Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelante, E. G., a travaillé comme infirmière autorisée jusqu’en septembre 2011. Elle a alors cessé de travailler en raison de troubles de santé mentale provoquant des psychoses et d’une déficience cognitive notable. Elle a reçu un diagnostic de schizophrénie. Elle demande à obtenir une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. La division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) a conclu qu’elle n’était pas admissible à une telle pension. Je dois déterminer si, eu égard aux circonstances de l’espèce, la division générale a commis une erreur de droit en parvenant à ses conclusions.

Genèse de l’instance

[3] L’appelante a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada en août 2012. L’intimé, le ministre de l’Emploi et du Développement social, a rejeté sa demande. L’appelante a fait appel de la décision de l’intimé devant la division générale; celle-ci a statué que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave à l’échéance de sa période minimale d’admissibilité, le 31 décembre 2013. (La fin de la période minimale d’admissibilité correspond à la date la plus tardive à laquelle un requérant doit être réputé invalide.)

[4] L’appelante a interjeté appel de la décision de la division générale sans invoquer les moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), mais a précisé qu’elle attendait toujours un certificat de santé pour un retour au travail et qu’elle demeurait en congé de maladie de longue durée.

[5] Dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, j’ai conclu que la division générale avait omis de reconnaître qu’il existait une possible date établie au prorata, soit février 2014, et qu’elle avait donc négligé de déterminer si l’appelante était devenue invalide entre le 1er janvier 2014 et le 28 février 2014. J’ai cependant jugé que la preuve dont disposait la division générale ne permettrait pas de conclure que l’appelante était devenue invalide au cours de cette période additionnelle.

[6] J’ai également conclu que la division générale avait mal interprété certains des éléments de preuve, étant donné qu’elle s’est fiée aux déclarations de l’appelante sans bien tenir compte de la preuve documentaire portée à sa connaissance. J’ai accordé la permission d’en appeler du fait que la division générale pourrait avoir commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de la situation particulière de l’appelante pour évaluer sa capacité, conformément au critère établi par la Cour d’appel fédérale dans Villani Note de bas de page 1.

Question préliminaire

[7] En appui à sa demande de pension d’invalidité, l’appelante a tenté de déposer des dossiers de santé mentale mis à jour, portant sur la période allant du 1er août 2016 au 25 août 2017 (AD4). La division générale n’avait disposé des copies d’aucun de ces dossiers. L’intimé s’est opposé à l’admissibilité de ces dossiers médicaux.

[8] Un appel n’autorise habituellement pas le dépôt de nouveaux éléments de preuve et se limite aux trois moyens d’appel énumérés à l’article 58 de la Loi sur le MEDS.Note de bas de page 2 Dans CvetkovskiNote de bas de page 3, le juge Russel a affirmé que « les nouveaux éléments de preuve ne sont admissibles que dans des cas limités […]. »

[9] Dans GloverNote de bas de page 4, la Cour fédérale a adopté et appuyé les motifs énoncés dans O’Keefe, concluant que la division d’appel n’avait pas erré en refusant d’examiner de nouveaux éléments de preuve dans cette affaire, dans le contexte d’une demande de permission d’en appeler. La Cour a aussi noté que sont prévues, à l’article 66 de la Loi sur le MEDS, des dispositions permettant à la division générale d’annuler ou de modifier une de ses décisions si de nouveaux éléments de preuve lui sont présentés par l’entremise d’une demande. Cependant, cet article prévoit que la demande d’annulation ou de modification doit être présentée au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision.

[10] D’après les faits dont je dispose, je ne suis pas convaincue qu’il existe une raison impérieuse justifiant d'admettre ces dossiers médicaux supplémentaires, comme rien ne donner à penser qu’ils correspondent à l’une des exceptions à la règle générale. Comme l’a affirmé la Cour fédérale, un appel à la division d’appel n’autorise habituellement pas le dépôt de nouveaux éléments de preuve.

Question en litige

[11] La question que je dois trancher est la suivante :

La division générale a-t-elle négligé de tenir compte de la situation particulière de l’appelante, conformément à Villani?

Analyse

La division générale a-t-elle tenu compte de la situation particulière de l’appelante?

[12] L’arrêt Villani explique que le critère juridique pour établir une invalidité grave doit être appliqué avec un certain rapport au « monde réel » et qu’un décideur doit tenir compte de la situation particulière du requérant, comme son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents professionnels et son expérience de la vie. Les passages suivants dans BungayNote de bas de page 5 ont confirmé qu’un décideur doit prendre en considération ces détails :

[11] [. . .] De plus, hormis la brève mention des antécédents de travail de la demanderesse, il n’est pas fait état de son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, son expérience de vie comme l’exige l’arrêt Villani, précité.

[. . .]

[14] Le membre dissident a bien appliqué les directives énoncées dans Villani (au paragraphe 14) au sujet du droit :

Le critère établi dans l’arrêt Villani (2001 CAF 248 (CanLII), [2002] 1 F.C 130) et la jurisprudence exigent que le tribunal et la Commission examinent l’état physique général de la personne.

[13] Dans l’affaire Bungay, la Cour d’appel fédérale a accueilli la demande de contrôle judiciaire et annulé la décision de la Commission d’appel des pensions (Commission), ordonnant qu’un tribunal différemment constitué de la Commission « réexamin[e] [l’]affaire en appliquant le critère établi dans Villani ».

[14] Dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, j’ai spécifié que l’appelante devrait être prête à démontrer la pertinence de sa situation personnelle pour déterminer si elle était atteinte d’une invalidité grave. Malgré cette précision, l’appelante n’a présenté aucune observation qui aborde cette question.

[15] L’intimé soutient que la division générale a établi les facteurs de Villani, aux paragraphes 9 à 13 de sa décision, et qu’elle les a bien pris en considération. L’intimé souligne que l’appelante avait 41 ans quand elle a présenté sa demande de pension d’invalidité; maîtrise bien l’anglais; a fait des études universitaires au Canada; a acquis une expérience professionnelle et suivi une formation qui sont particulières à un emploi; et habite en région urbaine.

[16] L’intimé soutient que [traduction] « ni l’état de santé [de l’appelante], ni son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques et son expérience de travail et de la vie ne l’empêchaient de travailler. » Selon l’intimé, l’exemple du contexte « réaliste », donné par la Cour d’appel fédérale dans Villani, représente l’étendue des occupations véritablement rémunératrices que la personne serait régulièrement capable de détenir, tout en vivant avec de sérieux problèmes de santé.

[17] L’intimé soutient que l’évaluation « réaliste », appliquée au cas de l’appelante, sert à connaître [traduction] « son aptitude à occuper un autre emploi qui est davantage routinier, structuré et supervisé et qui ne suppose pas de prendre directement soin de patients, en tenant compte du fait qu’elle détient un baccalauréat en sciences infirmières, a suivi une formation de sage-femme et est une infirmière diplômée ayant l’anglais pour langue seconde. » L’intimé soutient que le psychiatre consultant, le docteur Scarth, a conclu que l’appelante pouvait travailler, et que son psychologue, le docteur Zaide, a conclu qu’elle pourrait envisager de passer à un emploi de nature et de niveau différents, qui soit davantage [traduction] « routinier, structuré et supervisé et qui ne suppose pas de prendre directement soin de patients. »Note de bas de page 6

[18] L’intimé soutient que le psychiatre et le psychologue ont tous deux tenu compte des caractéristiques de l’appelante, conformément à Villani. L’intimé prétend que, pour ce qui est du psychologue, son évaluation fondée sur Villani est présente dans le test, notamment dans les résultats sur l’échelle d’intelligence. Même si le test comme tel ne fait pas référence à la situation particulière de l’appelante, je remarque que le psychologue avait recueilli des renseignements exhaustifs sur ses antécédents, notant son âge, ses aptitudes linguistiques, ainsi que son expérience de travail et de la vie.

[19] L’intimé soutient que, même si la Cour d’appel fédérale a statué dans les décisions Villani, Bungay et GarretNote de bas de page 7 qu’un décideur doit mener une analyse conforme aux principes de Villani, la Cour a aussi établi qu’une telle analyse n’est pas essentielle si la preuve démontre que le requérant est capable de travailler ou qu’il travaille carrément. Dans l’affaire KiriakidisNote de bas de page 8, par exemple, monsieur Kiriakidis travaillait. Cette affaire est différente de celle qui nous occupe du point de vue des faits, puisque l’appelante ne travaillait pas.

[20] L’intimé affirme également que la Cour d’appel fédérale a conclu, dans DoucetteNote de bas de page 9, qu’il n’était pas nécessaire de mener une analyse en profondeur fondée sur Villani, puisque des éléments de preuve permettaient d’appuyer des vues de la Commission d’appel des pensions selon lesquelles la véritable cause de l’incapacité du demandeur de reprendre le travail était « l’insuffisance de ses efforts ». La Cour d’appel fédérale était prête à admettre que monsieur Doucette souffrait de difficultés scolaires et cognitives qui le désavantageaient dans une recherche d’emploi, mais elle a conclu que la preuve permettait de penser qu’il existait du travail qu’il pouvait faire malgré ces limitations. Une évaluation professionnelle a révélé que monsieur Doucette était capable de faire certains emplois, tels que pompiste, répartiteur ou télévendeur.

[21] La juge Desjardins, dissidente, a écrit que l’analyse juridique du critère « réaliste » est une analyse exigeante à laquelle la Commission était tenue de procéder. Elle a jugé qu’à défaut d’effectuer cette analyse, la Commission n’avait pas appliqué correctement le droit aux faits dont elle était saisie et qu'elle avait, ce faisant, commis une erreur de droit.

[22] En employant le qualificatif « en profondeur » dans Doucette, la Cour laissait entendre qu’une certaine analyse — sans nécessairement être « en profondeur » — était requise, bien que la Commission n’en ait pas fait dans ce cas-là. La Cour a plutôt mené sa propre analyse. Elle a conclu qu’il suffisait qu’un décideur se fonde sur les dossiers médicaux et des évaluations professionnelles détaillées révélant une capacité de travail chez le requérant, et qu’un décideur pouvait donc, sur ce fondement, être libéré de son obligation de mener une analyse en profondeur basée sur Villani.

[23] En bref, en l’absence d’une évaluation processionnelle détaillée ou d’un document analogue, un décideur demeure généralement obligé de mener l’analyse conforme à Villani. Il peut néanmoins exister des circonstances permettant à un décideur de se soustraire à cette obligation, notamment lorsqu’un requérant a fait le choix déraisonnable de ne pas suivre les traitements recommandés. Dans LalondeNote de bas de page 10, la Cour d’appel fédérale a statué que le contexte « réaliste » suppose aussi de se demander si le refus du requérant de suivre le traitement est déraisonnable ou non, et quel impact ce refus peut avoir sur son état, dans le cas où le refus est jugé déraisonnable.

[24] L’intimé défend fermement que la cause InclimaNote de bas de page 11 s’applique aussi, et que l’appelante ne peut être réputée invalide puisqu’elle n’a pas démontré qu’elle avait fait des efforts pour obtenir et conserver un emploi qui ont été infructueux pour des raisons de santé. Cependant, ceci présuppose que l’appelante avait une capacité de travail. Avant de pouvoir appliquer Inclima, le décideur doit avoir constaté que le requérant avait une capacité de travail, compte tenu de sa situation particulière. Autrement dit, un décideur doit mener une analyse basée sur Villani avant de pouvoir déterminer si le requérant possède une quelconque capacité de travail et s’il a démontré que ses efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux vu son état de santé.

[25] En observant la décision de la division générale, on remarque qu’elle ne contient, ni dans la section de la preuve ni dans celle de l’analyse, aucune analyse visant à déterminer l’incidence de la station particulière de l’appelante sur sa capacité à détenir une occupation véritablement rémunératrice dans un contexte « réaliste » au moment de sa période minimale d’admissibilité. À cet égard, la division générale aurait, selon toute vraisemblance, erré en omettant de mener une analyse du critère « réaliste ».

[26] Comme le docteur Zaide a examiné les antécédents, l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, et l’expérience professionnelle et personnelle de l’appelante, il est possible de soutenir que le rapport neuropsychologique pourrait être un substitut à une analyse conforme à Villani qu’aurait elle-même menée la division générale, comme l’évaluation professionnelle dans Doucette. Si la division générale avait explicitement reconnu qu’elle substituait le rapport de Zaide à sa propre analyse basée sur Villani, j’aurais été prête à conclure qu’elle avait rempli son obligation de mener une évaluation « réaliste ».

L’appelante a-t-elle essayé tous les traitements recommandés?

[27] Comme je l’ai précisé plus tôt, il peut y avoir des situations où une évaluation fondée sur Villani n’est pas nécessaire, notamment lorsqu’un requérant a fait le choix déraisonnable de ne pas suivre les traitements recommandés.

[28] La division générale s’est fondée sur l’opinion médicale du psychiatre du 20 juin 2012Note de bas de page 12. Le docteur Scarth a suggéré que l’appelante se soumette à un test neuropsychologique, même s’il ne s’attendait pas à ce que ce test révèle des déficiences cognitives suffisamment importantes pour avoir une incidence sur sa capacité à exercer convenablement et sécuritairement son métier.

[29] Cependant, lorsque l’appelante s’est soumise à l’évaluation neuropsychologique, celle-ci a révélé de légères déficiences dans son fonctionnement cognitif, [traduction] « considérablement en deçà des niveaux auxquels on s’attend de la part d’une infirmière dans son domaine de spécialitéNote de bas de page 13. » Aux yeux du docteur Zaide, les résultats remettaient en question l’aptitude de l’appelante à réintégrer ses anciennes fonctions, et ce, même de manière graduelle. Il a jugé qu’elle avait fait montre de nombreuses forces qui [traduction] « pourraient lui permettre d’essayer de reprendre un emploi dans un autre domaine de spécialité » (mis en évidence par la soussignée).Note de bas de page 14 En d’autres termes, il n’était aucunement garanti que l’appelante allait être capable de recommencer à travailler, même dans un autre domaine de spécialité.

[30] Le docteur Zaide a recommandé la rééducation cognitive. Il a également suggéré que l’appelante soit examinée par un psychiatre pour déterminer si des médicaments servant à améliorer le fonctionnement cognitif seraient utiles.

[31] Aucun rapport ou dossier médical actuel ou mis à jour après 2012 n’a été présenté à la division générale pour montrer si l’appelante avait été réévaluée par un psychiatre (dans le but de déterminer si elle devait prendre certains médicaments pour possiblement améliorer son fonctionnement cognitif), ou monter qu’elle avait fait de la rééducation cognitive.

[32] Le psychologue avait formulé plusieurs autres recommandations à l’intention de l’appelante, notamment le maintien d’antipsychotiques de base, la psychoéducation et des interventions de soutien par l’entremise d’un thérapeute, ainsi que la thérapie cognitivo-comportementale.

[33] Il est difficile de dire si la division générale a cherché à savoir si l’appelante avait suivi ou respecté ces traitements qui lui avaient été recommandés, et, dans le cas où elle ne l’aurait pas fait, si elle disposait d’une explication raisonnable pour ce choix ou ce refus, ou quel en avait été l’effet sur son état d’incapacité. 

[34] La schizophrénie de l’appelante était en rémission depuis plusieurs années. Au moment de l’audience devant la division générale, l’appelante a témoigné qu’elle était [traduction] « complètement rétablie » et qu’elle n’avait aucun symptôme. L’appelante avait bon espoir que son médecin de famille lui donne un certificat de santé pour un retour au travail en septembre 2015.

[35] En se fondant en grande partie sur le témoignage de l’appelante et l’opinion du psychiatre, la division générale a conclu que l’appelante pourrait reprendre son ancien emploi. Le membre a aussi admis la déclaration de l’appelante voulant qu’elle n’avait plus aucune limitation en lien avec la schizophrénie. C’est probablement pour ces raisons que la division générale a jugé inutile, d’une part, de déterminer si l’appelante pouvait être réputée atteinte d’une invalide grave à l’échéance de sa période minimale d’admissibilité et, d’autre part, de déterminer si elle avait suivi tous les traitements recommandés. Comme la division générale a admis que l’appelante était [traduction] « complètement rétablie », cette dernière n’était pas tenue de suivre les traitements recommandés par le docteur Zaide.

[36] Pourtant, cela ne tenait pas compte des résultats au test neuropsychologique, qui avait révélé que le jugement de l’appelante était considérablement altéré et qu’elle comprenait très peu sa maladie. Le test montrait aussi qu’elle était atteinte de déficiences légères à modérées sur le plan du fonctionnement cognitif, et que la gravité de ses déficiences cognitives nuisait à sa capacité de remplir les fonctions que supposait son ancien emploi, en dépit de son état stable et de sa rémission. On peut penser que l’appelante avait sans doute décidé de ne pas suivre les traitements adéquats parce qu’elle avait une conscience limitée de son état et que son jugement était [traduction] « considérablement altéré ».

[37] D’un côté, les résultats du test neuropsychologique auraient dû conduire la division générale à faire preuve d’une certaine prudence, plutôt que d’admettre nécessairement la perception de l’appelante au sujet de son état et de sa capacité; mais, de l’autre côté, le docteur Zaide avait donné deux options à l’appelante, dont l’une comprenait d’envisager une transition et de reprendre un emploi de nature et de niveau différents, qui soit davantage routinier, structuré et supervisé et qui ne suppose pas de prendre directement soin de patients. 

[38] Malgré les lacunes dans la preuve dont la division générale était saisie et l’absence d’une analyse basée sur Villani, la division générale avait ultimement le droit de se fonder sur la recommandation du docteur Zaide voulant que l’appelante devrait envisager une transition et reprendre un emploi différent, qui convienne davantage à ses limitations et ses déficiences.Note de bas de page 15 Il en est ainsi puisque le docteur Zaide avait tenu compte de la situation particulière de l’appelante pour lui suggérer, parmi ses options, d’envisager une transition et de reprendre un emploi différent.

[39] Même si le résultat d’une telle transition était quelque peu hypothétique, cette recommandation avait néanmoins été formulée, obligeant ainsi l’appelante a essayé, à tout le moins, d’effectuer cette transition.Note de bas de page 16 Bien que l’appelante garde espoir de reprendre son ancien emploi et attende toujours de recevoir un certificat médical à cet effet, cette possibilité semble avoir été écartée, compte tenu des résultats de son test neuropsychologique. Par contre, il y avait d’autres options qu’elle n’avait pas explorées.

[40] Enfin, je souligne que l’appelante a fait savoir, dans les observations qu’elle m’a présentées, qu’elle participait de façon très active à des projets bénévoles.Note de bas de page 17 Bien que le bénévolat ne permette pas en soi de prouver sa capacité, il donne à penser, dans le cas de l'appelante, que ses déficiences cognitives étaient légères à modérées (comme les avait décrites le docteur Zaide) et qu’elle était capable de faire la transition recommandée par le docteur Zaide. L’ampleur et la nature du travail bénévole que fait actuellement l’appelante nuisent à son appel et laissent croire qu’elle n’est pas présentement atteinte d’une invalidité grave.

[41] L’appelante prétend qu’elle est atteinte d’une invalidité grave puisqu’elle est incapable de reprendre son ancien emploi, mais cela ne suffit pas dans le cadre du Régime de pensions du Canada. Conformément à l’alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada, une invalidité n’est grave que si elle rend le requérant régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[42] L’appelante prétend que son invalidité est prolongée parce qu’elle n’a pas travaillé pendant plusieurs années et parce que son assureur continue de lui verser des prestations d’invalidité de longue durée. Cependant, une invalidité n’est considérée comme prolongée que si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès. La division générale n’a pas expressément traité de la question de savoir si l’invalidité de l’appelante était prolongée, puisqu’elle avait conclu qu’il n’y avait pas invalidité grave. Qui plus est, même si l’appelante n’avait pas travaillé pendant plusieurs années, elle doit être atteinte d’une invalidité qui est à la fois grave et prolongée pour être admissible à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada.

Conclusion

[43] Même si la division générale n’a pas mené une analyse basée sur Villani, celle-ci était inutile compte tenu des circonstances de fait de l’espèce, vu l’existence d’un test neuropsychologique approfondi dans le cadre duquel le psychologue avait pris en considération la situation particulière de l’appelante, et avait fait savoir qu’elle pouvait envisager de faire une transition vers des domaines d’emploi pour lesquels il l’avait jugée apte. De plus, il n’y avait simplement aucune preuve médicale pour l’année 2013, et même le début de 2014, qui aurait permis à la division générale de bien déterminer si l’appelante pouvait être considérée comme étant atteinte d’une invalidité grave à l’échéance de sa période minimale d’admissibilité. Je souligne que l’appelante participe à l’heure actuelle à différentes activités bénévoles et qu’elle fait montre d’une capacité cognitive suffisante pour qu’elle puisse passer à [traduction] « un emploi de nature et de niveau différents », conformément à la recommandation du docteur Zaide. Pour ces quatre motifs, l’appel est rejeté.

Date de l'audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

17 et 30 janvier 2018

Téléconférence

E. G., appelante (seulement le 30 janvier 2018)
Viola Herbert (parajuriste), représentante de l’intimé
Dale Randell (avocat), représentant de l’intimé

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