Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La prestataire n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] La prestataire avait 51 ans au moment où elle a présenté sa demande. Elle a une 10e année. Elle a occupé son dernier emploi au service à la clientèle/à la réception/à l’expédition du 26 mai 2006 au 4 avril 2013, date à laquelle elle a subi un accident de travail en faisant une chute accidentelle alors qu’elle servait un client. Cela lui a causé des problèmes au genou et au dos. Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité de la prestataire le 13 août 2015. Le ministre a rejeté la demande initialement et après révision. La prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, le prestataire doit satisfaire aux exigences énoncées dans le RPC. Plus précisément, il doit être déclaré invalide aux termes du RPC au plus tard à la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations du prestataire au RPC. J’estime que la PMA du prestataire a pris fin le 31 décembre 2015.

Questions en litige

[4] Est-ce que la douleur au genou et au dos ainsi que l’anxiété et les crises de panique de la prestataire l’ont rendue gravement invalide, c’est-à-dire incapable de détenir régulièrement, au 31 décembre 2015, une occupation véritablement rémunératrice?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité de la prestataire s’est-elle étendue sur une période longue, continue et indéfinie en date du 31 décembre 2015?

Analyse

[6] On entend par invalidité une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit entraîner vraisemblablement le décès. Il incombe au prestataire de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité satisfait aux deux volets du critère, ce qui signifie que si le prestataire ne satisfait qu’à un seul volet du critère, il n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

La prestataire n’avait aucun problème de santé grave qui limitait sa capacité de travailler

[7] Je dois évaluer l’état de santé de la prestataire dans son ensemble, ce qui signifie que je dois tenir compte de toutes les déficiences possibles, et non seulement des déficiences les plus importantes ou de la déficience principale. Je constate que l’état physique de la prestataire a donné lieu à certaines limitations. Cependant, la prestataire n’a pas suivi le traitement recommandé. J’estime que l’état psychologique de la prestataire n’a pas eu d’incidence sur sa capacité de travailler.

[8] La prestataire a déclaré que sa principale affection incapacitante est une déchirure au ménisque du genou droit, une douleur au dos ainsi que de l’anxiété. Elle a affirmé qu’elle est capable de s’asseoir et de se tenir debout pendant 5 à 10 minutes et de marcher près de chez elle. Elle évite de s’étirer et de se pencher, mais elle répond à ses besoins personnels de façon autonome. Elle reçoit de l’aide de sa famille pour les tâches ménagères. En 2015, elle s’est fait prescrire de l’Endocet pour sa douleur ainsi que du clonazépam et de l’Ativan pour traiter son anxiété et ses crises de panique. 

[9] La prestataire a déclaré que, outre sa chute accidentelle au travail survenue en avril 2013, elle a été impliquée dans un accident de véhicule à moteur en juillet 2013. Elle a subi une légère blessure au cou et a aggravé des blessures antérieures. Elle a dû attendre un mois avant de pouvoir reprendre ses activités habituelles. Elle a fait de la physiothérapie pendant 6 à 7 mois ainsi que des exercices à la maison. La physiothérapie n’était utile que pendant la demi-heure suivant chaque séance.

[10] Dans un rapport daté du 13 août 2015Note de bas de page 2, le Dr DiNardo, médecin de famille, a diagnostiqué chez la prestataire de la douleur au genou droit consécutive à une glissade et à une chute au travail, ainsi qu’une lombalgie attribuable à une lombalgie mécanique causée par sa blessure. À l’examen, le Dr DiNardo a noté une sensibilité diffuse du genou droit avec un gonflement minimal. La prestataire avait de la difficulté à monter des escaliers, à rester debout pendant une longue période ou à marcher sur de longues distances. Elle a fait des séances de réadaptation et de physiothérapie intensives, et a atteint un plateau du côté de son rétablissement. Le médecin a noté qu’elle souffre de douleur chronique et la prestataire a déclaré que la douleur s’intensifie avec l’activité. Son niveau de douleur au genou est de 7-8/10 avec les médicaments et de 9/10 sans médicaments. Parfois, son genou lâche ou bloque. Le Dr DiNardo a déclaré qu’il a traité la prestataire pendant 20 ans et qu’il a commencé à la traiter pour son principal trouble médical en février 2013. Il a ajouté qu’elle a un mauvais pronostic de rétablissement. Il convient de préciser que le Dr DiNardo n’a pas noté la présence de problèmes psychologiques invalidants à ce moment-là et qu’il n’a prescrit aucun médicament pour un problème de cette nature autre que son ordonnance pour Endocet afin de contrôler la douleur de la prestataire.

[11] Un tomodensitogramme de la colonne lombaire effectué le 5 juin 2013Note de bas de page 3 était normal et n’a révélé aucune hernie discale aiguë et aucun signe d’atteinte au centre ou au foramen. Une IRM du genou droit prise le 23 juin 2013Note de bas de page 4 a révélé des déchirures latérales du ménisque. Une autre IRM effectuée le 22 décembre 2017 montre que la déchirure latérale du ménisque est petite et identique à ce qui a été observé lors de l’examen précédent. Il y a une légère tendinose du tendon du quadriceps et du tendon rotulien proximal. L’imagerie diagnostique ne permet pas de confirmer une affection grave de son genou droit.

[12] Le 26 juin 2015, la prestataire a consulté la Dre Krystyna PrutisNote de bas de page 5, physiatre, pour ses douleurs au bas du dos et au genou droit. La Dre Prutis a noté une certaine diminution de l’amplitude des mouvements dans son dos, mais aucune atteinte neurologique. La physiatre a eu l’impression que la prestataire souffrait d’une aggravation de sa douleur chronique au bas du dos et de sa douleur au genou consécutive à une lésion. Il n’y a pas d’instabilité du côté des ligaments croisés ou collatéraux, mais son ménisque présentait une déchirure. La Dre Prutis a recommandé de la physiothérapie et une consultation en orthopédie. Le tomodensitogramme de sa colonne lombaire réalisé en juin 2013 était normal et il n’y avait aucune autre preuve médicale permettant d’établir un problème grave dans la partie inférieure de sa colonne vertébrale.

[13] La preuve médicale montre que la prestataire avait des limitations physiques susceptibles d’avoir une incidence sur sa capacité de travailler. Toutefois, une chirurgie a été recommandée, mais elle n’a rien fait en ce sens. La prestataire a subi une évaluation complète de la CSPAAT réalisée par le Dr Ogilvie-HarrisNote de bas de page 6, chirurgien orthopédiste, le 25 octobre 2013. Le Dr Ogilvie‑Harris a précisé que la prestataire a une déchirure du ménisque latéral du genou droit due à une chute dans un escalier, situation qui est compliquée par des douleurs dorsales et des problèmes psychologiques. Elle est partiellement rétablie. L’on ne s’attend pas à un rétablissement complet, sauf si une chirurgie arthroscopique est pratiquée. Le Dr Ogilvie-Harris a souligné qu’il a été question de recourir à la chirurgie et qu’on a insisté sur le fait que l’intervention n’était pas essentielle, mais qu’elle pourrait être bénéfique. La prestataire a décidé de voir comment elle réagirait à une réadaptation plus poussée avant d’envisager une chirurgie. Dans son témoignage, la prestataire a déclaré qu’elle avait décidé de ne pas se faire opérer au genou parce qu’il n’y a aucune garantie de succès et que la chirurgie nécessiterait ensuite de la physiothérapie très intense et prolongée pendant six mois. Je trouve déraisonnable que la prestataire ait refusé la chirurgie et la physiothérapie subséquente. Le Dr Ogilvie-Harris était d’avis que la chirurgie lui serait bénéfique. Il y a de bonnes chances que l’intervention chirurgicale améliore son état et lui permette de retourner au travail dans un poste plus sédentaire. Aucune autre consultation orthopédique ne figure au dossier.

[14] Dans son rapport, le Dr Ogilvie-Harris a également déclaré que la prestataire est apte à retourner à des tâches sédentaires. Cependant, la question est compliquée par ses douleurs continues au bas du dos qui déterminent sa fonction. Il a également discuté avec la réclamante de l’importance que revêt le retour au travail dans le cadre du processus de réadaptation. La prestataire a confirmé à l’audience qu’elle n’avait pas tenté de retourner au travail malgré la recommandation du Dr Ogilvie-Harris.

[15] S’agissant de l’état psychologique de la prestataire, dans une lettre adressée à la représentante légale de la prestataire datée du 2 février 2018Note de bas de page 7, le Dr L. DiNardo, médecin de famille, a écrit qu’il était incapable d’identifier toute autre déficience relative à la dépression et à l’anxiété qui ne figurait pas dans la liste dressée antérieurement. Le Dr DiNardo a noté que la prestataire avait été adressée à un psychiatre qui lui avait prescrit du Zoloft et du lorazépam, mais que ses symptômes généraux ne s’étaient pas améliorés de façon significative. On lui a conseillé de suivre une thérapie cognitivo-comportementale, mais elle ne l’a pas fait. Il convient de préciser que la prestataire a déclaré qu’elle n’avait pas recouru à la thérapie cognitivo-comportementale parce qu’elle n’en avait pas les moyens. La prestataire n’a pas été réévaluée récemment par un spécialiste et son état a été traité à l’aide d’un opioïde à dose stable. Le Dr DiNardo a ajouté qu’il n’avait pas de notes au sujet des migraines ou de la gravité des migraines entre aujourd’hui et juillet 2017.

[16] La prestataire a déclaré qu’elle a commencé à faire des crises de panique dans son enfance. Ces crises se sont poursuivies jusqu’à ce jour, sans élément déclencheur. Une crise de panique peut survenir sans avertissement. Lorsque la prestataire faisait une crise de panique au travail, elle sortait dehors pendant un certain temps ou quelqu’un restait avec elle jusqu’à ce qu’elle se sente mieux. Parfois, son patron la suivait chez elle pour s’assurer qu’elle arrivait à bon port. Elle a mentionné qu’elle avait un employeur très compréhensif. Le 18 novembre 2016, la prestataire a subi une évaluation psychiatrique administrée par le Dr E. D’Alessandro, psychiatreNote de bas de page 8, qui a conclu qu’elle souffrait de dépression chronique, d’anxiété et de douleur chronique. Le Dr D’Alessandro a recommandé la thérapie cognitivo-comportementale, le Zoloft et le clonazépam, les techniques de relaxation et la poursuite du traitement médical de la douleur. Il a également noté que l’évaluation psychiatrique la plus récente de la prestataire avait été effectuée 15 ans avant la sienne. Le Dr D’Alessandro a de nouveau adressé la prestataire aux soins de son médecin de famille. Ce renseignement est présenté un an après l’échéance de la PMA de la prestataire et ne témoigne pas nécessairement du trouble psychiatrique de la prestataire pendant la durée de sa PMA.

[17] La prestataire a été évaluée le 30 avril 2018 par le Dr J. Dhaliwal, psychiatreNote de bas de page 9, qui a diagnostiqué chez elle une dépression, de l’anxiété et des troubles de l’humeur avec état d’humeur mixte. Le Dr Dhaliwal a signalé que la prestataire peut ne pas faire de crise d’anxiété pendant trois mois ou deux mois, puis faire des crises qui durent d’un à deux mois. Le Dr Dhaliwal a passé en revue ses médicaments, a ajouté du Risperdal, puis lui a conseillé de continuer à prendre du clonazépam et du Zoloft, comme avant. La prestataire a continué de voir le Dr Dhaliwal tous les mois ou tous les deux mois.

[18] J’estime, en me fondant sur les rapports médicaux des Drs D’Alessandro et Dhaliwal et sur le témoignage de vive voix de la prestataire, que cette dernière n’avait pas, le 31 décembre 2015 ou avant, un trouble psychiatrique grave qui l’aurait empêchée d’occuper un emploi rémunérateur convenable. Selon le Dr Dhaliwal, ses crises de panique sont peu fréquentes. Je remarque également que les deux rapports médicaux susmentionnés ont été préparés après l’expiration de la PMA de la prestataire et ne traitent pas de l’état psychiatrique de cette dernière pendant sa PMA, laquelle a pris fin le 31 décembre 2015.

[19] Je dois apprécier le caractère grave du critère dans un contexte réalisteNote de bas de page 10. Cela signifie que, pour déterminer la gravité de l’invalidité d’une personne, je dois tenir compte de divers facteurs comme l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie. La prestataire avait 52 ans au moment de présenter sa demande. Elle a une dixième année. La prestataire a travaillé pendant de nombreuses années comme préposée au service à la clientèle, réceptionniste et commis à l’expédition. Je suis d’avis qu’elle a acquis des compétences transférables limitées dans le cadre de son expérience de travail. En gardant à l’esprit les circonstances personnelles de la prestataire et ses problèmes de santé, il semblerait que ses circonstances personnelles auraient des conséquences défavorables sur sa capacité à chercher et, le cas échéant, à conserver un emploi à temps partiel. Cependant, il doit y avoir une preuve médicale démontrant une incapacité de travailler. J’ai jugé que les problèmes psychiatriques de la prestataire ne l’auraient pas empêchée d’occuper un emploi rémunérateur. J’ai également constaté qu’elle avait refusé de façon déraisonnable de se faire opérer au genou droit, situation qui, selon le Dr Ogilvie-Harris, pourrait être améliorée par la chirurgie et la physiothérapie. La prestataire a conservé une capacité résiduelle de travail.

La prestataire n’a pas fait d’efforts pour obtenir et conserver un emploi convenable

[20] La prestataire a déclaré qu’elle a cessé de travailler après avoir fait une chute accidentelle dans son lieu de travail en février 2013. Elle a travaillé pendant de nombreux jours après l’accident, et ce, malgré des douleurs au genou droit et au bas du dos. Après un certain nombre de jours, elle a consulté son médecin de famille et on lui a conseillé d’arrêter de travailler. Elle est retournée au travail après un mois avec des restrictions relativement au levage et au portage. Son travail n’était pas seulement sédentaire, car elle devait se lever et se déplacer pour apporter des articles aux clients. Elle a finalement cessé de travailler en avril 2013 en raison de douleurs au genou droit et au bas du dos, ainsi que de crises de panique. Elle n’a postulé pour aucun autre emploi depuis.

[21] Lorsqu’il y existe une preuve d’aptitude au travail, une personne doit montrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été vains en raison de son état de santéNote de bas de page 11. La prestataire a déclaré qu’elle n’a pas tenté de retourner au travail ni de chercher un autre emploi lorsqu’elle a cessé de travailler en avril 2013. Par conséquent, je ne peux pas déterminer, à partir de la preuve qui m’est présentée, que la prestataire n’a pas réussi à obtenir ou à conserver un emploi en raison de son état de santé si elle n’a jamais tenté de trouver un autre emploi. Selon l’arrêt Inclima, il existe une obligation de chercher un autre emploi lorsque le prestataire conserve la capacité résiduelle de le faire. En l’espèce, j’ai la certitude que la prestataire avait la capacité de chercher un autre travail, mais qu’elle n’a pas respecté son obligation, comme il est précisé dans l’arrêt Inclima.

Conclusion

[22] L’appel est rejeté.

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