Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision et motifs

Décision

[1] La prorogation du délai prévu pour présenter une demande de permission d’en appeler est refusée. Il n’y a pas de cause défendable que la division générale a fait une erreur, alors l’appel n’a pas de chance raisonnable de succès. Je ne prorogerai pas le délai de présentation de la demande de permission d’en appeler du requérant.

Aperçu

[2] T. H. (requérant) a présenté une demande de pension d’invalidité le 5 mai 2017. Il a déclaré qu’il était incapable de travailler en raison de ses crises épileptiques tonico-cloniques. Sa demande a été rejetée par le ministre le 12 juillet 2017. Le requérant a demandé une révision de cette décision le 2 mars 2018. La demande a été faite tardivement. Elle a été faite après la limite de 90 joursNote de bas de page 1.

[3] Le requérant a interjeté appel devant le présent Tribunal. La division générale a décidé que le ministre a rendu une décision (il a exercé son pouvoir discrétionnaire) de manière impartiale en refusant de proroger le délai imparti au requérant pour demander une révision. La division générale du Tribunal a rejeté l’appel le 9 mai 2019.

[4] Le 19 novembre 2019, le requérant a demandé la permission d’appeler de la décision de la division générale devant la division d’appelNote de bas de page 2. Je dois décider si la demande de permission d’appeler de la décision de la division générale est également tardive. Si c’est le cas, je dois décider si je peux accorder une prorogation du délai d’appel de la décision de la division générale. Si c’est le cas, je dois décider si le requérant satisfait au critère pour bénéficier d’une prorogation.

[5] Je conclus que la demande de permission d’appeler de la décision de la division générale est tardive. Cependant, étant donné que le retard est de moins d’un an, je peux décider si une prorogation de délai peut être accordée pour l’appel.

[6] Le requérant ne satisfait pas au critère pour bénéficier d’une prorogation de délai pour appeler de la décision de la division générale. Il n’est pas dans l’intérêt de la justice de permettre que cette cause, qui n’a aucune chance raisonnable de succès, aille de l’avant. Il n’y a pas de cause défendable soutenant que la division générale a fait une erreur en décidant que le ministre a agi avec impartialité lorsqu’il a refusé d’accorder une prorogation du délai pour permettre au requérant de demander une révision. Je ne vais pas proroger le délai pour appeler de la décision de la division générale.

Questions préliminaires

[7] Le requérant a fourni une nouvelle preuve à la division d’appel.

[8] En règle générale, la division d’appel n’étudie pas de nouvelle preuve dans une demande de permission d’en appelerNote de bas de page 3. Il existe quelques exceptions à cette règle. Aucune de ces exceptions ne s’applique dans le cas présent. Je ne vais pas considérer la nouvelle preuve.

Questions en litige

[9] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. Le requérant a-t-il présenté en retard sa demande de permission d’en appeler? Si c’est le cas, puis-je accorder une prorogation du délai d’appel de la décision de la division générale?
  2. Le requérant satisfait-il au critère juridique pour se voir accorder une prorogation du délai d’appel de la décision de la division générale?

Analyse

Demandes de révision tardives envoyées au ministre

[10] Le requérant a 90 jours à partir du moment où le ministre communique la décision initiale pour lui demander une révisionNote de bas de page 4. Lorsqu’une demande de révision est en retard, le ministre doit décider s’il accorde une prorogation au requérant. La loi indique que le ministre « peut » proroger le délai. Cela signifie que la décision de proroger le délai est un choix (un pouvoir discrétionnaire) que fait le ministreNote de bas de page 5.

[11] Pour recevoir une prorogation du délai pour déposer une demande de révision, le requérant doit démontrer : a) qu’il a un motif raisonnable pour demander une période plus longue et b) une intention persistante de demander une révisionNote de bas de page 6. Le requérant doit satisfaire aux deux facteursNote de bas de page 7.

[12] Le ministre doit exercer sa décision de proroger le délai de manière impartiale. Le ministre n’est pas impartial s’il agit de mauvaise foi ou dans un but ou pour un motif irrégulier, s’il prend en compte un facteur non pertinent ou s’il agit de manière discriminatoireNote de bas de page 8.

Appels tardifs à la division d’appel

[13] La partie requérante a 90 jours à partir du moment où le Tribunal lui communique la décision de la division générale pour demander la permission d’en appeler devant la division d’appelNote de bas de page 9.

[14] La division d’appel peut proroger le délai pour faire une demande de permission d’en appeler. Mais, la demande ne peut pas être faite plus d’une année après la date à laquelle le Tribunal communique de la décision à la partie demanderesseNote de bas de page 10.

[15] La décision de la division générale est présumée avoir été reçue dans les 10 jours civils suivant la date à laquelle elle a été postée aux partiesNote de bas de page 11. La partie requérante peut renverser cette présomption en présentant la preuve de la date à laquelle elle a réellement reçu la décision. 

La demande de permission d’appeler de la décision de la division générale du requérant est-elle en retard?

[16] La demande de permission d’appeler de la décision de la division générale a été soumise en retard. La division d’appel a bel et bien la capacité d’accorder une prorogation du délai parce que le requérant a déposé la demande d’appel moins d’un an après la date à laquelle j’ai conclu que le Tribunal lui a communiqué la décision.

[17] La décision de la division générale est datée du 9 mai 2019. La date 10  jours après le 9 mai 2019 était le dimanche 19 mai 2019. Le jour qui suit, soit le 20 mai 2019, était un jour férié. J’estime que le requérant a reçu la décision le mardi 21 mai 2019. Le requérant a fait appel devant la division d’appel le 19 novembre 2019Note de bas de page 12. Le requérant a dépassé l’échéance de 90 jours et est en retard.

Puis-je accorder une prorogation au requérant pour interjeter appel?

[18] Même si le requérant a dépassé les 90 jours, j’estime qu’il a déposé sa demande de permission d’en appeler dans le délai d’un an. Cela signifie que je peux accorder une prorogation du délai de présentation de la demande de permission d’en appeler.

Le requérant satisfait-il au critère juridique lui permettant de bénéficier d’une prorogation du délai?

[19] Le requérant ne satisfait pas au critère juridique lui permettant de bénéficier d’une prorogation du délai.

[20] La division d’appel doit poser quatre questions pour déterminer si elle proroge le délai pour appeler de la décision de la division générale. Les voici :

  1. Y avait-il intention persistante de poursuivre la demande?
  2. La cause est-elle défendable?
  3. Le retard a-t-il été expliqué raisonnablement?
  4. La prorogation du délai cause-t-elle préjudice à l’autre partieNote de bas de page 13?

[21] L’importance que doit accorder la division d’appel aux réponses de chacune de ces questions peut varier selon la cause. Dans certains cas, différents facteurs seront pertinents. Le facteur primordial à prendre en considération est celui voulant que la division d’appel doive servir les intérêts de la justiceNote de bas de page 14.

[22] Le Tribunal a écrit au requérant pour lui demander des renseignements qui aideraient la division d’appel à répondre à ces quatre questions. Le requérant a exprimé brièvement les raisons de son retard au niveau de la division d’appel.

Y avait-il intention persistante de poursuivre la demande?

[23] Le requérant n’a pas démontré une intention persistante de poursuivre sa demande avant la fin du délai de 90 jours et continuellement par la suite.

[24] La partie requérante doit poursuivre l’appel avec la diligence qui peut raisonnablement être exigée de sa partNote de bas de page 15. Je n’ai aucun argument du requérant ni de document dans le dossier qui m’amèneraient à conclure que le requérant a démontré au Tribunal qu’il avait l’intention de déposer la demande dans le délai 90 jours et continuellement par la suite.

La cause du requérant est-elle défendable?

[25] La cause du requérant ne permet pas de soutenir l’existence d’une erreur commise par la division générale.

[26] Selon la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), la division d’appel peut examiner trois types d’erreurs en appel. Le fait que la division générale ait omis d’offrir un processus équitable en est un. La division d’appel peut aussi corriger des erreurs de fait ou des erreurs de droit commises par la division généraleNote de bas de page 16.

[27] Dans les affaires où la partie requérante demande une prorogation du délai à la division d’appel, une cause défendable signifie que l’affaire doit avoir des chances raisonnables de succèsNote de bas de page 17. Il s’agit d’un critère peu rigoureux à satisfaire.

[28] La division générale a conclu que le ministre a agi de manière impartiale lorsqu’il a refusé d’accorder au requérant une prorogation du délai pour demander une révision. Celui-ci n’est pas parvenu à soutenir que la décision de la division générale comportait une erreur.

[29] L’appel du requérant à la division d’appel semble mettre l’accent sur la raison pour laquelle il devrait recevoir des prestationsNote de bas de page 18. Le travail de la division d’appel est de décider s’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur. La division générale a décidé que le ministre a agi avec impartialité lorsqu’il a décidé de ne pas proroger le délai de la demande d’appel du requérant à la division générale (lequel était en retard de plus d’un an). La division générale a tenu compte du critère juridique, et elle l’a appliqué aux faits. La division générale a tenu compte de la preuve du requérant soutenant qu’il ne pensait pas qu’il se serait absenté longtemps du travail, qu’il a visité un bureau de Service Canada pour qu’on lui explique comment faire appel, ce qu’il a fait éventuellement. La division générale a conclu que le ministre a agi de manière impartiale lorsqu’il a tranché que le retard n’a pas été causé par des circonstances atténuantes. Cette dernière a noté que le dossier ne contenait aucun document démontrant une intention persistante d’en appeler entre le moment où le requérant a reçu la lettre de refus et celui où il a demandé une révisionNote de bas de page 19.

[30] Selon moi, le requérant n’a pas de cause défendable en appel. Il n’a pas soulevé de cause défendable soutenant qu’une erreur de droit ou de fait a été commise dans la décision de la division générale, et je n’en vois personnellement aucune. Le requérant n’a pas soulevé la question d’un problème de processus équitable au niveau de la division générale.

[31] Il n’est pas défendable que la division générale a commis une erreur au sens de la LMEDS lorsqu’elle a tranché que le ministre a agi de manière impartiale en refusant de proroger le délai pour demander une révision.  

Y a-t-il un motif raisonnable expliquant le retard?

[32] Le requérant a expliqué la raison du retard à la division d’appel. Il affirme qu’il espérait revenir au travail et que les trois dernières années ont été très difficiles pour son épouse et lui.

[33] Je n’ai aucun doute que le requérant n’allait pas bien. Je comprends qu’il éprouvait des difficultés légitimes à remplir la documentation requise, notamment sa demande d’appel à la division d’appel. Toutefois, il a été en mesure de participer, dans une certaine mesure, aux processus du Tribunal et il a reçu de l’aide de son épouse. Même s’il est légitime que le requérant puisse avoir espoir de retourner au travail, il n’a pas donné de motif qui soit raisonnable dans les circonstances pour expliquer le retard.

La prorogation du délai causerait-elle préjudice au ministre?

[34] Aucun préjudice ne serait causé au ministre par l’octroi d’une prorogation de délai au requérant. Si je lui accordais une prorogation du délai, le ministre aurait la capacité de débattre la question, même si de nombreux mois se sont écoulés depuis l’audience de la division générale.

La prorogation du délai est refusée 

[35] Après avoir examiné les quatre questions pertinentes, je refuse de donner au requérant une prorogation du délai pour appeler de la décision de la division générale.

[36] Le requérant n’a pas pu démontrer une intention persistante d’interjeter appel. Il a expliqué le retard, mais son motif n’était pas raisonnable selon les circonstances. Le requérant ne dispose pas d’une cause défendable permettant de soutenir l’existence d’une erreur. L’absence de cause défendable est le facteur le plus important dans le présent cas. Même si l’accueil de la demande ne causait aucun préjudice au ministre, cela ne servirait pas les intérêts de la justice que la cause du requérant aille de l’avant, puisqu’il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur.

[37] J’ai passé en revue le dossier de la division généraleNote de bas de page 20. Je suis convaincue que la division générale n’a pas ignoré ni mal interprété la preuve lorsqu’elle a rendu sa décision. 

[38] Finalement, d’après les renseignements que j’ai en main, la période minimale d’admissibilité (PMA) du requérant pour la pension d’invalidité prend fin le 31 décembre 2020. Cela signifie que si le requérant peut choisir de faire une nouvelle demande de pension d’invalidité sous le RPC, s’il désire démontrer qu’il avait une invalidité grave et prolongée avant la fin de sa PMA, laquelle n’est pas encore terminée.

Conclusion

[39] La prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler est refusée.

 

Représentant :

T. H., non représenté

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