Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli.

Aperçu

[2] L’appelante, C. M., est une femme de 56 ans dont le dernier emploi consistait à livrer des pièces automobiles. Elle a cessé de travailler en 2010 après avoir commencé à éprouver de la douleur au cou, au dos et à l’épaule. En décembre 2016, elle a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

[3] L’intimé, le ministre de l’Emploi et du Développement social, a rejeté la demande parce que l’appelante n’avait pas suffisamment cotisé au RPC pour pouvoir être admissible aux prestations d’invalidité. L’appelante a interjeté appel de ce refus devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Dans une décision datée du 15 août 2018, la division générale a rejeté l’appel de façon sommaire puisqu’elle n’était pas convaincue qu’il avait une chance raisonnable de succès. La division générale a conclu expressément que l’appelante n’avait pas établi de période minimale d’admissibilité (PMA), comme l’exige la loi, parce qu’elle n’a pas cumulé au moins quatre années de cotisations valides au RPC au cours d’une période de six ans.

[4] Le 2 octobre 2018, l’appelante a interjeté appel de la décision relative au rejet sommaire auprès de la division d’appel du Tribunal, en prétendant que la division générale avait fondé sa décision sur une erreur importante. Étant donné qu’elle n’a pas précisé de quelle erreur il s’agissait, le Tribunal lui a demandé de fournir des motifs d’appel supplémentaires. Dans sa réponse, datée du 16 octobre 2018, elle a déclaré qu’elle ne savait pas qu’il y avait un délai à respecter pour présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC. Elle a ajouté qu’elle n’avait pas présenté de demande antérieurement, parce que sa fibromyalgie n’était pas importante à l’époque; à présent qu’elle l’était, elle avait besoin d’aide.

[5] Le 18 octobre 2018, l’appelante a présenté un rapport, daté du 17 octobre 2018, rédigé par une massothérapeute autorisée.

[6] Dans une lettre datée du 3 décembre 2018, le ministre a convenu que la division générale avait commis une erreur de droit lorsqu’elle a déterminé que l’appelante n’avait jamais établi de PMA. Le ministre a recommandé de renvoyer l’affaire à la division générale pour qu’une audience de novo (nouvelle audience) soit tenue.

[7] Il n’est pas nécessaire d’obtenir la permission d’en appeler dans le cas d’un appel interjeté en vertu de l’article 53(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement (Loi sur le MEDS), car une décision de rejet sommaire de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit.

[8] J’ai décidé qu’il n’est pas nécessaire de tenir une audience orale en l’espèce. Je vais instruire l’appel sur la foi du dossier documentaire, car celui-ci ne présente pas de lacunes et ne nécessite pas de clarifications.

Questions en litige

[9] Les seuls moyens d’appel à la division d’appel sont les suivants : la division générale a commis une erreur de droit, n’a pas observé un principe de justice naturelle, ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 1.

[10] Les questions dont je suis saisi sont les suivantes :

Question en litige no 1 : La division d’appel peut-elle examiner de nouveaux éléments de preuve?

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’appelante n’avait pas établi de PMA?

Analyse

Question en litige no 1 : La division d’appel peut-elle examiner de nouveaux éléments de preuve?

[11] Une fois que la division générale a instruit un appel, la mesure dans laquelle la partie requérante peut présenter des renseignements nouveaux ou supplémentaires à la division d’appel est très limitée. L’appelante a présenté un rapport qui a été rédigé après que la décision de la division générale a été rendue. Cependant, il m’est impossible de l’examiner, en raison des limites prévues à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS, qui ne confère pas à la division d’appel le pouvoir d’évaluer les demandes de pension d’invalidité sur le fond.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’appelante n’avait pas établi de PMA?

[12] Bien que la division générale ait appliqué correctement un seuil élevé lorsqu’elle a rejeté l’appel de façon sommaire, elle a commis une erreur de droit lorsqu’elle a conclu que l’appelante n’avait jamais établi de PMA.

[13] Au paragraphe 8 de sa décision, la division générale a cité les articles 44(1)(b) et 44(2)(a)(i) en vigueur du Régime de pension du Canada, qui établissent une PMA lorsqu’une partie requérante a versé des cotisations valides au RPC au cours de quatre des six dernières années de sa période de cotisation. La division générale a ajouté ce qui suit :

[traduction]

La période de cotisation [de l’appelante] s’échelonnait de 1980 à 2015, les six dernières années étant de 2010 à 2015. Selon son registre des gains, l’appelante a cotisé au RPC en 1989, 1990, 1991, 1999, 2000, 2008, 2009 et 2010. Elle devait avoir versé des cotisations valides au moins au cours de quatre ans de 2010 à 2015, toutefois elle avait versé des cotisations seulement au cours d’une année pendant cette période (2010).

Je constate deux problèmes dans ce passage. Premièrement, la division générale s’est contredite : d’une part, elle a établi que l’appelante avait versé des cotisations valides au RPC en 2008, 2009 et 2010 pendant une période de six ans; d’autre part, la division générale n’a trouvé qu’une seule année de cotisations au cours de la même période,

[14] Le deuxième problème, et plus important, est celui relevé par le ministre : la division générale semble avoir oublié que le RPC a déjà eu des exigences moins élevées en matière de cotisationNote de bas de page 2. De plus, il est toujours possible d’établir une PMA avant le 1er janvier 1998 si un requérant peut démontrer qu’il a versé des cotisations au cours d’au moins deux de trois années civiles ou de cinq de dix années civiles. En l’espèce, le relevé des gains de l’appelante montre des cotisations valides en 1990 et 1991, ce qui laisse entendre qu’elle avait une PMA se terminant le 31 décembre 1992.

Réparation

[15] La Loi sur le MEDS énonce les pouvoirs de la division d’appel de corriger les erreurs commises par la division générale. Au titre de l’article 59(1), je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendre; renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément à certaines directives; ou confirmer, infirmer ou modifier la décision de la division générale. De plus, en vertu de l’article 64 de la Loi sur le MEDS, la division d’appel peut trancher toute question de droit ou de fait pour statuer sur une demande présentée sous le régime de la Loi sur le MEDS.

[16] Au titre de l’article 3 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, la division d’appel est tenue de conduire l’instance de la manière la plus expéditive que les circonstances et l’équité le permettent, mais j’estime que je n’ai d’autre choix que de renvoyer l’affaire à la division générale pour une nouvelle audience.

[17] Je partage l’avis du ministre selon lequel le dossier n’est pas suffisamment complet pour me permettre de trancher cette affaire sur le fond. Le ministre avait précédemment refusé la demande de prestations du RPC de l’appelante parce qu’il avait conclu qu’elle n’avait jamais établi de PMA. Si le ministre avait repéré la PMA de l’appelante plus tôt, l’appelante aurait pu consacrer davantage de temps et d’énergie à recueillir des éléments de preuve qu’elle était invalide avant le 31 décembre 1992, plutôt que de concentrer son attention, comme elle l’a fait, sur son état médical dans la période après 2010. L’erreur du ministre a été occasionnée par le propre défaut de la division générale de reconnaître que la loi régissant l’admissibilité au RPC était différente avant 1998.

[18] À mon avis, la réparation appropriée dans le cadre de cet appel consiste à renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen. Bien qu’il semble que l’appelante ait établi une PMA, elle devra tout de même démontrer que son invalidité était grave et prolongée et que cela l’a rendue régulièrement incapable de régulièrement détenir une occupation véritablement rémunératrice à la date du 31 décembre 1992 ou avant cette date, et de façon continue par la suite.

Conclusion

[19] J’estime que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de reconnaître que l’appelante avait établi une PMA valide. Étant donné que le dossier n’est pas suffisamment complet pour me permettre de trancher cette affaire sur le fond, je renvoie l’affaire à la division générale pour une audience de novo (nouvelle audience). Je donne aussi comme instruction au personnel du Tribunal de rendre accessible cette décision à la ou au membre qui procédera à une nouvelle instruction de l’appel.

Mode d’instruction :

Représentants :

Sur la foi du dossier

Christopher Holm, représentant de l’appelante
Matthew Vens, représentant de l’intimé

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