Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Résumé :

Le requérant a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC sur le fondement de divers problèmes de santé. Il a fourni des éléments de preuve des répercussions de ses problèmes sur sa capacité de travailler, ce qu’on appelle aussi « limitations fonctionnelles ». Le ministre a rejeté la demande et le requérant a fait appel à la division générale (DG). La DG a conclu que son invalidité n’était pas grave et a donc rejeté l’appel. Le requérant a ensuite fait appel devant la division d’appel (DA) qui a conclu que la DG avait commis une erreur de droit en concluant que ses problèmes de santé n’étaient pas « graves ». La DG a dressé la liste de certaines limitations fonctionnelles, mais n’en a pas tenu compte dans leur ensemble. La DA a rendu la décision que la DG aurait dû rendre. Elle a conclu que malgré ses limitations, le requérant avait tout de même la capacité de travailler et n’était pas invalide.

La CAF a conclu que la DA avait été déraisonnable dans son évaluation de l’invalidité. D’abord, la DA a conclu que le requérant avait une certaine capacité de travailler et que ses problèmes de santé n’étaient pas « graves ». Elle n’a toutefois pas expliqué pourquoi elle avait aussi accepté la preuve laissant croire que ses limitations ne lui permettaient pas d’obtenir un travail régulier. Cette lacune dans l’analyse a fait en sorte que la CAF ne comprenait pas sa décision. Ensuite, la CAF a conclu que la DA n’avait pas fait son analyse dans un « contexte réaliste », comme l’exige la jurisprudence. Par exemple, la DA n’a pas abordé la preuve selon laquelle ses limitations ne lui permettaient pas d’occuper régulièrement un emploi. Cela contredit ses autres conclusions selon lesquelles il pouvait faire un travail à temps partiel. La DA n’a pas abordé les circonstances personnelles du requérant dans ses motifs. La CAF a accueilli la demande de contrôle judiciaire et a renvoyé l’affaire en DA pour réexamen.

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] Je rejette l’appel. La division générale a commis une erreur en n’analysant pas les limitations fonctionnelles du requérant. Je rendrai la décision que la division générale aurait dû rendre, et j’analyserai ces limitations fonctionnelles. Le résultat reste le même : le requérant n’a pas droit à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] D. R. (requérant) travaillait comme conducteur indépendant jusqu’à ce qu’il ait un accident de voiture en 2015. Il a subi une perte permanente de son champ de vision dans un œil. Il ressent des douleurs à l’épaule droite, au genou et au coude droit, et il est atteint de dépression.

[3] Le requérant a présenté une demande de pension d’invalidité le 18 décembre 2017. Le ministre a rejeté sa seconde demande au stade initial et après révision. Le requérant a interjeté appel devant le Tribunal.

[4] La division générale a rejeté l’appel du requérant le 27 mai 2019. La division générale a conclu que le requérant n’a pas démontré qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongéeNote de bas de page 1 à la date de sa période minimale d’admissibilité (PMA) qui se terminait le 31 décembre 2016, ou avant cette date. Le requérant a présenté une demande de permission d’en appeler relative à la décision de la division générale.

[5] J’ai accordé au requérant la permission d’en appeler de la décision de la division générale le 4 septembre 2019. J’ai conclu qu’il était possible de soutenir que la division générale avait commis une erreur de droit en n’évaluant pas l’ensemble des affections du requérant (dans leur totalité).

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur. Si la division générale a commis une erreur, je dois décider de ce que je vais faire pour y remédier (réparation).

[7] À mon avis, le membre de la division générale a commis une erreur de droit dans la décision. Pour corriger cette erreur, je rendrai la décision que la division générale aurait dû rendre. Le résultat reste le même : le requérant n’a pas droit à une pension d’invalidité au titre du RPC. Je rejette l’appel.

Question en litige

[8] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’analyser les limitations fonctionnelles du requérant au cours de la PMA?

Analyse

Examen des décisions de la division générale

[9] La division d’appel ne donne pas aux parties la possibilité de présenter pleinement leur position à nouveau dans le cadre d’une nouvelle audience. La division d’appel examine plutôt la décision de la division générale afin de déterminer si elle contient une erreur. Cet examen est fondé sur le libellé de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS). La LMEDS énonce les motifs (moyens) d’appel possiblesNote de bas de page 2. L’un de ces motifs d’appel se manifeste lorsque la division générale commet une erreur de droitNote de bas de page 3.

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit?

[10] La division générale a commis une erreur de droit en omettant d’analyser et de décider quelles étaient les limitations fonctionnelles du requérant à la fin ou avant la fin de la PMA.

[11] Une partie requérante est atteinte d’une invalidité « grave » au sens du RPC lorsqu’elle est « régulièrement incapable d’exercer une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 4 ». Il ne s’agit pas de savoir si la partie requérante est atteinte de graves affections, mais si son invalidité l’empêche de gagner sa vieNote de bas de page 5. La division générale doit évaluer les limitations fonctionnelles du requérant au moment de décider si l’invalidité est « grave » au sens du RPCNote de bas de page 6.

[12] En l’espèce, la division générale a correctement énoncé une série de principes juridiques qui s’appliquent pour décider si une invalidité est grave au sens du RPCNote de bas de page 7. La décision de la division générale indique quatre raisons pour lesquelles le requérant n’avait pas droit à la pension d’invaliditéNote de bas de page 8 :

  1. Il n’y avait aucun résultat d’examen clinique grave ni aucune limitation fonctionnelle grave liée à l’épaule droite, au genou droit ou au coude du requérant l’empêchant de travailler;
  2. Les activités quotidiennes du requérant démontrent qu’il avait une certaine capacité de travail;
  3. Le requérant n’a pas poursuivi la [traduction] « thérapie active » pour son épaule, son coude et son genou;
  4. Il n’y a aucune preuve selon laquelle la dépression et l’anxiété du requérant étaient des conditions invalidantes pour lui.

[13] Le requérant a fait valoir que la division générale avait commis une erreur en ne tenant pas compte de l’effet de l’ensemble de ses affections, y compris de son état psychologiqueNote de bas de page 9.

[14] Le ministre soutientNote de bas de page 10 que la division générale a examiné l’effet de l’ensemble des affections du requérant. La division générale a clairement indiqué dans sa décision qu’elle doit évaluer l’état de santé du requérant dans sa totalité. Cela signifie qu’il faut tenir compte de toutes les déficiences possibles, et non seulement des déficiences les plus importantes ou de la déficience principaleNote de bas de page 11. La division générale a reconnu que le requérant a déclaré qu’il était difficile de se pencher et de se lever. Le requérant aurait certaines limitations pour ce qui est d’exercer un travail exigeant physiquement, mais son invalidité n’était pas graveNote de bas de page 12. La division générale a reconnu la perte de vision du requérant, mais il a continué à travailler et à conduire un véhicule après avoir subi cette blessureNote de bas de page 13.

[15] Selon moi, la division générale a commis une erreur de droit. Le problème avec l’approche de la division générale est qu’elle est axée sur une liste de raisons pour lesquelles le requérant n’a pas droit à la pension d’invalidité. Plutôt, la division générale se devait de discuter et d’analyser l’ensemble des limitations fonctionnelles qui avaient une incidence sur la capacité à travailler du requérant au cours de sa PMA. La division générale n’est pas libre de sauter cette partie de l’analyse juridique. La Cour d’appel fédérale exige que la division générale prenne en considération les limitations fonctionnelles qui ont une incidence sur la capacité à travailler. Bien que la division générale ait mentionné plusieurs limitations fonctionnelles, elle n’a pas fourni d’analyse de toutes les limitations qui ont eu une incidence sur la capacité à travailler du requérant. Il s’agit d’une erreur de droit. Cette erreur précise peut également se traduire par une omission de considérer toutes les affections dans leur totalité, ce qui est plutôt l’erreur sur laquelle le requérant s’est concentré.    

[16] La division générale n’est pas tenue de mentionner chacun des éléments de preuve dans sa décisionNote de bas de page 14. Cependant, la division générale doit évaluer les limitations fonctionnelles du requérant lorsqu’elle décide si son invalidité est graveNote de bas de page 15. La décision ne répond pas à cette exigence concernant l’évaluation des limitations fonctionnelles.

[17] La décision de la division générale est axée sur les raisons pour lesquelles le requérant n’a pas démontré qu’il était atteint d’une invalidité grave. La division générale aurait quand même dû analyser et décider quelles étaient les limitations fonctionnelles du requérant au cours de la PMA.

[18] En ce qui concerne les limitations fonctionnelles, le membre de la division générale a mentionné :

  • certains éléments de preuve du requérant concernant ses activités quotidiennes, comme le fait de conduire et de transporter des sacs lors des courses, et le fait qu’il est allé en Jamaïque pour des vacancesNote de bas de page 16;
  • les éléments de preuve du requérant selon lesquels se pencher et se lever étaient problématiqueNote de bas de page 17;
  • les éléments de preuve du requérant concernant l’incidence de sa perte du champ de vision de l’œil gaucheNote de bas de page 18;
  • la douleur au genou après la fin de la PMANote de bas de page 19.

[19] Cependant, le dossier contenait beaucoup plus d’éléments de preuve concernant les limitations fonctionnelles du requérant que la division générale aurait dû examiner. Le chiropraticien du requérant à la clinique de réadaptation, le Dr Kerr, a fourni des renseignements sur les limitations fonctionnelles du requérant lors d’une évaluation après l’accident de voiture, puis dans des rapports d’étapeNote de bas de page 20. Le requérant a fourni quelques renseignements sur ses limitations dans son questionnaire d’invalidité du RPCNote de bas de page 21. Le requérant a également fourni un rapport d’étape provenant de la psychothérapie et qui fait la lumière sur les limitations fonctionnelles associées à sa dépressionNote de bas de page 22. La décision de la division générale ne fournit pas d’analyse de ces éléments de preuve afin de déterminer quelles étaient les limitations fonctionnelles du requérant au cours de la PMA. Il s’agit d’une erreur de droit.

[20] La division générale a commis une erreur de droit. La division générale doit décrire et examiner l’incidence des limitations fonctionnelles du requérant sur sa capacité à travailler. La division générale ne peut pas simplement sauter cet exercice et choisir plutôt de décrire les raisons disparates pour lesquelles un requérant n’a pas droit à une prestation dans ses décisions.

Réparation

[21] Lorsque je constate une erreur de la part de la division générale, je peux renvoyer l’affaire à la division générale aux fins de réexamen, ou je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendreNote de bas de page 23.

[22] Devant la division d’appel, le ministre et le requérant ont convenu que si je constatais une erreur, je devrais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[23] Le dossier est complet. Je rendrai la décision que la division générale aurait dû rendre. C’est la manière la plus équitable et la plus efficace de procéderNote de bas de page 24.

[24] J’estime que le requérant a des limitations physiques et psychologiques qui ont une incidence négative sur sa capacité à exercer une occupation véritablement rémunératrice. Lorsque je considère l’ensemble des affections (et les limitations fonctionnelles qui les accompagnent) en plus de la situation personnelle du requérant, je constate qu’à la fin de la PMA, le requérant avait une certaine capacité résiduelle de travail. Il n’a pas démontré que ses efforts pour obtenir et conserver un emploi étaient infructueux en raison de son invalidité. Il a pris des mesures pour gérer ses affections et n’a pas refusé de suivre des traitements. Toutefois, il n’a pas droit à la pension d’invalidité.

Critère juridique pour prouver qu’une invalidité est « grave »

[25] Une personne a droit à une pension d’invalidité lorsqu’elle peut prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de sa PMA ou avant cette date. Le ministre calcule la PMA en fonction des cotisations que la personne a versées au RPC. La PMA du requérant a pris fin le 31 décembre 2016.

[26] Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 25. Pour déterminer si une invalidité est grave, le décideur doit tenir compte de l’ensemble des affections du requérantNote de bas de page 26. L’accent est mis sur les limitations fonctionnelles du requérant qui ont une incidence sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 27. Les efforts pour gérer les problèmes médicaux sont également importantsNote de bas de page 28, a tout comme l’incidence de la situation personnelle du requérant sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 29. Si le requérant a au moins une certaine capacité (ou capacité « résiduelle ») à travailler, il doit démontrer que les efforts déployés pour obtenir et conserver un emploi ont échoué en raison de son invaliditéNote de bas de page 30.

Les affections du requérant

[27] À la fin de sa PMA, le requérant était atteint d’arthrite dégénérative, de discopathie dégénérative (DDD), de dépression, et avait des antécédents de tendinite de la coiffe des rotateurs. Il avait également un champ de vision réduit dans son œil gauche. Ces affections ont entraîné des limitations fonctionnelles qui ont affecté sa capacité à travailler. Cependant, il n’a pas démontré qu’il était régulièrement incapable d’exercer toute occupation véritablement rémunératrice. Il avait une certaine capacité à travailler à la fin de sa PMA.

[28] En juillet 2016, le chiropraticien du requérant, le Dr KerrNote de bas de page 31, a fourni une liste détaillée des limitations physiques que le requérant avait et qui auraient une incidence sur sa capacité à travailler. Le requérant avait ces limitations en dépit du fait qu’il avait assisté à de nombreuses séances à la clinique de réadaptation jusqu’à ce jour en 2016 seulementNote de bas de page 32.

[29] En juin 2016, le Dr Hewchuk (psychologue clinicien à la clinique de réadaptation) a réévalué le requérant. Le Dr Hewchuk a déclaré que le requérant restait dans la catégorie [traduction] « grave » pour ce qui est de la dépression, malgré les progrès réalisés au cours du traitementNote de bas de page 33. Il n’avait pas repris le travail depuis son accident en mai 2015.

[30] Le requérant a fourni des éléments de preuve médicale expliquant qu’il [traduction] « a définitivement perdu son champ gauche » à la suite de l’accident de voitureNote de bas de page 34.

Le requérant a des limitations fonctionnelles qui affectent sa capacité à travailler

[31] Le requérant dispose des rapports médicaux du RPC de son médecin de famille, le Dr Walters. Lorsqu’il a fait sa première demande de pension d’invalidité en mars 2017Note de bas de page 35, le Dr Walters a confirmé qu’il était atteint d’arthrite dégénérative pour laquelle il prenait de l’Advil et du Tylenol. Il a expliqué que le requérant avait eu des douleurs au cou, à la tête et au coude après un accident de voiture en 2015. Le Dr Walters a confirmé que les antécédents médicaux du requérant comprenaient une tendinose de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite (lors d’une radiographie du 15 juillet 2016), et qu’il avait passé un examen IRM de la tête en 2017 (qui n’a rien montré de significatif).

[32] La fois suivante où le requérant a présenté une demande était en décembre 2017Note de bas de page 36, et le Dr Walters a de nouveau rempli un formulaire médical du RPC. Cette fois-là, le Dr Walters a expliqué que les diagnostics étaient une douleur à l’épaule droite, une douleur au genou et une douleur au coude droit. Le Dr Walters a déclaré que le requérant avait de la difficulté à soulever des charges de plus de 90 degrés en raison d’une douleur à l’épaule droite. La douleur au coude droit était intermittente, soit une douleur lancinante qui remontait le long du bras. Sous [traduction] « pronostic », le Dr Walters a écrit [traduction] « arthrite dégénérative ».

[33] Dans une première évaluation effectuée après l’accident de voitureNote de bas de page 37, le chiropraticien du requérant (Dr Kerr) a déclaré que le pronostic du requérant était bon à modéré. Il a déclaré que le requérant présentait d’éventuels troubles psychologiques, une DDD modérée dans une partie de son dos et une DDD minime dans une autre partie. En raison de sa douleur à l’épaule, il avait de la difficulté à soulever des charges à plus de 90 degrés et souffrait de douleurs intermittentes dans le bras.

[34] Dans un rapport daté du 15 juillet 2015, le Dr Hsu (chiropraticien) a diagnostiqué chez le requérant une discopathie dégénérative modérée, une arthrose non couverte modérée et une arthrose faciale légèreNote de bas de page 38.

[35] Dans un rapport du Dr Hsu daté du 21 octobre 2015, le requérant montrait encore de faibles progrès en ce qui concerne ses douleurs à l’épaule droite et au brasNote de bas de page 39. La douleur s’étendait encore du côté droit de son cou jusqu’à son épaule droite, puis dans son bras et sa main. Il avait encore des engourdissements et des picotements intermittents accompagnés de faiblesse dans la main droite. De simples tâches comme saisir un objet restaient difficiles et douloureuses. Il avait encore beaucoup d’inconfort au niveau du coude droit, ainsi que des maux de tête et des étourdissements continus. Il avait des troubles du sommeil. Le rapport a noté qu’il n’était pas retourné au travail.

[36] En avril 2015, le requérant a passé une échographie de l’épaule droite. L’échographie a montré une tendinite du supraspinatus droit avec une certaine calcification. L’échographie du coude (datant du même jour) a montré que le requérant avait une calcification, laquelle était probablement dégénérativeNote de bas de page 40.

[37] Environ six mois avant la fin de la PMA, un rapport d’avancement détaillé rédigé par le Dr KerrNote de bas de page 41 indiquait que le requérant ressentait toujours un inconfort au niveau du cou, de l’épaule et du bras droits. Cela était aggravé par tout mouvement du bras droit nécessitant l’assistance du bras gauche. Des tâches simples comme se brosser les dents ou se raser étaient [traduction] « difficiles et douloureuses ». Le Dr Kerr a déclaré que le requérant avait des engourdissements, des picotements et une faiblesse qui s’étendait le long de la main et du bras droits. Le requérant a fait état de maux de tête continus du côté droit qui semblaient s’aggraver [traduction] « au fur et à mesure que la journée avançait ». Le requérant a signalé qu’il avait de la difficulté à obtenir un sommeil réparateur. Le requérant ne prenait que des médicaments en vente libre (Advil) tout au long de la journée. Son médecin et son assureur ont refusé la demande pour que le requérant subisse un examen IRM du cou et de l’épaule. Ce rapport documente de manière assez détaillée l’étendue de la mobilité de l’épaule droite du requérant.

[38] Le requérant a subi une radiographie de l’épaule droite en septembre 2017Note de bas de page 42, environ huit mois après la fin de sa PMA. La radiographie n’a révélé aucune anomalie osseuse ou articulaire significative. Il y avait un léger changement dégénératif dans l’articulation du coude avec un petit ostéophyte.

[39] Un rapport d’évolution psychologiqueNote de bas de page 43 datant de 2015 a documenté le fait que le requérant voyait un psychothérapeute, Eugene Hewchuk, une fois par semaine pour traiter son anxiété et sa dépression. Le rapport indique que le requérant avait terminé au moins une partie (peut-être 6 séances) de son [traduction] « deuxième plan de traitement ». Le requérant a fait état d’une certaine amélioration depuis le début du traitement, notamment une [traduction] « légère augmentation » des activités à domicile. Néanmoins, le requérant éprouvait toujours des problèmes psychologiques et émotionnels en raison de l’accident de voiture. Il était atteint d’insomnie, de perte d’appétit, de fatigue, de changements de comportement, de changements d’humeur et de styles de pensée correspondant à la dépression.

[40] Dans un rapport daté du 11 juin 2016, M. Hewchuk a déclaré qu’il avait de nouveau fait passer au requérant des tests de dépistage de la dépression et de l’anxiété. L’état du requérant n’avait pas changé. Les résultats ont placé l’anxiété et la dépression du requérant dans la [traduction] « catégorie graveNote de bas de page 44 ». Le requérant a déclaré qu’il était allé voir un psychiatre une fois par semaineNote de bas de page 45. Le requérant a témoigné que la dépression l’avait vraiment affecté, mais n’a pas donné beaucoup de détails sur la manière dont elle l’avait affecté.

[41] Le requérant a passé un examen IRM en janvier 2017 parce qu’il avait des maux de tête quotidiens persistants depuis son accident de voiture. Le rapport issu de l’examen IRM n’a pas permis d’expliquer pourquoi ces maux de tête survenaientNote de bas de page 46.

[42] Dans le questionnaire que le requérant a rempli en décembre 2017Note de bas de page 47 au moment où il a présenté sa demande de pension d’invalidité (après la fin de sa PMA), le requérant a déclaré qu’il avait de la difficulté à se pencher, à s’étirer et à transporter des charges. Il a déclaré que ses positions assise et debout étaient [traduction] « limitées », qu’il pouvait marcher un demi-kilomètre, qu’il pouvait porter 10 livres sur une distance de 100 mètres, et qu’il ne pouvait faire qu’un entretien ménager [traduction] « limité ». Sous [traduction] « mémoire et concentration », il a écrit [traduction] « quelque peu » et sous [traduction] « sommeil », il a écrit [traduction] « limité ». Il a déclaré qu’il pouvait conduire une voiture pendant peut-être une demi-heure. Le requérant a déclaré qu’il avait des maux de tête modérés et fréquents.

[43] Le requérant a décrit l’incidence de son handicap sur sa capacité à accomplir des tâches physiques dans la vie quotidienne. Par exemple, dans son témoignage à l’audience de la division générale, le requérant a déclaré que :

[44] Le requérant a également témoigné de son incapacité à accomplir des tâches qui pourraient être plus étroitement associées à une capacité de travail, même dans une position sédentaire. Le requérant a déclaré ce qui suit :

[45] Le requérant a pris des mesures raisonnables pour gérer son état. Il n’a pas refusé de traitement.

[46] Son médecin de famille lui a suggéré de prendre de l’Advil, et le requérant a pris ce médicament. Il a commencé à prendre du Celebrex après la fin de sa PMA. Le requérant s’est conformé au traitement dispensé à la clinique de réadaptation, notamment à la physiothérapie (bien qu’il n’ait pas constaté de progrès spectaculaires) et à la thérapie cognitivo-comportementale. Il semblerait que le chiropraticien de la clinique, le Dr Kerr, ait plaidé à plusieurs reprises en faveur d’un plus grand nombre de tests de diagnostic pour le requérant, notamment des examens IRM. Les tests de diagnostic dont le requérant a fait l’objet n’ont pas entraîné de changements importants quant à son traitement pendant sa PMA.

[47] Le requérant ressentait à la fois des douleurs et des symptômes associés à la dépression. Il avait un champ de vision limité dans un œil.

Les circonstances personnelles sont un obstacle à l’emploi

[48] Je dois adopter une approche « réaliste » pour déterminer si le requérant est atteint d’une invalidité grave. Cela signifie que je dois tenir compte des circonstances personnelles du requérant, notamment de son âge, de son niveau d’éducation, de ses compétences linguistiques et de son expérience professionnelle et de la vieNote de bas de page 59.

[49] Le requérant était âgé de 60 ans à la date de fin de sa PMA. Il avait droit à une pension de retraite anticipée au titre du RPC. Il avait terminé sa 10e année. Il ne semble pas avoir de difficultés à communiquer en anglais. Il n’a pas fourni d’antécédents professionnels complets lors de son audience devant la division générale, mais il travaillait comme chauffeur et livrait des médicaments aux maisons de retraite. Plus tard, il a fait un peu d’entretien dans des maisons de retraite (sur des choses comme les ordinateurs, les télécopieurs et les chariots de médicaments).

[50] Les circonstances personnelles du requérant, plus particulièrement son âge et son éducation, font en sorte qu’il est confronté à certains obstacles à l’emploi. En ce qui concerne l’accès à un travail qui n’est pas lié à son expérience, je trouve que l’âge du requérant et son éducation constitueraient un obstacle à l’obtention de certains types d’emplois plus sédentaires (mais pas tous).

Analyse de la preuve : le requérant avait une certaine capacité de travail

[51] À mon avis, les éléments de preuve du requérant permettent d’établir qu’il avait des limitations fonctionnelles à la fin de sa PMA, mais qu’il avait aussi une certaine capacité de travail.

[52] La preuve médicale objective confirme que le requérant a eu des problèmes de santé pendant sa PMA, notamment une arthrite dégénérative, une discopathie dégénérative, une tendinite de la coiffe des rotateurs et une dépression. Il avait également une certaine perte de champ visuel. La preuve du requérant démontre que ces affections entraînent des limitations qui affectent la capacité de travail du requérant.

[53] Je trouve que les limitations du requérant font en sorte qu’il lui aurait été difficile de reprendre son ancien travail à temps plein, qui consistait à assurer les livraisons pour la société pharmaceutique, puis à réparer les choses dans les maisons de retraite. Le fait de se pencher et de s’étirer pour effectuer des réparations, en particulier, était peut-être trop difficile. Le requérant éprouvait de la douleur à l’épaule et au bras lorsqu’il s’étirait pour atteindre des choses. Le Dr Walters a spécifiquement déclaré que le requérant avait des douleurs lorsqu’il s’étirait au-dessus de 90 degrés.

[54] J’accepte la preuve du requérant selon laquelle il était [traduction] « limité » dans sa capacité à s’asseoir et à se lever. Je préfère cette preuve au témoignage qu’il a donné lors de l’audience de la division générale selon lequel il peut rester assis pendant seulement 5 minutes. Les questionnaires que le requérant a remplis plus près de la date de fin de sa PMA (en mars 2017 et en décembre 2017) sont plus fiables en ce qui concerne sa situation au cours de sa PMA, par opposition au témoignage qu’il a donné beaucoup plus tard lors de l’audience devant la division générale. Dans son questionnaire, il a déclaré qu’il pouvait conduire pendant peut-être une demi-heure ou sur de courtes distances lorsqu’il en avait besoin.

[55] Le requérant ne prenait que des médicaments en vente libre (Advil, etc.) contre la douleur. J’accepte sa preuve selon laquelle il était capable de se laver et de s’habiller la plupart des jours, de marcher un demi-kilomètre et de transporter 10 livres. Il avait de réelles limitations quant à ce qu’il pouvait faire dans la maison, en particulier en ce qui concerne le nettoyage. À mon avis, la dépression du requérant a fait en sorte qu’il lui a été difficile de sortir du lit certains jours, et les rapports médicaux suggèrent qu’il lui a fallu un certain temps pour se remettre à conduire après son accident de voiture.

[56] À mon avis, compte tenu de la preuve médicale et de la preuve du requérant concernant ses limitations fonctionnelles, ainsi que ses circonstances personnelles, le requérant avait une certaine capacité résiduelle de travail, même s’il ne pouvait plus exercer son ancien emploi.

[57] Le requérant a déclaré qu’il n’était pas en mesure de se rendre quotidiennement à un travail de manière fiable. J’estime toutefois qu’à la fin de sa PMA, le requérant aurait pu se chercher un emploi à temps partiel qui tient compte de ses limitations.

[58] Le requérant avait une certaine capacité de travail et devait donc démontrer que ses efforts pour obtenir et conserver un emploi étaient infructueux en raison de son invalidité. Le requérant a essayé de travailler pour un ami dans un café, mais il ne pouvait pas remplir la machine à espresso parce qu’un seul de ses bras était vraiment fonctionnel en raison de la douleur qu’il ressentait à l’épaule et au bras.

[59] Le requérant n’a pas été en mesure de démontrer qu’il a déployé des efforts pour se trouver un travail qui correspondait à ses restrictions physiques, en particulier en ce qui concerne son épaule. Le requérant pouvait marcher pendant un demi-kilomètre et transporter une charge de 10 livres. Il prenait de l’Advil pour la douleur. Il ne prenait aucun médicament pour sa dépression, et son médecin de famille ne l’a pas répertorié comme étant une maladie invalidante. Il ne pouvait pas rester debout toute la journée, tous les jours, dans le cadre d’un emploi à temps plein, mais il aurait peut-être été en mesure d’exercer un emploi exigeant qu’il soit parfois debout, parfois assis s’il avait tenté d’en occuper un.

Conclusion

[60] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur. J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. Le résultat était le même : le requérant n’a pas droit à une pension d’invalidité au titre du RPC.

 

Date de l’audience :

Le 26 novembre 2019

Mode d’instruction :

Téléconférence

Comparutions :

D. R., appelant

Viola Herbert, représentante de l’intimé

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