Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le requérant est admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) payable à partir de novembre 2018. Mes motifs sont les suivants.

Aperçu

[2] Le requérant a occupé un dernier emploi à temps plein comme technicien en maintenance des avions durant environ 27 ans. Il a cessé de travailler en juillet 2018. Il a dit qu’il ne pouvait plus travailler depuis ce moment en raison de douleurs au dos, au poignet droit et au genou. Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du requérant le 27 août 2018. Le ministre a rejeté cette demande initialement et après révision. Le requérant a porté en appel la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, la partie requérante doit satisfaire aux exigences énoncées dans le RPC. Plus précisément, la partie requérante doit être déclarée invalide au sens du RPC au plus tard à la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations de la partie requérante au RPC. Je constate que la PMA du requérant prendra fin le 31 décembre 2021. Puisqu’il s’agit d’une date à venir, le requérant doit être jugé invalide au moment de l’audience.

Questions en litige

[4] Les problèmes de santé du requérant ont-ils entraîné une invalidité grave, c’est-à-dire qu’il était régulièrement incapable d’exercer une occupation véritablement rémunératrice au moment de l’audience?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant était-elle également d’une durée longue, continue et indéfinie à la date de l’audience?

Analyse

[6] Une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une personne est réputée avoir une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès. Il incombe à la partie requérante de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité satisfait aux deux volets du critère; ainsi, si la partie requérante ne satisfait qu’à un seul volet, elle n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

La combinaison des constatations objectives et subjectives appuie d’importants problèmes de santé

[7] Je dois évaluer l’état de santé du requérant dans sa totalité. Cela signifie qu’il faut tenir compte de toutes les déficiences possibles, et non seulement des déficiences les plus importantes ou de la déficience principaleNote de bas de page 2.

[8] Le Dr Anderson a corroboré le témoignage du requérant selon lequel il souffre de douleur croissante au dos depuis de nombreuses années. Cependant, c’est en février 2018 que son état s’est aggravé sans aucune raison particulière. En raison de cela, le requérant a été mis en arrêt de travail durant huit semaines à partir de février 2018.

[9] La douleur du requérant ne s’est pas atténuée pendant qu’il était en congé et qu’il se rendait à ses traitements de physiothérapie et de massothérapie. Il est retourné travailler en mars 2018, mais il était absent au moins un jour par semaine en raison de sa douleur. Il devait aussi quitter le travail plus tôt trois jours par semaine.

[10] En juillet 2018, le Dr Anderson lui a recommandé d’éviter de soulever des objets lourds ainsi que de pousser et tirer des objets de façon répétée. Le Dr Anderson est aussi celui qui l’a mis en arrêt de travail pour une durée indéterminée. Il était d’avis que l’état de santé du requérant allait empirer, et que son travail était un facteur important de cette détérioration.

[11] En septembre 2018, le Dr Anderson a déclaré que le requérant avait tous les jours des douleurs intenses au bas du dos et une réduction de l’amplitude des mouvements du bas du dos. Il avait l’impression que le requérant n’était pas en mesure de reprendre son emploi précédent. Il a aussi précisé que le requérant n’était pas formé pour un autre type d’emploi.

[12] En 2018, le requérant a subi des radiographies et une imagerie par résonance magnétique (IRM). Les radiographies des genoux ne montraient qu’une légère arthrite. Une IRM du bas du dos a révélé une scoliose, de multiples bombements discaux et de multiples petites hernies discales. Selon le Dr Lipson, physiatre, les résultats de l’IRM ne rendaient pas vraiment compte des symptômes du requérant.

[13] Le requérant a suivi d’autres séances de physiothérapie et un programme de conditionnement au travail au Canadian Back Institute [Centre de réadaptation du dos] de décembre 2018 à février 2019. Il a participé à ce programme à la demande de sa compagnie d’assurance. D’après Mme Chisamore du Canadian Back Institute, le requérant n’était pas en mesure de satisfaire aux exigences principales relatives à son emploi. Il était seulement en mesure de rester debout ou de marcher pendant une heure et trente minutes, en prenant des pauses, et il pouvait soulever seulement 10 livres. Il démontrait aussi des comportements axés sur la douleur.

[14] Le traitement actuel du requérant comprend la prise des médicaments Vimovo et diclofénac. On lui a prescrit une unité de stimulation nerveuse électrique transcutanée pour utilisation à domicile ainsi qu’un corset lombaire. Il applique du gel diclofénac pour sa douleur aux genoux. Selon le requérant, rien ne l’aide vraiment. Son dernier traitement de physiothérapie a eu lieu en février 2019, mais il continue de consulter une chiropraticienne ou un chiropraticien quelques fois par mois pour des traitements d’acuponcture et de massothérapie aux poignets, aux genoux et au dos. Il n’a pas les moyens d’y aller plus souvent. Il consulte son médecin de famille tous les mois. Le Dr Anderson lui aurait dit qu’il ne prendrait pas de mieux, et aucun autre traitement ne lui a été recommandé. Je juge que le requérant a respecté les traitements à ce jour.

[15] À première vue, la preuve diagnostique objective est décevante. Cependant, je reconnais que la sensation de douleur est fortement subjective, et qu’elle varie beaucoup d’une personne à l’autre. Des conclusions objectives n’ont pas nécessairement de lien avec la douleur subjective ressentie par une personne. La douleur n’est pas quelque chose qui peut être mesuré de façon empirique. C’est la raison pour laquelle j’ai accordé une importance considérable au témoignage crédible du requérant pour apprécier l’ensemble de ses déficiences. Son témoignage subjectif est appuyé par ses praticiens qui conviennent qu’il ne pourrait pas recommencer à travailler dans le seul domaine de travail qu’il a connu, ou pour lequel il est qualifié.

Les limitations du requérant ont une incidence sur sa vie quotidienne

[16] Pour déterminer si une invalidité est « grave », il ne s’agit pas de savoir si le requérant a des déficiences graves, mais si l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. La détermination de la gravité de l’invalidité d’une personne ne dépend pas de son incapacité d’occuper son emploi régulier, mais plutôt de son incapacité de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 3.

[17] Le requérant réside dans un appartement au rez-de-chaussée avec son fils adulte. Il compte sur son fils et son ex-épouse pour l’aider par exemple à cuisinier, nettoyer, faire la lessive et faire les courses. Le requérant a une voiture, mais il ne peut pas conduire longtemps. Il passe la plupart de son temps à essayer d’être confortable, à faire de courtes marches de 15 minutes, à s’étirer et à regarder la télévision. Il est seulement confortable en position couchée. Il souffre de douleurs plus intenses au dos et aux genoux lorsqu’il est en position assise, en position debout et lorsqu’il marche pendant plusieurs minutes. Il a souvent besoin de son fils pour l’aider simplement à passer de la position assise à la position debout ou à se lever le matin. Le fait de faire des mouvements soudains cause un [traduction] « affaiblissement » au dos, et son dos semble la plupart du temps [traduction] « courbé». Sa douleur au poignet limite aussi sa capacité d’ouvrir des bouteilles ou des pots.

[18] Je conviens que la douleur que le requérant ressent tous les jours a une grande incidence sur sa vie quotidienne et limite ce qu’il peut faire. Sa capacité à être actif et à apporter sa contribution est grandement limitée : il s’en remet aux autres pour obtenir régulièrement du soutien, et la position couchée est la seule qu’il peut maintenir.

Le requérant n’est pas employable dans un contexte réaliste

[19] Il me faut aussi évaluer l’aspect du critère ayant trait à la gravité de l’invalidité dans un contexte réalisteNote de bas de page 4. Cela signifie que je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[20] Le requérant est âgé de 60 ans, et il a constamment versé des cotisations au RPC pendant plus de 30 ans. Je constate qu’il a une solide éthique de travail. Il a terminé sa 11e année au Canada et n’a pas de diplôme d’études secondaires. Bien que l’anglais ne soit pas sa langue maternelle, il a été apte à participer à l’audience sans le service d’interprétation. En ce qui concerne ses emplois, le requérant a seulement réellement travaillé comme ouvrier . Il a travaillé pour la dernière fois comme technicien en maintenance des avions responsable du ravitaillement en carburant des avions. Il a occupé cet emploi pendant 27 ans.

[21] Bien que je reconnaisse que l’emploi du requérant était exigeant physiquement et qu’il a contribué énormément à son état de santé actuel, il n’a pas de compétences transférables ni de compétences en informatique, il a un niveau d’études très limité, de faibles compétences en lecture et en écriture en anglais, et il est âgé de 60 ans. Il a aussi des limitations fonctionnelles, y compris une capacité très limitée à soulever ou à transporter des objets, et de la difficulté à marcher ou à demeurer en position assise ou debout de façon prolongée.

[22] Le requérant n’a pas cherché d’autre emploi depuis juillet 2018. J’accepte ses raisons pour ne pas l’avoir fait. D’abord, ses symptômes n’ont pas connu d’amélioration. Il se demande aussi, tout naturellement, quel employeur embaucherait une personne qui a autant d’obstacles à surmonter. Je suis d’accord avec le requérant. J’estime qu’il n’est pas réaliste de penser qu’un employeur, dans un marché de l’emploi concurrentiel, l’embaucherait et lui fournirait des mesures d’adaptation indéfiniment. Le requérant est aussi un mauvais candidat pour tout type de recyclage professionnel.

[23] Lorsque l’état de santé du requérant est soupesé en tenant compte des facteurs de l’arrêt Villani, je conclus qu’il est plus probable qu’improbable qu’il souffrait d’une invalidité grave au sens du RPC au moment de l’audience. J’estime que le requérant ne peut pas occuper régulièrement un emploi véritablement rémunérateur pour lequel il est qualifié en fonction de son âge, de son instruction et de son expérience de travail.

Invalidité prolongée

[24] J’estime également que l’invalidité du requérant durait depuis une période longue, continue et indéfinie au moment de l’audience. Son état de santé est de nature dégénérative et il se détériore progressivement depuis les 20 dernières années. Malgré le fait qu’il ait consulté des spécialistes, qu’il ait suivi des traitements de physiothérapie, de chiropractie, d’acuponcture et de massothérapie, et qu’il ait pris la médication prescrite, il n’y a pas eu de grandes améliorations. Compte tenu de la nature de son état de santé et de l’absence d’amélioration à ce jour, j’estime peu probable qu’il s’améliore au point où il pourrait occuper de nouveau régulièrement un emploi véritablement rémunérateur.

Conclusion

[25] Le requérant était atteint d’une invalidité grave et prolongée en juillet 2018, date où il a cessé de travailler. Les versements commencent quatre mois après la date d’invalidité réputée, soit en novembre 2018Note de bas de page 5.

[26] L’appel est accueilli.

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