Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La requérante, M. W., a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) en août 2017Note de bas de page 1. Le ministre a rejeté la demande, et la requérante a fait appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Je rejette l’appel. La requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC. Les raisons de ma décision sont expliquées ci‑dessous.

Aperçu

[3] La requérante a 37 ans. Elle a travaillé comme manœuvre pour une municipalité de district dans la région de Vancouver pendant environ huit ans. En janvier 2012, elle s’est blessée au dos au travail. Elle a été en arrêt de travail pendant deux ans pendant qu’elle suivait un programme de réadaptation auprès de WorkSafe BC (la Commission des accidents du travail de la Colombie‑Britannique). Elle est retournée au travail où elle a occupé un emploi différent et faisait des tâches plus légères; ce poste a toutefois pris fin au début de 2015.

[4] La requérante n’a pas travaillé depuis ce moment. Elle dit ne pas pouvoir occuper n’importe quel poste en raison de la douleur de l’engourdissement constants de son dos et de sa jambe gauche, qui l’empêchent de faire quelque activité que ce soit pendant une longue période.

[5] La requérante est admissible à une pension d’invalidité du RPC si elle satisfait aux conditions suivantes :

  • Elle doit avoir cotisé au RPC pendant une période que l’on appelle la période minimale d’admissibilité ou PMA;
  • Elle doit avoir une invalidité qui est grave et prolongée;
  • Elle doit être devenue invalide au plus tard à la date de fin de sa PMANote de bas de page 2.

[6] La PMA de la requérante prendra fin le 31 décembre 2023Note de bas de page 3. Étant donné que cette date est dans le futur, la requérante doit être invalide en date du 16 avril 2020, la date à laquelle j’ai instruit son appel. Il revient à la requérante de prouver cela selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est invalide.

Question en litige dans cet appel

[7] Je dois décider si la requérante a une invalidité grave et prolongée, et si elle est devenue invalide au plus tard le 16 avril 2020.

Analyse

[8] Une personne est invalide selon le RPC si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité est grave si la personne est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 4. La personne doit satisfaire aux deux critères pour être invalide au sens du RPC.

La requérante n’est pas atteinte d’une invalidité grave

[9] À l’audience, la requérante m’a parue honnête et directe. Je reconnais qu’elle a de la douleur au dos, à la jambe et au pied qui a une incidence sur ses activités quotidiennes et sa capacité de travailler. Cependant, je ne suis pas convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité est grave selon la définition que donne le RPC de ce mot.

i. Ce que la requérante a dit au sujet de son état de santé

[10] La requérante a commencé à travailler pour la municipalité de district en 2003 ou 2004. Elle avait été embauchée pour exécuter du travail saisonnier comme de l’aménagement paysager et l’entretien des sentiers. Par la suite, elle a commencé à travailler dans une équipe responsable du pavage. Son emploi comportait des tâches comme pelleter de l’asphalte, couler du béton et manier le marteau-piqueur. Elle conduisait des camions à benne basculante et des chasse-neiges. Elle était employée temporaire à temps plein, ce qui signifie qu’elle travaillait à temps plein, mais était licenciée pendant environ une semaine tous les ans de manière à ne pas obtenir le statut de salariée à temps plein.

[11] La requérante se portait bien jusqu’en janvier 2012. Jusqu’à cette journée où elle travaillait avec une ou un partenaire de travail à remplacer le couvercle d’un bassin de drainage en bordure de route où ils faisaient le déblaiement. Sa ou son partenaire a lâché prise, et la requérante est tombée alors qu’elle tenait une charge d’environ 100 livres. Elle a eu immédiatement de la douleur au bas du dos. Une semaine plus tard, elle a commencé à ressentir également de la douleur jusque dans sa jambe gauche.

[12] La requérante ne savait pas pourquoi elle avait répondu dans son questionnaire relatif à l’invalidité qu’elle avait arrêté de travailler en février 2012 et qu’elle n’avait plus été en mesure de travailler à partir de ce moment-là. Elle était certaine d’être retournée au travail pendant deux ans après s’être blessée. WorkSafe BC a dirigé ses soins médicaux et sa réadaptation. Elle a pris des narcotiques pour soulager sa douleur, et a bénéficié de physiothérapie, de massothérapie et d’injections. Elle a également participé à du counselling de groupe et à un programme de gestion de la douleur. Rien ne l’a aidée. WorkSafe BC l’a finalement orientée vers une ou un spécialiste qui a recommandé qu’elle subisse une chirurgie au dos.

[13] La requérante a subi une discectomie en mars 2013. Elle m’a dit s’être sentie mieux pendant un certain temps, et que ses symptômes se sont ensuite aggravés. Un examen de suivi par IRM a montré que du tissu cicatriciel s’était formé autour de la racine nerveuse S1. On lui a dit que c’était ce qui causait l’aggravation de ses symptômes. On lui a aussi dit que ce ne serait pas une bonne idée d’essayer d’enlever le tissu cicatriciel au moyen d’une chirurgie. WorkSafe BC lui a donné une petite pension et a cessé de payer pour ses séances de physiothérapie et de massothérapie. Elle a arrêté de recevoir des injections parce qu’elles ne l’aidaient pas. Elle ne se souvient pas de sa dernière consultation avec une ou un spécialiste du dos. Son traitement consiste en des médicaments prescrits par sa médecin de famille, la Dre Walton-Knight. Elle prend du Cymbalta pour sa douleur névralgique et 10 mg d’oxycodone deux fois par jour. Elle m’a dit que le Cymbalta lui donne des « sensations de choc électrique dans le cerveau » qui se répercutent dans son corps, mais qu’autrement ses médicaments ne lui causent aucun autre effet secondaire. Elle n’a pas décrit ses « sensations de choc électrique dans le cerveau » comme étant incapacitants.

[14] La requérante m’a dit que son état ne s’est pas amélioré du tout. Elle a de la douleur névralgique constante qui irradie au point où elle doit se rendre à l’urgence, à moins de surveiller très attentivement tout ce qu’elle fait. En raison de sa douleur, elle a de la difficulté à s’asseoir, à se tenir debout ou à marcher autrement qu’à un rythme lent. Elle vit avec sa fille de quatre ans dans une maison d’hôtes sur la ferme de ses parents. Elle peut marcher un peu, conduire, faire l’épicerie et faire des tâches ménagères légères. Sa mère et sa grand-mère l’aident. Sa fille a commencé récemment à fréquenter la garderie trois jours par semaine afin que la requérante ait un peu de répit. La gouvernement provincial assume les frais de garderie en raison des problèmes de dos de la requérante.

ii. La preuve médicale

[15] Les documents médicaux de la requérante sont un peu difficiles à suivre. Je présume que la majeure partie de son dossier de WorkSafe BC n’est pas inclus dans ses documents, et que bon nombre des rapports ne comportent que la première page. Ce n’est pas la faute de la requérante. Il n’existe aucune règle qui dit qu’elle doit fournir son dossier médical intégralNote de bas de page 5. Quoi qu’il en soit, le dossier du Tribunal contient des lettres, un rapport médical, et des notes cliniques de la médecin de famille de la requérante. Ces documents procurent une bonne vue d’ensemble de l’état de santé de la requérante. Ils concordent avec le reste des documents médicaux. Ils confirment également ce que la requérante m’a dit au sujet de sa blessure et de ses traitements. J’ai demandé à la requérante si elle voulait un délai pour soumettre plus de documents et elle m’a répondu non, car son état n’a pas changé.

[16] La preuve médicale confirme que la requérante a subi une blessure au dos en 2012. Elle a eu une spondylose lombaire, une diminution de la hauteur d’un disque, une dessiccation discale, un disque bombé et une irritation de la racine nerveuseNote de bas de page 6. Après avoir subi une discectomie, elle a été atteinte d’une fibrose périneurale (tissu cicatriciel)Note de bas de page 7. Elle a de la douleur continue au bas du dos et la sciatique qui irradie jusqu’à sa jambe gauche et de la névralgie au pied gauche. Sa jambe gauche est faible. Elle a des poussées de douleur aiguë lorsqu’elle fait certaines activités. Elle prend du Cymbalta et de faibles doses d’opioïdes pour contrôler sa douleurNote de bas de page 8.

iii. La requérante a la capacité de travailler

[17] Le critère pour déterminer si une invalidité est « grave » n’est pas la question de savoir si une personne a reçu un diagnostic précis ou est atteinte de déficiences graves, mais plutôt celle de savoir si l’invalidité l’empêche de gagner sa vieNote de bas de page 9. Elle doit être régulièrement incapable de détenir toute occupation véritablement rémunératrice, et non seulement incapable de détenir son emploi habituel.

[18] Pour décider si la requérante a la capacité de travailler, je dois tenir compte de la preuve associée à son état de santé, ainsi que de facteurs comme son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques et ses expériences antérieures de travail et de vieNote de bas de page 10.

[19] Les caractéristiques personnelles de la requérante sont essentiellement positives. L’anglais est sa langue maternelle. Elle a quitté l’école secondaire après la 11e année parce qu’elle voulait commencer à travailler, et non parce qu’elle avait échoué ou qu’elle avait de la difficulté avec ses travaux scolaires. Elle a obtenu un certificat en coiffure et a travaillé comme coiffeuse pendant un certain temps. Bien qu’elle ait passé la majeure partie de son temps sur le marché du travail à faire du travail manuel, elle a seulement 37 ans. Rien ne donne à penser dans son dossier qu’elle a un déficit cognitif ou un trouble d’apprentissage qui l’empêcherait d’apprendre de nouvelles compétences ou de parfaire son éducation. Je ne crois pas que ses caractéristiques personnelles affectent négativement sa capacité de travail. Par conséquent, ma décision au sujet de cette capacité dépend de la preuve associée à son état de santé.

[20] La requérante estime qu’elle ne peut pas détenir un quelconque emploi en raison de sa douleur et de ses limitations. Elle a essayé d’occuper un emploi de bureau auprès de son ancien employeur pendant près d’un an en 2014 et 2015. Elle a été licenciée et n’a donc pas pu être admissible au statut de salariée à temps plein. De plus, elle remplaçait une personne en congé qui était prête à reprendre son poste. Il n’y avait pas d’autre poste pour elle. Elle m’a dit qu’elle pouvait à peine exécuter le travail de toute façon. On lui permettait de s’asseoir, de se tenir debout et de prendre des pauses au besoin. Malgré cela, elle était souvent absente ou devait partir tôt parce que le travail intensifiait sa douleur au dos et à la jambe. Elle a été absente pendant trois mois consécutifs à la fin de 2014.

[21] La preuve médicale laisse entendre que la requérante a une certaine capacité de travailler :

  • Lors d’un examen en 2017, la Dre Walton‑Knight n’a pas noté de signes physiques ou de limitations fonctionnelles pour la position assise. Elle a dit que la requérante avait besoin de se recycler pour un emploi dans le cadre duquel elle pourrait éviter de soulever des objets lourds et de changer souvent de position afin de composer avec sa douleur chroniqueNote de bas de page 11.
  • Un an plus tard, la Dre Walton‑Knight a dit que la requérante avait de la douleur après s’être assise pendant quelques minutes à peine, qu’elle ne pouvait pas se tenir debout pendant de longues périodes, et que le fait de conduire aggravait sa douleur au dos. Elle pensait qu’elle ne pourrait même pas effectuer des tâches légèresNote de bas de page 12.
  • Cependant, en décembre 2018, date du dernier document médical versé au dossier, l’avis de la Dre Walton‑Knight avait changé. Elle a dit que la requérante ne pouvait pas être formée pour un quelconque travail qui exigeait de soulever des objets lourds ou de s’asseoir pendant une période prolongée. Lors de ses mauvaises journées, elle boitait, elle ne pouvait pas porter sa fille en toute sécurité et elle avait de la difficulté à monter les escaliersNote de bas de page 13.

[22] Il existe aussi une preuve autre que médicale de capacité à travailler :

  • La requérante a perdu son emploi de bureau en 2015 pour des raisons qui n’étaient pas rattachées à son état de santé ou à son rendement au travail.
  • La requérante m’a dit que WorkSafe BC a continué à considérer qu’elle est capable de faire du travail de bureau et accepte de payer pour qu’elle suive des cours en ligne afin de développer ses compétences. Je ne peux pas adopter la décision de WorkSafe BC au sujet de la capacité de travailler de la requérante, mais je peux tenir compte de cet élément de preuve.
  • La requérante décrit ses activités quotidiennes de la façon suivante : tâches ménagères légères, bricolage avec sa fille, brossage des chevaux à la ferme et lecture.
  • La requérante a suivi le cours en ligne pour obtenir le titre de National Construction Safety Officer [agente nationale de sécurité dans l’industrie de la construction]. Je reconnais qu’elle n’a pas fait les examens et qu’elle n’a pas trouvé de travail dans ce domaine. Elle croyait qu’elle serait capable de travailler pendant un bloc de quelques heures et de faire la tournée des chantiers. Elle pense que même cela pourrait s’avérer trop optimiste.

[23] J’accepte que la requérante ne puisse pas occuper un emploi semblable à celui qu’elle détenait auparavant. La preuve ci-dessus me donne toutefois à penser qu’elle a surtout de la difficulté à se tenir debout, à marcher et à soulever des objets. Elle a parfois de la difficulté à demeurer en position assise, mais le problème n’est pas constant ni régulier. Cela signifie qu’elle pourrait avoir la capacité d’exécuter un travail sédentaire.

[24] Étant donné qu’il existe une preuve de sa capacité de travailler, la requérante doit démontrer qu’elle a essayé de travailler, mais qu’elle n’était pas capable en raison de son problème de santéNote de bas de page 14. Je reconnais qu’en 2014 et 2015, elle a eu de la difficulté à exécuter du travail sédentaire dans un milieu de travail qui lui offrait des mesures d’adaptation. Cependant, c’était il y a plus de cinq ans. La preuve de capacité de travailler date d’après le moment où son tissu cicatriciel a été défini comme un problème en décembre 2014, et d’après le licenciement de la requérante. La requérante n’a pas essayé d’effectuer du travail sédentaire ou un autre travail convenable pour faire contrepoids à cette preuve.

[25] La requérante n’aurait peut-être pas réussi si elle avait essayé de détenir un travail convenable après le début de 2015. Mais elle aurait également pu réussir. Elle doit prouver que ses arguments sont plus probables qu’improbables. Étant donné qu’elle n’a pas essayé de détenir un travail convenable au cours des cinq dernières années malgré la preuve d’une capacité de travailler pendant cette période, elle ne m’a pas convaincue qu’elle est régulièrement incapable de détenir une quelconque occupation véritablement rémunératrice.

Conclusion

[26] Étant donné que j’ai décidé que le problème de santé de la requérante n’est pas grave, je n’ai pas examiné s’il était prolongé.

[27] L’appel est rejeté.

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