Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

L’appelante a droit au versement d’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) à compter de février 2017.

Aperçu

[1] Le ministre a reçu la demande de prestations d’invalidité de l’appelante le 10 janvier 2018. Elle a 60 ans. Elle a fait sa 12e année et a obtenu un baccalauréat en arts. Elle a décrit le principal problème de santé qui la rendait invalide comme une cardiopathie congénitale caractérisée par une valve aortique bicuspide accompagnée d’une sténose aortique, de souffles diastoliques et systoliques et d’une arythmie avec des palpitations. Elle a précisé que son dernier emploi était dans une entreprise d’exportation de juillet 2015 à juin 2016, moment où elle a cessé de travailler en raison d’une pénurie de travail.

[2] Pour avoir droit à une pension d’invalidité du RPC, l’appelante doit remplir les conditions énoncées dans le RPC. Plus précisément, elle doit être déclarée invalide au sens du RPC au plus tard à la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA repose sur les cotisations que l’appelante a versées au RPC. Je constate que la PMA de l’appelante a pris fin le 31 décembre 2017.

Questions en litige

[3] Le problème de santé de l’appelante a-t-il entraîné chez elle une invalidité grave, c’est-à-dire qu’elle était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au plus tard le 31 décembre 2017?

[4] Si tel est le cas, l’invalidité de l’appelante devait-elle aussi durer pendant une période longue, continue et indéfinie au plus tard le 31 décembre 2017?

Analyse

[5] L’invalidité se définit comme une invalidité physique ou mentale qui est grave et prolongéeFootnote 1. Une personne est considérée comme ayant une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès. La personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Autrement dit, si l’appelante satisfait seulement à un volet, elle n’a pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

[6] Je dois évaluer le volet « grave » du critère dans un contexte réalisteFootnote 2. Ainsi, pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[7] Pour évaluer si une invalidité est « grave », il ne s’agit pas de savoir si la personne a des déficiences graves, mais si l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. Il n’est pas question de savoir si une personne est dans l’impossibilité d’accomplir ses tâches habituelles, mais plutôt si elle est incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceFootnote 3.

i. Rapports médicaux antérieurs au 31 décembre 2017 (avant la fin de la PMA)

[8] Le 3 octobre 2017Footnote 4, un rapport du Dr Kilany, cardiologue, indiquait que l’appelante présentait un souffle protodiastolique, ce qui concordait aussi avec une insuffisance aortique.

[9] Le 3 novembre 2017Footnote 5, l’appelante a subi une scintigraphie de perfusion myocardique à l’effort parce qu’elle se plaignait de douleurs thoraciques. Elle a aussi subi une échocardiographie à l’effort, qui n’a révélé aucun symptôme pour un travail d’une bonne intensité. La scintigraphie de perfusion myocardique était normale.

[10] Dans un rapport daté du 15 décembre 2017, le Dr Ochocinski, médecin de famille, a déclaré que l’appelante avait eu de fortes douleurs thoraciques en avril 2017 et qu’on avait décelé une sténose aortique et une arythmie cardiaqueFootnote 6. Elle avait souvent des épisodes de douleurs thoraciques et d’essoufflement, qui avaient commencé à s’aggraver quelques mois auparavant. Il a écrit qu’elle contrôlait mieux sa fréquence cardiaque avec des médicaments. Son pronostic était bon.

ii. Rapports médicaux postérieurs au 31 décembre 2017 (après la PMA)

[11] En 2018, le Dr Sabbagh a évalué l’appelante parce qu’elle ronflait et faisait de l’insomnie. Le 16 janvier 2018Footnote 7, l’étude de son sommeil a montré qu’elle présentait une légère apnée obstructive du sommeil et une arythmie occasionnelle. En août 2018Footnote 8, le Dr Sabbagh a écrit qu’elle se sentait mieux depuis qu’elle utilisait un appareil de pression positive expiratoire, mais qu’elle continuait de se réveiller fréquemment.

[12] Le 29 mai 2018Footnote 9, le Dr Kilany, cardiologue, a écrit que les palpitations de l’appelante s’étaient améliorées depuis qu’elle avait commencé à prendre du bisoprolol (un bêtabloquant utilisé pour traiter l’hypertension et les maladies du cœur), mais qu’elle avait continué d’avoir des douleurs thoraciques à l’effort et parfois même au repos. Le Dr Kilany a aussi constaté une bicuspidie légère de la valve aortique, une légère sténose aortique et de la régurgitation. Il a mentionné que l’appelante pouvait marcher un kilomètre à un rythme lent et monter les escaliers par tranche de 14 sans grande difficulté. Le Dr Kilany avait prévu des examens plus poussés, car il se demandait si la sténose aortique et la régurgitation étaient sous-estimées, puisque l’appelante présentait des symptômes persistants de palpitation, d’essoufflement et de douleurs thoraciques occasionnelles, et il envisageait une éventuelle chirurgie de remplacement de la valve cardiaque.

[13] Le 4 septembre 2018Footnote 10, le Dr Kilany a noté qu’un autre échocardiogramme montrait que la valve aortique bicuspide de l’appelante présentait une sténose modérée accompagnée d’une légère régurgitation. Il lui a recommandé de continuer à prendre le même médicament et de passer un échocardiogramme tous les six mois.

[14] Le 26 juillet 2019Footnote 11, le Dr Muhammad, psychiatre, a diagnostiqué un trouble anxieux non spécifié, pour lequel l’appelante prenait de la mirtazapine (un médicament contre l’anxiété) la nuit.

iii. Témoignage

[15] L’appelante a déclaré avoir travaillé pour une entreprise d’exportation de 2015 à juin 2016. Elle était spécialiste en documentation. Elle a été mise à pied en 2016. Elle a bel et bien essayé de trouver du travail dans le domaine de l’informatique, mais personne ne l’a embauchée.

[16] Elle a expliqué qu’elle avait des symptômes cardiaques en mars 2017. Elle a été hospitalisée et a vu beaucoup de spécialistes. Elle a reçu un diagnostic de problème de santé congénital. Elle avait une maladie du cœur avant d’avoir 37 ans. Elle prenait des médicaments et tout allait bien jusqu’en 2017.

[17] Elle fait aussi de l’apnée du sommeil et de l’insomnie. Elle peut dormir seulement de quatre à cinq heures par nuit. Elle se sent très fatiguée et irritable en raison du manque de sommeil.

[18] Elle consulte aussi un psychiatre pour une dépression et des attaques de panique. Les symptômes ont commencé à se manifester à 35 ans. Toutefois, quand elle a appris qu’elle avait un problème cardiaque, elle est devenue encore plus déprimée. En 2019, son psychiatre lui a prescrit des médicaments. Elle continue d’éprouver de la tristesse, de la fatigue et un manque d’énergie. Elle a aussi des difficultés de concentration.

[19] Elle a déclaré que, compte tenu de ses symptômes persistants, elle doute qu’elle soit productive dans un milieu de travail.

[20] L’appelante vit actuellement avec son fils. Elle n’est pas capable de faire grand-chose pendant la journée, sauf préparer certains repas.

iv. Capacité résiduelle de travailler

[21] Je juge que l’appelante a effectivement une invalidité grave, car elle est régulièrement incapable de détenir une occupation rémunératrice en raison de limitations persistantes causées par une épicondylite bilatérale.

[22] Le ministre a reconnu la maladie du cœur de l’appelante. Par contre, elle décrit son problème de santé comme étant congénital et elle avait pu travailler malgré tout. Les examens cardiaques ont révélé des problèmes à la valve cardiaque d’une intensité légère à modérée seulement. Sa fonction cardiaque était en majeure partie normale. Même s’il est possible que sa fonction cardiaque et son apnée du sommeil entraînent certaines limitations, les résultats ne permettent pas de conclure qu’elle avait un grave problème de santé pendant sa PMA et de façon continue depuis. L’appelante a reçu une bonne éducation et possède des compétences transférables. Ainsi, elle conserve la capacité de faire un travail léger ou sédentaire qui lui serait convenable. Le ministre a ajouté que l’appelante avait peut-être un trouble anxieux non spécifié et une apnée obstructive du sommeil. Toutefois, il est possible de traiter les deux problèmes de santé. Ni l’un ni l’autre ne devrait l’empêcher d’effectuer un travail convenable. De plus, aucune contre-indication médicale n’empêchait un retour progressif dans un emploi convenable.

[23] Je ne suis pas d’accord avec les observations du ministre. Les rapports médicaux démontrent que l’appelante continue d’avoir des douleurs à la poitrine, de l’essoufflement et des palpitations du cœur même si elle prend des médicaments et suit le traitement indiqué. De plus, elle fait une dépression.

[24] Je fonde ma décision sur les rapports médicaux suivants :

  • Dans son rapport de décembre 2017, le Dr Ochocinski a déclaré que l’appelante avait de graves douleurs thoraciques, qu’on avait décelé chez elle une sténose de la valve aortique et une arythmie cardiaque, qu’elle avait souvent des épisodes de douleurs thoraciques et d’essoufflement qui avaient commencé à s’aggraver quelques mois plus tôt (son pronostic était bon).
  • Dans son rapport de mai 2018, le Dr Kilany affirme que l’appelante a continué de présenter des douleurs thoraciques à l’effort et parfois même au repos. Elle pouvait marcher lentement. Il avait prévu des examens plus poussés, car il se demandait si la sténose aortique et la régurgitation étaient sous-estimées, puisque l’appelante présentait ses symptômes persistants de palpitation, d’essoufflement et de douleurs thoraciques occasionnelles. Elle ferait l’objet d’un suivi cardiaque continu (tous les six mois) et subirait possiblement une chirurgie de remplacement de la valve cardiaque. En septembre 2018, le Dr Kilany a noté que l’autre échocardiogramme montrait que la valve aortique bicuspide de l’appelante présentait une sténose modérée accompagnée d’une régurgitation légère.
  • Le rapport rédigé en juillet 2019 par le Dr Muhammad indiquait que l’appelante était atteinte d’un trouble anxieux non spécifié.

[25] L’appelante fait également de l’apnée du sommeil et de l’insomnie.

[26] Même si l’appelante a 60 ans, qu’elle a fait sa 12e année et qu’elle a obtenu un baccalauréat en arts, elle a des épisodes de douleurs thoraciques et d’essoufflement ainsi que des palpitations cardiaques. Elle fait aussi une dépression.

[27] Je suis convaincue que l’appelante n’est pas en mesure de fonctionner dans un milieu professionnel. Par conséquent, elle est atteinte d’une invalidité grave depuis juin 2016, moment où elle a cessé de travailler.

Invalidité prolongée

[28] Je juge que l’appelante a prouvé selon la prépondérance des probabilités que son invalidité doit durer pendant une période longue, continue et indéfinie.

[29] D’après le témoignage de l’appelante et les rapports médicaux datant de 2017, il est évident que son état de santé ne s’est pas amélioré malgré la prise de médicaments et le respect des recommandations des médecins.

Conclusion

[30] L’appelante avait une invalidité grave et prolongée en juin 2016, quand elle a cessé de travailler. Toutefois, pour établir la date du paiement de la pension, il faut considérer qu’une personne est réputée être devenue invalide tout au plus 15 mois avant que le ministre reçoive sa demande de pensionFootnote 12. La demande de l’appelante a été reçue en janvier 2018, donc la date réputée de son invalidité est octobre 2016. Le versement de la pension commence quatre mois après la date réputée de l’invalidité, donc à compter de février 2017Footnote 13.

[31] L’appel est accueilli.

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