Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La requérante ne remplit pas les conditions d’admissibilité à une pension d’invalidité ou à la prestation d’invalidité après-retraite.

Aperçu

[2] La requérante a travaillé comme infirmière autorisée jusqu’en mars 2015. Elle ne travaillait que quatre heures par jour et ses tâches avaient été modifiées pendant ses deux dernières années de service. Sa douleur chronique au dos l’empêchait de travailler à temps plein. Elle n’a pas travaillé depuis mars 2015 à cause de sa douleur chronique au dos et de son inaptitude à obtenir un emploi sédentaire. La requérante a commencé à toucher une pension de retraite en janvier 2015. Elle souhaite faire annuler sa pension de retraite et la remplacer par une pension d’invalidité.

Chronologie des demandes de pension d’invalidité

[3] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité de la requérante le 25 mars 2015. Le ministre a rejeté sa demande au départ et après révision. La décision initiale rejetant sa demande remonte à août 2015. La requérante maintient qu’on lui avait dit que la décision d’août 2015 était finale. En janvier 2019, elle a reçu une lettre l’informant de la nouvelle prestation d’invalidité après-retraiteNote de bas de page 1. Elle a communiqué avec Service Canada, qui lui a conseillé de contester la décision de 2015, qui lui refusait une pension d’invalidité. La requérante a demandé une révision le 8 mars 2019. Le ministre a accepté l’explication à son retard, et a exercé son pouvoir discrétionnaire pour accepter sa demande de révision, même si elle avait été présentée après le délai de 90 jours imparti à cette fin. La requérante a fait appel de la décision de révision et du refus de la PIAR devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[4] Une nouvelle prestation est entrée en vigueur en janvier 2019. La PIAR est payable aux personnes qui n’ont pas atteint l’âge de 65 ans, touchent une pension de retraite et sont invalides. Pour être admissible à cette prestation, il faut avoir versé des cotisations suffisantes au Régime de pensions du Canada (RPC) pour avoir une période minimale d’admissibilité (PMA) se terminant au plus tôt en janvier 2019. La requérante a demandé la PIAR. Le ministre a confirmé le refus le 14 janvier 2020, comme la PMA de la requérante venait à échéance avant janvier 2019.

Questions en litige

[5] Je dois trancher deux questions. D’abord, je dois décider si la requérante était atteinte d’une invalidité grave le 31 décembre 2014 ou avant cette date. Ensuite, je dois décider si la requérante est admissible à la PIAR. Je vais traiter de ces deux questions séparément comme elles nécessitent des analyses différentes.

Analyse

Explication de la PMA se terminant le 31 décembre 2014

[6] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, une personne requérante doit répondre aux critères prévus par le RPC. Plus précisément, elle doit être invalide au sens du RPC à l’échéance de sa PMA ou avant cette date. La PMA de la requérante est basée sur ses cotisations au RPC et sur la date où elle a commencé à recevoir sa pension de retraite.

[7] Le RPC autorise une personne requérante à annuler sa pension de retraite et à la remplacer par une pension d’invalidité. Certaines règles interviennent néanmoins lors d’une telle manœuvre et influencent le calcul de la PMA. Le premier calcul basé sur les cotisations donne une PMA se terminant le 31 décembre 2018. La requérante souhaite cependant annuler sa pension de retraite et la remplacer par une pension d’invalidité. Une personne requérante ne peut pas recevoir les deux pensions en même temps. Il doit donc être démontré que la requérante était atteinte d’une invalidité grave le mois précédant celui où elle a commencé à recevoir sa pension de retraiteNote de bas de page 2. Elle a commencé à recevoir une pension de retraite en janvier 2015. L’échéance de sa PMA est donc le 31 décembre 2014, soit le mois avant celui de janvier 2015.

Définition d’une invalidité grave et prolongée

[8] Une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 3. Une invalidité est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. La personne doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité présente les deux caractéristiques du critère. Autrement dit, si une seule de ces caractéristiques est présente, la personne n’est pas admissible à la pension d’invalidité.

Invalidité grave

La preuve médicale ne démontre pas une invalidité grave

[9] Pour être admissible à une pension d’invalidité, la requérante doit fournir des éléments de preuve documentaire témoignant de son état de santé à l’échéance de sa PMA, le 31 décembre 2014Note de bas de page 4. Les preuves médicales se rapportant à des affections après la PMA ne sont pas pertinentesNote de bas de page 5. Un certain nombre d’affections sont apparues chez la requérante après le 31 décembre 2014. Il me faut considérer toutes ses détériorations possibles, dans leur ensemble, à l’échéance de sa PMANote de bas de page 6. La requérante a confirmé qu’il n’y avait qu’un seul problème de santé qui, selon elle, l’empêchait de travailler à l’échéance de sa PMA ou avant cette date. Le problème en question est une douleur chronique au dos et les limitations qui en découlent.

[10] Je dispose d’un nombre limité de rapports médicaux se rapportant à la PMA. Un court résumé a été rédigé par Jana Blackburn, infirmière praticienne, en date du 19 septembre 2019. Elle a noté que la requérante avait eu son rendez-vous d’évaluation en février 2012. À l’époque, la requérante ne disait pas avoir mal ni avoir des limitations. Selon madame Blackburn, la requérante avait mentionné une première fois son problème au dos ou son invalidité le 12 mars 2015.

[11] Les images médicales objectives montraient des problèmes minimes à sa colonne et dans la région lombaire. Un tomodensitogramme de sa colonne lombaire avait été fait le 24 octobre 2008. L’image obtenue révélait des modifications minimales aux facettes et un léger bombement discal à L4-5 et à L3-4. Les conclusions de l’imagerie étaient des changements minimes attribuables à la spondylose. Aucun bombement discal, hernie ou sténose d’importance n’était ressorti de l’imagerie par résonance magnétique de la colonne et de la région lombaire, réalisée le 12 février 2010. Le docteur Nizzaro a conclu que ses résultats étaient normaux pour son âge.

[12] Des notes médicales montrent que la requérante s’était plainte d’un mal de dos avant sa PMA. Des traitements conservateurs avaient été faits : physiothérapie, ibuprofène, Tylenol. Les notes de la clinique dirigée par du personnel infirmier praticien de Sudbury sont précieuses pour savoir si sa douleur chronique au dos était grave et prolongée. L’infirmière praticienne s’était entretenue avec le médecin responsableNote de bas de page 7 et avait avisé la requérante qu’elle ne remplissait pas les critères du RPC. Le docteur Routhier a de nouveau examiné la requête de la requérante pour obtenir un appui pour sa demande au RPC. Le médecin a examiné la [sic] médicale et physiothérapie et jugé qu’elle ne permettait pas de conclure à une affection « grave et prolongée » l’empêchant d’obtenir un emploi rémunérateur. Il n’a donc pas voulu remplir les formulairesNote de bas de page 8. Des notes de la clinique du 18 janvier 2016 précisent que les critères de la pension d’invalidité du RPC avaient été discutés avec la requérante. La clinique lui a expliqué qu’il était peu probable qu’elle remplisse les critères, étant donné qu’elle avait un faible degré de douleur et une capacité fonctionnelle élevée et qu’elle pouvait encore occuper un emploi moins exigeant sur le plan physiqueNote de bas de page 9.

[13] Mon rôle n’est pas d’accepter aveuglément des opinions médicales. L’opinion des professionnels de la santé de la clinique de Sudbury ne scelle pas l’affaire. Je dois plutôt décider du poids à lui donner. Et je donne un poids considérable à cette opinion. Celle-ci est en effet cohérente par rapport à la preuve médicale objective et aux images médicales datant de la PMA. C’est principalement à cette clinique que la requérante avait été suivie, et elle est la mieux placée pour évaluer ses limitations fonctionnelles. La clinique semble avoir basé son opinion sur des considérations objectives. Bien que je ne me défasse pas de ma responsabilité de décider si elle a une invalidité grave et prolongée, j’estime que l’opinion de la clinique est un élément de preuve cohérent et révélateur. Je suis d’accord avec cette opinion, comme je constate, après ma propre analyse, que la preuve médicale objective ne démontreNote de bas de page 10 pas que la requérante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC.

Le témoignage ne permet pas de conclure à une invalidité grave

[14] La requérante a témoigné lors de l’audience de vive voix. Elle a confirmé qu’une douleur chronique au dos était le problème de santé à cause duquel elle avait cessé de travailler en 2015.

[15] La requérante a déclaré que son mal au dos remontait au moins à 2008. Elle avait de la difficulté à travailler à temps plein à cause de ce problème. Elle avait seulement travaillé quatre ou cinq heures par jour durant ses deux dernières années de service comme infirmière. Elle avait travaillé en mars 2015 pour la dernière fois. Elle avait arrêté le travail en raison de problèmes de dos récurrents. Elle avait décidé de cesser de travailler le 13 mars 2015 puisque son lieu de travail changeait et allait l’obliger à faire un trajet de 45 minutes à l’aller et au retour. Cette condition aurait aggravé son problème au dos. Elle a aussi soulevé que, comme elle travaillait des heures réduites, ses cotisations de retraite étaient aussi réduites et bonifiaient peu sa pension de retraite. Elle mettait en doute la pertinence à continuer de travailler, d’un point de vue financier, compte tenu des coûts additionnels liés au transport et du peu de dollars qui s’ajoutaient à sa future pension.

[16] Pour être admissible à une pension d’invalidité, il faut que la requérante soit incapable d’occuper tout type d’emploi, et pas juste son emploi habituel. Elle a jugé que les exigences physiques et le trajet prolongé de son emploi d’infirmière étaient excessifs compte tenu de sa douleur chronique au dos. Le médecin de la clinique a noté qu’elle pouvait faire du travail moins exigeant physiquement. Cette opinion a été confirmée par le témoignage de la requérante. Elle avait postulé pour différents emplois, en vain. Elle n’avait pas été engagée, mais avait été placée sur une courte liste pour un poste de répartition. Elle avait aussi postulé, entre autres, pour des emplois en vente au détail et en centre d’appels, ainsi que pour de l’entraide entre aînés. Elle a affirmé qu’elle ne pouvait plus être certaine de pouvoir travailler à temps plein, mais qu’elle pensait pouvoir travailler des heures régulières à temps partiel. Elle a fait remarquer qu’il était difficile de trouver un emploi. J’admets que les problèmes de santé actuels de la requérante la rendent incapable d’occuper un quelconque emploi en date de l’audience. Elle aurait cependant pu, à l’échéance de sa PMA et dans les quelques années qui ont suivi, occuper régulièrement un emploi plus sédentaire que son métier d’infirmière.

[17] La requérante a témoigné qu’elle avait eu une invalidité grave et prolongée pendant des années avant la fin de sa PMA. Elle avait jugé nécessaire de réduire ses heures de travail en raison de son mal de dos. Je reconnais qu’elle avait des problèmes de santé, et il est tout à son honneur d’avoir modifié ses heures de travail afin de conserver son emploi. Bien qu’elle était aux prises avec une douleur lombaire, cette limitation ne remplit pas le critère d’une invalidité grave. Elle avait pu continuer de travailler et s’était sentie capable de postuler pour des emplois moins exigeants physiquement. Le fait que son état de santé ne corresponde pas à la définition d’une invalidité grave selon le RPC n’enlève rien à son parcours professionnel admirable et à la persévérance dont elle a fait preuve malgré son problème au dos.

Circonstances personnelles de la requérante  

[18] Je dois évaluer la dimension « grave » du critère dans un contexte réaliste. Autrement dit, pour décider si une personne est atteinte d’une invalidité grave, je dois tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie. Une preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu’une preuve des efforts déployés pour trouver un emploi et de l’existence des possibilités d’emploiNote de bas de page 11.

[19] La requérante avait été capable de travailler au moment de sa PMA. Elle travaillait des heures à temps partiel de façon régulière. Chez une personne qui demande une pension d’invalidité, la capacité d’occuper régulièrement un emploi rémunérateur est précisément l’antithèse d’une invalidité grave et prolongéeNote de bas de page 12. La requérante avait 60 ans quand elle a présenté sa demande. C’est une personne instruite qui a travaillé comme infirmière autorisée. Elle possède donc d’importantes compétences transférables. Elle n’a soulevé aucune difficulté de concentration. Elle était capable d’apprendre de nouvelles compétences pour occuper un emploi sédentaire qui conviendrait aux limitations dues à son âge au moment où elle a fait sa demande. La preuve est insuffisante pour conclure à une invalidité grave. Je conclus que la requérante n’a pas démontré qu’il était plus probable qu’improbable qu’elle était, d’un point de vue réaliste, atteinte d’une invalidité grave au sens du RPC.

La PMA de la requérante ne respecte pas l’exigence pour une PIAR

[20] La PIAR est une nouvelle prestation qui est entrée en vigueur en janvier 2019. Elle vise à fournir une prestation aux personnes invalides qui touchent une pension de retraite tout en ayant moins de 65 ans. Étant donné que la PIAR est une nouvelle prestation depuis le 1er janvier 2019, la PMA des bénéficiaires ne peut pas se terminer avant janvier 2019Note de bas de page 13. La PMA de la requérante ne remplit pas cette exigence comme elle se termine avant janvier 2019Note de bas de page 14.

[21] La requérante n’est pas admissible à la PIAR comme elle ne remplit pas l’exigence en matière de PMA. Je reconnais ses problèmes médicaux sérieux et les limitations qui en découlent. Le fait que sa PMA ne satisfait pas à l’exigence établie ne signifie pas qu’elle est capable de travailler ni que ses symptômes ne sont pas réels. Le RPC est un régime contributif, et les cotisations qu’elle a versées ne donnent pas lieu à une PMA se terminant en 2019 ou plus tard. Même si elle était incapable de travailler à la date de l’audience, sa demande ne peut être accueillie.

Conclusion

[22] La requérante n’a pas démontré qu’il était plus probable qu’improbable qu’elle était atteinte d’une invalidité grave qui la rendait régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice le 31 décembre 2014 ou avant cette date.

[23] La requérante n’est pas admissible à la PIAR comme sa PMA se termine avant janvier 2019.

[24] L’appel est rejeté.

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