Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le ministre a établi que le requérant avait cessé d’être invalide au sens du Régime de pensions du Canada (RPC) à la fin d’avril 2002.

Aperçu

[2] Le requérant a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC en juin 2000, après avoir cessé de travailler en juillet 1999 en raison de complications liées au sidaNote de bas de page 1. Le ministre a accueilli sa demande après révision en novembre 2001. En décembre 2012, le ministre a informé le requérant qu’il examinait son admissibilité à une pension d’invalidité puisqu’il semblait avoir repris le travail. Après son examen, le ministre a déterminé que le requérant ne satisfaisait plus aux critères d’admissibilité pour toucher une pension d’invalidité. Sa pension a pris fin rétroactivement le 30 avril 2002, à la suite d’un essai de travail de trois mois. Le ministre a conclu que le requérant avait encouru un trop-payé de 92 083,04 $ pour la période entre mai 2002 et décembre 2012.

[3] Le requérant a interjeté appel de la décision auprès du ministre, mais son appel a été rejeté initialement et après révision. Le requérant a ensuite interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

Question en litige

[4] Le ministre a-t-il établi que le requérant avait cessé d’être invalide à la fin d’avril 2002?

Analyse

[5] Une pension d’invalidité cesse d’être payable le mois au cours duquel la partie requérante cesse d’être invalideNote de bas de page 2. Le ministre a le fardeau de prouver que, selon la prépondérance des probabilités, la partie requérante a cessé d’être invalide au moment où ses prestations ont été annuléesNote de bas de page 3.

Le requérant a repris un emploi véritablement rémunérateur en février 2002

[6] Toute partie requérante atteinte de problèmes de santé graves et prolongés peut être inadmissible à une pension d’invalidité si elle est jugée régulièrement capable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 4. Une occupation véritablement rémunératrice suppose que l’emploi soit réel et rémunérateur, que la personne exerce une fonction utile, et que l’indemnité reflète une récompense appropriée pour la nature du travail effectuéNote de bas de page 5.

[7] Le requérant a reçu un diagnostic de VIH en 1994Note de bas de page 6. Son état est rapidement devenu grave. Il a commencé un traitement antirétroviral qui depuis a eu des effets positifs sur sa santé. Toutefois, son médecin a affirmé que des modifications neurocognitives permanentes peuvent survenir chez toute personne atteinte d’une maladie aussi grave que celle du requérant. Celui-ci éprouve des difficultés constantes liées à la concentration, à l’insomnie, à la fatigue et à la réalisation de plusieurs tâches à la fois. Bien que je reconnaisse qu’il est atteint de problèmes de santé graves et prolongés, j’estime que la preuve appuie la position du ministre selon laquelle le requérant a repris un emploi véritablement rémunérateur en février 2002.

[8] Bien qu’il ait été sans emploi pendant environ deux ans et demi, il est on ne peut plus évident qu’il a repris un emploi véritablement rémunérateur au début de février 2002, lorsqu’il a accepté un poste de gestionnaire de cas chez XNote de bas de page 7. Il a terminé un essai de travail de trois mois à la fin d’avril 2002. De plus, la preuve démontre que le requérant a conservé un emploi stable dans le domaine des avantages sociaux depuis 2002, malgré quelques courtes interruptions et un congé d’invalidité de courte durée à la fin de 2003. Le montant de ses gains est passé de 49 397 $ en 2002 à 97 691 $ en 2014Note de bas de page 8. Dans les questionnaires, les anciens employeurs du requérant ont confirmé qu’il travaillait en moyenne de 35 à 40 heures par semaine. Les questionnaires ne donnent pas à penser qu’il travaillait [traduction] « bénévolement ». Il est vrai que le requérant a eu multiples employeurs depuis 2002, en plus d’avoir fait l’objet de deux cessations d’emploi documentées et d’une démission par consentement mutuel. Toutefois, il a pourtant conservé une bonne stabilité d’emploi. Un de ses employeurs, X, a affirmé que ses compétences ne correspondaient pas aux exigences de l’emploiNote de bas de page 9. Cet employeur a tout de même souligné que le requérant n’avait pas besoin d’aide de ses collègues, qu’il travaillait de façon indépendante, qu’il n’avait eu besoin que d’une supervision occasionnelle et qu’il faisait preuve d’assiduité. Le requérant a fait valoir que son état de santé avait une incidence sur le potentiel de ses gainsNote de bas de page 10; toutefois, la trajectoire des gains d’une personne avant l’apparition d’une invalidité n’est pas pertinente dans le contexte du RPC.

[9] J’estime que la preuve appuie la position du ministre selon laquelle le requérant a repris un emploi véritablement rémunérateur en février 2002, malgré ses problèmes de santé graves et prolongés.

Le requérant n’a pas avisé le ministre qu’il avait repris le travail comme l’exige le RPC

[10] Une personne qui a été jugée invalide au sens du RPC doit aviser le ministre immédiatement si elle retourne travaillerNote de bas de page 11.

[11] Lors de l’audience, le requérant n’a pas contesté le fait qu’il était retourné travailler. Il a plutôt soutenu qu’il ne savait pas qu’il touchait une pension d’invalidité en raison de la diminution de sa fonction cognitive découlant de son état de santé. Il ne se souvenait pas avoir reçu une lettre l’informant que sa demande de pension d’invalidité avait été accueillie. Il a affirmé qu’il est possible qu’il était hospitalisé à ce moment-là. D’ailleurs, en raison de son diagnostic, il n’est pas certain qu’il aurait compris la lettre. Il ne se souvient pas avoir déjà reçu les bulletins annuels « Maintenir le lien » de Service Canada. À l’appui de sa position, il a fourni des lettres de ses médecins demandant que le dysfonctionnement neurocognitif du requérant soit pris en considération au moment de tenir compte de son obligation d’informer Service Canada de son retour au travailNote de bas de page 12.

[12] Bien que les observations du requérant soient prises en compte, la preuve démontre que Service Canada a envoyé une lettre au requérant pour confirmer que sa demande de pension d’invalidité avait été accueillie en novembre 2001Note de bas de page 13. La lettre précisait que le requérant devait informer Service Canada dès que possible si son état de santé s’améliorait ou s’il retournait travailler. D’ailleurs, la preuve montre que le requérant a retiré son appel du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision en décembre 2001 en signant une déclaration selon laquelle la décision du ministre avait été modifiée à sa satisfactionNote de bas de page 14. Je suis donc convaincue que le ministre a informé le requérant à propos de l’accueil de sa demande de pension d’invalidité et de son obligation de rendre compte de toute activité professionnelle future.

[13] Le requérant a reconnu avoir reçu de l’argent du RPC, mais a affirmé avoir supposé qu’il s’agissait des versements de sa pension de survivant du RPC, lesquels ont commencé en juillet 1988. Comme il a reçu un seul chèque ou dépôt, il ne s’est pas rendu compte qu’il recevait les deux types de prestations. Toutefois, le ministre a souligné à juste titre que les relevés T4 annuels du requérant précisaient clairement le revenu du RPC qu’il touchait, soit la pension de survivant et la pension d’invaliditéNote de bas de page 15. Même si le requérant a affirmé qu’il tenait mal ses dossiers et qu’il se fiait aux autres pour produire ses déclarations de revenus, ses explications n’annulent pas son obligation au titre du RPC de déclarer le fait qu’il était retourné au travail.

[14] De plus, je suis davantage persuadée par la preuve du ministre que le requérant reçoit le bulletin annuel « Maintenir le lien » depuis 2004Note de bas de page 16.

[15] Par conséquent, j’estime que la preuve montre que le requérant n’a pas avisé le ministre qu’il avait repris le travail en février 2002, malgré le fait qu’il avait été informé de son obligation de le faire.

Le Tribunal n’a pas compétence pour corriger une erreur administrative

[16] Le RPC prévoit clairement que seul le ministre peut corriger une erreur administrative; le Tribunal n’a pas compétence dans ce domaineNote de bas de page 17.

[17] Le requérant prétend que le ministre a commis une erreur administrative. Il a fait valoir qu’il n’a jamais tenté de cacher ses sources de revenus au gouvernement. Il a fait l’objet d’une vérification par l’Agence du revenu du Canada (ARC) en 2007, en 2010 et en 2012. Dans le cadre de ces vérifications, il a déclaré tous ses revenus, y compris ses T4 qui précisaient un revenu d’emploi et une pension d’invalidité du RPC. Les états financiers vérifiés précisent que l’ARC était au courant des sources de revenus du requérant, mais qu’elle n’a toutefois signalé aucun problème. Par conséquent, le montant du trop-payé est bien plus élevé que ce qu’il aurait été si le gouvernement avait remarqué le problème plus tôt. Le requérant affirme qu’il y a eu un trop-payé à cause d’un manque d’intégration du système informatique entre l’ARC et Service Canada. Il a fait valoir que le gouvernement devrait être responsable des occasions manquées de l’informer du trop-payé.

[18] D’ailleurs, le requérant a affirmé que son état de santé se détériorait et que sa maladie avait réduit son espérance de vie. Au cours des derniers mois, il a travaillé à temps partiel à partir de la maison en raison de son état de santé. Il prévoit présenter une demande de pension d’invalidité au cours des six prochains mois. Son état de santé limite considérablement sa capacité à rembourser Service Canada.

[19] J’estime que le requérant a soulevé des arguments probants. Le gouvernement, qu’il s’agisse de l’ARC ou de Service Canada, n’a pas expliqué adéquatement pourquoi il lui a fallu plus de 10 ans pour signaler le problème, alors que le requérant semble avoir déclaré toutes ses sources de revenus. Le requérant a demandé que Service Canada révise son cas à la recherche d’erreurs administratives, mais une révision interne a permis d’établir qu’aucune erreur n’avait été commiseNote de bas de page 18. Malheureusement, le requérant n’a pas demandé un contrôle judiciaire de cette décision à la Cour fédérale du Canada.

[20] Néanmoins, je ne peux ni remédier à la situation en faveur du requérant ni réduire le montant du trop-payé imposé au requérant à la lumière de son état de santé précaire. Mon mandat se limite à déterminer si le ministre a prouvé que le requérant avait cessé d’être invalide à la fin d’avril 2002. À cet égard, j’estime que la preuve étaye clairement la position du ministre.

Conclusion

[21] Par conséquent, j’ai conclu que le ministre a prouvé que, selon la prépondérance des probabilités, le requérant avait cessé d’être invalide au sens du RPC à la fin d’avril 2002, à la suite d’un essai de travail de trois mois qui a commencé au début de février 2002.

[22] L’appel est rejeté.

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