Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le requérant est un homme de 58 ans qui a travaillé comme transporteur (chauffeur commercial) pendant environ 21 ans. En janvier 2011, il a pris un congé de son emploi de chauffeur d’autobus adapté en raison de la fatigue chronique dont il souffrait due à l’apnée du sommeil. En juin 2011, son permis de conduire pour véhicule commercial a été révoqué. Le requérant n’a pas travaillé depuis 2011.

[3] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du requérant le 20 avril 2017. Il a rejeté la demande initialement et après révision. Le requérant a interjeté appel de la décision issue de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[4] Une personne qui demande une pension d’invalidité doit satisfaire aux exigences énoncées dans la loi qui portent sur les prestations d’invalidité du RPC. Premièrement, il faut satisfaire aux exigences en matière de cotisations. Le terme juridique pour décrire cela est la période minimale d’admissibilité (PMA)Footnote 1. Cela ne constitue pas un problème dans le présent appel. La PMA du requérant a pris fin le 31 décembre 2013.

Questions en litige

[5] Au sens du RPC, une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeFootnote 2. Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. Le requérant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité répond aux deux volets du critère. Cela signifie que si le requérant ne satisfait qu’à un seul volet, il n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

[6] Le requérant était-il atteint d’une invalidité grave au plus tard le 31 décembre?

[7] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant était-elle prolongée au plus tard le 31 décembre 2013?

Le requérant était-il atteint d’une invalidité grave au plus tard le 31 décembre 2013?

[8] Non. Bien que le requérant a certaines limitations en raison de ses problèmes de santé, il n’a pas suivi les traitements recommandés ou envisagé d’autres options sans expliquer raisonnablement pourquoi. En outre, le requérant n’a pas tenté de retourner travailler ou de se recycler.

Troubles médicaux

[9] Je dois évaluer l’état de santé du requérant dans sa totalité, ce qui signifie que je dois tenir compte de toutes les déficiences possibles, et non pas uniquement de celles qui sont les plus importantes ou les principalesFootnote 3. Les troubles médicaux qui influent sur la capacité de travailler du requérant sont un grave syndrome d’apnées obstructives du sommeil et des blessures physiques.

[10] Depuis 1997 environ, le requérant a des problèmes de ronflements, est incapable de bien dormir et souffre de somnolence excessive pendant la journée. À l’époque, il conduisait un autocar sur de longues distances et a remarqué qu’il avait l’impression de s’endormir pendant la journée. Parce qu’il avait des inquiétudes quant à la sécurité, il a quitté cet emploi. Au cours des années suivantes, il a travaillé comme chauffeur d’autobus scolaire et d’autobus effectuant des visites de ville. Dans le cadre de ces deux emplois, il pouvait prendre souvent des pauses et se reposer ou faire une sieste pendant les temps d’arrêt.

[11] En octobre 2000, le requérant a été engagé pour conduire un autobus adapté dans la ville. Dans le cadre de ce travail, il ramassait et déposait des personnes handicapées. De nombreux passagers étaient en fauteuil roulant ou en scooter ou avaient besoin d’aide physique. Le requérant devait pousser les fauteuils roulants sur les rampes d’accès, transférer les passagers de leur scooter à un siège et les aider à marcher.

[12] Le requérant a déclaré que la somnolence s’emparait de lui au fur et à mesure que la journée progressait. Il profitait de ses pauses pour fermer les yeux et parfois faire une sieste et décompresser. Au fil des ans, son état n’a fait qu’empirer, car il dormait moins la nuit et il avait souvent des maux de tête. En 2004, lorsque le requérant a eu suffisamment d’ancienneté, il a pu commencer à faire des quarts fractionnés – il pouvait rentrer chez lui pour faire une sieste et revenir plus tard pour la seconde moitié de son quart.

[13] Bien qu’il tentait de faire une sieste pendant la journée, le requérant s’absentait souvent du travail. Il a déclaré qu’il arrivait souvent en retard (qu’il ne se réveillait pas grâce à son alarme) ou qu’il ne se présentait pas du tout au travail parce qu’il était extrêmement fatigué et qu’il avait des étourdissements ou des maux de tête. Le requérant a fourni des copies de nombreux formulaires d’absence qu’il a soumis au fil des ans. Toutefois, les motifs d’absence indiqués dans un grand nombre d’entre eux ne sont pas liés à la fatigue, comme des problèmes de voiture, une panne de courant dans le bâtiment, une maladie, etc.

[14] Malgré ses problèmes de sommeil qui persistaient et leur incidence sur sa capacité à travailler en toute sécurité, le requérant n’avait toujours pas consulté de médecin en 2010 à propos de ses étourdissements et de sa fatigue excessive pendant la journée.

[15] Entre 2008 et 2010, en plus de ses problèmes de sommeil, le requérant a également subi des blessures physiques au travail. Il s’est blessé au dos, au genou droit et à l’épaule gauche lors de trois incidents différents. Sur une période de 15 mois, il s’est absenté du travail pendant environ quatre mois et demi en raison de ces blessures. Selon les rapports d’invalidité de courte durée rédigés par le Dr Wray, le requérant était aux prises avec :

  • des douleurs lombaires de nature mécanique avec divers degrés d’irritation de la racine nerveuse gauche et des spasmes lombaires violents qui limitent sa capacité à aider les passagers à monter et à descendre de l’autobus et les rampes;
  • une bursite au genou droit qui lui cause de la douleur lorsqu’il marche ou emprunte les escaliers;
  • de la fasciite plantaire;
  • une bursite et une tendinite à l’épaule gauche.

[16] Le requérant a pris des médicaments pour traiter de la douleur et de l’enflure et a suivi des traitements de physiothérapie. Il est retourné au travail après que les physiothérapeutes lui en aient donné l’autorisation. En août 2010, le Dr Wray a indiqué dans un de ses rapports qu’en raison de ses symptômes, le requérant avait de la difficulté à soulever et à déplacer des fauteuils roulants et à aider les passagers qui se déplacent avec un déambulateur. Selon lui, le requérant devrait envisager de faire un autre métier qui n’implique pas de soulever des objets.

[17] En octobre 2010, l’employeur du requérant l’a envoyé passer un examen médical indépendant. Les principaux problèmes physiques identifiés par l’examinateur, le Dr El-Sawy, étaient des douleurs au bas du dos, à la main gauche, aux épaules et aux pieds. Les genoux du requérant ne le gênaient pas à ce moment-là. Le Dr El-Sawy a indiqué que les maux de dos du requérant étaient de nature mécanique. Il a recommandé une imagerie par résonnance magnétique pour ses problèmes d’épaule. Le Dr El-Sawy s’est aussi dit préoccupé par la perte d’énergie et les troubles du sommeil importants du requérant. Dans son rapport daté d’octobre 2010, le Dr El-Sawy a recommandé une étude du sommeil dans un laboratoire du sommeil.

[18] Le requérant a fait une étude du sommeil en décembre 2010. Le Dr Dales lui a diagnostiqué une apnée obstructive du sommeil grave et une hypoxémie (faible niveau d’oxygène dans le sang). Les personnes souffrant d’apnée du sommeil ont généralement des problèmes à maintenir leurs voies respiratoires ouvertes pendant leur sommeil. Cela entraîne un faible niveau d’oxygène dans le sang. Un faible niveau d’oxygène peut entraîner de la somnolence pendant la journée, de la fatigue et une perte de concentration.

[19] Dans son rapport daté du 11 janvier 2011, le Dr Dales indique que le meilleur traitement pour le requérant est un appareil de ventilation en pression positive continue (VPPC) et que les autres options ne seraient pas suffisantes pour contrôler son état de santé. Pendant l’étude du sommeil, le requérant a essayé d’utiliser l’appareil de VPPC, mais ne l’a pas toléré. Le Dr Dales a également écrit qu’il devrait en informer le ministère des Transports.

[20] Le requérant a tenté d’utiliser l’appareil de VPPC, mais déclare qu’il est claustrophobe (qu’il a peur des espaces confinés). Les appareils de VPPC comportent un masque qui couvre complètement la bouche et le nez de l’utilisateur. Le masque est relié par une tubulure à l’appareil, qui fournit une pression d’air à l’utilisateur. La pression positive garde les voies respiratoires de l’utilisateur ouvertes pendant qu’il dort. Le requérant dit que lorsqu’il porte le masque, il a peur et a l’impression d’étouffer. Il a indiqué que c’était comme si quelqu’un essayait de lui mettre un sac sur la tête.

[21] Le requérant affirme qu’en janvier 2011, il a failli s’effondrer à cause de la fatigue en aidant un usager. Il a demandé à son employeur de tenir compte de son état de santé et de lui trouver un emploi de bureau. Son employeur a rejeté sa demande en raison de son absentéisme excessif. Le requérant est parti en congé de maladie. En juin 2011, le ministre des Transports a révoqué son permis de conduire de catégorie F pour véhicule commercial et son permis de conduire général. Le requérant a quitté son emploi à la mi-juin 2011.

[22] Entre janvier et juillet 2011, le requérant a eu un certain nombre de rendez-vous au laboratoire du sommeil pour tenter de résoudre ses difficultés à utiliser l’appareil de VPPC. Les pressions de l’appareil de VPPC ont été ajustées et il a essayé différents masques. Le requérant a aussi essayé d’autres appareils de traitement de l’apnée du sommeil : un appareil de VPPC automatique, un appareil de type biniveau et des canules nasales. Le requérant affirme que l’appareil de type biniveau comporte également un masque qu’il ne peut pas tolérer très longtemps en raison de sa claustrophobie et qu’il ne peut pas utiliser les canules nasales parce qu’il respire par la bouche.

[23] Le 16 février 2011, le requérant a consulté le Dr Dales pour une étude du sommeil et une polygraphie cardio-respiratoire en laboratoire. Dans son rapport, le Dr Dales a écrit que le requérant avait utilisé l’appareil de VPPC trois heures par nuit, quatre nuits par semaine. Il a également indiqué qu’il avait conseillé le requérant sur les risques de l’apnée du sommeil non traitée et qu’il lui avait expliqué que les deux options de traitement qui s’offraient à lui étaient un appareil de VPPC automatique et une trachéotomie.

[24] En avril 2011, le requérant a eu une autre consultation en matière de sommeil après avoir essayé un appareil de VPPC et un appareil de VPPC automatique. Il avait utilisé l’appareil de VPPC 16 nuits sur un total de 36 nuits environ 2 heures par nuit.

[25] Dans son rapport d’avril 2011, le Dr Dales a indiqué qu’il avait expliqué au requérant qu’il courrait un risque accru d’accidents vasculaires cérébraux, de crises cardiaques et d’hypertension si son apnée du sommeil n’était pas traitée. Le Dr Dales a répété que la seule option efficace mise à part l’appareil de VPCC serait une trachéotomie. Encore une fois, le requérant a refusé le traitement.

[26] En juillet 2011, le requérant a eu une autre consultation pour une étude du sommeil. Il a reçu une ordonnance pour essayer un appareil de VPPC automatique ou un appareil de type biniveau automatique.

[27] Dans un rapport au Dr Wray daté du 14 mars 2012, le Dr Dales a écrit que le requérant avait utilisé l’appareil de VPPC en moyenne 2 heures et 23 minutes 34 jours sur 37. Il a indiqué que l’appareil de VPPC permettait un bon contrôle, mais que le requérant était incapable de l’utiliser suffisamment longtemps. Le Dr Dales a déclaré que le requérant ne pouvait pas tolérer le masque ou la mentonnière parce qu’il est claustrophobe.

[28] Dans son rapport du 18 juin 2012, le Dr Dales a écrit que le requérant souffrait d’un nombre d’épisodes d’apnée et d’hypopnée très élevé et qu’il ne tolérait pas l’appareil de VPPC. Il a noté que le requérant avait essayé un appareil de type biniveau de pointe et qu’il l’avait utilisé 52 nuits sur 76 pendant environ 2 heures par nuit.

[29] Le Dr Dales a également écrit que le requérant avait posé des questions au sujet des autres traitements possibles et qu’il lui avait de nouveau expliqué au requérant qu’une reconstruction faciale majeure ou une trachéotomie pourrait améliorer son apnée du sommeil. Le Dr Dales a noté que le requérant [traduction] « n’était pas très enthousiaste » quant à l’un ou l’autre des traitements. Le requérant a demandé à voir un otorhinolaryngologiste pour lequel le Dr Dales lui a fourni une référence. Le Dr Dales lui a également prescrit quelques médicaments : de la trazodone pour voir si cela l’aiderait à dormir et à mieux utiliser l’appareil de VPPC et du modafinil pour traiter sa somnolence excessive. Il s’agit du dernier rapport avant la fin de la MPA, soit avant le 31 décembre 2013.

[30] Les rapports suivants sur l’apnée du sommeil du requérant datent de 2018 et 2019. Ils indiquent que le requérant n’était [traduction] « pas à l’aise » avec l’appareil de VPPC. Les résultats d’études du sommeil indiquent toujours une apnée obstructive du sommeil grave.

Incidence de l’apnée du sommeil

[31] Lorsqu’on lui a demandé comment son apnée du sommeil l’avait affecté entre 2011 et décembre 2013 (date de fin de la PMA), le requérant a déclaré qu’il se sentait toujours fatigué tout au long de la journée, mais que cela [traduction] « le frappait éventuellement de plein fouet » et qu’il devait s’allonger et dormir. Il faisait une sieste l’avant-midi et une sieste l’après‑midi. Il programmait une alarme pour se réveiller une heure et demie plus tard. Souvent, lorsqu’il se réveillait, il avait mal à la tête.

[32] Le requérant a déclaré qu’il est incapable de se concentrer pendant très longtemps : s’il lit, il se désintéresse rapidement et ses yeux commencent à se fermer. Après avoir regardé la télévision pendant une heure, il ne peut plus se concentrer. Il a besoin qu’on lui rappelle que ses vêtements sont dans la sécheuse ou que de l’eau bouille sur le rond de la cuisinière. Il affirme que cela ressemble à lorsqu’on est debout toute la nuit ou qu’on ne dort pas.

[33] Dans ses observations, le requérant affirme que l’apnée du sommeil a eu une incidence importante sur ses capacités. Outre sa grande fatigue pendant la journée, il a du mal à se concentrer, est distrait et est incapable d’accomplir des tâches.

Incidence des blessures physiques

[34] Le requérant a subi plusieurs blessures physiques avant la fin de sa PMA, soit avant le 31 décembre 2013. Cependant, il est retourné travailler chaque fois après avoir pris un repos et suivi une physiothérapie et une pharmacothérapie. Le seul médecin qui a relevé une restriction est le Dr Wray, qui a écrit en août 2010 que le requérant devrait envisager un autre métier qui n’impliquait pas de soulever des objets. En outre, l’examen médical indépendant réalisé en octobre 2010 a révélé que ses douleurs au bas du dos étaient de nature mécanique. Le seul autre élément de preuve de blessure ou de douleur physique antérieure à la PMA est une note dans le dossier du Dr Wray concernant des douleurs au genou le 10 décembre 2013.

[35] D’après la preuve, bien que le requérant ait pu éprouver des douleurs ou être limité dans ses mouvements avant la fin de la PMA, il était capable d’occuper un emploi léger ou sédentaire. Au cours de son témoignage, le requérant a déclaré que sa première préoccupation à l’époque où il a pris congé de son emploi était son incapacité à conduire en toute sécurité et qu’il avait espéré que son employeur lui offrirait des mesures d’adaptation.

Le requérant a-t-il suivi les traitements recommandés pour son apnée du sommeil?

i. Preuve de refus

[36] Je dois évaluer une invalidité grave dans un contexte réaliste, ce qui signifie que je dois déterminer si le refus du requérant de suivre les traitements recommandés est déraisonnable ou non, et quelle incidence ce refus peut avoir sur son état d’incapacité advenant que ce refus soit considéré comme déraisonnableFootnote 4.

[37] Une partie requérante est tenue de respecter les recommandations de traitement raisonnables, ou bien de fournir une explication convaincante si elle ne le fait pasFootnote 5.

[38] Le requérant n’a pas utilisé un appareil de VPPC comme recommandé. Les rapports rédigés au fil des ans indiquent qu’il a rarement utilisé l’appareil de VPPC pendant plus de quelques heures à la fois et qu’il ne l’a pas utilisé tous les soirs. Même sept ans après avoir été diagnostiqué, le requérant n’utilise pas l’appareil de VPPC chaque soir. Selon un rapport de conformité portant sur l’utilisation par le requérant de l’appareil de VPPC entre le 19 juin et le 17 août 2018, le requérant n’a utilisé l’appareil que 41 jours sur 60, et 38 jours, il l’a utilisé pendant moins de 4 heures.

[39] Le requérant n’a pas non plus pris comme il le devait les médicaments qui lui ont été prescrits qui pouvaient l’aider à dormir ou à amoindrir les effets de sa somnolence pendant la journée.

ii. Explication du refus et caractère raisonnable de l’explication

[40] Il est reconnu que la claustrophobie du requérant a une incidence sur sa capacité à porter un masque et à utiliser l’appareil de VPPC. Il a aussi été noté que le requérant a tenté de s’adapter à l’appareil de VPPC au fil des ans. Cependant, il a refusé d’envisager les seules autres options de traitements qui s’offraient à lui pour son apnée du sommeil et il n’a pas envisagé de se faire soigner pour sa claustrophobie.

[41] Comme je l’ai précisé plus haut, le Dr Dales a informé le requérant à de nombreuses reprises des répercussions possibles d’une apnée du sommeil non traitée. Le Dr Dales l’a également informé que les seules autres options de traitement à l’appareil de VPPC qui s’offraient à lui étaient une reconstruction faciale et une trachéotomie. Selon les rapports du Dr Dales et le témoignage du requérant, il a refusé les deux traitements.

[42] Il incombe au requérant d’expliquer son refus d’envisager ces options. Le requérant n’a pas expliqué pourquoi il refuse d’envisager ces deux traitements et n’a produit aucun élément de preuve sur leurs risques. Bien que le refus d’une chirurgie ou d’une trachéotomie puisse être considéré comme une décision raisonnable dans les premiers jours suivant un diagnostic, ne pas envisager ces options après des tentatives répétées et infructueuses d’utiliser l’appareil de VPPC n’est pas raisonnable. En outre, lorsqu’on a demandé au requérant lors de l’audience s’il envisageait de suivre un traitement pour sa claustrophobie, il a répondu par la négative parce que son médecin n’en avait pas parlé.

[43] On a également prescrit au requérant des médicaments pour l’aider à s’endormir (trazodone) et pour lutter contre sa somnolence pendant la journée (modafinil). Le requérant a déclaré qu’il n’aime pas prendre de la trazodone parce que cela l’étourdit. Cependant, une note dans les dossiers du Dr Abdulkarim indique que la trazodone était efficace en dose complète. En outre, le requérant ne prend du modafinil qu’occasionnellement, lorsqu’il n’a pas le temps de faire une sieste pendant la journée. Le requérant n’a pas fourni d’élément de preuve indiquant qu’il avait discuté des effets secondaires avec son médecin ou qu’il avait cherché d’autres options. Par conséquent, j’estime que l’explication qu’il a fournie pour avoir refusé de prendre ses médicaments n’est pas raisonnable.

iii. Incidence du refus du requérant sur son statut d’invalidité

[44] Le refus du requérant d’envisager d’autres options de traitements ou de prendre ses médicaments de façon régulière (sans explication raisonnable) signifie qu’il n’a pas fait tout ce qu’il pouvait faire pour réduire les répercussions de son apnée du sommeil ou améliorer ses capacités fonctionnelles. Par conséquent, j’estime que le requérant a une capacité résiduelle de travailler.

Contexte réaliste

[45] Je dois évaluer l’aspect du critère ayant trait à la gravité dans un contexte réalisteFootnote 6. Cela signifie que, pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[46] Le requérant avait 52 ans à la fin de la PMA et 50 ans lorsqu’il a cessé de travailler. Il a terminé sa 12e année en 1979 et a obtenu un diplôme en technologies électroniques du Ryerson Technical College en 1984. De 1985 à 1988, le requérant a travaillé dans le secteur des technologies électroniques, la plupart du temps dans le domaine des instruments de vol. Le requérant a déclaré qu’il avait cessé de travailler dans ce secteur en 1988 parce qu’il avait l’impression qu’il [traduction] « n’était pas doué pour cela ».

[47] Pendant les cinq années suivantes, le requérant a travaillé à temps partiel pour le journal Ottawa Citizen en tant que superviseur des livreurs de journaux. Il s’occupait principalement des plaintes des clients et apprenait aux livreurs de journaux comment recruter de nouveaux clients. Il n’était responsable d’aucune question financière.

[48] En 1995, le requérant a obtenu son permis de catégories A et B assorti de l’autorisation Z (pour conduire des camions, des autobus et des véhicules munis de freins à air). De cette année‑là jusqu’en 2011, il a conduit des autobus scolaires, des autocars, des autobus urbains à deux étages et des autobus adaptés. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, les permis de conduire pour véhicule commercial et général du requérant ont été révoqués en 2011 en raison de son apnée du sommeil.

[49] Le critère permettant d’évaluer si une invalidité est « grave » ne consiste pas à déterminer si une personne souffre de graves affections, mais plutôt à déterminer si son invalidité l’empêche de gagner sa vie. La détermination de la gravité de l’invalidité d’une personne ne dépend pas de son incapacité d’occuper son emploi régulier, mais plutôt de son incapacité de détenir une occupation véritablement rémunératriceFootnote 7.

[50] Le requérant a acquis la majeure partie de ses compétences professionnelles dans le cadre de son emploi de chauffeur commercial et il est évident qu’il ne peut pas reprendre aucun emploi de chauffeur puisque son permis a été révoqué. Toutefois, le requérant possède des compétences transférables acquises grâce à ses expériences de travail au journal Ottawa Citizen, où il supervisait les livreurs de journaux et traitait les plaintes des clients. Il possède aussi des connaissances et de l’expérience dans le domaine des technologies électroniques qui pourraient se révéler utiles dans d’autres domaines ou être mises à niveau.

[51] Le requérant a affirmé lors de l’audience qu’il ne pouvait pas retourner travailler parce qu’il serait trop fatigué pour faire bonne figure en entrevue et suivre le rythme. Il a indiqué qu’il avait réfléchi entre 2011 et 2013 à la possibilité de faire un autre travail ou de se recycler.

[52] À l’audience, j’ai questionné le requérant au sujet du type de travail qu’il pensait pouvoir accomplir lorsqu’il a demandé des mesures d’adaptation à son travail en 2011. Le requérant a répondu qu’il ne savait pas quel type de travail il pouvait effectuer, mais qu’il savait qu’il n’était pas sécuritaire qu’il conduise un véhicule et qu’il avait besoin de quelque chose de moins exigeant sur le plan physique.

[53] À la lumière du témoignage du requérant et des éléments de preuve médicale datant de la PMA, j’estime qu’il avait une capacité résiduelle de se recycler ou d’effectuer un travail léger ou sédentaire.

[54] Le fait que le requérant n’ait pas tenté de se recycler ou de trouver un autre emploi et qu’il n’ait pas tenté d’atténuer ses problèmes de santé en suivant les recommandations de traitement signifie qu’il ne satisfait pas à la définition d’invalidité grave.

Le requérant est-il atteint d’une invalidité prolongée?

[55] Puisque je suis arrivée à la conclusion que l’invalidité du requérant n’est pas grave, il n’est pas nécessaire que j’examine si son invalidité est prolongée.

Conclusion

[56] L’appel est rejeté.

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