Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Decision and reasons

Decision

[1] L’appel est accueilli, et la demande de pension d’invalidité est rejetée.

Aperçu

[2] B. H. (requérante) a terminé sa douzième année et a commencé à travailler. Elle a travaillé pour la dernière fois à titre de collationneuse jusqu’en 1997. Elle a présenté une première demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada en 1998. Elle a prétendu être invalide en raison de la fibromyalgie, de la sclérose en plaques, de la dépression et de problèmes de contrôle de la vessie. Le ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences a rejeté la demande. La requérante a interjeté appel de cette décision devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, et un tribunal de révision a rejeté l’appel le 13 avril 1999.

[3] La requérante a de nouveau présenté une demande de pension d’invalidité en octobre 2013. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté la demande également. La requérante a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale. Le 6 juillet 2016, la division générale du Tribunal a accueilli l’appel et elle a conclu que la requérante était invalide en décembre 1997. L’appel interjeté par le ministre contre cette décision est accueilli, et la demande de pension d’invalidité est rejetée parce que la division générale a commis une erreur et qu’il n’existe aucune preuve selon laquelle la pension d’invalidité pouvait être accordée à la requérante.

Question préliminaire : L’audience a été de l’avant même si la requérante ne disposait pas du dossier complet

[4] Lorsque la représentante du ministre a commencé à formuler ses observations, elle souhaitait renvoyer particulièrement à certains paragraphes de la décision de la division générale. La requérante n’avait pas apporté une copie de la décision à l’audience. Elle a insisté que l’audience aille de l’avant malgré le fait qu’elle ne possédait pas ce document.

Questions en litige

[5] La division générale a-t-elle commis une erreur parce que la question qu’elle devait trancher l’avait déjà été?

[6] La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte de l’ensemble de la preuve portée à sa connaissance lorsqu’elle a conclu que l’invalidité était grave et prolongée?

Analysis

[7] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) régit les activités du Tribunal. Elle prévoit qu’il existe seulement trois moyens d’appel limités pouvant donner gain de cause à l’appel : la division générale a omis d’observer les principes de justice naturelle; elle a commis une erreur de droit; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 1. Le ministre soulève deux moyens d’appels, qui doivent faire l’objet d’un examen dans ce contexte.

Question en litige 1 : La question avait-elle déjà été tranchée devant la division générale?

[8] Il existe une règle de droit qui s’appelle « le principe de la chose jugée ». Il prévoit que, si une affaire a déjà été tranchée par un décideur quasi judiciaire, elle ne peut pas être plaidée de nouveau dans le cadre d’une autre procédure judiciaire. Afin d’appliquer cette règle, trois conditions doivent être remplies. Les conditions sont les suivantes :

  1. les parties sont les mêmes dans les deux instances;
  2. la décision antérieure était finale;
  3. la question en litige était la même dans les deux procédures judiciaires.

Ces conditions doivent être clairement remplies en l’espèce. Les parties sont la requérante et le ministre (même si le titre du ministre a changé, il s’agit de la même partie, car il est responsable de la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada).

[9] La décision antérieure était finale. Le tribunal de révision a rendu sa décision le 13 avril 1999. La requérante a demandé la permission d’en appeler à la Commission d’appel des pensions qui a été refusée. Aucune autre action ne pouvait être prise.

[10] La question en litige était également la même dans les deux causes. Dans chaque cause, la requérante devait prouver qu’elle était invalide selon le Régime de pensions du Canada le 31 décembre 1999 ou avant cette date (il s’agit de la date de fin de sa période minimale d’admissibilité qui a été calculée selon le moment où elle a fait des cotisations au Régime de pensions du Canada au moyen de revenus d’emploi). La requérante a fondé sa demande sur les mêmes problèmes de santé dans les deux causes.

[11] Il n’existe aucun motif sur le plan juridique d’exercer un pouvoir discrétionnaire et de ne pas appliquer le principe de la chose jugée en l’espèce.

[12] Cependant, étant donné que le tribunal de révision a conclu que la requérante n’était pas invalide à la date de la décision d’avril 1999 ou avant cette date, la requérante serait admissible à une pension d’invalidité si elle a établi qu’elle était devenue après la date de la décision du tribunal de révision, le 13 avril 1999, et avant la date de fin de la RPC, soit le 31 décembre 1999.

[13] La division générale a bien énoncé cela dans sa décision. Elle a également résumé la preuve médicale et le témoignage présentés. Cela comprenait les rapports présentés par Drs Hader et Voll. Le 1er avril 1999, Dr Hader a déclaré que la requérante avait conservé la capacité d’effectuer des types de travaux sédentaires et légersNote de bas de page 2. Le 29 avril 1999, Dr Voll a déclaré que la sclérose en plaques de la requérante était bénigne à ce moment-là, et il n’y avait eu aucun épisode récurrent depuis 1996. Ces renseignements étaient devant le tribunal de révision.

[14] Je suis convaincue que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a conclu que la requérante était invalide en décembre 1997. Le tribunal de révision avait récemment conclu que la requérante n’était pas invalide à cette dateNote de bas de page 3. La décision était finale. La division générale n’avait aucun pouvoir juridique de changer ou d’infirmer cette décision. Il s’agissait d’une erreur de droit.

[15] Le libellé de la Loi sur le MEDS ne qualifie pas les erreurs de droit. La division d’appel n’est donc pas tenue de faire preuve de déférence à l’égard des interprétations de la division générale. L’appel est accueilli à ce motif.

Question en litige 2 : la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’invalidité de la requérante était grave et prolongée

[16] De plus, afin qu’un requérant soit invalide selon le Régime de pensions du Canada, il doit être atteint d’une invalidité grave et prolongée. Le Régime de pensions du Canada définit une invalidité grave comme étant une invalidité qui rend un requérant régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 4. La division générale s’est fondée sur les rapports de Dr Voll de septembre 2013Note de bas de page 5 et de mai 2014Note de bas de page 6 pour appuyer sa conclusion selon laquelle la requérante était invalide. Cependant ces rapports contredisaient les rapports produits par le même médecin en 1999, à savoir la période visée. De plus, Dr Hader a également déclaré en 1999 que la requérante avait la capacité d’effectuer des tâches sédentaires ou légères, et la requérante a fait l’objet d’une évaluation des capacités fonctionnelles à ce moment-là. Celle-ci a permis de conclure que la requérante avait conservé la capacité de travailler. Par conséquent, la conclusion de la division générale selon laquelle la requérante était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice le 31 décembre 1999 a été tirée de façon erronée et sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[17] Le Régime de pensions du Canada définit une invalidité prolongée comme étant une invalidité qui durera vraisemblablement pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraînera vraisemblablement le décès. Rien ne prouve que l’état de santé de la requérante a changé dans une mesure que la requérante est devenue invalide entre le 14 avril 1999 et le 31 décembre 1999. Il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir que l’état de santé était de durée indéfinie à ce moment-là. La division générale a donc commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’invalidité était prolongée.

[18] La décision de la division générale était fondée sur ces conclusions de faits erronées. Il s’agit d’une autre erreur prévue à la Loi sur le MEDS, et l’appel est accueilli à ce motif également.

Conclusion

[19] L’appel est accueilli pour ces motifs.

[20] La Loi sur le MEDS prévoit les mesures correctives que la division d’appel peut prendreNote de bas de page 7. En l’espèce, il est approprié de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. La requérante déclare qu’elle est invalide en raison des mêmes problèmes de santé qui existaient lorsque le tribunal de révision a rendu sa décision le 13 avril 1999. Rien ne prouve que ces problèmes de santé ont changé entre le 14 avril 1999 et le 31 décembre 1999 de façon à rendre la requérante invalide. Les rapports médicaux produits vers 1999 font tous état du fait que la requérante avait la capacité de travailler à ce moment-là.

[21] Même si je conviens que la requérante peut être incapable de travailler maintenant et même si j’éprouve de la compassion pour son état actuel, la décision de savoir si elle est devenue invalide entre le 14 avril 1999 et le 31 décembre 1999 ne peut pas être fondée sur la compassion ou des circonstances atténuantes.

[22] La demande de pension d’invalidité de la requérante est rejetée.

Date de l'audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 5 février 2018

Vidéoconférence

B. H., intimée
Sylvie Doire, représentante de l’appelant

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