Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] K. B. (requérante) est atteinte de fibromyalgie. Elle a cessé de travailler en octobre 2015. La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) en mars 2017. Le ministre a rejeté la demande initialement et après révision. La requérante a interjeté appel devant le Tribunal. Le 10 mai 2019, la division générale a rejeté l’appel de la requérante.

[3] La division d’appel doit déterminer s’il existe une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur visée par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS). Je conclus qu’il n’existe aucune cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur, et, par conséquent, la demande de permission d’en appeler est rejetée.  

Question en litige

[4] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait en ne tenant pas compte d’un élément de preuve provenant d’un médecin concernant l’état de la requérante durant sa période minimale d’admissibilité?
  2. Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit?
  3. Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur relativement à l’équité procédurale ou à sa compétence?

Analyse

Examen des décisions de la division générale

[5] La division d’appel ne permet pas au ministre ou à la partie requérante de présenter de nouveau les arguments liés à sa cause de façon intégrale au cours d’une nouvelle audience. La division d’appel effectue plutôt un examen de la décision de la division générale afin de déterminer si elle contient des erreurs. Les seules erreurs qui permettent à la division d’appel d’accorder la permission d’en appeler sont celles qui sont énumérées dans la LMEDSNote de bas de page 1. Ces erreurs possibles sont appelées les « moyens d’appel ».

[6] La LMEDS énonce que la division générale commet une erreur de fait lorsqu’elle fonde sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 2. Pour qu’il s’agisse d’une erreur, la conclusion de fait doit être déterminanteNote de bas de page 3. Elle doit être aussi inexacteNote de bas de page 4,  contredire délibérément la preuveNote de bas de page 5 et avoir été tirée sans avoir été guidée par un jugement continuNote de bas de page 6 ou sans que la division générale tienne compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 7.

[7] Selon la LMEDS, la division générale commet une erreur si elle ne respecte pas un principe de justice naturelle ou qu’elle n’exerce pas ou excède sa compétence.

[8] Les principes de justice naturelle concernent l’équité procédurale. Une décision dans laquelle la division générale ne respecte pas les principes de justice naturelle est un exemple de manquement à l’équité procédurale. Dans chaque cas, les exigences relatives à l’équité dépendent de divers facteursNote de bas de page 8. La division générale ne dispose que des pouvoirs qui sont énoncés dans la loi. Si un membre de la division générale tranche une question pour laquelle aucun pouvoir ne lui est conféré, il excède sa compétence. Si la division générale ne tranche pas une question qu’elle devait trancher, il s’agit d’un refus d’exercer sa compétence.

[9] La LMEDS prévoit également que la division d’appel peut examiner toute décision rendue par la division générale qui est entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier. Au stade de l’appel, la partie requérante doit démontrer que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 9. Afin de satisfaire à cette exigence, la partie requérante doit uniquement démontrer qu’il existe un moyen défendable permettant de croire que l’appel sera accueilliNote de bas de page 10. Ce critère n’est pas difficile à respecter.

Question 1 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait en ne tenant pas compte d’un élément de preuve provenant d’un médecin concernant l’état de la requérante durant sa période minimale d’admissibilité?

[10] La requérante n’a pas démontré l’existence d’une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait en ne tenant pas compte d’un élément de preuve provenant d’un médecin concernant l’état de la requérante durant sa période minimale d’admissibilité (PMA).

[11] Pour être admissible à une pension d’invalidité, un requérant doit démontrer qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée durant la période minimale d’admissibilité (PMA)Note de bas de page 11. La PMA est calculée en fonction des cotisations du requérant au Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 12.

[12] En l’espèce, la PMA de la requérante a pris fin le 31 décembre 2009. La requérante a également réalisé des gains en 2010. Ces gains étaient inférieurs au seuil requis pour cotiser au Régime de pensions du Canada. Par conséquent, si la requérante est devenue invalide avant la fin novembre 2010, elle est admissible à des prestations d’invalidité déterminées au moyen d’un calcul proportionnelNote de bas de page 13.

[13] La division générale ne doit pas mentionner chacun des éléments de preuve dans sa décisionNote de bas de page 14. En revanche, si la preuve est importante, la division générale doit en faire mentionNote de bas de page 15.

[14] La requérante soutient que la division générale n’a pas tenu compte de la lettre de la Dre Fudge du 5 février 2018Note de bas de page 16. L’avocat de la requérante affirme que la lettre de la Dre Fudge était importante, et, bien qu’elle figurait dans le dossier de la division générale, il n’en a pas fait mention expressément dans sa plaidoirie. L’avocat de la requérante fait valoir que, par conséquent, la division générale a tiré une conclusion de fait erronée concernant l’invalidité de la requérante et en faisant abstraction de la lettre de la Dre FudgeNote de bas de page 17.

[15] Dans sa lettre, la Dre Fudge affirme avoir reçu la requérante en consultation pour la première fois en 2016 et lui avoir diagnostiqué une fibromyalgie :

[traduction]

Selon son dossier, elle présente toutefois des symptômes depuis au moins 2010. Elle a consulté un interniste local en novembre 2010 en raison d'une douleur thoracique du côté gauche qu’elle ressentait depuis longtemps, associée à un engourdissement et à des picotements dans son bras gauche. Elle se plaignait également de dyspepsie et de ballonnement abdominal. Elle a subi une coloscopie en novembre 2010 en raison d'une douleur persistante dans le quadrant supérieur droit. En 2013, elle a consulté un chirurgien orthopédique local en raison de douleurs au genou. En 2015, elle a consulté un chirurgien généraliste en raison d'un malaise épigastrique persistant. En rétrospective, je pense que tous ces symptômes pourraient certainement s’ajouter à sa douleur chronique. Selon toute vraisemblance, ses symptômes antérieurs à 2010 remontent probablement à 2009 à tout le moins.

[16] Dans sa décision, le membre de division générale souligne que, bien qu’il existe un élément de preuve selon lequel la requérante présentait certains symptômes, [traduction] « en particulier des douleurs abdominales », la requérante n’a produit aucune preuve médicale permettant de soutenir que son invalidité était grave en 2010Note de bas de page 18. La division générale souligne également que la requérante a continué de travailler à temps partiel en 2010 et à temps plein de 2013 à 2015Note de bas de page 19. Dans son témoignage, la requérante affirme qu’elle a cessé de travailler en octobre 2015, car son état s’était aggravé. Le membre de la division générale mentionne aussi que, dans son questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, la requérante affirme être devenue invalide en novembre 2016Note de bas de page 20.

[17] Selon moi, la requérante n’a pas démontré l’existence d’une cause défendable permettant de soutenir qu’une erreur de fait a été commise. La division générale fait mention dans son analyse de l’élément de preuve provenant de la Dre Fudge, sans toutefois préciser son nom. J’estime que la mention des douleurs abdominales dans la décision de la division générale renvoie aux symptômes décrits par la Dre Fudge. Il n’existe aucune cause défendable permettant de soutenir que la division générale n’a pas tenu compte d’un élément de preuve. Le membre de la division générale a soupesé tous les éléments de preuve dont il disposait pour parvenir à une décision. La décision générale a appliqué les faits (y compris la preuve médicale durant la PMA et les faits concernant le travail de la prestataire après sa PMA) au droit et a déterminé que l’invalidité de la requérante n’était pas grave. Selon moi, aucune erreur ne découle d’une mauvaise application du droit établi aux faitsNote de bas de page 21.

Question 2 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit?

[18] La requérante n’a pas démontré l’existence d’une cause défendable permettant de soutenir qu’une erreur de droit a été commise.

[19] La requérante soutient que la division générale a commis une erreur de droit en appliquant une PMA, laquelle serait de nature « arbitraire », et en ne tenant pas compte de [traduction] « l’ensemble de son travailNote de bas de page 22. »

[20] Selon moi, la période cotisable tient compte de ce que la requérante appelle « l’ensemble de son travail ». Par contre, le ministre doit calculer la PMA au moyen de la période cotisable, laquelle se fonde sur les années de cotisations valides au Régime de pension du Canada.

[21] Il n’existe aucune cause défendable permettant de soutenir qu’une erreur de droit a été commise pour ce qui est de l’application de la période cotisable de la PMA de la requérante. L’avocat de la requérante a raison : en l’espèce, la PMA est un obstacle à l’admissibilité de la requérante à la pension d’invalidité. Cependant, il n’existe aucune cause défendable concernant une erreur de droit qui repose sur la simple application de la PMA. L’application de la PMA n’est pas facultative : il s’agit d’une obligation juridiqueNote de bas de page 23. L’application de la PMA aux demandes de pension d’invalidité au titre du RPC n’est nullement arbitraire, même si elle a une incidence sur certains requérants qui ne sont pas admissibles à recevoir une pension d’invalidité.

Question 3 : Existe-t-il une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur relativement à l’équité procédurale ou à sa compétence?

[22] La requérante n’a pas démontré l’existence d’une cause défendable permettant de soutenir qu’une erreur a été commise relativement à l’équité procédurale ou à la compétence.

[23] La division générale explique ce qui suit :

Je dois respecter les dispositions du RPC. Je ne peux pas exercer une forme quelconque de pouvoirs fondés sur l’équité lorsque j’instruis un appel. Le Tribunal est un décideur établi par la loi et je dois interpréter et appliquer les dispositions, comme elles sont prévues par le RPC. Je n’ai pas le pouvoir de déroger aux dispositions du RPC ni de rendre de décisions fondées sur l’équité, la compassion ou les circonstances atténuantesNote de bas de page 24.

[24] D’après ce que je comprends, la requérante soutient que la décision de la division générale est inéquitable, manque de compassion et fait abstraction des circonstances atténuantes. En quelque sorte, la requérante remet en question d’une certaine façon l’explication du membre de la division générale au sujet de sa compétenceNote de bas de page 25. Cependant, la requérante n’a avancé aucun argument quant au pouvoir dont dispose la division générale et que celle-ci pourrait ne pas avoir utilisé en l’espèce.

[25] La requérante n’a pas démontré l’existence d’une cause défendable permettant de soutenir qu’une erreur a été commise relativement à l’équité procédurale et à la compétence. Le membre de la division générale a expliqué de façon adéquate quelles étaient ses fonctions et l’étendue de ses pouvoirs. Selon moi, la requérante conteste le caractère équitable de la décision, mais la justice naturelle concerne plutôt l’équité procédurale. Le membre de la division générale ne peut pas outrepasser ses pouvoirs afin d’accorder une pension d’invalidité pour des motifs d’ordre humanitaire ou en se fondant sur des circonstances atténuantes.

[26] J’ai examiné le dossier. Je suis convaincue que le membre de la division générale n’a pas négligé ou mal interprété la preuve. Il a obtenu des renseignements supplémentaires auprès de la requérante concernant la nature de son travail après la fin de la PMA, de 2013 à 2015, et il les a soupesés au regard d’autres éléments de preuve concernant les symptômes de la requérante (en particulier les douleurs abdominales) durant la PMA.

Conclusion

[27] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

Fred R. Stagg, représentant la demanderesse

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