Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La requérante a droit à ce que sa demande de révision tardive soit traitée conformément aux règles établies dans le Régime de pensions du Canada (RPC) et le Règlement sur le Régime de pensions du Canada (Règlement sur le RPC). J’énumérerai mes motifs dans la présente décision.

Aperçu

[2] La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 7 mai 2012Footnote 1. Sa demande a été rejetée par le ministre le 7 septembre 2012Footnote 2. La requérante n’a pas demandé au ministre de réviser cette décision.

[3] La requérante a présenté une deuxième demande de prestations d’invalidité le 14 mai 2015Footnote 3. Sa demande a été rejetée par le ministre le 9 septembre 2015Footnote 4. Le représentant de la requérante a déposé une demande de révision le 18 août 2016Footnote 5. Le ministre a rejeté la demande parce qu’elle a été faite en retardFootnote 6. La requérante n’a pas fait appel par la suite.

[4] La requérante a fait une troisième demande de prestations d’invalidité le 12 décembre 2016Footnote 7. Le ministre a approuvé sa demande et a jugé qu’elle était admissible aux prestations d’invalidité à compter de janvier 2016. Le 24 avril 2019, la requérante a demandé au ministre de réviser sa décision du 7 septembre 2012 et de modifier la date d’entrée en vigueur de ses prestationsFootnote 8. Plus précisément, la requérante a demandé au ministre de lui verser sa pension d’invalidité à compter du moment où elle a fait sa demande initiale, soit en mai 2012.

[5] Le 4 juillet 2019, le ministre a rejeté la demande de révision de la décision de septembre 2012 parce que la requérante l’a présentée en retard. La requérante a fait appel de ce refus devant le Tribunal de la sécurité sociale.

Raison pour laquelle l’appel ne peut pas aborder la demande de prestations d’invalidité de la requérante

[6] Je ne peux pas décider si la requérante est admissible à des prestations supplémentaires ou différentes. La requérante a soulevé plusieurs questions, dont les suivantes : si on pouvait faire en sorte que ses prestations d’invalidité entrent en vigueur plus tôt; preuve de la façon dont le RPC investit les cotisations; si elle a le droit de recevoir ses prestations sous forme de montant forfaitaire; et comment on peut s’attendre à ce qu’elle vive compte tenu de sa situation financière et de ses conditions de vie. Malheureusement, le présent appel ne peut pas répondre à ces questions.

[7] La décision du 7 septembre 2012 et les questions soulevées par la requérante à son sujet ne font pas partie du présent appel. Une partie appelante peut faire appel au Tribunal d’une décision découlant d’une révision ou d’un refus d’accorder plus de temps pour faire une demande de révisionFootnote 9. La décision du 7 septembre 2012 n’était pas une décision découlant d’une révision. En juillet 2019, le ministre a refusé d’accorder plus de temps à la requérante pour faire une demande de révision. Voilà sur quoi porte le présent appel.

Question en litige

[8] Le ministre a-t-il exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’il a décidé que la requérante n’avait pas droit à plus de temps pour demander une révision de la décision du 7 septembre 2012?

Analyse

Qu’est-ce qui est exigé du ministre lorsqu’il exerce son pouvoir discrétionnaire?

[9] Le pouvoir du ministre d’accorder ou non un délai supplémentaire pour faire une demande de révision tardive est un pouvoir discrétionnaire. Plus précisément, le ministre peut accorder un délai supplémentaire, mais il n’est pas obligé de le faireFootnote 10. Le Règlement sur le RPC établit les circonstances pertinentes que le ministre doit prendre en considération au moment de décider d’accorder ou non un délai supplémentaire à une personne souhaitant faire une demande de révisionFootnote 11.

[10] La loi exige que le ministre suive une procédure détaillée lorsqu’une partie requérante présente une demande de révision tardive. Une partie requérante qui n’est pas satisfaite d’une décision a habituellement 90 jours pour demander au ministre de réviser sa décision. Le ministre peut autoriser une prolongation du délai pour présenter une demande de révision s’il est convaincu (i) qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et (ii) que la personne a manifesté l’intention constante de demander la révisionFootnote 12.

[11] Si la demande de révision est présentée après 365 jours suivant celui où la partie requérante est avisée par écrit de la décision, le ministre doit aussi être convaincu (i) que la demande a des chances raisonnables de succès et (ii) que l’autorisation du délai supplémentaire pour présenter la demande ne porte préjudice à aucune des partiesFootnote 13. Le ministre doit examiner les quatre critères et être convaincu que chacun d’entre eux est satisfaitFootnote 14. La décision du ministre d’accueillir ou de refuser une demande de révision tardive est une décision discrétionnaire, mais ce pouvoir discrétionnaire doit être exercé de manière judiciaireFootnote 15.

[12] Un pouvoir discrétionnaire n’est pas exercé de façon judiciaire s’il est démontré que le décideur a :

  1. agi de mauvaise foi;
  2. agi dans un but ou pour un motif irrégulier;
  3. tenu compte d’un facteur non pertinent;
  4. fait abstraction d’un facteur pertinent;
  5. agi de manière discriminatoireFootnote 16.

Je ne peux pas conclure que le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire

[13] Le RPC exige que le ministre fournisse les motifs de ses décisionsFootnote 17. Le ministre a demandé que la requérante réponde à des questions et il a affirmé que ses réponses ont été prises en considérationFootnote 18. Toutefois, la lettre de refus de demande n’explique pas pourquoi le ministre a refusé sa demande. Par conséquent, il m’est impossible de savoir ce que le ministre a pris en considération lorsqu’il a décidé de refuser d’accorder un délai supplémentaire à la requérante pour faire une demande de révision. Je ne peux pas déterminer si le ministre a pris des facteurs non pertinents en considération ou s’il a omis de tenir compte de facteurs pertinents. Je ne peux pas juger si le ministre a agi de mauvaise foi, dans un but ou pour un motif irrégulier ou de manière discriminatoire. Je ne peux donc pas conclure que le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

Raison pour laquelle j’ai tranché cet appel sur la foi du dossier

[14] Je peux trancher un appel en me fondant sur les documents et les observations au dossier, ou bien tenir une audience. Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale permet les deux et fournit des conseils pour décider comment procéder. Je dois choisir l’option la plus équitable, expéditive, économique et informelleFootnote 19. Une décision sur la foi du dossier est appropriée lorsque les questions en litige ne sont pas complexes; il n’y a pas de lacune ou de question sans réponse au dossier; et la crédibilité n’est pas une des questions principales.

[15] La question en litige n’est pas complexe. Elle se limite à la question de savoir si le ministre a examiné la demande tardive judiciairement. Toutes les lettres et décisions pertinentes sont consignées au dossier. La position du ministre a été énoncée dans les notes au dossier et la requérante a fait des observations écrites sur la question en litige. Rien n’indique que la crédibilité est une question en litige. Instruire l’appel sur la foi du dossier est juste et équitable. Il s’agit de la façon la plus expéditive, économique et informelle de procéder.

La requérante n’était pas disponible pour discuter de son appel

[16] Elle a refusé de fournir ses coordonnées, à l’exception de son adresse postale. Elle a exigé que toute communication se fasse par écrit. Le Tribunal a écrit aux deux parties pour les informer qu’elles pouvaient faire des observations écrites sur la question de savoir si le ministre aurait dû prendre en considération la demande tardive que la requérante a envoyée au ministre pour qu’il révise sa décision de septembre 2012. La requérante a envoyé des lettres en février et en mars 2020. Elle a dit qu’elle n’avait pas d’autres documents ou éléments de preuve à présenter.

[17] Dans sa lettre du mois de mars, la requérante a dit en partie qu’elle [traduction] « [...] se réserve le droit à un appel de jure ». Le Tribunal a tenté de communiquer avec la requérante pour lui confirmer que son appel serait instruit sur la foi des éléments de preuve et des observations au dossier. Malheureusement, la lettre n’a pas pu être livrée étant donné que la requérante a déménagé. Les parties requérantes doivent signaler sans tarder tout changement dans leurs coordonnéesFootnote 20. Puisque la requérante n’a pas fourni ses nouvelles coordonnées au Tribunal, celui-ci n’a pas pu la joindre pour l’informer que son appel serait instruit sur la foi de la preuve et des documents au dossier.

L’appel ne devrait pas être retardé

[18] Je suis convaincue que l’appel devrait aller de l’avant et qu’une décision fondée sur la preuve et les documents au dossier est la façon la plus juste et équitable de procéder. Je ne crois pas que l’appel devrait être retardé parce que la requérante a omis de demeurer en contact avec le Tribunal.

[19] La requérante était au courant de la question à être abordée dans le cadre de l’appel. Elle a eu l’occasion de faire des observations et de fournir de l’information. Elle a fourni de l’information et a dit qu’elle n’avait rien d’autre à soumettre. C’est la requérante qui a décidé de communiquer uniquement par écrit et elle n’a pas fourni ses nouvelles coordonnées au Tribunal. La requérante pourrait être informée de la décision en retard, mais cela est le résultat direct de son choix de communiquer uniquement par la poste. Elle recevra une copie de la décision lorsqu’elle communiquera avec le Tribunal et qu’elle lui fournira ses coordonnées.

Conclusion

[20] L’appel est accueilli. Lorsque le ministre a refusé d’accorder un délai supplémentaire à la requérante pour faire une demande de révision, il n’a pas rendu sa décision de manière judiciaire. J’ordonne au ministre de prendre en considération la demande de révision tardive de la requérante conformément au RPC et au Règlement sur le RPC.

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