Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Introduction

[1] Le 11 avril 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada a conclu qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada n’était pas payable à la demanderesse.

[2] La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal le 21 juin 2017. Le Tribunal a écrit à la demanderesse pour l’informe que sa demande de permission d’en appeler était incomplète étant donné qu’il n’y avait pas de motifs d’appel suffisants (voir Bossé c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1142). La demanderesse a fourni des renseignements à l’appui de sa demande, et le Tribunal lui a écrit à nouveau pour lui dire qu’elle n’avait toujours pas fourni un motif d’appel. La demanderesse a fourni des renseignements supplémentaires au Tribunal, et celui-ci a reconnu la demande comme étant complète.

Question en litige

[3] La division d’appel doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Permission d’en appeler

[4] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. La division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[5] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Une cause défendable en droit est une cause qui a une chance raisonnable de succès (voir Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63).

Moyens d’appel

[6] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[7] La demanderesse fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de fait au titre de l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS. La demanderesse semble soutenir qu’elle a dit à la division générale avoir été mordue par une tique (maladie de Lyme), mais la division générale a ignoré la preuve.

[8] La demanderesse soutient également que, pendant qu’elle attendait la décision de la division générale, elle a subi une scintigraphie osseuse et un examen par imagerie par résonance magnétique (IRM) qui aident à démontrer qu’elle ne peut pas travailler. Elle a présenté le rapport de l’examen par IRM dans le cadre de sa demande de permission d’en appeler.

Analyse

[9] Il incombe à la demanderesse de fournir tous les éléments de preuve et argument requis selon le paragraphe 58(1) de la LMEDS (voir Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300). Cependant, la division d’appel devrait effectuer plus qu’un examen mécaniste des motifs d’appel (voir Karadeolian c. Canada (Procureur général), 2016 CF 615). Selon un examen de la décision de la division générale, il existe un certain nombre d’erreurs possibles prévues au paragraphe 58(1) de la LMEDS.

[10] Tout d’abord, la division générale pourrait avoir fait une déclaration inexacte et avoir ainsi omis d’appliquer adéquatement le critère juridique relatif à une invalidité grave pour les besoins de la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. La division générale a déclaré ce qui suit (au paragraphe 31) : [traduction] « En se fondant sur le témoignage de l’appelante, le Tribunal est incapable de conclure que l’appelante était atteinte d’une invalidité fonctionnelle importante et d’une limitation dans ses activités quotidiennes à la date de fin de la période minimale d’admissibilité ou à la date calculée au prorata. »

[11] En se fondant sur cette déclaration, il est défendable de prétendre que la division générale a commis une erreur de droit au titre de l’alinéa 58(1)b) de la LMEDS. La division générale a été chargée de déterminer si la demanderesse était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de la période minimale d’admissibilité (PMA) ou à la date calculée au prorata, ou avant l’une de ces dates. Afin d’être admissible aux prestations au titre du Régime de pensions du Canada, la demanderesse doit être « régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice ». Il est possible que la division générale ait plutôt mis l’accent à tort sur la question de savoir si la demanderesse était atteinte d’une [traduction] « invalidité fonctionnelle importante et d’une limitation dans ses activités quotidiennes ».

[12] Ensuite, même si la division générale a reconnu avec raison le besoin d’apprécier le critère relatif à la gravité dans un contexte « réaliste » (voir Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248) au paragraphe 25, il est possible que la division générale ait omis de réellement mener cette analyse. Selon l’arrêt Villani, un décideur doit tenir compte de facteurs tels l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents professionnels et l’expérience de vie. En l’espèce, l’âge de la demanderesse est mentionné dans la preuve, mais pas dans l’analyse. Une partie des antécédents professionnels de la demanderesse est mentionnée dans l’analyse (au paragraphe 27), mais aucune analyse n’a été effectuée relativement à son éducation ou à son niveau d’aptitudes linguistiques. Sur la foi du dossier, il semble que la demanderesse pourrait avoir effectué ses études secondaires en Bosnie-Herzégovine, et la décision ne mentionne aucunement les aptitudes linguistiques de la demanderesse en anglais, ce qui aurait pu être pertinent. L’omission d’effectuer l’analyse établie dans l’arrêt Villani peut être le signe d’une erreur commise au titre de l’alinéa 58(1)b) de la LMEDS.

[13] Finalement, il est défendable de prétendre que la division générale a commis une erreur relativement à son traitement de la preuve produite après la date de fin de la PMA concernant un emploi à temps partiel de 2011 à 2013. La division générale semble s’être fondée sur cette preuve pour conclure que la demanderesse n’était pas atteinte d’une invalidité grave, sans expliquer la façon dont cette preuve appuie la conclusion relative à la gravité à la date de fin de la PMA ou avant cette date. Il ne s’agit pas simplement d’une question du caractère suffisant des motifs dans leur ensemble, ce qui ne constitue pas un motif d’appel « distinct » (voir Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62). La question est plutôt celle de savoir si la division générale a fourni des motifs permettant de comprendre l’analyse effectuée dans le cadre la preuve produite avant et après la date de fin de la PMA respectivement.

[14] Quant à la question de savoir si cet emploi à temps partiel était régulier et véritablement rémunérateur, la division générale n’a pas résumé les gains précisés dans le dossier ou tenu expressément compte dans l’analyse de la raison pour laquelle la demanderesse a quitté cet emploi. La division générale a déclaré que la demanderesse a travaillé pendant [traduction] « de longues heures » et a conclu ce qui suit : [traduction] « Toutefois, étant donné le grand nombre d’heures travaillées, le Tribunal estime que l’appelante était "régulièrement" capable de détenir un emploi véritablement rémunérateur jusqu’à la date de l’audience. » (paragraphe 30).

[15] Il est défendable de soutenir que les motifs ne permettent pas de comprendre la façon dont le Tribunal a conclu que l’emploi à temps partiel était véritablement rémunérateur, car il n’y a aucun renvoi aux gains ou à une conclusion claire concernant le caractère prévisible ou régulier de la capacité de travailler de la demander et le nombre d’heures que la division générale considère comme étant un [traduction] « grand nombre ».

[16] Étant donné que la division d’appel a cerné plusieurs erreurs possibles au titre du paragraphe 58(1) de la LMEDS, la division d’appel n’a pas besoin, à ce stade, de considérer aucun des autres motifs soulevés par la demanderesse à ce stade-ci. Conformément au paragraphe 58(2) de la LMEDS, il n’est pas nécessaire d’examiner individuellement chaque motif d’appel pour les accepter ou les refuser (voir Mette v. Canada (Procureur général), 2016 CAF 276).

[17] La demanderesse n’est pas limitée dans sa capacité de poursuivre avec les moyens invoqués dans sa demande de permission d’en appeler, à une exception près. La division d’appel ne tiendra pas compte de tout argument en appel qui se fonde sur de nouveaux éléments de preuve qui n’ont pas été présentés à la division générale (c.-à-d. les résultats de la scintigraphie osseuse et de l’examen par IRM qui ont été produits après la date de l’audience). La division d’appel n’accorde généralement pas la permission d’en appeler au motif de nouveaux éléments de preuve (voir l’arrêt Mette).

[18] Si la demanderesse souhaite présenter des observations relatives à la preuve qui a été ignorée par la division générale concernant la maladie de Lyme, elle devra fournir des renseignements supplémentaires concerne l’endroit où cette preuve figure dans le dossier.

Conclusion

[19] La demande de permission d’en appeler est accordée. La présente décision d’accorder la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.