Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Aperçu

[1] L’appelante, B. C., a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) en mars 2014Note de bas de page 1. Dans sa demande, elle a déclaré avoir été impliquée dans des accidents de véhicule en juin et en décembre 2011. Dans le questionnaire qu’elle a rempli dans le cadre de la demande, elle a déclaré avoir cessé de travailler en octobre 2012.

[2] Le ministre de l’Emploi et du Développement social a refusé la demande initialementNote de bas de page 2 et après révisionNote de bas de page 3. B. C. a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, qui a rejeté l’appel en concluant qu’elle n’était pas atteinte d’une invalidité grave, au sens du RPC, à la date de fin de la période minimale d’admissibilité (PMA), à savoir le 31 décembre 2011, ou avant cette date. L’appelante interjette appel de la décision de la division générale.

[3] Pour les raisons qui suivent, j’ai décidé que l’appel est rejeté.

Observations

[4] Dans son avis d’appelNote de bas de page 4, l’appelante soutient que la membre de la division générale [traduction] « a commis des erreurs de droit tangibles et manifestes », a fait abstraction d’une preuve fiable et a tiré des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[5] En ce qui concerne les erreurs de droit prétendues, l’appelante soutient que la membre a appliqué le mauvais fardeau de la preuve. À cet égard, elle fait valoir que la membre lui a demandé de prouver que son invalidité était grave hors de tout doute raisonnable, et non selon la prépondérance des probabilitésNote de bas de page 5. Elle soutient également que la membre n’a pas tenu compte de la question de savoir si l’invalidité était grave dans un contexte réaliste, conformément aux principes établis par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général)Note de bas de page 6. Elle soutient également que la membre de la division générale a commis une erreur de droit en se fondant sur le fait que l’appelante ne s’est pas rendue à l’urgence après son accident de véhicule en décembre 2011 afin d’appuyer une conclusion selon laquelle l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité graveNote de bas de page 7. Finalement, elle fait valoir que sa preuve et celle de ses sœurs relativement à l’état de l’appelante après la date de fin de la PMA [traduction] « donnaient à la membre du Tribunal un examen complet a posteriori. Le fait qu’elle n’a pas tiré profit de cet examen complet a posteriori constituait une erreur de droit qui a entraîné une décision arbitraire et qui ne peut être prise en compte. »

[6] En ce qui concerne les prétendues erreurs de fait, l’appelante soutient que la preuve, particulièrement celle de ses sœurs et la sienne, appuie une conclusion d’invalidité. Elle fait valoir que la membre de la division générale n’a pas accordé suffisamment d’importance à la preuve qui, selon elle, appuie une conclusion d’invalidité. Elle soutient également que la membre a fait abstraction de la preuve qui, même si elle a été produite après la PMA, prouvait que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave à la date de fin de la PMA ou avant cette date.

[7] En réponse à l’allégation selon laquelle la division générale n’a pas appliqué l’arrêt Villani adéquatement, le ministre se fonde sur l’arrêt Giannaros c. Canada (Ministre du Développement social)Note de bas de page 8 pour appuyer son argument selon lequel la division générale n’était pas tenue de prendre en considération les facteurs établis dans l’arrêt Villani parce qu’elle a conclu, au paragraphe 65 de la décision que l’appelante n’était pas atteinte d’un grave trouble médical à la date de fin de sa PMA. Le ministre fait valoir que, néanmoins, l’appelante a mal interprété le critère et que la division générale a bien pris en considération et appliqué l’arrêt Villani.

[8] En ce qui concerne les prétendues erreurs de fait, le ministre soutient que l’appelante n’a pas souligné de conclusions abusives ou arbitraires et qu’elle choisit des éléments précis de la preuve en ignorant des éléments importants qui n’appuient pas une conclusion d’invalidité. Le ministre soutient également que l’appelante invite la division d’appel à accorder beaucoup d’importance à son témoignage et à faire abstraction d’une partie importante de la preuve médicale. Le ministre déclare que la division générale a expliqué pourquoi elle a accordé moins d’importance au témoignage de l’appelante, et la division d’appel n’a pas la compétence de soupeser de nouveau la preuve afin d’en arriver à une conclusion différente fondée sur les mêmes faits.

[9] Les deux parties ont soutenu que l’appel peut être instruit sur la foi du dossier et des observations écrites. L’appel a été instruit de cette façon.

Questions en litige

Prétendues erreurs de droit

Question en litige no 1: La division générale a-t-elle appliqué le mauvais fardeau de la preuve?

Question en litige no 2: La division générale a-t-elle omis de tenir compte de la question de la gravité dans un contexte « réaliste », comme il est prévu dans l’arrêt Villani?

Prétendues erreurs de fait

Question en litige no 3 : La division générale a-t-elle omis d’accorder le poids approprié à la preuve?

Question en litige no 4 : La division générale a-t-elle fait abstraction de la preuve qui démontrait que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave à la date de fin de la PMA ou avant cette date?

Analyse

[10] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) prévoit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refuse d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] Afin d’accueillir l’appel, je dois être convaincue que l’appelante a prouvé qu’il est plus probable que le contraire que la division générale ait commis une erreur visée par le paragraphe 58(1).

Prétendues erreurs de droit

[12] La Cour d’appel fédérale a récemment précisé que, lorsque le législateur conçoit un cadre administratif à plusieurs niveaux, la portée de l’examen par le tribunal d’appel de la décision du tribunal inférieur doit être déterminée par le libellé dans la loi dominanteNote de bas de page 9.

[13] Je suis d’accord avec le ministre que, selon le libellé sans réserve de l’alinéa 58(1)b) de la LMEDS, la division générale n’est pas tenue de faire preuve de déférence en ce qui concerne les erreurs de droit. Contrairement aux observations de l’appelante, les erreurs de droit ne doivent pas être [traduction] « tangibles ou manifestes »; l’erreur de droit doit seulement être commise.

Question en litige no 1: La division générale a-t-elle appliqué le mauvais fardeau de la preuve à la question de savoir si l’invalidité de l’appelante était grave à la date de fin de la PMA ou avant cette date?

[14] L’appelante soutient que la membre de la division générale lui a demandé à tort de prouver hors de tout doute raisonnable qu’elle était invalide au sens du RPC. Afin d’aborder les arguments de l’appelante avec précision, voici les arguments sommaires de son avocate relativement à ce moyen d’appel :

[traduction]

L’appel concerne principalement le fardeau de la preuve. La membre du Tribunal a déclaré plus d’une fois que le fardeau était la « prépondérance des probabilités » ou « plus probablement que le contraire ». Cependant, elle a commis trois erreurs de droit en tentant d’appliquer le fardeau de la preuve, et ces erreurs constituent les moyens d’appel :

(1) elle a tenu compte de la preuve de présentation (ce qui constitue la moitié du fardeau de la preuve) et elle l’a appliquée par erreur au fardeau du « hors de tout doute raisonnable »;

(2) même si elle a tenu compte de la preuve de présentation, elle a ignoré les observations écrites abordant la preuve de persuasion (l’autre moitié du fardeau de la preuve);

(3) elle n’a pas étudié la période située après la date de fin de la PMA pour avoir la certitude qu’elle devait tenir compte de la preuve hors de tout doute raisonnable.

Ces erreurs ont fait en sorte qu’elle a tiré une conclusion arbitraire et inexplicable. La preuve aurait dû clairement démontrer qu’il était plus probable que le contraire qu’il existait une invalidité. De plus, malgré le doute résiduel qu’elle pourrait avoir eu quant à la « déficience », elle a refusé de le dissiper en examinant au-delà de la PMA pour constater le résultat, qui était très certainement l’invalidité au sens du Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 10.

[15] Pour les motifs suivants, j’ai conclu que ce moyen d’appel ne donne pas gain de cause à l’appel.

[16] La déclaration de l’avocate de l’appelante selon laquelle le fardeau de présentation est [traduction] « la moitié du fardeau de la preuve » et selon laquelle le fardeau de persuasion constitue l’autre moitié est incorrecte. La Cour suprême du Canada a conclu qu’il existe seulement un fardeau de la preuve (aussi appelé « fardeau de persuasion ») dans une affaire au civil et qu’il s’agit de la prépondérance des probabilitésNote de bas de page 11. La Cour d’appel fédérale a confirmé que la personne qui demande une pension d’invalidité du RPC a le fardeau de prouver que son invalidité satisfait aux exigences prévues au paragraphe 42(2) du RPC selon la prépondérance des probabilitésNote de bas de page 12. Cela signifie que la partie requérante doit prouver qu’il est plus probable que le contraire qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongées à la date de fin de la PMA ou avant cette date, et de façon continue par la suite.

[17] Le fardeau de la preuve est entièrement distinct du fardeau de présentation. Comme il est souligné par la Cour suprême du Canada, le fardeau de présentation n’est pas le fardeau de la preuveNote de bas de page 13. Le fardeau de présentation détermine si une question doit être laissée au juge des faits, alors que le fardeau de persuasion détermine la façon de trancher la questionNote de bas de page 14. Par exemple, dans une demande de pension d’invalidité, la partie requérante doit présenter une preuve médicale à l’appui d’une demandeNote de bas de page 15. Il s’agit d’un fardeau de présentation, dont l’appelante s’est acquittée en l’espèce parce qu’elle a bel et bien présenté une preuve médicale. Le rôle de la division générale à cette étape était d’analyser la preuve, documentaire ou orale, portée à sa connaissance afin de déterminer si l’appelante s’était acquittée du fardeau de la preuve en démontrant selon la prépondérance des probabilités (sur la foi de la preuve portée à la connaissance de la division générale) que son invalidité satisfaisait aux exigences du RPC.

[18] Dans ses arguments, l’avocate de l’appelante semble laisser entendre que le fardeau de persuasion doit être fondé sur le caractère persuasif des observations écrites et, le fardeau de présentation, sur la preuve. Cela représente une mauvaise interprétation du processus. La membre de la division générale devait tenir compte de l’ensemble de la preuve portée à sa connaissance pour déterminer si une partie s’est acquittée du fardeau de persuasion (à savoir le fardeau de la preuve). Bien que des observations puissent être utiles afin de souligner à une cour ou à un tribunal la preuve sur laquelle une partie se fonde, ces observations ne constituent pas une preuve, et la décision quant à la question de savoir si une partie s’est acquittée du fardeau de la preuve n’est pas fondée sur des observations, mais bien sur le droit et la preuve seulement.

[19] À divers passages dans ses motifs, la membre de la division générale a déclaré qu’il incombait à l’appelante de prouver, selon la prépondérance des probabilités ou selon le principe qu’il est plus probable que le contraire, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de la PMA ou avant cette dateNote de bas de page 16. Après avoir analysé et apprécié la preuve, la membre a déclaré ne pas être convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante était régulièrement incapable de détenir un emploi véritablement rémunérateur à la date de fin de sa PMA. Elle a ensuite conclu que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave, selon la prépondérance des probabilitésNote de bas de page 17. Elle n’a jamais appliqué la norme « hors de tout doute raisonnable ». Par conséquent, je ne suis pas d’accord avec l’allégation selon laquelle la division générale a commis une erreur parce qu’elle a appliqué le mauvais fardeau de la preuve.

[20] Je conclus que l’appel fondé sur ce moyen n’a pas gain de cause.

[21] En ce qui concerne l’argument de l’avocate de l’appelante selon lequel la membre [traduction] « n’a pas examiné au-delà de la PMA pour avoir la certitude qu’elle devait tenir compte de la preuve hors de tout doute raisonnable », l’appelante n’était pas tenue de prouver sa cause au moyen de cette norme de preuve. J’examine les arguments selon lesquels la membre a omis de tenir compte de la preuve concernant la période suivant la date de fin de la PMA et selon lesquels la conclusion de la membre de la division générale [traduction] « était arbitraire et ne pouvait pas être prise en compte » ci-après, aux paragraphes 42 à 47.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle omis de tenir compte de la question de la gravité dans un contexte « réaliste », comme il est prévu dans l’arrêt Villani?

[22] Le rôle de la division générale était de déterminer si l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2011 (fin de la PMA) ou avant cette date, et de façon continue par la suite. Selon le RPC, une invalidité est « grave » si « elle rend la personne […] régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 18 ». Selon la Cour suprême du Canada, dans le contexte du RPC, « le critère d’évaluation est l’aptitude au travail » : une personne peut être atteinte de graves déficiences, mais être inadmissible aux prestations du RPC si ces déficiences, aussi graves qu’elles puissent être, ne l’empêchent pas de gagner sa vieNote de bas de page 19.

[23] Dans l’arrêt Villani, la Cour d’appel fédérale a déclaré que, pour évaluer si une invalidité est grave, la division générale doit adopter une approche « réaliste ». L’approche « réaliste » prévoit qu’on détermine si une partie requérante, dans les circonstances des antécédents et de l’état de santé, est apte à travailler, c’est-à-dire régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. L’aptitude à travailler n’est pas évaluée dans l’abstrait, mais plutôt à la lumière de l’ensemble des circonstances. Les circonstances d’une partie requérante sont divisées en deux catégories :

a) les antécédents de la partie requérante : les questions relatives à l’âge, au niveau d’instruction, aux aptitudes linguistiques, aux antécédents professionnels et à l’expérience de vie sont pertinentes en l’espèceNote de bas de page 20;

b) l’état de santé de la partie requérante : il s’agit d’une vaste demande de renseignements nécessitant l’évaluation de l’ensemble de l’état de la partie requérante. Toutes les déficiences possibles de la partie requérante qui ont une incidence sur son aptitude à travailler, sur le plan physique et psychologique, doivent être prises en considération, et non seulement les déficiences les plus importantes ou la déficience principaleNote de bas de page 21.

[24] L’appelante soutient que la membre de la division générale a mal interprété le sens de l’arrêt Villani et qu’elle l’a ainsi mal appliqué, voire pas du toutNote de bas de page 22. Elle affirme que la membre fait abstraction ou oublie complètement l’invalidité mentale de l’appelante, ce qui pourrait représenter une partie importante de l’invaliditéNote de bas de page 23. Elle n’est pas d’accord avec l’appréciation des facteurs établis dans l’arrêt Villani par la membre.

[25] J’estime que ce moyen d’appel n’a pas de fond.

[26] La membre a déclaré avec raison que, pour décider si une personne est atteinte d’une invalidité grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs comme l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents professionnels et l’expérience de vieNote de bas de page 24. La membre a souligné que l’appelante a une douzième année et d’autres qualifications, elle parle anglais et, au moment de la date de fin de la PMA, elle était âgée de 50 ans. Elle a également déclaré que rien dans les antécédents de travail ou l’expérience de vie de l’appelante ne donnait à penser qu’elle aurait été incapable d’entreprendre un emploi avec des tâches légères à la date de fin de la PMA ou avant cette date. Rien ne me permet de conclure que la membre a commis une erreur de droit dans son application des facteurs établis dans l’arrêt Villani.

[27] En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la membre n’a pas tenu compte de l’ensemble de l’état de santé de l’appelante parce qu’elle a fait abstraction de l’invalidité mentale de l’appelante ou qu’elle a oublié cet élément, cela n’est pas corroboré par les motifs. La membre a renvoyé aux directives de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Bungay c. Canada (Procureur général)Note de bas de page 25 selon lesquelles il faut examiner l’état de santé « réel » de la partie appelante en tenant compte de l’ensemble de l’état de santé, et non seulement de la déficience principaleNote de bas de page 26. Au paragraphe 41, la membre a répété la preuve de Dr Lubbers, psychologue, qui a conclu dans un rapport daté de janvier 2014 qu’ [traduction] « il n’y avait aucune conséquence importante sur le plan clinique par rapport aux blessures de l’appelante, comme un trouble du stress post-traumatique ou un trouble anxieux grave ». Dans la partie relative à l’analyse de ses motifs, la membre a tenu compte de la preuve concernant les troubles psychologiques de l’appelante en déclarant ce qui suit :

[traduction]

[71] Le Tribunal a également tenu compte des résultats des examens médicaux indépendants de janvier 2014 dans lesquels un psychologue, un neurologue et un physiatre ont conclu que rien ne prouvait l’existence d’une déficience continue. Le Tribunal garde à l’esprit que ces examens ont été effectués à la demande de la compagnie d’assurance de l’appelante. Le Tribunal a également tenu compte de l’observation de l’appelante selon laquelle chaque spécialiste a tenu compte de son état de façon isolée. Néanmoins, trois rapports défavorables pris en considération de façon collective ne constituent pas un rapport favorable. Il s’agit seulement d’un facteur dont le Tribunal a tenu compte pour rendre sa décision.

[72] Le Tribunal reconnaît que le Dr Al-Ozairi, psychiatre de la Clinique de traitement des lésions cérébrales, a posé un diagnostic de trouble post‑commotion et de trouble dépressif majeur, de nature légère à modérée. Cependant, ce diagnostic a été rendu plus de trois ans après la date de fin de la PMA. Le Tribunal est incapable de lire le diagnostic se rapportant à la période précédant le 31 décembre 2011.

[28] Il semble que, contrairement aux observations de l’appelante, la membre de la division générale a bel et bien tenu compte des éléments psychologiques de l’état de l’appelante. La membre a également examiné les éléments physiques avant de conclure ce qui suit : [traduction] « Même en tenant compte de l’ensemble des troubles répertoriés de l’appelante, il ne semble pas qu’elle avait un état de santé grave à la date de fin de sa PMANote de bas de page 27. »

[29] En ce qui concerne l’analyse, la membre de la division générale a déclaré avec raison qu’elle devait agir en fonction des arrêts Villani et Bungay et appliquer les principes établis dans ces arrêts dans son analyse de la preuve. Étant donné qu’elle a effectué une analyse approfondie établie par l’arrêt Villani, je ne suis pas tenue de prendre en considération l’argument du ministre selon lequel elle n’était pas obligée de le faire, conformément à la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Giannaros.

[30] J’estime que l’appelante n’a pas établi que la division générale a appliqué une erreur dans son application de l’arrêt Villani.

Prétendues erreurs de fait

[31] Un autre des moyens d’appel prévus devant la division d’appel est celui selon lequel la division générale « a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 28 ». Selon ce libellé, la division d’appel doit faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de fait de la division générale : en plus de la conclusion de fait contestée qui est essentielle (« fondé sa décision sur ») et incorrecte « erronée » pour donner gain de cause à l’appel, la conclusion contestée doit également avoir été tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans avoir tenu compte de la preuve présentée à la division générale. Le libellé donne à penser que la division d’appel doit intervenir si la division générale fonde sa décision sur une erreur qui est clairement manifeste ou contraire au dossierNote de bas de page 29.

Question en litige no 3: La division générale a-t-elle omis d’accorder le poids approprié à la preuve?

[32] L’argument de l’appelante en ce qui concerne ce moyen d’appel est essentiellement que la membre de la division générale aurait dû accorder plus de poids à la preuve de l’appelante, au témoignage de sa sœur D. et à une déclaration écrite de sa sœur M.Note de bas de page 30 qu’à la preuve médicale. L’appelante soutient également que la preuve de ses sœurs et d’elle concernant l’état de l’appelante après la date de fin de la PMA [traduction] « a donné à la membre du Tribunal une rétrospection complèteNote de bas de page 31 ». Elle fait valoir que [traduction] « Le fait de ne pas avoir tiré profiter d’une rétrospection complète constituait une erreur de droit ayant entraîné une décision arbitraire que ne peut pas être prise en compteNote de bas de page 32 ».

[33] Dans cet argument, l’appelante conteste la façon dont la membre de la division générale a soupesé la preuve. Contrairement à l’observation selon laquelle la membre a effectué son analyse de la preuve d’une manière constituant une erreur de droit, l’appréciation de la preuve fait partie du processus de la conclusion de fait.

[34] Les moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la LMEDS ne permettent pas à la division d’appel de soupeser la preuve de nouveau. « Autrement dit, réévaluer la preuve entendue par la division générale n’est pas un motif d’appel qui peut être contempléNote de bas de page 33. »

[35] Dans ses motifs, la membre de la division générale a fourni une justification pour avoir accordé plus de poids à la preuve médicale qu’à la preuve de l’appelante. Elle a conclu que l’appelante [traduction] « a donné un récit vague et elle avait beaucoup de difficulté à se souvenir d’événements importants et de fournir une preuve à l’égard de ces événements », qui se sont produits il y a presque cinq ansNote de bas de page 34. La membre a convenu que cela était dû en raison du temps écoulé et de l’état de l’appelante au moment de l’audience, et non en raison d’un comportement évasif de sa part. En ce qui concerne la preuve de D., la sœur de l’appelante, la membre a souligné que, même si D. a fait de son mieux pour décrire les antécédents de sa sœur, son témoignage n’était pas compatible avec la preuve médicale qui laissait entendre que l’appelante s’était remise en grande partie de son accident de juin 2011 avant son accident survenu en décembre 2011. La membre a déclaré qu’elle n’a pas accordé beaucoup de poids à la déclaration écrite de M., la sœur de l’appelante, qui n’a pas témoigné, car la déclaration n’était pas solennelle.

[36] Par conséquent, la membre a fourni une justification raisonnable pour avoir accordé plus d’importance à la preuve médicale qu’à la preuve de l’appelante et de ses sœurs. L’appelante se fonde sur le rapport de Dr Al-Ozairi, psychiatre, qui avait posé un diagnostic de trouble post‑commotion et d’un trouble de dépression majeure en mars 2015. La membre a fourni une justification pour n’avoir accordé aucune importante au rapport du Dr Al-Ozairi. Elle a déclaré ce qui suit : [traduction] « Cependant, ce diagnostic a été donné plus de trois ans après la date de fin de sa PMA. Le Tribunal n’est pas en mesure de lire le diagnostic remontant à la période précédant le 31 décembre 2011Note de bas de page 35 »,

[37] L’appelante soutient également que la division générale a commis une erreur de droit en se fondant sur le fait que l’appelante ne s’est pas rendue à l’urgence après l’accident de véhicule survenu en décembre 2011. Cela est davantage une prétendue erreur de fait.

[38] Dans son analyse, la membre de la division générale a tiré une conclusion selon laquelle l’état de santé de l’appelante n’était pas grave avant le 28 décembre 2011, date du second accident de véhicule. Elle a ensuite examiné la période entre le second accident de véhicule et la date de fin de la PMA. Elle a déclaré ce qui suit :

[traduction]

Si les blessures subies par l’appelante à la suite de l’accident de véhicule de décembre 2011 avaient été graves, il y aurait lieu de s’attendre à ce qu’elle se présente à l’urgence immédiatement, qu’elle consulte son médecin de famille ou qu’elle se rende à une clinique sans rendez-vous. Cependant, rien ne démontre que l’appelante s’est rendue immédiatement à l’hôpital immédiatement après son accident de véhicule en décembre 2011, et elle n’a pas subi une radiographie ou un tomodensitogramme de la colonne cervicale avant janvier 2012. Aucun des rapports d’imagerie ne permet de tirer des conclusions importantes [notes de bas de page omises]. Elle n’a pas consulté son médecin de famille avant le 20 janvier 2012, soit trois semaines après l’accident de véhicule. Le Dr Shepherd avait donné une prescription de 20 comprimés de Tylenol no 3 en septembre 2011, et celle-ci n’a été renouvelée que huit mois plus tard, ce qui donne à penser que l’appelante ne souffrait pas de douleurs graves pendant cette périodeNote de bas de page 36.

[39] La membre a ensuite examiné la preuve de l’appelante et la preuve médicale produite après la date de fin de la PMA. Après un examen approfondi de la preuve, la membre a conclu que l’invalidité de l’appelante n’était pas grave à la date de fin de la PMA ou avant cette date. La membre avait le droit de prendre cette preuve en considération dans le cadre de son appréciation. Comme il a été souligné, mon rôle ne consiste pas à soupeser la preuve à nouveau.

[40] La membre a raisonnablement examiné la preuve produite entre le second accident de véhicule et la date de fin de la PMA. Il est impossible de déclarer qu’une erreur prévue à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS a été commise en agissant ainsi.

[41] J’estime que ce motif d’appel ne donne pas gain de cause à l’appel.

Question en litige no 4 : La division générale a-t-elle fait abstraction de la preuve qui démontrait que l’appelante était atteindre d’une invalidité grave à la date de fin de la PMA ou avant cette date?

[42] Afin d’établir que la division générale a commis une erreur visée à l’alinéa 58(1)c) de la LMEDS, l’appelante doit établir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée et que cette conclusion de fait était abusive ou arbitraire ou a été tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[43] L’appelante soutient que la membre n’a pas tenu compte de la preuve concernant la période suivant la date de fin de la PMA. Les motifs n’appuient pas cette observation. La membre a tenu compte de la preuve médicale produite après la date de fin de la PMA dans son résumé de la preuve et dans son analyse. Dans le cadre de son analyse, elle a examiné les rapports médicaux produits après la date de fin de la PMA aux paragraphes 75 et 76. Par conséquent, il est impossible de déclarer qu’elle n’a pas tenu compte des éléments portés à sa connaissance ou que sa conclusion [traduction] « était abusive et qu’elle ne devait pas être prise en compte », comme il a été soutenu par l’appelante.

[44] L’appelante soutient ce qui suit : [traduction] « La conclusion de la membre du Tribunal aux paragraphes 65 et 66 selon laquelle l’état de santé de l’appelante ne semblait pas être grave avant le 31 décembre 2011 est appuyée par plusieurs renvois à des améliorations en matière de mouvement et de douleurs, mais on ne fait aucun renvoi à la détérioration ultérieureNote de bas de page 37. » Cependant, la Cour d’appel fédérale a reconnu que la détérioration de l’état d’une partie requérante après la date de fin de la PMA, la manifestation de nouveaux troubles et symptômes ou l’aggravation de troubles présents à la date de fin de la PMA ne sont pas pertinents pour rendre une décision sur la gravité à la date de fin de la PMANote de bas de page 38.

[45] Dans le cadre de ce moyen d’appel, l’appelante soutient également qu’elle était atteinte d’une invalidité grave à la date de fin de la PMA. Elle tente essentiellement de me convaincre d’apprécier de nouveau la preuve et de tirer une conclusion différente. Un appel devant la division d’appel n’offre pas cette possibilité de trancher ou de poursuivre de nouveau la demande.

[46] La preuve appuyait la conclusion de la membre selon laquelle l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave le 31 décembre 2011 ou avant cette date.

[47] J’estime que l’appelante n’a pas démontré selon la prépondérance des probabilités que l’appel fondé sur ce moyen doit être accueilli.

Conclusion

[48] L’appel est rejeté.

Mode d’instruction :

Parties et représentants :

Sur la foi du dossier

B. C., appelante
Joyce Chun, avocate de l’appelante
Ministre de l’Emploi et du Développement social, intimé
Marcus Dirnberger, avocat de l’intimé

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