vous prévu pour le 25 février 2016. La recommandation était qualifiée de non urgente, et était formulée pour des raisons d’anxiété et de stress.

[28] Altum Health a préparé de nombreux rapports sur les traitements qui ont donné lieu à un rapport de congé, du programme de services spécialisés liés aux fonctions et à la gestion de la douleur de la CSPAAT, le 6 avril 2016. Diagnostic : Axe I - trouble de la douleur associé à l’état psychologique et à l’état de santé général (chronique); Axe III : douleur chronique au poignet gauche : EGF : 61-65. D’après le rapport, sur le fondement de tests objectifs, l’appelante a démontré la capacité d’exécuter des activités sédentaires qui consistent à soulever des objets de la taille jusqu’à la hauteur de la tête et à transporter des objets, et des tâches sédentaires à légères consistant à soulever des objets du sol jusqu’au niveau de la taille. Bon nombre de limitations fonctionnelles permanentes ont été recommandées, notamment concernant les tâches qui nécessitent d’agripper des objets avec la main gauche, l’exposition au froid, le fait d’agripper des objets avec la main gauche, des tâches qui nécessitent de tirer ou de pousser des objets sur une base occasionnelle seulement et de soulever des objets d’un certain poids seulement. Sous la rubrique réintégration au marché du travail : aucune contre-indication qui empêcherait un retour au travail n’a été relevée.

[29] Jasna Mudrinic, M.Serv.Soc., a rédigé un rapport le 11 mars 2017. Le rapport soulignait que du counseling avait commencé en décembre 2016 et que depuis ce moment elle avait assisté à huit séances de thérapie individuelle. L’histoire personnelle racontée à l’auteure mentionnait que l’appelante souffrait constamment de douleurs au poignet gauche, au bras gauche et à l’épaule, ce qui perturbait son sommeil et la laissait dans un état de fatigue toute la journée. Selon le rapport, l’appelante a des symptômes graves associés à la dépression, et de nombreux symptômes d’anxiété. D’après l’auteure, ses symptômes psychosociaux et physiques continus sont de nature chronique et persistent depuis 2012. Selon les conclusions du rapport, malgré l’accès continu à la thérapie, l’appelante continuera d’avoir une capacité réduite à gérer sa vie et un avis clinique est formulé selon lequel elle est une bonne candidate aux prestations d’invalidité du RPC, qui réduiraient son niveau de stress global.

[30] Le Dr Cletus Okonkwo a préparé un rapport de consultation le 28 avril 2017. Il a noté que le motif de consultation était une douleur continue à la main et que l’appelante ne pouvait donc pas travailler. Elle a révélé avoir essayé de travailler à de nombreuses reprises, mais qu’on la mettait à pied en se plaignant qu’elle n’avait qu’une main et qu’elle avait des difficultés avec la CSPAAT. Depuis son accident, elle n’a pas été en mesure de conserver un emploi, car elle subissait de la discrimination en raison de ses capacités physiques limitées. Elle est frustrée et subit environ trois crises de panique par semaine. Elle n’a pas fait de counseling depuis l’accident. Diagnostic posé : trouble dépressif majeur, trouble de douleur chronique et antécédents de fracture du poignet gauche. Il a recommandé du counseling et la prise quotidienne d’Effexor, ainsi qu’une dose accrue de Pregabalin.

Observations

[31] L’avocat de l’appelante a soutenu que l’appelante est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. L’appelante s’est blessée au poignet gauche en mars 2012 et cela a eu de lourdes conséquences pour elle sur le plan psychologique. Elle a une éthique de travail enviable, et elle travaillait 60 heures par semaine avant son accident.
  2. Les facteurs relatifs au contexte réaliste (Villani) montrent qu’elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Elle est peu qualifiée et a des compétences transférables limitées; elle a 58 ans et un faible niveau d’instruction. Elle est incapable d’exécuter du travail physique, le seul type de travail pour lequel elle possède de l’expérience.
  3. Elle a essayé de retourner au travail dans une franchise de restauration rapide, et même dans ce poste exigeant peu d’aptitudes, on l’a jugée trop lente, et son employeur éventuel a mis fin à sa tentative de retour au travail.

[32] L’intimé soutient que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité, pour les raisons suivantes :

  1. L’appelante est droitière, et elle est donc capable de demeurer apte à travailler. Elle est capable de travailler à temps partiel, ce qui démontre une capacité à travailler.
  2. Malgré les limitations liées au poignet et aux doigts gauches de l’appelante, d’éventuelles occupations convenables ont été ciblées pour l’appelante. Elle peut apprendre de nouvelles compétences grâce à la formation professionnelle et elle a été capable d’occuper des postes de premier échelon avant l’échéance de la PMA.
  3. Le groupe d’alphabétisation a mentionné que l’appelante faisait preuve d’une confiance en elle accrue en anglais et qu’elle était maintenant à l’aise de répondre au téléphone. L’appelante a fait des progrès satisfaisants pour améliorer ses compétences existantes et cela l’aidera à réaliser ses objectifs professionnels. L’appelante a des restrictions permanentes, cependant elle est capable d’exécuter des tâches peu exigeantes physiquement.

Analyse

Critères d’admissibilité à une pension d’invalidité

[33] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités ou selon le principe qu’il est plus probable que le contraire, qu’elle était invalide au sens du RPC à la date de fin de sa PMA ou avant cette date.

[34] L’article 44(1)(b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne touche pas de pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la PMA.

[35] L’article 42(2)(a) énonce qu’une personne est invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Période minimale d’admissibilité

[36] Le Tribunal constate que la date de fin de la PMA est le 31 décembre 2015.

Caractère grave

[37] Lorsqu’il existe des éléments de preuve de capacité de travail, la partie appelante doit démontrer que ses efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c Canada (PG), 2003 CAF 117. L’appelante a des restrictions qui l’empêchent d’occuper un emploi qui exige un effort physique considérable, surtout une occupation exigeant l’utilisation de son bras, de son poignet et de sa main gauches. L’appelante a cherché activement un emploi adapté à ses restrictions, sans succès. Elle croyait être capable d’effectuer des tâches légères de nettoyage (juillet 2015) et était emballée par une possibilité d’emploi comme dame de compagnie et préposée aux soins pour personnes âgées. Les emplois qu’elle a cherchés pourraient être difficiles à décrocher compte tenu de facteurs socioéconomiques, mais cette preuve révèle qu’elle était capable d’occuper des emplois légers/sédentaires. Elle a tenté de conserver son emploi à Arby’s, mais elle n’a pas été embauchée, car on lui a dit qu’elle était trop lente dans la préparation des sandwichs. Son incapacité à obtenir un emploi à temps plein à Arby’s ne permet pas de conclure qu’elle est incapable de détenir [traduction] « aucune » occupation dans les limites de ses restrictions. Elle a aussi eu des difficultés avec la CSPAAT, et elle croyait subir de la discrimination en raison de ses capacités physiques limitées. Ces facteurs ne sont pas des critères d’admissibilité à une pension d’invalidité. La question à trancher consiste à déterminer si l’appelante était régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Le Tribunal estime que les efforts de l’appelante pour obtenir un emploi ont été infructueux pour des raisons autres que son état de santé.

[38] L’état d’une partie requérante doit être évalué dans sa totalité. Toutes les incapacités doivent être considérées, pas non seulement les incapacités les plus importantes ou l’incapacité principale (Bungay c Canada (Procureur général), 2011 CAF 47). Dans son questionnaire daté du 7 octobre 2015, l’appelante a inscrit, sous la rubrique maladies ou incapacités qui vous empêchent de travailler : bras et poignet gauches. Elle n’a inscrit le mot dépression à aucun endroit dans le questionnaire. Le rapport médical standard rédigé par le médecin de famille (octobre 2015) qui traitait l’appelante depuis février 2008 ne mentionne pas que l’appelante pourrait souffrir de dépression. En avril 2014, le rapport psychoprofessionnel mentionnait que l’appelante n’avait pas consulté un praticien en santé mentale et qu’elle ne désirait pas le faire. Les rapports datés d’après l’échéance de la PMA faisaient état d’une EGF en janvier de 55‑60, soit un niveau modéré, et de 61‑65 en avril 2016, soit un niveau léger. D’après le programme de services spécialisés liés aux fonctions et à la gestion de la douleur de la CSPAAT, qui a évalué tant son état psychologique que son état de santé général (y compris la douleur chronique au poignet gauche), il n’y a pas de contre-indication qui l’empêcherait de retourner au travail.

[39] Jasna Mudrinic, M.Serv.Soc., a commencé à voir l’appelante en counseling en décembre 2016, soit un an après l’échéance de sa PMA. Elle a estimé que l’appelante souffrait de symptômes psychologiques et physiques continus depuis 2012. Le Tribunal n’accorde pas un poids important à son opinion, car elle s’appuie sur l’information subjective fournie par l’appelante et sur des critères non objectifs puisqu’elle n’a pas suivi l’appelante depuis 2012. Elle estime de plus que l’octroi d’une pension d’invalidité du RPC réduirait son niveau de stress global. Les besoins financiers ne sont pas une considération pertinente pour le RPC.

[40] L’admission de la preuve médicale selon laquelle elle ne peut pas utiliser régulièrement ses mains pour exécuter des tâches répétitives n’empêche pas une conclusion subséquente selon laquelle la demanderesse a une certaine capacité de travailler (Kiraly c Canada (Procureur général), 2015 CAF 66). La Cour d’appel fédérale a rejeté l’observation selon laquelle la conclusion concernant l’incapacité à utiliser ses mains contredisait le cadre analytique énoncé dans l’arrêt Villani.La Cour a noté que l’affaire était principalement axée sur les faits. L’appelante s’est blessée au poignet gauche lorsqu’elle a glissé et est tombée sur la glace en 2012 et, depuis cet événement, elle est aux prises avec des limitations et de la douleur qui ont découlé de cette blessure. Sa main dominante est la main droite, et elle n’a pas de restrictions importantes quant à l’utilisation de sa main dominante. L’appelante a démontré la capacité d’exécuter des activités qui correspondent aux activités sédentaires consistant à soulever et à transporter des objets (Altum Health, avril 2016). Cette capacité montre que l’appelante est régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice adaptée à ses limitations physiques liées à sa main et à son poignet gauches.

[41] Le critère de gravité doit être évalué dans un contexte réaliste (Villani c Canada (PG), 2001 CAF 248. Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[42] L’appelante avait 57 ans à l’échéance de sa PMA. Elle a de l’expérience de travail, et a notamment exploité une petite entreprise en Hongrie. Elle a occupé différents emplois, ce qui lui a permis d’acquérir de l’expérience et de développer certaines compétences transférables. Elle n’a pas beaucoup d’expérience dans des emplois spécialisés ou dans un environnement de bureau, cependant elle a occupé divers postes de premier échelon. L’anglais n’est pas sa langue maternelle, mais elle a travaillé dans des environnements où l’anglais était la langue de travail et elle a conservé son emploi. Le Literacy Group of Waterloo (groupe d’alphabétisation de Waterloo) a souligné que l’appelante démontrait de la confiance dans les quatre compétences en anglais. Elle a également démontré des progrès satisfaisants dans la formation sur les compétences essentielles. À l’âge de 57 ans, l’appelante a montré une capacité de se recycler pour occuper des postes de premier échelon et a manifesté un intérêt pour des professions comme les soins aux personnes âgées. Elle peut prendre plus de temps que la moyenne pour apprendre ou retenir des choses, mais elle fait preuve de capacité. Les limitations notées au plus tard à l’échéance de la PMA consistaient à restreindre l’exposition au froid et l’utilisation de sa main et de son poignet gauches. Il ne s’agit pas de limitations qui l’empêcheraient d’être régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à l’échéance de sa PMA. L’appelante avait des restrictions à l’échéance de sa PMA qui l’empêchaient d’utiliser à répétition sa main et son poignet gauches. Aucune restriction ne concernait sa main et son poignet droits, et elle serait une employée fiable et prévisible pour un employeur dans un contexte réaliste dans une occupation adaptée aux limitations de sa main et de son poignet gauches. Le Tribunal estime que l’appelante n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave au sens du RPC à l’échéance de sa PMA, dans un contexte réaliste.

Caractère prolongé

[43] Comme le Tribunal a conclu qu’il n’y avait pas invalidité grave, il ne lui est pas nécessaire de se prononcer sur son caractère prolongé.

Conclusion

[44] L’appel est rejeté.

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