Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le requérant est âgé de 55 ans et a des antécédents professionnels diversifiés et de longue date. Il a plus récemment travaillé comme manœuvre général et [traduction] « X ». Toutefois, il était atteint d’une discopathie dégénérative et il a également subi des blessures professionnelles. Il souffre de douleurs chroniques et il n’était plus capable de gérer les exigences physiques de son emploi. Il a tenté d’effectuer des tâches légères, mais il n’a pas travaillé depuis le 13 octobre 2015. Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du RPC du requérant le 30 novembre 2016. Le ministre a rejeté cette demande initialement et après révision. Le requérant a interjeté appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, le requérant doit satisfaire aux exigences qui sont énoncées dans le RPC. Plus précisément, le requérant doit être déclaré invalide au sens du RPC au plus tard à la date de fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations de la requérante au RPC. Je constate que la PMA du requérant prend fin le 31 décembre 2018.

Questions en litige

[4] Les problèmes de santé du requérant ont-ils entraîné chez celui-ci une invalidité grave à la date de fin de sa PMA? Autrement dit, était-il régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice le 31 décembre 2018?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant était-elle également prolongée?

Analyse

[6] Une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une personne est réputée être atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès. Une personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité satisfait aux deux parties du critère. Cela signifie que si le requérant ne satisfait qu’à une partie, il n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Le requérant était-il atteint d’une invalidité grave le 31 décembre 2018?

[7] Je dois évaluer l’état de santé du requérant dans sa totalité, ce qui signifie que je dois tenir compte de toutes les déficiences possibles, et non pas uniquement de celles qui sont les plus importantes ou les principalesNote de bas de page 2. Je dois aussi évaluer le volet « grave » du critère dans un contexte réalisteNote de bas de page 3. Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[8] Le requérant avait 55 ans à la date de fin de sa PMA. Il s’exprime parfaitement en anglais. À l’audience, il a confirmé avoir fait ses examens finaux en 11e année, mais qu’ils n’ont pas compté étant donné qu’il avait été suspendu de son école. Le Dr Chandrarajan (médecin de famille) a laissé entendre que le niveau d’instruction du requérant mine sa capacité réelleNote de bas de page 4. Le requérant possédait également des permis de conduire de classes A et D dans le passé, mais il possède maintenant un permis de classe G seulement. Il a également suivi une formation périodique dans le cadre de son emploi, comme les formations sur les premiers soins et sur le système d’information sur les matières dangereuses utilisées au travail. Il a également occupé une grande variété d’emplois : il a effectué l’entretien de machinerie dans un établissement de X, il a fait des livraisons pour une entreprise de X, il travaillait dans un magasin de détail d’une X, il a travaillé dans le secteur de la construction, il a effectué l’entretien d’édifices à logements, il a peinturé des bureaux et des usines, et il a fait du déneigement. Son emploi le plus récent, qu’il a occupé pendant plus de 13 ans, était à titre de manœuvre général et d’X à X. Cela comprenait l’entretien paysager des terrains sportifs, l’opération de tondeuses, la coupe d’arbres et d’arbustes, le jardinage, le pelletage, l’arrosage, la lutte contre les mauvaises herbes, la conduite de camions à benne basculante, le remplissage de bacs à sable et une variété de petites tâches.

[9] Sans tenir compte de ses problèmes de santé, les caractéristiques personnelles du requérant lui offrent un éventail relativement grand de possibilités d’emploi non sédentaires. Même si son âge et son faible niveau d’instruction [traduction] « consignée » l’empêchaient probablement de suivre un programme officiel de perfectionnement scolaire, de participer à de longs programmes de formations ou d’occuper une profession spécialisée, il pourrait être capable de suivre un bref programme de recyclage axé sur un emploi précis. La grande variété de son expérience professionnelle démontre une capacité d’apprendre et d’exécuter des tâches particulières à un emploi. Compte tenu de cela, j’examinerai s’il est atteint d’un grave problème de santé ayant une incidence sur sa capacité de travailler.

Le requérant est atteint d’un problème de santé grave ayant une incidence sur sa capacité de travailler

[10] Je ne doute aucunement que la discopathie dégénérative et la douleur associée du requérant le rendent incapable de retourner occuper son ancien emploi comme manœuvre générale et X. Le Dr Chandrarajan a affirmé cela à différentes occasions de 2015 à 2018. La douleur dorsale chronique du requérant l’empêchait clairement d’occuper un emploi d’une telle nature physique : les activités légères à modérées posaient problème, et sa douleur interférait même avec ses activités quotidiennesNote de bas de page 5.

[11] À l’audience, le requérant a déclaré qu’il était [traduction] « définitivement invalide en raison depuis son emploi original ». Il a également décrit d’importantes limitations concernant sa capacité d’occuper un emploi de nature physique. J’estime que le requérant est un témoin franc. Je n’ai pas eu l’impression qu’il s’empêchait de me divulguer des renseignements. Par conséquent, je suis prêt à accepter sa preuve (et celle du Dr Chandrarajan) selon laquelle sa capacité de travailler est minée par son état de santé depuis 2015.  

[12] Cependant, pour déterminer si une invalidité est « grave », il ne s’agit pas de savoir si la personne a des déficiences graves, mais si l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. Il ne s’agit pas de déterminer si une personne est incapable d’exercer son emploi ordinaire, mais plutôt si elle est incapable d’exercer un travail véritablement rémunérateurNote de bas de page 6. Je dois donc déterminer si le requérant a une capacité résiduelle de travailler.

Le requérant possède une capacité résiduelle de travailler à l’heure actuelle

[13] La preuve médicale la plus récente date d’août 2018Note de bas de page 7. Cependant, à l’audience, le requérant a décrit les plus récentes améliorations de son état de santé. Il a déclaré que sa tolérance en position assise et debout ainsi que sa tolérance à la conduite s’étaient légèrement améliorées. Bien qu’il souffre encore de douleurs, il a l’impression que son état s’améliore. Il essaie de faire plus de tâches ménagères et il est capable d’en faire davantage qu’auparavant. Il a décrit l’accent mis sur le traitement de la douleur au lieu de sur un remède et il a déclaré qu’il s’était amélioré en ce qui concerne le choix d’activités adaptées à ses capacités. Cela est important, car s’il se sent bien une journée et qu’il en fait trop, il restera au lit le jour suivant.

[14] Le requérant essaie de demeurer positif à l’égard de sa situation. Il espère qu’il sera capable de retourner travailler et effectuer un certain type d’emploi, et ce, même s’il ne récupérera pas totalement. Il a dit que le Dr Chandrarajan partage son avis. Le requérant a ajouté qu’il est [traduction] « très près » d’un possible retour, mais qu’il ne pouvait pas effectuer son ancien emploi parce qu’il était très exigeant sur le plan physique.

[15] En octobre 2016, le Dr Chandrarajan a laissé entendre que le requérant pourrait effectuer un emploi sédentaire (à l’ordinateur) à son propre rythmeNote de bas de page 8. Lorsqu’il a été questionné sur sa capacité à effectuer un tel type d’emploi à l’heure actuelle, le requérant pensait qu’il pourrait le faire pendant une courte période, mais pas pendant quatre heures de suite. Il a encore de la difficulté à demeurer en position assise et il devrait sans cesse se lever.

[16] Il a été demandé au requérant s’il y avait un emploi qu’il pourrait occuper selon lui. Il a répondu qu’il pourrait selon lui occuper un emploi aux tâches légères qui ne comprend pas de tâches exigeantes comme le pelletage ou les secousses d’un tracteur. Il croyait qu’il pourrait trouver un tel type d’emploi chez son employeur actuel à la cuisine, à la prévention des pertes, à la santé et à la sécurité au travail ou au service de livraison et d’expédition. Ces postes semblent comprendre des changements de position relativement fréquents et ne semblent pas comprendre une position assise pendant une période prolongée. Lorsqu’il lui a été demandé s’il était capable d’essayer l’un de ces emplois s’ils étaient offerts, il a répondu qu’il pourrait l'être. Cependant, il n’est pas certain du type d’emploi qui lui serait offert.

[17] Le requérant a dit préférer fortement travailler avec son employeur actuel, car il craignait d’avoir besoin de retourner chez lui de temps à autre. Il croyait qu’un employeur civil serait moins compréhensif à cet égard. Il a également souligné que le fait de continuer de travailler au sein de la X serait plus favorable en ce qui concerne la pension de retraite. Il a affirmé qu’il souhaitait vraiment travailler, qu’il est absent du travail depuis trop longtemps et qu’il ne veut pas être à la maison en permanence.

[18] Même si le requérant a déclaré qu’il ne pouvait pas demeurer en position assise pendant toute l’audience, j’accepte sa preuve claire selon laquelle il y a eu une amélioration récente. J’estime également qu’il existe une preuve convaincante de capacité de travailler étant donné qu’il est apparemment prêt à tenter d’occuper un emploi qui est adapté à ses limitations actuelles. Cette conclusion est extrêmement importante, car, lorsque la capacité de travailler est prouvée, la personne doit démontrer que les efforts pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son état de santéNote de bas de page 9.

Les efforts déployés par le requérant pour obtenir et conserver un emploi ont-ils été infructueux en raison de son état de santé?

[19] Le requérant a dit ne pas avoir postulé à un emploi depuis son arrêt de travail en 2015. Toutefois, son syndicat l’a informé qu’il pourrait y avoir une autre possibilité d’emploi comprenant des exigences physiques réduites. Il a affirmé que son syndicat l’aiderait à trouver un autre poste si son appel concernant ses prestations d’invalidité du RPC était infructueux. Il a déclaré que le syndicat avait une attitude du style [traduction] « assoyons-nous et attendons » et que ce dernier hésitait à prendre des mesures avant que l’appel soit tranché.

[20] Le requérant a déclaré qu’il n’avait pas vraiment pensé à un domaine d’emploi particulier à l’extérieur de celui de son employeur actuel. Il ne pense pas qu’il pourrait durer longtemps dans un bureau. Il n’aimerait pas accepter un autre emploi et devoir démissionner après une semaine ou deux. Il a admis qu’il pourrait devoir envisager d’autres emplois et peut-être dresser une liste d’emplois qui pourraient lui convenir.

[21] Bien qu’il ait actuellement une capacité de travailler, je dois conclure que le requérant a déployé peu d’efforts, voire aucun effort, pour obtenir ou conserver un emploi convenable. En effet, il semble que ces efforts soient en suspens en attendant l’issue de l’appel. Bien que cela semble avoir été causé par le fait que le requérant se fiait au syndicat, et non par un manque de volonté de la part du requérant pour cherche un emploi convenable, cela signifie quand même que ses efforts pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son état de santé. Par conséquent, la Cour d’appel fédérale m’oblige à conclure qu’il ne peut pas être considéré comme étant gravement invalide à cette périodeNote de bas de page 10. Son appel ne peut être accueilli.

Versement de prestations d’invalidité au requérant par une compagnie d’assurance privée

[22] Bien que l’analyse ci-dessus soit suffisante pour trancher l’appel, j’aimerais formuler un bref commentaire sur le versement de prestations d’invalidité de longue durée au requérant de la part d’une compagnie d’assurance privée. On demande fréquemment au Tribunal d’apprécier l’invalidité selon le RPC lorsqu’une compagnie d’assurance privée a déjà déterminé que la partie demanderesse satisfaisait à la définition de l’invalidité de la compagnie d’assurance. Toutefois, il existe une jurisprudence non exécutoire confirmant que le versement de prestations d’invalidité au moyen d’un régime d’assurance privée n’est pas pertinent aux fins des prestations d’invalidité du RPC. Les dispositions d’autres régimes privés et publics de prestations d’invalidité ne sont pas les mêmes que celles prévues par le RPC. Le seuil pour une pension d’invalidité du RPC est élevé et rigoureux, probablement le plus élevé parmi les lois de ce genre en Amérique du NordNote de bas de page 11. Bien qu’il semble qu’on ait refusé le versement de prestations d’invalidité de l’Ontario au requérant, cela n’est pas pertinent aux fins des prestations d’invalidité du RPCNote de bas de page 12.

Le requérant est-il atteint d’une invalidité prolongée?

[23] Comme j’ai conclu que l’invalidité du requérant n’était pas grave, il n’est pas nécessaire pour moi de répondre à cette question.

Conclusion

[24] L’appel est rejeté.

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