Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] F. F. est la requérante dans cet appel. Elle n’a pas droit à une rétroactivité supplémentaire de sa pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). La requérante n’a pas établi qu’elle était incapable de former ou d’exprimer une intention de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC à une date antérieure au sens de la loi sur le RPC. Voici comment je suis arrivée à cette décision.

Aperçu

[2] La requérante a travaillé comme manœuvre générale de 1979 à avril 2009, lorsqu’elle a arrêté de travailler en raison d’un accident de véhicule. Elle a embauché un avocat et l’affaire judiciaire a été clôturée en 2018, presque 10 ans plus tard. La requérante croyait que l’avocat avait présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC, mais elle a découvert que cela n’était pas le cas. Elle a présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC en mars 2018 avec l’aide de sa belle-fille. Le ministre a approuvé la demande initialement avec une date de début de décembre 2016, car il s’agissait du mois le plus tôt où la requérante pouvait être considérée comme étant atteinte d’une invalidité. Le ministre a déclaré que la date de début de la requérante est décembre 2016 et qu’elle ne peut être modifiée puisqu’elle a reçu la rétroactivité maximale de 15 mois conformément à la loi sur le RPC. La requérante a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès du Tribunal de la sécurité sociale. À l’audience, la requérante a affirmé qu’elle était frappée d’incapacité et qu’elle n’avait pas pu faire sa demande de prestations d’invalidité du RPC plus tôt en raison de ses problèmes de santé physique et mentale.

[3] Pour satisfaire à la définition d’incapacité aux termes de l’article 60(8) du RPC, il aurait fallu que la demande soit faite au nom de la requérante. Afin que la demande de la requérante soit considérée comme ayant été faite à une date antérieure, la requérante doit démontrer qu’elle était incapable de former ou d’exprimer une intention de faire une demande avant le jour où la demande a été faite, comme il est prévu à l’article 60(9) du RPC. De plus, conformément à l’article 60(10) du RPC, la requérante doit démontrer que cette période d’incapacité était une période continue.

Questions préliminaires

[4] À l’audience, la requérante m’a dit qu’elle avait une autre évaluation psychologique de M. David Ross qui ne figurait pas au dossier, et qu’elle souhaitait soumettre le rapport comme preuve qu’elle était frappée d’incapacité. J’ai demandé à la requérante d’envoyer le rapport au Tribunal, ce qu’elle a faitNote de bas de page 1. J’ai admis le rapport comme élément de preuve. J’ai demandé au ministre de répondre à la question d’incapacité puisque cette question n’avait pas été soulevée avant et que le ministre n’avait pas fait d’observations sur celle-ci. Le ministre a demandé que l’appel soit mis en suspens pendant un mois afin qu’il puisse enquêter sur la question de l’incapacité. J’ai accepté. La requérante et le ministre ont fait d’autres observations et j’ai donné à chacun l’occasion d’y répondre.

Question en litige

[5] La requérante a-t-elle droit à une rétroactivité supplémentaire de sa pension d’invalidité du RPC parce qu’elle était incapable de faire une demande plus tôt?

Analyse

[6] La requérante a fait une demande de pension d’invalidité du RPC le 6 mars 2018 et elle a obtenu une pension d’invalidité du RPC avec une date de début de décembre 2016. Elle a affirmé qu’elle avait été frappée d’incapacité après un accident de véhicule en 2009 et que c’est pour cette raison qu’elle n’avait pas pu faire sa demande avant mars 2018.

[7] Les activités de la requérante durant la prétendue période d’incapacité sont pertinentes pour déterminer si elle était capable de former ou d’exprimer une intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC. L’article 60 du RPC est précis et ciblé puisqu’il n’exige pas la prise en compte de la capacité de faire, préparer, traiter ou remplir une demande de prestations, mais seulement la capacité de former ou d’exprimer une intention de faire une demande. Les activités d’une partie requérante durant la période pertinente peuvent faire la lumière sur son incapacité continue de former ou d’exprimer l’intention requise (Danielson c Procureur général du Canada, 2008 CAF 78).

La requérante a-t-elle droit à une rétroactivité supplémentaire de sa pension d’invalidité du RPC parce qu’elle était incapable de faire une demande plus tôt?

Non, j’estime que la demande de pension d’invalidité du RPC de la requérante ne peut pas être considérée comme ayant été faite à une date antérieure.

[8] La requérante m’a dit qu’elle était capable de conduire pour se rendre à ses rendez-vous de physiothérapie et de massothérapie après son accident de véhicule en 2009 puisqu’ils étaient près de chez elle et qu’elle n’avait pas besoin de prendre l’autoroute. Elle avait des rendez-vous toutes les deux ou trois semaines et elle était capable de s’y rendre seule. Elle a continué de détenir un permis de conduire, ce qui appuie le fait qu’elle avait la capacité cognitive de prendre rapidement des décisions. La requérante m’a dit qu’elle avait rédigé sa propre demande de pension d’invalidité du RPC, mais que sa belle-fille l’avait un peu aidée. Elle m’a aussi dit qu’elle avait rempli son appel au Tribunal. Je constate qu’elle a signé ces deux formulaires elle-même.

[9] La requérante a plus de mauvaises journées que de bonnes journées. Il y a des jours où elle peut faire un casse-tête et d’autres où elle est très embrouillée. La belle-fille de la requérante (personne de soutien) m’a dit que la requérante est frappée d’incapacité parce qu’elle ne peut pas maintenir ses routines habituelles.

[10] J’estime qu’il est possible que la requérante ait besoin d’aide pour ses soins étant donné qu’elle a de bonnes et de mauvaises journées. Toutefois, M. Ross a noté dans son rapport de juin 2012 que la requérante était cliniquement cohérente et qu’il n’y avait aucun signe d’autonégligence sur le plan de l’hygiène personnelle ou de l’apparence. Elle s’est montrée courtoise et attentive, elle était agréable, coopérative et non défensive, et elle parlait de façon franche et spontanée. La forme et le fond de ses pensées étaient cohérents et logiques. Sa compréhension était adéquate et elle organisait bien ses idéesNote de bas de page 2. Je reconnais que M. Ross a affirmé que la requérante était stressée, qu’elle avait des limitations associées à la douleur ainsi que des difficultés et des inquiétudes au sujet du travail et de ses finances qui l’empêcheraient de réintégrer le marché du travail; toutefois, M. Ross a affirmé que la requérante était cohérente, logique et bien organisée. Il est évident pour moi que l’évaluation de M. Ross n’appuie pas l’idée que la requérante était incapable de former ou d’exprimer une intention de faire une demande de pension d’invalidité du RPC après son accident de véhicule. Je considère que la preuve médicale ne démontre pas que la requérante était atteinte de déficits cognitifs graves qui la rendaient incapable de former ou d’exprimer une intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[11] Je juge que la requérante était capable de rencontrer son avocat et de respecter ses rendez-vous avec celui-ci ainsi que de procéder à la poursuite contre l’ICBC. Elle m’a dit qu’elle était capable de retirer de l’argent de son compte bancaire et d’aller au caissier de banque pour effectuer des transactions. Elle n’a pas de mandataire ou de fiduciaire pour prendre ses affaires en main.

[12] Le 4 septembre 2019, Dr J. Fuller, médecin de famille, a rempli un formulaire de déclaration d’incapacitéNote de bas de page 3. Il a noté que la requérante avait les problèmes de santé suivants : douleurs chroniques au cou et au dos, trouble d’anxiété généralisée et trouble panique. Ces problèmes de santé l’ont empêchée de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension d’invalidité du RPC depuis avril 2009. Dans une lettre datée du 28 juin 2018Note de bas de page 4, le médecin a affirmé qu’il connaissait la requérante depuis 2005, mais qu’il l’avait seulement vue une fois en 2009. Elle avait un autre médecin et elle est seulement revenue le voir en 2012. Il a noté qu’il ne l’avait pas traitée en lien avec les blessures qu’elle avait subies lors de son accident de véhicule pendant les trois années qui ont suivi l’accident. J’estime que le Dr Fuller a seulement vu la requérante une fois en 2009 et qu’il ne l’a pas vue pour l’examiner ou pour évaluer ses progrès sur une base régulière. Il n’a pas de notes cliniques qui pourraient aider à poser un diagnostic d’incapacité entre l’accident de véhicule de 2009 et mars 2018 lorsque la requérante a fait une demande de pension d’invalidité, car l’incapacité doit être continue. Je reconnais que la requérante a des limitations parmi ses problèmes de santé en raison de blessures subies lors de l’accident de véhicule. Toutefois, l’information du Dr Fuller ne démontre pas que la requérante était incapable de former l’intention de faire une demande de pension d’invalidité du RPC.

[13] Je reconnais que la requérante fait face à des difficultés et des défis en raison de ses problèmes de santé, et qu’elle prend des médicaments pour la douleur et l’anxiété; toutefois, cela démontre qu’elle est atteinte d’une invalidité et non qu’elle est frappée d’incapacité.

[14] Je tiens à souligner de nouveau que l’article 60 est précis et ciblé puisqu’il n’exige pas la prise en compte de la capacité de faire, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations, mais seulement la capacité de former ou d’exprimer une intention de faire une demande.

[15] Je juge que la demande de pension d’invalidité du RPC de la requérante ne peut être jugée comme ayant été faite à une date antérieure étant donné qu’elle ne répond pas aux critères de la disposition sur l’incapacité. Il est malheureux qu’elle n’ait pas fait sa demande de pension d’invalidité du RPC plus tôt.

[16] Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, j’ai décidé que, selon la prépondérance des probabilités, la requérante n’a pas démontré qu’elle était incapable de former ou d’exprimer une intention de faire une demande de pension d’invalidité du RPC à une date antérieure au sens de la loi sur le RPC.

Conclusion

[17] L’appel est rejeté.

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