Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] D. E. (requérant) a travaillé et a versé des cotisations au Régime de pensions du Canada pendant de nombreuses années. Il est atteint d’anxiété et de dépression, et il a travaillé durant un certain temps tout en ayant ces problèmes alors que son employeur lui offrait des mesures d’adaptation. En 2016, le requérant a perdu la vue d’un œil. Il a cessé de travailler. Le requérant a demandé et a commencé à toucher une pension de retraite du Régime de pensions du Canada en mars 2016 lorsqu’il a eu 60 ans.

[3] Le requérant a ensuite présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. En mai 2017, le ministre de l’Emploi et du Développement social a reçu un rapport médical de la part du médecin du requérant. Le ministre a écrit au requérant en juin 2017 et lui a demandé de présenter une demande de pension d’invalidité dans les 30 jours suivants. Le requérant a déposé un formulaire de demande de pension d’invalidité dûment rempli le 29 juin 2017Note de bas de page 1.

[4] Le Régime de pensions du Canada (RPC)Note de bas de page 2 établit qu’une pension d’invalidité peut remplacer une pension de retraite si un requérant est déclaré invalide avant le début des versements de la pension de retraite. Il prévoit aussi qu’une personne ne peut être réputée être devenue invalide plus de 15 mois avant la date de la présentation de sa demande de pension d’invaliditéNote de bas de page 3. Par conséquent, le libellé actuel du RPC ne permet pas le remplacement d’une pension de retraite par une pension d’invalidité si un requérant a demandé la pension d’invalidité plus de 15 mois après qu’il a commencé à toucher la pension de retraite.

[5] Le requérant a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal. La division générale du Tribunal a accueilli l’appel, a décidé que le rapport médical devait être considéré comme une demande de prestations d’invalidité et a conclu que le requérant était atteint d’une invalidité grave et prolongée avant qu’il ne touche la pension de retraite. L’appel est rejeté parce que la division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle a considéré le rapport médical comme une demande de pension d’invalidité.

Question en litige

[6] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé que le rapport médical du requérant était une demande de pension d’invalidité?

Analyse

[7] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) régit le fonctionnement du Tribunal. Elle prévoit uniquement trois moyens d’appel pouvant être considérés par la division d’appel. Ces moyens d’appel sont les suivants : la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 4. L’argument du ministre selon lequel la division générale a commis une erreur de droit est présenté ci-dessous.

[8] Le RPC prévoit qu’aucune prestation n’est payable à une personne sauf si la demande en a été faiteNote de bas de page 5. Cette demande doit être faite de la manière prescriteNote de bas de page 6. Plus précisément, la demande doit être présentée par écritNote de bas de page 7. Le Règlement sur le Régime de pensions du Canada (Règlement) prévoit qu’un requérant doit également, lors de sa demande, ou par la suite, lorsque le ministre le lui demande, fournir par écrit des renseignements pertinents, y comprisNote de bas de page 8 :

  1. a) le nom, à la naissance, et le nom actuel, le sexe, l’adresse et le numéro d’assurance sociale du requérant;
  2. b) la date et le lieu de naissance du requérant;
  3. c) une déclaration attestant le montant du traitement et du salaire cotisables et le montant des gains cotisables d’un cotisant travaillant à son propre compte, que le cotisant invalide a gagné au cours de l’année où il est devenu invalide et de toute année précédant celle de son invalidité;
  4. d) si le requérant reçoit, ou recevait, ou a présenté une demande soit de prestations aux termes du RPC ou d’un régime provincial de pension, soit de pension, aux termes de la Loi sur la sécurité de la vieillesse;
  5. e) un rapport sur toute invalidité physique ou mentale indiquant les éléments suivants :
    1. i) la nature, l’étendue et le pronostic de l’invalidité,
    2. ii) les constatations sur lesquelles se fondent le diagnostic et le pronostic,
    3. iii) toute incapacité résultant de l’invalidité,
    4. iv) tout autre renseignement qui pourrait être approprié, y compris les recommandations concernant le traitement ou les examens additionnels;
  6. f) une déclaration indiquant l’emploi et les gains de cette personne pendant la période commençant à la date à partir de laquelle le requérant allègue que l’invalidité a commencé;
  7. g) une déclaration indiquant la formation scolaire, l’expérience acquise au travail et les activités habituelles de la personne.

[9] Le ministre a reçu le rapport médical dans les 15 mois suivant le début des versements de la pension de retraite du requérant. Ce rapport contenait certains des renseignements exigés selon le RPC et le Règlement. En juin 2017, le ministre a écrit au requérant pour lui demander de fournir d’autres renseignements dans les 30 jours suivants et a envoyé au requérant un formulaire de demande à remplir, afin de s’assurer que ce dernier fournisse tous les renseignements requis. Le requérant a répondu immédiatement et a envoyé un formulaire de demande dûment rempli par retour du courrier. Le ministre a demandé les renseignements et le formulaire rempli 16 mois après que le requérant a commencé à toucher la pension de retraite.

[10] La division générale a conclu que le médecin avait déposé au nom du requérant le rapport médical qui contenait une grande partie des renseignements requisNote de bas de page 9. Elle a également décidé ce qui suit :

[traduction]
Les renseignements déposés au nom du requérant permettaient au ministre de déterminer son identité, la nature de ses problèmes de santé, ses traitements et son pronostic, ainsi que le moment où le requérant n’était plus capable de travailler. Le ministre possédait assez de renseignements pour évaluer l’intention du requérant et demander des renseignements supplémentaires. Le requérant a suivi le processus prévu par le RPC et le Règlement. Son médecin a présenté des rapports médicaux en son nom et il a répondu rapidement lorsqu’on lui a demandé plus de renseignements. De plus, si j’applique les règles comme le ministre le suggère, une grande injustice serait commise, car la limite de 15 mois ferait en sorte que la demande du requérant ne serait pas considérée du tout.

J’estime qu’il n’existe aucune exigence à l’article 60 du RPC ou dans le Règlement qui oblige le requérant à présenter sa propre demande ou à signer un document pour enclencher le processus [...]Note de bas de page 10.

[11] Premièrement, la division générale a tenu compte du fait qu’il n’est pas nécessaire de signer une demande pour enclencher le processus de demande de pension d’invaliditéNote de bas de page 11. Elle a affirmé à juste titre que le Règlement prévoit des exigences détaillées et précises, mais ne mentionne pas qu’une signature doit être apposée sur une demande. Par conséquent, le fait qu’un rapport médical a été fourni n’établit pas si une demande a été adéquatement présentée.

[12] Deuxièmement, la division générale a admis que le rapport médical ne contient pas les renseignements sur la scolarité, l’emploi et le salaire du requérant. Elle a conclu avec raison qu’il n’est pas nécessaire au titre du RPC et du Règlement que tous les renseignements soient fournis avant qu’une demande soit évaluéeNote de bas de page 12. L’article 52 du Règlement prévoit que les renseignements requis doivent être fournis dans la demande ou par écrit par la suite, lorsqu’on les demande. Le requérant a fourni les renseignements manquants immédiatement après qu’on lui a demandé de le faire. Selon l’estampille, le ministre a reçu les renseignements environ 10 jours après les avoir demandés.

[13] De plus, lorsque le ministre a demandé les renseignements supplémentaires, il a donné un délai de 30 jours au requérant pour les fournir. Il est raisonnable que le requérant ait agi en pensant que s’il fournissait les renseignements requis à la demande du ministre, sa demande de pension d’invalidité serait évaluée sur le fond, et non rejetée en raison du temps écoulé.

[14] Enfin, le ministre s’appuie sur une décision de la Commission d’appel des pensionsNote de bas de page 13 et de la division d’appelNote de bas de page 14, qui ont toutes deux décidé qu’un rapport médical n’était pas suffisant pour être considéré comme une demande de pension d’invalidité, parce qu’il ne comprend pas tous les renseignements nécessaires selon le Règlement. Ces décisions ne me lient pas, mais elles peuvent être convaincantes.  

[15] Ces décisions sont différentes de l’appel en l’espèce de par leurs faits. Dans les deux décisions que le ministre évoque, celui-ci a envoyé au moins deux lettres aux parties requérantes pour leur rappeler de présenter une demande de pension d’invalidité et ces dernières ne l’ont pas fait avant plusieurs mois. Dans le présent appel, le requérant a fourni tous les renseignements immédiatement après en avoir reçu la demande.

[16] En outre, dans les décisions sur lesquelles s’appuie le ministre, il n’y avait aucun indice selon lequel les parties requérantes n’avaient plus de temps pour présenter une demande, tandis qu’en l’espèce, la date limite pour présenter une demande était presque passée, et le ministre n’a pas avisé le requérant que sa demande risquait d’être présentée en retard. De fait, la demande du ministre concernant les renseignements supplémentaires a été faite après la date limite. Par conséquent, ces décisions ne sont pas concluantes en l’espèce.

[17] La division générale n’a pas commis une erreur de droit. Elle a tenu compte du RPC et du Règlement. Elle a évalué la preuve portée à sa connaissance. Elle a appliqué le droit aux faits. Elle a rendu une décision qui est logique, transparente et compréhensible. Rien ne justifie que la division d’appel intervienne.

Conclusion

[18] L’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 19 décembre 2018

Téléconférence

D. E., intimé

Viola Hebert, représentante de l’appelant

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