Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le requérant vit avec sa femme à X. Son dernier emploi à temps plein était celui de superviseur d’un centre d’appel. Son dernier jour à ce poste a été le 5 août 2015. Il a déclaré qu’il ne pouvait plus travailler à cause de son anxiété et de ses crises de paniqueNote de bas de page 1. Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du requérant le 27 juin 2018. Le ministre a rejeté la demande dans un premier temps et lors de sa révision. Le requérant a fait appel de la décision issue de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale. J’ai procédé à l’audience par voie de questions et de réponses écrites. En raison de son anxiété, le requérant n’a pas voulu participer à une audience par téléconférence.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, le requérant doit satisfaire aux exigences qui sont énoncées dans le RPC. Plus précisément, il doit être déclaré invalide au sens du RPC au plus tard à la date marquant la fin de la période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations au RPC. Je constate que la PMA du requérant prend fin le 31 décembre 2018.

Questions en litige

[4] Le requérant était-il atteint d’une invalidité grave au 31 décembre 2018?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant était-elle également prolongée à la date du 31 décembre 2018?

Analyse

[6] Selon le RPC, l’« invalidité » s’entend d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 2. Une personne est réputée être atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. Le requérant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Cela signifie que si le requérant ne satisfait qu’à un volet, il n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Le requérant était-il atteint d’une invalidité grave au 31 décembre 2018?

[7] Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus que le requérant n’était pas atteint d’une invalidité grave au 31 décembre 2018.

[8] Je dois évaluer le volet gravité du critère dans un contexte réalisteNote de bas de page 3. Cela signifie qu’en déterminant si l’invalidité du requérant est grave, je dois garder à l’esprit des facteurs tels que l’âge, le niveau d’éducation, les compétences linguistiques, les antécédents professionnels et les expériences de vie. Le requérant n’avait que 42 ans à la date de fin de sa PMA. Il parle couramment l’anglais. Il a suivi un programme collégial de trois ans en informatique. Il a travaillé en tant que superviseur de centre d’appels, surveillant des opérations, installateur de logiciels et programmeur. Il a également travaillé dans des services d’assistance informatique. Abstraction faite de son état de santé, j’estime qu’il serait apte à occuper un large éventail d’emplois dans le domaine du service à la clientèle et de l’informatique. Compte tenu de sa scolarité, il serait également en mesure de suivre une formation appropriée pour exercer des fonctions spécialisées dans ces domaines.

[9] Je dois également évaluer l’état du requérant dans son ensemble. Cela signifie que je dois tenir compte de toutes ses déficiences possibles, et pas seulement de la plus grande ou de la principale déficienceNote de bas de page 4. Sa préoccupation majeure est maintenant l’anxiété et les crises de panique. Il est atteint du syndrome d’Asperger, qui fait partie d’une catégorie plus vaste de troubles regroupés sous le nom de troubles du spectre autistique. Il fait également état d’apnée du sommeil et de dépressionNote de bas de page 5. Même s’il avait de nombreux troubles physiques lorsqu’il a présenté sa demande de prestations d’invalidité du RPC en juin 2018Note de bas de page 6, il a eu une chirurgie bariatrique en août 2018. Son poids est passé de 400 à 235 livres. Cela a eu des effets bénéfiques importants sur le plan physique. Il n’a plus de douleurs au dos et aux genoux lorsqu’il marche. Toutefois, l’opération n’a pas eu d’effet notable sur son anxiété et sa dépression. Il a toujours des difficultés à fréquenter les lieux publics et à gérer des facteurs de stress, même mineurs. Il n’a plus de permis de conduire. Il est difficile pour lui de prendre les transports en commun, ou d’aller chez son médecin et à l’épicerieNote de bas de page 7.

[10] Les documents médicaux attestent que le requérant ne peut pas reprendre son emploi de superviseur de centre d’appelsNote de bas de page 8. Les exigences de ce rôle, même à temps partiel, dépassent de loin ses capacités actuelles. J’ai tenu l’audience par écrit en raison de son anxiété au téléphoneNote de bas de page 9. Toutefois, la mesure de la « gravité » d’une invalidité n’est pas de savoir si une personne souffre de graves déficiences, mais de déterminer si l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. Il ne s’agit pas de savoir si le requérant est incapable d’exercer son travail habituel, mais plutôt s’il est incapable de détenir un emploi réellement rémunérateurNote de bas de page 10. Je vais maintenant examiner si le requérant a une certaine capacité de travail.

Le requérant a-t-il une capacité de travail?

[11] Le requérant a travaillé à temps partiel du 1er juin 2017 au 1er mars 2018. Environ un jour par mois, il montait des vidéos pour un amiNote de bas de page 11. Il gagnait 200 $ par vidéo, ce qui représentait 8 à 10 heures de travail. Cela correspond à un taux horaire de 20 à 25 $. Même s’il ne travaillait qu’un jour par mois, il aurait travaillé toutes les semaines si on lui avait donné davantage de travail. Il a cessé de travailler en mars 2018 parce que son ami n’avait plus besoin de ses servicesNote de bas de page 12.

[12] En réponse à mes questions posées par écrit, le requérant a déclaré qu’il pourrait probablement effectuer un travail similaire au montage vidéo qu’il a effectué jusqu’en mars 2018. Il pensait qu’il pouvait le faire à raison de 10 à 15 heures par semaine, car ce travail était peu stressant et ne comportait [traduction] « pratiquement aucun contact humain ». En fait, avec une formation, il a dit qu’il pouvait gérer [traduction] « n’importe quel travail informatique » où l’interaction humaine était extrêmement limitée et qui ne comportait [traduction] « aucune échéance stressante »Note de bas de page 13. Je note qu’il n’est pas impossible pour le requérant d’avoir des contacts avec d’autres personnes. Il utilise occasionnellement les médias sociaux tels que Facebook et Twitter pour rester en contact avec les gens. Avant la pandémie de COVID-19, il allait au gymnase plusieurs fois par semaine pendant les heures creusesNote de bas de page 14. Cependant, il n’aime pas utiliser le téléphone.

[13] Sur la base des heures de montage vidéo et de la rémunération du requérant, je peux estimer sa capacité à gagner sa vie. En travaillant 15 heures par semaine, à 25 $ de l’heure, il pourrait gagner 18 750 $ par an s’il travaillait 50 semaines par an. Cela suggère qu’il pourrait être capable de détenir régulièrement un emploi réellement rémunérateur. Un emploi « réellement rémunérateur » rapporte un salaire égal ou supérieur au montant annuel maximum de la pension d’invalidité du RPCNote de bas de page 15. En 2019, ce montant s’élevait à 16 347,60 $. En 2020, ce montant est passé à 16 651,92 $. Toutefois, il se pourrait que sa capacité, selon son autoévaluation, ne soit en fait que de 10 heures par semaine, à 20 $ de l’heure. S’il travaillait pendant 50 semaines, son revenu annuel ne serait que de 10 000 $. Bien que ce chiffre soit manifestement inférieur au seuil correspondant à un emploi « réellement rémunérateur », il dénote néanmoins une capacité non négligeable à exercer un travail rémunéré.

[14] Le requérant admet qu’il utilise un ordinateur toute la journée. Rien ne l’empêcherait sur le plan physique de travailler sur ordinateur, surtout s’il pouvait le faire de chez lui. Cependant, il est très important pour lui de limiter le stress et les contacts humainsNote de bas de page 16. Le Dr Higgs (médecin de famille) a affirmé en octobre 2019 que le requérant pourrait être en mesure de travailler à partir de son domicileNote de bas de page 17. Comme cela a été mentionné, il quittait son domicile plusieurs fois par semaine avant la pandémie pour aller au gymnase pendant les heures creuses.

[15] Je conclus que le requérant avait une certaine capacité de travailler à son domicile, avec peu de contacts sociaux, depuis au moins le début de son travail de montage vidéo en juin 2017. Cette capacité s’applique aussi au travail sur ordinateur similaire à son travail de montage vidéo. Bien que celui-ci ait pris fin en mars 2018, il n’a pas pris fin en raison de son état de santé. Il avait encore une capacité de travailler à ce moment-là, et il a déclaré qu’il aurait pu faire plus que ce qu’il faisait en fait. Il conserve cette capacité aujourd’hui. Comme l’a montré la pandémie actuelle, le travail à domicile est une forme d’emploi valable. C’est particulièrement vrai dans le secteur des technologies de l’information, où le lieu de travail n’a souvent aucune importance.

La capacité de travail du requérant empêche-t-elle de conclure que l’invalidité est grave?

[16] La détermination de la capacité de travail est essentielle, car, lorsqu’il existe des éléments de preuve de la capacité de travail, une personne doit démontrer que les efforts déployés pour obtenir et conserver un emploi ont échoué en raison de son état de santéNote de bas de page 18. La Cour d’appel fédérale a fixé cette exigence. Elle est contraignante pour le Tribunal.

[17] Bien qu’il ait été capable de travailler pendant au moins les trois dernières années, le requérant n’a pas postulé d’emploi ni exercé de travail depuis mars 2018. Il n’a pas non plus essayé de trouver un travail supplémentaire alors qu’il ne travaillait qu’un jour par mois pour son ami. Le seul emploi qu’il a exercé depuis août 2015 était de travailler pour son amiNote de bas de page 19. Le requérant a déclaré qu’il n’avait pas postulé d’emploi parce qu’il craignait que son anxiété le rende incapable d’exercer son travail de manière adéquate. Il ne pensait pas que cela serait juste pour un nouvel employeurNote de bas de page 20.

[18] Comme le requérant n’a pas essayé de trouver un autre emploi depuis mars 2018, il ne peut pas démontrer que les efforts déployés pour obtenir et conserver un emploi ont échoué en raison de son état de santé. Sa crainte que le fait de postuler un emploi soit injuste pour un employeur ne supprime pas l’exigence fixée par la Cour d’appel fédérale. Cela signifie que je ne peux pas le déclarer atteint d’une invalidité grave depuis au moins mars 2018 jusqu’à aujourd’hui. La Cour d’appel fédérale a également déclaré que le Parlement n’avait pas l’intention d’accorder des prestations d’invalidité du RPC en cas d’invalidité temporaireNote de bas de page 21. Par conséquent, il ne peut pas obtenir gain de cause en appel. Je vais maintenant aborder brièvement les raisons pour lesquelles le requérant a fait appel devant le Tribunal.

Les raisons de l’appel du requérant.

[19] Dans son avis d’appel d’avril 2019, le requérant a déclaré qu’il avait fait appel parce que son état de santé s’était aggravé et que les médicaments ne l’aidaient plus beaucoup. Dans ses réponses écrites de mai 2020, il a confirmé que ce déclin s’était poursuivi jusqu’à l’audienceNote de bas de page 22. Néanmoins, le requérant a admis en mai 2020 qu’il pouvait probablement assumer 10 à 15 heures de travail par semaineNote de bas de page 23. Si l’on ajoute à cela les éléments de preuve qu’il a apportés concernant son état de santé qui périclitait, cela suggère qu’il pourrait avoir eu une capacité de travail encore plus importante à la date de sa PMA, le 31 décembre 2018. L’appel du requérant ne s’en trouve pas facilité.

L’invalidité du requérant était-elle également prolongée au 31 décembre 2018?

[20] Je n’ai pas besoin de répondre à cette question, car le requérant n’était pas atteint d’une invalidité grave à la date de sa PMA.

Conclusion

[21] L’appel est rejeté.

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