Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le requérant est admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) payable à compter de janvier 2016.

Aperçu

[2] Le requérant a travaillé pour la dernière fois en tant qu’opérateur d’équipement lourd à temps plein d’avril 2015 à septembre 2015. Il a déclaré qu’il ne pouvait plus travailler depuis parce que ses douleurs chroniques au dos et au genou s’étaient intensifiées. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a reçu la demande de pension d’invalidité du requérant le 14 décembre 2015. Le ministre a rejeté la demande initialement et après révision. Le requérant a fait appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, le requérant doit satisfaire aux exigences énoncées dans le RPC. Plus précisément, le requérant doit être déclaré invalide au sens du RPC au plus tard à la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations du requérant au RPC. Je constate que la PMA du requérant a pris fin le 31 décembre 2018.

[4] J’ai déjà rendu une décision de rejet sommaire concernant l’appel du requérant au sujet d’une pension d’invalidité du RPC le 23 novembre 2017. J’ai rendu cette décision après avoir tenté, en vain, de communiquer à maintes reprises avec le requérant et de lui remettre l’avis d’audience. Le requérant a par la suite demandé la permission de faire appel à la division d’appel du Tribunal, affirmant que les moyens de communication n’avaient pas tous été utilisés avant de rejeter sommairement son appel. Le 22 août 2018, la division d’appel du Tribunal a accueilli la demande de faire appel du requérant, et l’affaire a été renvoyée à la division générale du Tribunal pour réexamen.

Questions en litige

[5] Les problèmes de santé du requérant ont-ils entraîné chez lui une invalidité grave, c’est‑à‑dire qu’il était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en date du 31 décembre 2018?

[6] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant était-elle aussi d’une durée longue, continue et indéfinie en date du 31 décembre 2018?

Analyse

[7] L’invalidité est définie comme étant une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas page 1. Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. Il incombe à la personne de prouver que, selon la prépondérance des probabilités, son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Ainsi, si le requérant ne satisfait qu’à un seul volet, il n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

[8] J’estime que le requérant était crédible. Il a témoigné d’une façon franche en répondant aux questions relatives à ses antécédents professionnels et médicaux ainsi qu’à l’incidence de son état de santé sur sa vie quotidienne.

Invalidité grave

i. Le requérant est atteint d’un problème de santé grave qui a une incidence sur tous les aspects de sa vie quotidienne.

[9] Le critère permettant d’évaluer si une invalidité est « grave » ne consiste pas à savoir si la personne a de graves détériorations, mais plutôt si son invalidité l’empêche de gagner sa vie. La gravité de l’invalidité d’une personne ne dépend pas de son incapacité d’occuper son emploi régulier, mais plutôt de son incapacité de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas page 2. Je dois aussi évaluer l’état de santé du requérant dans son ensemble, ce qui signifie que je dois examiner toutes les détériorations du requérant, pas seulement les détériorations les plus importantes ou la détérioration principaleNote de bas page 3.

[10] Le médecin de famille du requérant, Dr Motyer, a rapporté en juillet 2014 que le requérant avait eu besoin de codéine pendant longtemps pour apaiser ses douleurs chroniques au genou gauche. En août 2014, le Dr Motyer a précisé que le requérant se plaignait beaucoup de douleurs au bas du dos, malgré les antidouleurs qu’il prenait déjà. Le requérant a continué de travailler malgré ses douleurs au dos et au genou. En novembre 2014, une imagerie par résonnance magnétique (IRM) du rachis lombaire du requérant a révélé un bombement discal avec des déchirures annulaires et une protrusion discale contiguë à la racine nerveuse L5 au niveau L4-L5. Une IRM de suivi réalisée en 2016 a révélé une nouvelle déchirure annulaire au niveau L5-S1 et un déplacement continu de la racine nerveuse droite L5. Au début de 2015, le requérant a eu des anesthésies tronculaires dans une clinique de gestion de la douleur, et selon le Dr Bharat, il a bien répondu au traitement. J’estime que ces conclusions objectives sont importantes et qu’elles établissent une corrélation avec les symptômes du requérant.

[11] En septembre 2015, le requérant prenait les antidouleurs suivants : Amitriptyline, Lyrica, Flexeril, Tylenol 4 et Codeine Contin. Le Dr Ahmed, algologue traitant du requérant, a noté en 2016 que le requérant avait déjà consulté différents chirurgiens orthopédistes par le passé. Selon le requérant, on lui avait dit qu’il était trop jeune pour une chirurgie de remplacement du genou et qu’il n’était pas un bon candidat pour toute autre intervention chirurgicale.

[12] Le requérant se rend toujours à Oshawa pour voir le Dr Ahmed afin de recevoir des injections contre la douleur à quelques mois d’intervalle. Il prend l’autobus ou un ami le conduit à ses rendez-vous. Le Dr Ahmed a noté dans son dernier rapport qu’il attendait les résultats d’une IRM récente avant d’envisager les injections péridurales, mais le requérant a soutenu qu’il avait déjà reçu ces injections par le passé, la dernière fois remontant à l’année précédente. Ces injections avaient plus ou moins donné les résultats escomptés, et le requérant n’est pas optimiste quant au fait que d’autres injections péridurales lui soient bénéfiques. Jusqu’à maintenant, le traitement a donné de bons résultats. Malgré les différents traitements possibles à l’heure actuelle, le requérant continue d’évaluer subjectivement son niveau de douleur quotidien à 8 sur 10.

[13] Le requérant admet que la physiothérapie et l’hydrothérapie lui ont été recommandées, mais qu’il n’y a pas eu recours parce qu’elles sont trop coûteuses. Il essaie tout de même d’être aussi actif que possible en faisant des étirements à la maison et en sortant pour marcher. Le requérant a affirmé qu’il est seulement capable de marcher un pâté de maisons avant de devoir s’arrêter et qu’il peut seulement rester assis pendant 30 à 60 minutes. Il fait de son mieux pour cuisiner des repas simples et il fait du nettoyage seulement lorsque cela est absolument nécessaire.

[14] Le requérant passe le plus clair de son temps à bouger et à changer de position afin d’être confortable. Il passe également du temps allongé sur le canapé avec un coussin chauffant tout en regardant la télévision ou en lisant. S’il tousse ou se penche de la mauvaise façon, il peut arquer le dos et ressentir d’atroces douleurs. Le requérant peut compter sur son voisinage pour l’aider avec son épicerie et sur son propriétaire pour s’occuper de l’entretien extérieur. Il a précisé qu’il a seulement des compétences de base en informatique et qu’il n’a pas d’ordinateur.

[15] Je conviens que les douleurs chroniques du requérant déterminent ses activités quotidiennes. Il a suivi les traitements recommandés, mais ceux-ci ont donné des résultats limités, surtout en ce qui concerne son dos. Même avec de fortes doses de narcotiques et des injections régulières au dos dans une clinique de gestion de la douleur, les douleurs quotidiennes du requérant demeurent constantes. J’estime que ses douleurs et ses limitations fonctionnelles l’empêchent d’exercer régulièrement un emploi véritablement rémunérateur.

ii. L’état de santé du requérant ne s’est pas amélioré au point où il pourrait retourner sur le marché du travail.

[16] Lorsqu’il y a une preuve de la capacité de travailler, une personne doit démontrer que les démarches qu’elle a faites pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueuses en raison de son état de santéNote de bas page 4.

[17] Le requérant a cessé de travailler en septembre 2015 après s’être rattrapé en tombant de l’excavatrice qu’il conduisait. On lui aurait proposé des tâches légères, mais celles-ci consistaient tout de même à effectuer des tâches lourdes. Le requérant a donc dû refuser.

[18] Le requérant a affirmé que ses douleurs chroniques existaient depuis 20 ans lorsqu’il a cessé de travailler. Au fil du temps, elles se sont intensifiées principalement à cause des secousses constances causées par l’équipement lourd qu’il conduisait. L’incident de travail survenu en septembre 2015 a considérablement aggravé ses problèmes de genou et de dos. Ceux‑ci ne cessent de s’intensifier. Le requérant n’a donc pas cherché un autre emploi. Il avait déjà passé de nombreuses années à travailler tout en prenant de puissants narcotiques. En 2015, ces médicaments n’ont rien fait pour atténuer ses douleurs au dos. De plus, le requérant n’a jamais connu autre chose que le travail manuel et son poste d’opérateur d’équipement lourd.

[19] Je reconnais que le requérant retournerait au travail s’il le pouvait. Malheureusement, son état de santé ne s’est pas amélioré pour lui permettre de le faire. J’estime que cela l’a empêché d’obtenir et de conserver un emploi pour lequel il serait qualifié en fonction de son âge, de son niveau d’instruction et de son expérience.

iii. Le requérant n’est pas employable dans un contexte réaliste.

[20] Je dois évaluer le critère relatif à la gravité dans un contexte réalisteNote de bas page 5. Cela signifie que pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[21] Le requérant est âgé de 55 ans. Il a terminé ses études secondaires et parle couramment l’anglais. Il ne possède aucune compétence transférable compte tenu de ses antécédents professionnels dans le domaine industriel et en tant qu’opérateur d’équipement lourd. Le requérant ne possède aucune compétence réelle en informatique. Compte tenu de son âge, de son manque de compétences transférables et de ses nombreuses limitations fonctionnelles, j’estime qu’il ne serait pas un bon candidat pour le recyclage professionnel ou pour un travail plus sédentaire adapté à ses limitations.

[22] Après avoir examiné l’ensemble de la preuve produite, j’ai conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le requérant était atteint d’une invalidité grave, telle que définie par le RPC, en date du 31 décembre 2018.

Invalidité prolongée

[23] Je suis d’avis que l’invalidité du requérant subsistait également depuis une période longue, continue et indéfinie en date du 31 décembre 2018. Le requérant a des douleurs chroniques au genou et au dos depuis bien avant septembre 2015. Malgré les traitements recommandés, les injections régulières contre la douleur et les puissants narcotiques, l’état du requérant ne s’est pas beaucoup amélioré dans l’ensemble. Compte tenu de la nature chronique de ses symptômes, de l’absence de présentation d’options de traitement restauratrices et de l’absence d’amélioration jusqu’à maintenant, j’estime qu’il est peu probable que son état s’améliorera au point où il sera régulièrement capable d’occuper de nouveau un emploi véritablement rémunérateur. Bien que la chirurgie de remplacement du genou puisse un jour diminuer ses douleurs et améliorer la mobilité de son genou dans une certaine mesure, la plainte principale du requérant concerne le bas de son dos pour lequel aucune nouvelle option de traitement ne lui a été présentée.

Conclusion

[24] Le requérant était atteint d’une invalidité grave et prolongée en septembre 2015, date où il a complètement cessé de travailler. Les versements de la pension doivent commencer quatre mois après la date de début de l’invalidité, soit à partir de janvier 2016.

[25] L’appel est accueilli.

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