Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] La requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] La requérante était âgée de 60 ans quand elle a commencé à toucher une pension de retraite du RPC, en octobre 2013. C’est seulement en janvier 2016 qu’elle a présenté une demande de pension d’invalidité. Elle a occupé son dernier emploi comme coordonnatrice de soutien et a arrêté de travailler en janvier 2006 en raison d’une blessure/opération et d’une déficience permanente touchant ses deux mains. Le ministre est d’avis qu’elle n’est pas admissible à une pension d’invalidité puisqu’elle a présenté sa demande pour cette pension plus de 15 mois après le début du versement de sa pension de retraite. La requérante a fait appel de la décision de révision du ministre devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] La requérante soutient qu’elle peut demander une pension d’invalidité du RPC puisqu’elle avait été incapable d’exprimer l’intention de présenter une demande à cet effet entre 2006 et juillet 2016. Elle prétend également être invalide depuis 2006.

Question préliminaire

[4] J’accuse réception du document GD23 et je fais remarquer qu’il est semblable à des lettres antérieures. J’admets le document GD23 et je l’ai communiqué au ministre, sans néanmoins lui avoir demandé d’y répondre.

Question en litige

  1. La requérante était-elle incapable de former et d’exprimer l’intention de présenter une demande de pension d’invalidité avant juillet 2016?
  2. Si tel est le cas, est-ce que ses problèmes de santé — douleur au poignet gauche, état de stress post-traumatique, syndrome de la douleur chronique, anxiété et dépression — la rendaient incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice le mois précédant septembre 2013, moment où elle a commencé à toucher sa pension de retraite?
  3. Si tel est le cas, son invalidité dure-t-elle pendant une période longue, continue et indéfinie?

Analyse

Le requérant ne doit pas toucher une pension de retraite  

[5] Une pension de retraite peut être remplacée par une pension d’invalidité seulement si le bénéficiaire est réputé être devenu invalide avant le mois où il a commencé à toucher sa prestation de retraite. Une personne peut être réputée « invalide » au plus tôt 15 mois avant la date à laquelle le ministre reçoit sa demande de pension d’invalidité.Note de bas de page 1

[6] Concrètement, le RPC ne permet pas d’annuler une pension de retraite et de la remplacer par une pension d’invalidité si la demande de pension d’invalidité est présentée 15 mois ou plus après le début du versement de la pension de retraite.

[7] À moins que puisse s’appliquer l’exception en cas d’incapacité, la requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité. La requérante a commencé à toucher sa pension de retraite du RPC en octobre 2013 et a présenté sa demande de pension d’invalidité du RPC en juillet 2016, soit environ 32 mois après avoir commencé à recevoir ses prestations de retraite. Comme elle a présenté sa demande de pension d’invalidité en juillet 2016, elle ne pourrait être réputée invalide avant avril 2015, soit après le début du versement de sa pension de retraite.

Exception en cas d’incapacité

[8] Le RPC prévoit une exception au délai de 15 mois imparti pour demander une pension d’invalidité du RPC après le début du versement d’une pension de retraite du RPC.

[9] Cette exception permet aux personnes qui n’ont pas la capacité de présenter une demande de prestations de faire antidater leur demande à un moment où elles étaient encore capables de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande.Note de bas de page 2 Pour remplir le critère relatif à l’incapacité, un requérant doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande de prestations.

[10] La capacité de former l’intention de présenter une demande de prestations est semblable à la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent au requérant demandant des prestations.Note de bas de page 3 La capacité doit être évaluée eu égard au sens ordinaire de ce terme et d’après la preuve médicale et les activités dudit requérant.Note de bas de page 4

[11] Le libellé est clair et précis. Il ne requiert pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de pension d’invalidité, mais seulement la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une telle demande.

[12] Je dois examiner la preuve médicale et les activités de l’appelante pour la période séparant la date supposée du début de son invalidité et la date de présentation de sa demande; ces éléments seront révélateurs de sa capacité de former et d’exprimer l’intention de faire une demande au cours de ladite période.

[13] En l’espèce, la période de l’incapacité potentielle qui doit être examinée s’étend de 2006 (date à laquelle la requérante prétend être devenue invalide) à juillet 2016 (date où elle a présenté sa demande de pension d’invalidité).

La requérante avait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande

[14] La requérante affirme qu’elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension d’invalidité à partir de 2006.

[15] Selon le ministre, les renseignements accumulés ne permettent pas de soutenir qu’il y avait eu incapacité au sens du RPC :

  • Rien ne révèle que la requérante avait eu besoin d’une procuration pour que quelqu’un prenne des décisions en son nom;
  • Elle avait pu donner son consentement pour différents examens médicaux et interventions médicales (opération en 2006, injections de lidocaïne en 2007), se rendre seule à des rendez-vous médicaux et requérir elle-même d’autres consultations (recommandation auprès d’un psychologue demandée en 2007).
  • Durant la période où elle prétend avoir été incapable de présenter une demande de pension d’invalidité du RPC, elle avait été en contact avec la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) au sujet d’une demande de prestations auprès de l’organisme.
  • Elle a signé sa demande de pension de retraite du RPC, en 2013, de même que sa demande de pension d’invalidité du RPC, en 2016.

[16] J’ai examiné la preuve médicale versée au dossier ainsi que les activités de la requérante pour déterminer si elle avait été incapable de « former ou d’exprimer l’intention » de présenter une demande de pension d’invalidité. 

[17] En mai 2017, le docteur D. Ho, médecin de famille, a rempli la déclaration d’incapacité au nom de la requérante, notant qu’elle était frappée d’incapacité depuis 2006. Il a répondu par la négative à la question de savoir si la requérante était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande en raison de son état de santé. Il a ensuite précisé que la requérante prenait des analgésiques et devait composer avec beaucoup de stress en raison de ses difficultés au quotidien et de ses interactions avec la CSPAAT. Ses fonctions cognitives pourraient ne pas toujours être optimales.Note de bas de page 5

[18] La requérante a écrit qu’elle prenait énormément de médicaments depuis 2006 et que cela avait une incidence sur sa capacité à bien prendre des décisions et parfois à raisonner.Note de bas de page 6 Elle avait été mal conseillée par la CSPAAT et Service Canada dans son processus de demande auprès du RPC.

[19] J’ai accordé beaucoup de poids à la déclaration du docteur Ho voulant que la requérante n’avait pas été incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande. Même si le médecin a affirmé que ses fonctions cognitives pourraient ne pas toujours être optimales, ses activités démontrent qu’elle avait été capable de consentir à des interventions et des examens médicaux variés en 2006 et 2007Note de bas de page 7; de se rendre seule à des rendez-vous médicaux; et de requérir elle-même des consultations complémentaires.Note de bas de page 8 Au cours de la période où elle prétend avoir été incapable de faire une demande de pension d’invalidité du RPC, la requérante avait été en communication avec la CSPAAT au sujet d’une demande de prestations auprès de l’organisme. Elle avait également présenté des demandes auprès du RPC pour une pension de retraite en 2013 et une pension d’invalidité en 2016. La déclaration du docteur Ho selon laquelle son incapacité n’avait pas été continue est étayée par la position de la requérante elle-même, selon qui sa capacité de raisonner et de bien prendre des décisions était parfois compromise.

[20] Pour pouvoir recourir à la disposition de l’incapacité, la requérante doit avoir été incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations et la période de son incapacité doit avoir été continue. La capacité de former l’intention de faire une demande de prestations n’est pas sensiblement différente de la capacité de former une intention relativement aux autres choix qu’elle a faits durant la période où elle prétend avoir été frappée d’incapacité. J’estime que la requérante n’a pas démontré qu’elle avait été frappée d’incapacité au sens du RPC.

[21] Comme la requérante ne peut se prévaloir de l’exception en cas d’incapacité, je n’ai pas besoin de déterminer si elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en septembre 2013.

[22] La requérante a demandé au ministre d’enquêter pour savoir si une erreur avait été commise par le personnel du ministère. Le 2 mai 2018, le ministre a nié tout conseil erroné ou erreur administrative et a accordé à la requérante 30 jours pour faire appel de cette décision auprès de la Cour fédérale. Je comprends que la requérante est frustrée du fait que le Tribunal n’est pas habilité à statuer sur des allégations de conseil erroné ou d’erreur administrative portées contre le ministre. Le Tribunal est créé par voie législative et ne jouit donc que des pouvoirs qui lui sont conférés par sa loi habilitante. Bien que je compatisse à la situation de la requérante, je ne peux recourir aux principes d’équité ni tenir compte de circonstances atténuantes pour lui permettre d’annuler sa pension de retraite afin de la remplacer par une pension d’invalidité.

Conclusion

[23] La requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC.

[24] L’appel est rejeté.

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