Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et Décision

Introduction

[1] Le 27 juin 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada a conclu qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada n’était pas payable au demandeur. Le 18 septembre 2017, le demandeur a présenté une demande de permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal.

Question en litige

[2] La division d’appel doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

Permission d’en appeler

[3] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission. La division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[4] Le paragraphe 58(2) de la LMEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Une cause défendable en droit est une cause qui a une chance raisonnable de succès (voir Fancy c. Canada (Procureur général), 201 CAF 63).

Moyens d’appel

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[6] Le demandeur soutient que la division générale a commis une erreur de droit au titre de l’alinéa 58(1)b) de la LMEDS des façons suivantes : a) en n’appliquant pas le principe établi dans l’arrêt Bungay c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 47, selon lequel toutes les incapacités dont pourrait être atteint le requérant et qui ont des conséquences sur l’employabilité du requérant doivent être prises en considération, et non seulement les incapacités principales ou les plus évidentes (ce qui nécessite une évaluation de l’état du requérant dans son ensemble); b) en ne satisfaisant pas l’exigence prévue dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248, selon laquelle il faut évaluer la situation du demandeur dans un contexte « réaliste ».

Analyse

[7] Le demandeur n’a pas soulevé un motif d’appel prévu à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Évaluation des problèmes de santé du demandeur dans son ensemble

[8] La section relative à la preuve de la décision de la division générale comprend des renvois à la destruction post-traumatique du demandeur de la hanche droite (paragraphes 14 et 15) et à la tendinite chronique au talon d’Achille gauche (paragraphe 14). La section relative à l’analyse de la décision (paragraphe 27) renvoie également à la douleur du demandeur à l’épaule, qui est survenue après la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). La division générale a souligné que le demandeur prend du Tylenol extra fort pour traiter la douleur (paragraphe 12). La division générale a souligné les rapports de Dr Martin, dans lesquels il a déclaré que les limitations du demandeur étaient la rigidité, la faiblesse à la hanche droite avec une jambe droite courte et la sensibilité au tendon d’Achille gauche. Dr Martin a déclaré que le demandeur sera toujours limité aux activités légères et que le demandeur est probablement incapable d’effectuer autre chose que des activités très légères et préférablement sédentaires (paragraphes 14 et 15). Le demandeur a déclaré qu’il pouvait demeurer en position assise de 45 minutes à une heure à la fois (paragraphe 11).

[9] Dans son analyse, la division générale n’a pas ignoré ou fait abstraction d’un élément de preuve concernant les problèmes de santé du demandeur. La division générale a encore une fois reconnu la preuve médicale de Dr Martin (paragraphes 23 et 24) et a conclu, par conséquent, que le demandeur a des limitations, mais qu’il n’est pas incapable d’effectuer tout type d’emploi (paragraphe 25) à la date de fin de sa PMA, le 31 décembre 2014. La division générale a également renvoyé à la tendinite au tendon d’Achille, a fait remarquer que le demandeur recevait des traitements de physiothérapie (paragraphe 26) et a souligné que la preuve médicale relative à son épaule selon laquelle il devait [traduction] « effectuer ses activités régulières du mieux qu’il le peut » (paragraphe 27). L’arrêt Bungay prévoit que la division générale doit tenir compte de l’ensemble des incapacités possibles du requérant qui ont une incidence sur son employabilité, et non seulement les plus importantes incapacités ou la principale incapacité (ce qui exige une évaluation de l’état du requérant dans son ensemble). La discussion des incapacités par la division générale n’était pas cloisonnée de façon à créer une erreur de droit défendable en l’espèce selon l’arrêt Bungay.

[10] Le demandeur semble prétendre qu’il y avait un troisième problème médical, à savoir la douleur chronique. Même s’il existait certainement une preuve devant la division générale selon laquelle le demandeur a souffert de douleurs pendant une période prolongée, soit un trouble de la douleur chronique n’était pas un trouble distinct souligné dans le dossier médical présenté à la division générale. Néanmoins, la douleur était certainement un facteur clé pour comprendre l’expérience du demandeur concernant sa hanche.

Prise en considération de la situation personnelle du demandeur

[11] La division générale a souligné la situation personnelle du demandeur dans son résumé de la preuve, puis tenu compte de cette situation dans son analyse relative à la question de savoir si l’état du demandeur était grave. Lue dans son ensemble, la décision de la division générale ne soulève pas une cause défendable relativement à l’erreur commise en n’appliquant pas la situation personnelle réaliste du demandeur, comme il est prévu dans l’arrêt Villani.

[12] Lorsque la division générale détermine si un demandeur est incapable de détenir pendant une période durable une occupation véritablement rémunératrice, l’arrêt Villani prévoit clairement (au paragraphe 38) que les occupations hypothétiques dont la division générale doivent tenir compte « ne peuvent pas être dissociées de la situation particulière du requérant, par exemple son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience ».

[13] En mentionnant la preuve, la décision de la division générale fait état à l’âge, aux antécédents de travail à titre d’opérateur de machinerie lourde, d’opérateur de machine à imprimer et de technicien tireur, et à une instruction de douzième année (paragraphes 7 et 8). La division générale a également mentionné la preuve du demandeur concernant le fait qu’il ne s’est pas recyclé en raison de difficultés financières (paragraphe 11).

[14] Dans le cadre de l’analyse, la division générale déclare ce qui suit (au paragraphe 28) :

[traduction]

Le critère de gravité doit être évalué dans un contexte réaliste (Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248). Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie. L’appelant était âgé de 43 ans au dépôt de la demande. Il possède une douzième année et il compte beaucoup d’années d’expérience de travail dans le domaine de l’imprimerie. Néanmoins, en gardant à l’esprit les circonstances personnelles de l’appelant et de ses problèmes de santé, le Tribunal conclut que ses circonstances personnelles n’auraient pas eu de conséquences défavorables sur sa capacité à chercher et, au besoin, à conserver un emploi à temps partiel ou à temps plein.

[15] Même si le paragraphe 28 mentionne précisément l’âge, les antécédents de travail et l’instruction du demandeur, il est vrai que la division générale n’a pas expressément renvoyé encore une fois aux circonstances financières du demandeur en ce qui concerne le recyclage. La division générale est présumée avoir examiné l’ensemble de la preuve qui lui a été présenté, mais cette présomption sera écartée lorsque la valeur probante des éléments de preuve qui n’ont pas été expressément traités est d’un degré tel qu’ils auraient dû l’être (voir Lee Villeneuve c. Canada (Procureur général), 2013 CF 498; Kellar c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 204; Litke c. Canada (Ressources humaines et Développement social), 2008 CAF 366). La valeur probante de la preuve devrait être prise en considération à la lumière de l’obligation du demandeur lorsqu’il existe une preuve de capacité de travailler pour démontrer que les efforts déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de cet état de santé (Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117). La valeur probante de la preuve sur la situation financière du demandeur relativement au recyclage est faible en l’espèce, car, selon la preuve du demandeur, il n’a jamais postulé pour un emploi (paragraphe 11).

[16] Le demandeur semble faire valoir que la division générale a mal appliqué l’arrêt Villani en conclu que la situation personnelle du demandeur n’aurait aucune influence défavorable sur sa capacité de chercher un autre emploi, au lieu d’étudier la question de savoir s’il était capable de réintégrer le marché du travail et d’obtenir un emploi adapté.

[17] Dans l’arrêt Bungay, la Cour d’appel fédérale a interprété l’arrêt Villani comme une décision voulant que l’approche « réaliste » prévoie que la division générale doit déterminer si un demandeur, dans les circonstances de ses antécédents et de son état de santé, est employable (c’est-à-dire, capable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice). La division générale a appliqué ce principe. La division générale a tenu compte de circonstances réalistes, comme l’âge et l’instruction du demandeur et la preuve médicale de Dr Moore concernant les limitations et le traitement de la douleur, pour conclure qu’il existait une preuve de capacité de travailler. La même situation personnelle sur laquelle la division générale s’est fondée pour déterminer que les limitations du demandeur ne l’empêchaient pas de travailler s’appliquait à l’examen de la question de savoir si le demandeur était incapable de chercher ou de conserver un emploi en raison de son invalidité. Cela est illustré au paragraphe 28 de la décision de la division générale.

[18] Le demandeur a le fardeau de présenter l’ensemble de la preuve et des arguments requis conformément au paragraphe 58(1) de la LMEDS (voir Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300). Toutefois, la division d’appel devrait dépasser l’application mécanique des termes des moyens d’appel (voir Karadeolian c. Canada (Procureur général), 2016 CF 615). La division d’appel a examiné le dossier et est convaincue que la division générale n’a pas ignoré ou mal interprété la preuve. Le demandeur n’était pas représenté à l’audience, et la division générale a recueilli minutieusement des renseignements qui ont précisé et amélioré la preuve figurant déjà au dossier relativement aux problèmes de santé et à la situation personnelle du demandeur. La division générale a consacré du temps à veiller à ce que le demandeur soit en mesure de fournir un témoignage détaillé sur ses antécédents de travail et la nature précise de ses limitations physiques.

Conclusion

[19] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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