Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision

[1] Le requérant n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) avant juin 2018.

Aperçu

[2] Le requérant a eu une longue carrière d’agent de correction. Il a reçu un diagnostic de trouble de stress post-traumatique (TSPT) en 2012. Il a continué de travailler à son emploi habituel même s’il éprouvait des difficultés jusqu’à ce qu’il prenne une retraite anticipée en février 2014. Pour des raisons financières, il a travaillé à temps partiel par intermittence dans une série d’emplois moins exigeants jusqu’en juin 2018, lorsqu’il a cessé de travailler en raison de ses problèmes de santé.

[3] Il a demandé une pension d’invalidité du RPC, affirmant qu’il ne pouvait plus travailler en raison d’un TSPT, de l’anxiété et de l’hypertension. Le ministre a déclaré le requérant invalide en date de juin 2018. Le requérant a soutenu qu’il était invalide depuis février 2014, lorsqu’il a pris sa retraite et quitté son emploi habituel. Le ministre a rejeté la demande du requérant qui voulait faire établir le début de son invalidité à une date antérieure. Le requérant a appelé de la décision du ministre au Tribunal de la sécurité sociale.

[4] À l’audience, j’ai expliqué au requérant que, dans la plupart des cas, la loi limite les paiements rétroactifs à 15 mois après la réception d’une demande tardiveNote de bas page 1. Par conséquent, même s’il obtenait gain de cause, sa pension du RPC ne serait pas payable à compter de février 2014. Le requérant a dit qu’il comprenait, mais qu’il voulait obtenir la rétroactivité maximale permise par le RPC suivant sa demande de prestations d’invalidité.

Question en litige

[5] Le requérant remplissait-il le critère de l’invalidité grave et prolongée avant juin 2018?

Analyse

[6] Aux termes du RPC, l’invalidité se définit comme une invalidité physique ou mentale qui est grave et prolongéeNote de bas page 2. Une personne est considérée comme ayant une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès. La personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité satisfait aux deux volets du critère.

Le requérant avait la capacité de travailler après avoir quitté son emploi habituel

[7] J’admets que le requérant ne pouvait plus effectuer son travail habituel. Il a décrit un stress extrême au travail après avoir été témoin d’événements très traumatisants. Son problème de santé et ses symptômes sont apparus avant qu’il quitte son emploi. Il a commencé son traitement en 2012. En février 2014, il a pris une retraite anticipée. Je ne nie pas la preuve du requérant montrant qu’il souffre depuis (au moins) 2014. Toutefois, la souffrance du requérant n’est pas un élément fondamental du critère d’invaliditéNote de bas page 3. Pour évaluer si une invalidité est « grave », il ne s’agit pas de savoir si le requérant est incapable d’exercer son emploi régulier, mais plutôt s’il est incapable d’effectuer tout travail véritablement rémunérateurNote de bas page 4.

[8] La preuve du requérant démontre qu’il a continué à travailler après avoir quitté son emploi habituel. Au départ, il a demandé et reçu des prestations régulières d’assurance-emploi (AE) pendant 52 semaines. En demandant des prestations régulières d’AE, le requérant affirmait qu’il était disponible et qu’il cherchait un emploi. Lorsque ses prestations ont pris fin, il a trouvé un emploi chez Nutrilawn pour la saison printemps-été de 2015. Le requérant a précisé que l’emploi était seulement saisonnier, mais je remarque qu’il a accumulé assez d’heures de travail pour avoir droit aux prestations régulières d’AE pendant les mois d’automne et d’hiver. Il est retourné travailler pour Nutrilawn au printemps 2016, mais son état de santé s’est dégradé et il a été incapable de travailler pendant la majeure partie de l’été. Il a déclaré qu’en septembre 2016, il n’avait d’autre choix que de trouver un autre emploi pour des raisons financières. Il a été embauché par une entreprise de nettoyage, X, où il travaillait de trois à quatre heures par jour, cinq jours par semaine. Le requérant a expliqué qu’il avait de la difficulté à exécuter les tâches, mais je note qu’il a conservé son emploi après que X a perdu le contrat au profit d’une nouvelle entreprise, Y. De plus, son employeur n’a relevé aucun problème de rendement dans les questionnaires au dossier. À un moment donné en 2017 ou en 2018, il se souvient d’avoir réduit ses heures pour travailler de deux à trois heures par jour et seulement les fins de semaine où il y avait moins de stress au travail jusqu’à ce qu’il arrête complètement de travailler.

[9] En plus de l’emploi à l’entreprise de nettoyage, le requérant en a trouvé un deuxième dans une épicerie, Z. Il a commencé à travailler comme commis aux fruits et légumes en octobre 2017. À son embauche, il prévoyait travailler 20 heures par semaine, mais il a fini par réduire ses heures pour faire de 12 à 15 heures par semaine. Il a déclaré qu’il n’aurait pas été capable de travailler à temps plein. Il a décrit quelques mesures d’adaptation mineures que son employeur lui a accordées, mais j’ai jugé qu’elles ne relevaient pas d’un employeur bienveillant. Pour qu’un employeur soit considéré comme « bienveillant », les mesures d’adaptation qu’il offre doivent surpasser ce qu’on attend d’un employeur sur le marché compétitifNote de bas page 5, ce qui n’est pas le cas dans la situation du requérant. Le requérant a déclaré qu’il s’est entendu avec son gestionnaire pour travailler le plus d’heures possible. Il travaillait le soir quand le magasin était moins achalandé. Il travaillait toujours avec une autre personne qui pouvait l’aider au besoin. Il ne pouvait pas lever plus de 50 livres. Il prenait des pauses pour diminuer son anxiété. Il a déclaré s’être absenté du travail. Il a complètement cessé de travailler en juin 2018 quand, selon ses dires, il a frappé un mur en raison de ses symptômes de TSPT, de stress, d’anxiété et d’hypertension. Son médecin de famille, le Dr Hart, qui a écrit que le requérant serait incapable de retourner au travail pendant une période indéfinie pour des raisons médicales, traitait sa maladieNote de bas page 6. Ensuite, le requérant a demandé des prestations de maladie de l’AE, puis une pension d’invalidité du RPC.

[10] Le requérant a soutenu que sa demande de crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH)Note de bas page 7 prouve que le début de son invalidité remonte à une date antérieure. D’abord, il est important de souligner que le critère du CIPH diffère considérablement de celui qui sert à définir l’invalidité au sens du RPC. Les critères ne sont pas interchangeables. De plus, même si le Dr Hart a écrit dans la demande de CIPH remplie en octobre 2018 que le requérant avait quitté son emploi en 2014 en raison de la détérioration de sa santé mentale, j’estime que cette déclaration ne démontre pas l’existence d’une invalidité grave et prolongée à cette époque. J’ai tenu compte du fait que, dans le rapport médical pour le RPC qu’il a rempli en juin 2018, le Dr Hart a reconnu que le requérant travaillait à temps partiel depuis 2014 et qu’il était [traduction] « actuellement incapable d’occuper un poste quel qu’il soit »Note de bas page 8. Sous le régime du RPC, il se peut qu’un emploi saisonnier ou à temps partiel soit véritablement rémunérateurNote de bas page 9. Par conséquent, je ne suis pas d’accord avec le requérant, qui croit que la preuve du Dr Hart démontre qu’il ne pouvait pas travailler à compter de février 2014.

[11] Ensuite, le requérant a soutenu que sa rémunération en 2017 et en 2018 était moindre que s’il avait reçu la somme maximale des prestations d’invalidité du RPC et qu’on ne pouvait pas la considérer comme provenant d’un emploi véritablement rémunérateurNote de bas page 10. Cependant, la loi utilise l’expression « véritablement rémunératrice » pour qualifier une occupation qui procure un traitement ou un salaire égal ou supérieur à la somme annuelle maximale qu’une personne pourrait recevoir à titre de pension d’invalidité. La loi ne donne aucune orientation pour les situations où la rémunération d’une personne est inférieure au montant de référence. En examinant la capacité du requérant à obtenir et à conserver un emploi, à respecter un horaire de travail et à travailler à une fréquence constante dans un emploi rémunéré, j’ai conclu que le requérant avait une capacité continue d’exercer un emploi véritablement rémunérateur jusqu’à ce que ses problèmes de santé l’empêchent de continuer en juin 2018.

Il incombe au requérant de prouver son invalidité

[12] En matière de prestations d’invalidité du RPC, le fardeau de la preuve repose sur le requérant ou la requérante.

[13] Le dossier montre que le ministre a communiqué avec XNote de bas page 11 et ZNote de bas page 12, les entreprises qui ont employé le requérant. Le ministre a tenté de joindre Y, mais l’entreprise n’a pas répondu à la demande du ministreNote de bas page 13. Bien que le questionnaire rempli par X laisse entendre que le requérant a cessé de travailler en juin 2017 en raison d’un manque de travail, à l’audience, le requérant a expliqué que X avait perdu le contrat au profit d’une autre entreprise de nettoyage, Y. Le requérant a continué de travailler pour la nouvelle entreprise.  

[14] Le requérant a contesté l’approche du ministre sur bon nombre de points touchant les questionnaires remplis par les employeurs. Il a fait valoir que le ministre aurait dû contacter l’entreprise Nutrilawn, qui selon le requérant aurait confirmé qu’il éprouvait des difficultés au travail en raison de ses problèmes de santé. Il croit également que le ministre aurait dû communiquer avec des personnes qui travaillaient plus directement avec lui sur ses lieux de travail. Elles auraient été mieux placées pour témoigner de ses absences pour des raisons médicales ainsi que des mesures d’adaptation dont il avait besoin. Ce sont plutôt des personnes qu’il n’a jamais rencontrées qui ont rempli les formulaires.

[15] J’ai entendu la frustration du requérant, mais le dossier montre que le ministre a tenté d’obtenir plus de renseignements sur ses emplois antérieurs. Le ministre a essayé de se faire une idée plus claire de la capacité de travail du requérant. Le ministre a tenté de joindre les entreprises où il a travaillé. Il ne faut pas blâmer le ministre si l’une d’elles n’a pas répondu à sa demande de renseignements ou si une autre a fait parvenir le formulaire au service des ressources humaines au lieu de l’envoyer aux gestionnaires sur le terrain.

[16] En plus de ce reproche, le requérant a fait de nombreuses allégations voulant qu’il y ait eu des erreurs ou des omissions dans la façon dont le ministre a jugé son appel. Je ne les aborde pas une à une dans ma décision, puisque la loi ne me donne pas le pouvoir d’examiner de telles questions ou d’accorder une réparation à cet égardNote de bas page 14.

[17] En résumé, j’ai examiné les nombreuses lettres dans lesquelles le requérant détaille sa position. Je lui ai également donné l’occasion durant l’audience orale de réfuter la conclusion du ministre et d’expliquer pourquoi je devrais accorder moins d’importance aux questionnaires. J’admets que les questionnaires ne présentent peut-être pas une image complète des capacités fonctionnelles du requérant au travail. Toutefois, en rendant ma décision, j’ai pris en considération l’ensemble de la preuve. Après avoir soupesé tous les éléments de preuve, je conclus que le requérant avait la capacité de travailler après avoir pris sa retraite et quitté son emploi habituel. C’est seulement quand il ne pouvait plus travailler en raison de ses problèmes de santé en juin 2018 qu’il est devenu invalide au sens du RPC.

Conclusion

[18] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.