Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] D. R. (requérante) a cessé de travailler comme adjointe administrative en novembre 2014. Elle a été mise à pied dans le cadre d’une réduction d’effectifs, mais a aussi affirmé qu’elle ne pouvait plus travailler en raison de l’ostéoporose touchant sa hanche droite; d’une thrombopénie due à une splénomégalie; d’une cirrhose, possiblement à cause du gonflement à ses pieds, ses chevilles et ses jambes; et de l’hépatite B. Elle a commencé à toucher une pension de retraite du Régime de pension du Canada en septembre 2015, et a présenté le même mois une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Elle peut seulement annuler la pension de retraite et la remplacer par une pension d’invalidité si elle est réputée être devenue invalide avant le mois où sa pension de retraite est devenue payable. Ainsi, il lui fallait démontrer qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en août 2015 ou avant cette date.

[3] Le ministre a rejeté la demande au stade initial et après révision. Elle a fait appel de la décision du ministre devant le Tribunal, et la division générale a rejeté son appel en septembre 2017.

[4] La requérante demande d’obtenir la permission d’appeler de la décision de la division générale. La division d’appel doit déterminer s’il est défendable que la division générale a commis dans sa décision une erreur justifiant d’accorder à la requérante la permission d’en appeler.

Question en litige

[5] Est-il défendable que la division générale a commis une erreur de fait puisqu’elle n’a pas reconnu que la requérante avait un problème de consommation d’alcool?

Analyse

[6] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) énonce les moyens permettant de faire appel de décisions de la division générale. Le paragraphe 58(1) énumère les moyens suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] Au stade de la demande de permission d’en appeler, un demandeur doit démontrer que l’appel a une chance raisonnable de succès. Pour remplir cette exigence, la requérante doit seulement démontrer qu’il existe un motif défendable grâce auquel son appel pourrait avoir gain de cause.

Est-il défendable que la division générale a commis une erreur de fait puisqu’elle n’a pas reconnu que la requérante avait un problème de consommation d’alcool?

[8] Il n’existe pas de cause défendable au motif que la division générale aurait commis une erreur de fait en ne reconnaissant pas que la requérante avait un problème de consommation d’alcool. La division générale a tenu compte de hépatite C et de la cirrhose de la requérante, ainsi que de l’opinion du docteur Lau quant à la nécessité qu’elle s’abstienne de consommer de l’alcool afin de pouvoir être admissible à un traitement contre hépatite C.  

[9] La requérante soutient que la division générale a commis une erreur pour l’application de l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS du fait qu’elle a ignoré un fait important figurant au dossier d’appel. La requérante affirme que la division générale n’a pas reconnu l’existence de son problème de consommation d’alcool en rapport avec tous ses autres problèmes de santé qui, ensemble, la rendaient gravement invalide au sens du RPC. La requérante soutient qu’il faut prendre en compte son problème de consommation d’alcool pour brosser un tableau plus exact de son invalidité.

[10] La décision de la division générale ne mentionne pas expressément un problème de consommation d’alcool chez la requérante, ni les limitations en résultant proprement ou les types de traitement entrepris pour le soigner. Le paragraphe 25 de la décision fait cependant référence au diagnostic posé par le docteur Lau, à savoir celui d’une [traduction] « cirrhose attribuable à la combinaison de l’hépatite C et de l’alcool. Elle avait été avisée en juin de s’abstenir de consommer d’alcool mais avait rapporté en octobre 2015 qu’elle buvait encore. » La division générale a admis que le docteur Lau avait noté que la requérante [traduction] « pourrait être admissible à un traitement contre l’hépatite » si elle s’abstenait de consommer de l’alcool.

[11] La division d’appel a écrit à l’avocat de la requérante pour lui demander où se trouvait, au dossier, l’information concernant le problème de consommation d’alcool de la requérante. L’avocat a répondu en se reportant au témoignage de la requérante. Dans ce témoignage, elle a affirmé qu’elle s’abstenait de boire de l’alcool et qu’elle voyait le docteur Lau tous les six mois pour son hépatite C et sa cirrhose. L’avocat de la requérante a également fait référence à la lettre du 7 mars 2016 du docteur Lau (GD2-67), à laquelle la division générale a fait référence dans sa décision. Il est écrit dans cette lettre que le traitement principal recommandé à la requérante en juin 2015 consistait à continuer de s’abstenir de consommer de l’alcool et que la requérante buvait cependant toujours en date de sa dernière visite d’octobre 2015. L’avocat de la requérante souligne aussi que le témoignage de la requérante quant à ses capacités fonctionnelles différait de celui de son époux, ce qui soutient l’existence de son problème de consommation d’alcool.

[12] S’il existait une preuve du problème de consommation d’alcool et que la division générale l’avait ignorée, sa conclusion quant à la gravité de l’invalidité de la requérante pourrait être erronée comme elle ne serait pas fondée sur l’effet cumulatif de tous les problèmes de santé de la requérante.Note de bas de page 1

[13] Néanmoins, la division d’appel ne peut accorder la permission d’en appeler sur une base hypothétique. La Cour fédérale a statué que la division d’appel avait erré en omettant de « de préciser de quelque façon que ce soit […] les éléments de preuve sur lesquels elle s’était appuyée pour établir si la défenderesse avait une chance raisonnable de succès en appel.Note de bas de page 2 » Une décision accordant la permission d’en appeler doit mettre en évidence les éléments de preuve permettant de conclure que l’appel a une chance raisonnable de succès.Note de bas de page 3

[14] Même si le critère est peu rigoureux pour obtenir la permission d’en appeler, celle-ci ne peut pas être accordée sur une base hypothétique. La requérante n’a invoqué aucun élément de preuve précis au dossier qui montrerait qu’elle avait un problème de consommation d’alcool. Si l’avocat de la requérante a fourni une preuve qui pourrait aider la division générale à déduire que la requérante était atteinte d'un tel problème, la division générale n’a pas commis d’erreur factuelle en ne déduisant pas l’existence d’un diagnostic précis d’après la preuve. À défaut d’indiquer la preuve exacte qu’aurait ignorée la division générale quant à un problème de consommation d’alcool, la requérante n’a pas une chance raisonnable de succès. La division générale n’a pas ignoré la preuve relative à sa consommation d’alcool (en opposition à un problème de consommation d’alcool) et a fait référence à l’opinion du docteur Lau dans sa décision.

[15] Un requérant doit fournir tous les éléments de preuve et les arguments nécessaires en vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS.Note de bas de page 4 Par ailleurs, la division d’appel ne doit pas qu’examiner de façon mécanique les motifs d’appel.Note de bas de page 5 En l'espèce, la division d’appel a examiné le dossier et est convaincue que la division générale n’a pas ignoré ou mal interprété des éléments de preuve. Le témoignage de la requérante portait principalement sur sa douleur et les problèmes de mobilité auxquels elle faisait face depuis une blessure survenue en août 2014. La requérante a produit une preuve concernant le traitement de son hépatite C. Durant l’audience, le membre de la division générale l’a questionnée sur l’opinion du docteur Lau. La requérante a affirmé qu’elle s’était abstenue de boire de l’alcool parce qu’elle espérait que son hépatite C puisse [traduction] « un jour » être traitée. Dans son plaidoyer final, l’avocat de la requérante a mentionné que [traduction] « sa consommation d’alcool avait perduré à travers le temps » et a fait référence à la déclaration du docteur Lau voulant que la requérante [traduction] « buvait encore ».

[16] La division générale n’a pas ignoré la preuve médicale du docteur Lau concernant la cirrhose attribuable à la combinaison d’une hépatite C et de l’alcool. Elle y fait référence dans son analyse, au paragraphe 52. La décision ne fait pas mention d’un « problème de consommation d’alcool » puisqu’il n’y avait aucune preuve portant sur ce diagnostic précis.

Conclusion

[17] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

Keith Poulson, avocat de la requérante

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