Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli et le dossier est retourné à la division générale pour un nouvel examen.

Aperçu

[2] Mme McCoy (requérante) a travaillé pendant plus de 25 ans à titre d’adjointe exécutive. Elle a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada et a déclaré être invalide en raison d’anxiété et de dépression. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. La requérante a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale. La division générale du Tribunal a accueilli l’appel, statuant que la requérante était invalide en date d’avril 2013. Le ministre interjette appel de cette décision. L’appel est accueilli puisque la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée selon laquelle le médecin de famille a soutenu la décision de la requérante de refuser de prendre des médicaments antidépresseurs.

Questions en litige

[3] La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée selon laquelle le Dr Barnes a soutenu la décision de la requérante de refuser de prendre des médicaments antidépresseurs?

[4] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en ne tenant pas compte des principes juridiques de la décision InclimaNote de bas de page 1?

Analyse

[5] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) régit le fonctionnement du Tribunal. Elle prévoit uniquement les trois moyens d’appel suivants : la division générale n’a pas observé les principes de justice naturelle; elle a commis une erreur de compétence ou de droit; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Les arguments du ministre relativement à l’appel en l’espèce doivent être examinés dans ce contexte.

Question en litige no 1 : Conclusion de fait erronées

[6] Pour qu’un appel soit accueilli sur le motif que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, le ministre doit prouver trois choses : que la conclusion de fait en question était erronée; qu’elle a été tirée par la division générale de façon abusive ou arbitraire ou sans égard aux éléments portés à sa connaissance; et que la décision reposait sur cette conclusion de fait.

[7] La division générale a tiré la conclusion de fait suivante :

[traduction]
La [requérante] a refusé les suggestions du médecin de prendre des médicaments antidépresseurs. Il semble que son médecin de famille était en faveur de cette position de ne pas prendre le risque, quoique faible, d’avoir des crises en raison de l’interaction des médicaments. En dépit du fait que le psychiatre ait également suggéré la médication, le Tribunal estime que la [requérante] avait une véritable peur des effets de tout médicament sur ses crises. Le Tribunal accepte l’explication de la [requérante], soutenue par son médecin de famille de ne pas prendre la médication prescriteNote de bas de page 2.

Le ministre fait valoir que la conclusion de fait de la division générale selon laquelle le médecin de famille a soutenu le refus de la requérante de prendre les médicaments antidépresseurs était erronée. En juin 2013, le médecin de famille a écrit qu’il n’avait pas prescrit de médicament à ce moment-là [traduction] « en raison du trouble convulsif sous-jacent » et qu’un avis psychiatrique serait [traduction] « très bénéfique pour soutenir son absence du travail »Note de bas de page 3. Il a noté plus tard que la requérante était réticente à prendre la médication, le trouble convulsif et qu’il [traduction] « attendait l’avis psychiatrique »Note de bas de page 4. Également en novembre 2013, ce médecin a rempli des formulaires pour l’assureur en soins de santé de la requérante sur lesquels il a inscrit qu’aucun traitement n’était en cours et qu’une consultation psychiatrique était en attenteNote de bas de page 5.

[8] Lorsque cette preuve est lue dans son ensemble, elle n’appuie pas la conclusion de fait tirée par la division générale selon laquelle le médecin de famille a soutenu le refus de la requérante d’essayer les médicaments antidépresseurs en raison de son trouble convulsif sous‑jacent. Au mieux, ce médecin n’a pas prescrit la médication en juin 2013 ou en novembre 2013 parce qu’une orientation à un psychiatre était en attente, et il voulait savoir ce que pensait le spécialiste avant de prescrire ce traitement.

[9] Cette conclusion de fait a été tirée par la division générale sans tenir compte de tous les éléments portés à sa connaissance, notamment le fait qu’une consultation psychiatrique était en attente.

[10] La décision a été fondée sur cette conclusion de fait erronée. La décision énonce que [traduction] « Le Tribunal accepte l’explication de la [requérante], soutenue par son médecin de famille de ne pas prendre la médication prescrite »Note de bas de page 6. Il pourrait s’agir d’une erreur au titre de la Loi sur le MEDSNote de bas de page 7. L’appel doit être accueilli.

[11] Aucun élément de preuve n’a été porté à la connaissance de la division générale concernant toute incidence éventuelle de la prise d’un antidépresseur sur le trouble convulsif sous-jacent de la requérante ou le traitement de ce trouble. Il est donc impossible de déterminer si le refus de la requérante d’essayer les médicaments antidépresseurs était objectivement raisonnable ou non. Cependant, il s’agit d’une question différente de celle à savoir l’erreur de la division générale d’énoncer que le médecin de famille a soutenu sa décision.

[12] Le ministre soutient également que l’exigence de suivre les recommandations de traitement inclut l’obligation pour la requérante de s’informer au sujet de la médication proposée par ses médecins. Il a fait référence à la note du Dr OkoronkwoNote de bas de page 8 selon laquelle la requérante n’a pas lu les renseignements fournis au sujet d’une médication. Cependant, il s’agit de la seule déclaration dans le dossier écrit qui fait référence à un moment où la requérante n’a pas lu ou examiné un traitement proposé. Le fait que la requérante ne se soit jamais informée à ce sujet n’est pas une preuve concluante; cela ne fait que décrire une visite lors de laquelle elle n’a pas lu la documentation. La décision de la division générale ne mentionne pas cette preuve et ne tire pas de conclusion de fait à cet égard. Je ne suis donc pas convaincue que le fait que la requérante n’a pas lu au sujet d’un médicament lors d’une visite chez le médecin permet d’établir qu’elle a refusé de suivre la recommandation de traitement.

[13] La représentante du ministre fait également valoir que la division générale a commis une erreur parce que le psychiatre a recommandé de façon constante que la requérante prenne la médication pendant qu’il la traitait. La division générale n’a tiré aucune conclusion de fait erronée à cet égard. La division générale a résumé la preuve du psychiatre, y compris le fait que la requérante a refusé sa recommandation de prendre des antidépresseursNote de bas de page 9, et en a tenu compte dans son analyse de la preuveNote de bas de page 10.

Question en litige no 2 : Erreur de droit

[14] Le ministre soutient également que la division générale a commis une erreur de droit. La Cour d’appel fédérale enseigne aussi dans l’arrêt Inclima que, là où il y a des preuves de capacité de travail, une personne doit démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux en raison de son état de santé. La décision énonce correctement celaNote de bas de page 11. La division générale, après avoir soupesé la preuve, a déterminé que la requérante n’avait pas la capacité de travailler, alors ce principe juridique ne s’appliquait pasNote de bas de page 12. Ceci est une erreur de droit. L’arrêt Inclima n’appuie pas la thèse selon laquelle un requérant doit démontrer que ses efforts pour trouver et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son incapacité à travailler, mais la question de savoir si quelque preuve que cette capacité existe. La décision division générale ne fait référence à aucune preuve de capacité de travail. Par conséquent, la division générale a commis une erreur de droit parce qu’elle n’a pas appliqué le principe juridique approprié aux faits portés à sa connaissance.

[15] Le ministre soutient que la déclaration de la requérante, sur le formulaire de demande de pension d’invalidité, selon laquelle elle accepterait de se soumettre à une évaluation de réadaptation était une preuve de sa capacité de travailler. Il n’appartient pas à la division d’appel d’apprécier de nouveau la preuve dont la division générale était saisieNote de bas de page 13. L’invitation du ministre à apprécier de nouveau la preuve et à conclure que la déclaration sur la demande constituait une preuve de capacité de travail de manière à ce que les principes juridiques de l’arrêt Inclima devraient être appliqués en l’espèce n’est pas fondée.

[16] Le ministre fait aussi valoir que le psychiatre n’a jamais mentionné que la requérante ne pouvait pas travailler. Cependant, la requérante ne travaillait pas lorsqu’il l’a traitée. De plus, son rôle n’était pas d’évaluer sa capacité à travailler. Par conséquent, le fait qu’il n’a pas fait de déclaration au sujet de sa capacité de travailler ne peut pas servir de fondement par l’une ou l’autre des parties en l’espèce.

Conclusion

[17] L’appel est accueilli puisque la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée au titre de la Loi sur le MEDS et qu’elle a commis une erreur de droit.

[18] La Loi sur le MEDSNote de bas de page 14 prévoit la réparation que la division d’appel peut accorder dans un appel. En l’espèce, la preuve devra être soupesée. Cela est au cœur du mandat de la division générale. L’affaire est donc renvoyée à la division générale pour réexamen. Pour éviter toute crainte de partialité, l’affaire devrait être instruite par un autre membre de la division générale.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 3 avril 2018

Téléconférence

Roxanne McCoy, intimée
Kathleen Erin Cullin, avocate

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