Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La pension d’invalidité de la requérante au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) lui est seulement payable à partir de juin 2016.

Aperçu

[2] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité de la requérante le 15 mai 2017. Il a approuvé la demande et a déterminé que la requérante devait commencer à recevoir des prestations en juin 2016. La requérante a demandé au ministre de réviser la date de début de ses prestations. Sa demande a été présentée en retard, et le ministre a refusé de réviser sa décision initiale. La requérante a interjeté appel devant le Tribunal. Le Tribunal a accueilli l’appel et a ordonné au ministre de réviser sa décision initiale. Au cours du processus de révision, la requérante a soulevé une question d’incapacité au titre du RPC lorsqu’elle a déclaré qu’elle n’était pas en mesure de déposer sa demande avant mai 2017. Le ministre a rejeté la demande de révision parce que la requérante a reçu le montant maximal de prestations rétroactives et n’était pas admissible à des prestations supplémentaires. La requérante a interjeté appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

Question en litige

[3] La requérante était-elle incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant mai 2017, ce qui ferait en sorte qu’elle soit admissible à des prestations d’invalidité rétroactives supplémentaire?

Analyse

[4] Aux termes du RPC, une personne ne peut être réputée invalide plus de 15 mois avant la date à laquelle la demande de pension d’invalidité est présentéeFootnote 1. La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité en mai 2017. Elle a été réputée invalide en février 2016, soit 15 mois avant le mois au cours duquel elle a présenté sa demande. Le ministre a utilisé cela pour calculer ses prestations rétroactives.

[5] Le RPC prévoit une exception à cette règle de rétroaction de 15 mois. La requérante peut bénéficier de prestations rétroactives supplémentaires si elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle elle a présenté la demandeFootnote 2.

Incapacité au sens du RPC

[6] Pour prouver qu’elle répond à la définition d’incapacité, la requérante doit démontrer qu’elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations avant la date à laquelle elle l’a fait. Il est important de disposer d’éléments de preuve médicale concernant son invalidité pendant la période d’incapacité invoquée. Il est également important de prendre en considération les autres activités de la requérante au cours de la période, car elles peuvent démontrer sa capacité de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demandeFootnote 3.

L’invalidité de la requérante

[7] Les éléments de preuve au dossier et le témoignage de la requérante confirment qu’elle était atteinte d’un problème de santé mentale débilitant depuis 1985 environ, soit depuis qu’elle a 21 ans. Le critère relatif à l’incapacité n’est satisfait que s’il y a une période pendant laquelle elle n’a pas pu former l’intention ou communiquer l’intention de demander des prestations. Les éléments de preuve à l’appui de son invalidité ne prouvent pas son incapacité s’il n’y a pas d’éléments de preuve selon lesquelles elle n’a pas pu former ou exprimer l’intention de présenter une demande. Les éléments de preuve au dossier et le témoignage de la requérante ne révèlent pas de période pendant laquelle elle répondait à la définition d’incapacité.

[8] La requérante a déclaré que sa période d’incapacité a commencé vers 1985, lorsqu’elle avait 21 ans. Elle se poursuit aujourd’hui, mais elle se limite à des périodes de six à sept jours, à raison de trois à quatre fois par année. Elle a déclaré que sa santé mentale était à l’origine de cette incapacité. Elle était déprimée et ne pensait pas clairement. Elle s’est décrite comme étant prisonnière dans sa propre maison. Son âge a également contribué à l’incapacité. Elle n’avait pas les connaissances nécessaires pour comprendre ce qu’elle devait faire pour elle-même. Elle croyait qu’elle finirait par se rétablir et ne connaissait pas les règles ou les procédures relatives aux prestations d’invalidité. Elle ne savait pas que les personnes atteintes de troubles mentaux avaient droit à des prestations d’invalidité. Elle sait maintenant qu’elle aurait eu droit à une pension d’invalidité lorsqu’elle a présenté ses premiers symptômes d’invalidité. Elle estime donc qu’elle devrait avoir droit à plus de prestations rétroactives, sinon au montant total.

[9] La requérante a déclaré être tombée très malade en 1985, lorsqu’elle a commencé à présenter des symptômes de dépression et d’anxiété. Elle était incapable de travailler et ne pouvait pas faire grand-chose pour prendre soin d’elle-même. Elle ne pouvait pas quitter son domicile sans être accompagnée et comptait sur les membres de sa famille pour l’aider dans ses activités quotidiennes. Après un an ou deux, ses médicaments ont commencé à l’aider, mais elle a continué d’éprouver des difficultés à maintenir ce qu’elle considérait comme étant une vie normale. Elle a eu beaucoup de mal à comprendre sa maladie, mais elle a continué d’essayer de travailler pendant de brèves périodes.

[10] L’invalidité de la requérante n’est pas contestée. Le ministre a convenu qu’elle a droit à des prestations d’invalidité parce qu’elle est atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC. Le médecin de famille de la requérante la traite pour une dépression et de l’anxiété grave depuis plus de 17 ans. Ses symptômes comprennent des difficultés de concentration, des problèmes respiratoires et de la douleur. Elle doit [traduction] « remettre à plus tard » les activités ménagères lorsqu’elle a peu d’énergieFootnote 4.

Les activités de la requérante au cours de la période visée par la demande

[11] En plus des éléments de preuve médicale, il est important de tenir compte des activités de la requérante pendant la période où elle affirme avoir été incapable de former ou d’exprimer l’intention de demander des prestations. Ses activités peuvent aider à déterminer si elle n’avait pas une capacité au sens du RPCFootnote 5. La capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande n’est pas différente de la capacité à faire d’autres choix. Les activités de la requérante avant qu’elle ne demande des prestations d’invalidité ne démontrent pas qu’elle n’était pas en mesure de former ou d’exprimer l’intention de demander des prestations.

[12] Le fait qu’une personne n’ait pas l’idée d’exercer une faculté donnée en raison de sa vision du monde ne dénote pas chez elle une absence de capacitéFootnote 6. La requérante attribue une partie de son incapacité au fait qu’elle n’avait que 21 ou 22 ans lorsqu’elle est tombée gravement malade et qu’elle ne comprenait pas les règles relatives aux prestations d’invalidité. La règle relative à l’incapacité en ce qui concerne les prestations rétroactives est axée sur la question de savoir si la requérante pouvait former ou exprimer l’intention de présenter une demande. Ces règles n’exigent pas qu’elle ait les connaissances ou la capacité de remplir ou de soumettre les documentsFootnote 7.

[13] La requérante a décrit ses activités habituelles pendant les années qui ont suivi l’apparition de sa maladie et avant mai 2017. Elle s’est mariée en 1992 et a eu deux enfants - l’un né en 1994 et l’autre en 1998. Elle était la principale personne à s’occuper de ses fils et ces derniers demeurent au cœur de sa vie. Elle et son conjoint se sont séparés vers 2010 et ont ensuite divorcé. Elle a continué à assumer la responsabilité principale des soins et de la garde de ses fils. La requérante prenait des décisions au jour le jour pour elle-même et pour les enfants. Elle prenait ses propres décisions juridiques et médicales. La seule exception est que son ex-conjoint payait toujours les factures du ménage et continue de le faire.

[14] La requérante a expliqué comment sa santé mentale l’affectait et affectait ses enfants, en particulier lorsqu’elle ne pouvait pas quitter la maison ou emmener les enfants à l’école. Même avec les symptômes de sa maladie et les effets secondaires des médicaments, elle a pu continuer à subvenir aux besoins de ses fils et n’a pas eu à demander à d’autres personnes de prendre soin d’eux. La requérante vit toujours seule et gère ses décisions personnelles et domestiques, à l’exception du paiement des factures du ménage. Parfois, elle reçoit l’aide d’autres personnes pour faire ses courses. Pendant la période d’incapacité invoquée, la requérante a pris toutes les autres décisions, comme engager un avocat et lui donner des instructions, rencontrer des professionnels de la santé et prendre des décisions concernant les soins en cours, établir des règles et prendre des décisions pour ses enfants.  

[15] La requérante a décrit les difficultés dévastatrices qu’elle a connues lorsqu’elle est tombée malade pour la première fois et de temps en temps depuis. Elle continue d’éprouver des périodes de symptômes accrus plusieurs fois par année. Elle a fait preuve d’une grande force et d’une grande persévérance pour prendre soin d’elle-même et de ses fils tout en vivant avec une invalidité grave. Malheureusement, la gravité de son état ne lui donne pas le droit à des prestations supplémentaires.

[16] Le Tribunal est créé par voie législative et ne jouit donc que des pouvoirs qui lui sont conférés par ses lois habilitantes. Il me faut donc interpréter et appliquer les dispositions telles qu’elles sont énoncées dans le RPC. Je comprends que la requérante est atteinte d’une invalidité et éprouve des difficultés avec sa santé depuis de nombreuses années, mais je ne peux pas tenir compte de circonstances atténuantes afin d’ignorer les dispositions obligatoires du RPC.

Conclusion

[17] La description faite par la requérante de son état de santé et de ses activités ainsi que les éléments de preuve figurant au dossier ne prouvent pas, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était, pendant une période quelconque, incapable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande avant mai 2017. Par conséquent, elle n’est pas admissible à des prestations d’invalidité rétroactives supplémentaires.

[18] L’appel est rejeté.

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