Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : S. H. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 734

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-1123

ENTRE :

S. H.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Raymond Raphael
Date de l’audience par
téléconférence :
Le 2 juillet 2020
Date de la décision : Le 4 juillet 2020

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Décision

[1] La requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] La requérante avait 48 ans lorsqu’elle a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC en octobre 2018. Dans son questionnaire relatif à l’invalidité, elle a mentionné qu’elle avait travaillé pour la dernière fois comme manœuvre et qu’elle avait arrêté de travailler en octobre 2013Note de bas page 1 en raison de [traduction] « fractures des os ». Elle a aussi mentionné qu’elle avait été incapable de travailler en raison de troubles bipolaire et schizoaffectifNote de bas page 2. Le ministre a rejeté la demande initialement et après révision, et la requérante a fait appel auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Il s’agit de la cinquième demande de pension d’invalidité du RPC de la requérante. Ses demandes antérieures ont été présentées en octobre 1996, mars 2008, novembre 2013 et octobre 2015. Le ministre a rejeté les deux premières demandes initialement et après révision. La requérante n’a pas porté les décisions découlant de la révision en appel. Le ministre a rejeté initialement les deux dernières demandes, et la requérante n’a pas demandé de révision.

[4] Le ministre reconnaît que la requérante est invalide depuis avril 1994 en raison de son état de santé mentale grave. Cependant, il affirme qu’il n’existe aucun élément de preuve permettant d’établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave au sens du RPC lorsqu’elle a été admissible aux prestations d’invalidité du RPC pour la dernière fois à la fin de décembre 1991 ou en janvier 1993Note de bas page 3.

[5] Aux fins de l’application du RPC, on entend par invalidité une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas page 4. L’invalidité de la partie requérante est grave si elle la rend régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Son invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie.

[6] Pour avoir gain de cause, la partie requérante doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est devenue invalide avant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA)Note de bas page 5. Sa PMA, la date à laquelle elle doit prouver qu’elle était invalide, est le 31 décembre 1991Note de bas page 6.

[7] La requérante a touché une rémunération de 419 $ en 1993. Ce montant est inférieur au niveau de rémunération lui permettant de satisfaire aux exigences en matière de cotisations; cependant, si elle est devenue invalide en 1993, avant la fin de janvier 1993, elle sera admissible aux prestations d’invaliditéNote de bas page 7.

Questions en litige

  1. L’état de santé mentale de la requérante l’a-t-il rendue régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en date du 31 décembre 1991?
  2. Sinon, son état de santé mentale l’a-t-il rendue régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à compter de 1993 et avant la fin de janvier 1993?
  3. Si c’est le cas, son invalidité est-elle d’une durée longue, continue et indéfinie?

Mode d’instruction

[8] Dans son avis d’appel, la requérante a demandé que l’audience soit instruite sous forme de questions et réponses écrites. Compte tenu de cette demande, le 4 mars 2020, j’ai envoyé un avis d’audience qui comprenait des questions auxquelles la requérante devait répondreNote de bas page 8. Le Tribunal a reçu les réponses de la requérante le 27 mars 2020Note de bas page 9.

[9] Après avoir examiné les réponses de la requérante, j’ai déterminé qu’une audience orale était nécessaire pour que je puisse évaluer adéquatement l’état de la requérante à la fin de décembre 1991 et en janvier 1993. Cela est attribuable au fait que la requérante a répondu qu’elle avait arrêté de travailler en 1993 en raison de son état de santé et qu’elle n’était plus capable de travailler après 1993. Cependant, elle n’a pas précisé à quel moment de l’année 1993 elle avait arrêté de travailler. De plus, elle n’a pas expliqué les circonstances dans lesquelles elle avait arrêté de travailler.

Invalidité grave

Bien que la requérante ait été invalide depuis avril 1994, il n’existe aucune preuve médicale permettant d’établir qu’elle était invalide à la date de fin de la PMA

[10] Je dois concentrer mon attention sur l’état de la requérante au 31 décembre 1991 ou, sinon, au cours du mois de janvier 1993.

[11] Le RPC est un régime d’assurance sociale fondé sur les cotisationsNote de bas page 10. Le RPC protège la requérante uniquement pour les problèmes de santé qui sont devenus graves au plus tard à la date de fin de sa PMA. Il ne la protège pas pour les problèmes de santé qui sont devenus graves par la suite.

[12] Pour avoir gain de cause, une partie requérante doit fournir une preuve médicale objective de son invalidité à l’échéance de sa PMA. La preuve médicale postérieure à la date de fin de la PMA n’est pas pertinente lorsqu’une partie requérante ne réussit pas à prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave avant la date de fin de sa PMANote de bas page 11.

[13] La preuve médicale établit que la requérante a des problèmes de santé mentale graves depuis avril 1994, lorsqu’elle a eu une crise psychotique. Cependant, aucun élément de preuve médicale ne montre qu’elle avait une invalidité grave à la fin de décembre 1991, ou qu’elle est devenue gravement invalide en janvier 1993.

[14] La requérante a affirmé qu’elle travaillait comme préposée à l’entretien dans une maison de soins en 1991. Elle a arrêté de travailler parce qu’elle s’est cassé la rotule et s’est fracturé le coccyx. Elle a affirmé qu’elle n’était pas capable de travailler parce qu’elle était stressée et incapable de se concentrer. Cependant, elle a reconnu n’avoir reçu aucun traitement pour ses problèmes de santé mentale à l’époque. Elle a aussi reconnu qu’elle n’avait pas vu de psychiatre jusqu’à ce qu’elle consulte le Dr Tobin en avril 1994.

[15] Le Dr Harding a été le médecin de famille de la requérante de janvier 1992 à mai 1995. Ses notes de cabinet font état de huit visites au cabinet au cours des années 1992 et 1993, mais aucune de ces visites n’était en lien avec des problèmes de santé mentale. La première mention d’un problème de santé mentale figure dans la note de cabinet du 11 avril 1994, où on fait référence à des [traduction] « pensées délirantes », et on mentionne que la requérante est orientée vers le Dr TobinNote de bas page 12.

[16] La requérante a été admise à l’hôpital le 11 avril 1994, et a obtenu son congé le 25 avril 1994. Dans le résumé du congé, le Dr Tobin a précisé que la requérante avait été admise en raison de multiples hallucinations et délires. Le Dr Tobin a précisé également que ses symptômes étaient présents depuis trois à quatre semaines, et qu’elle n’avait pas d’antécédents psychiatriques. Le Dr Tobin a posé un diagnostic de psychose schizophréniforme, possiblement aggravée par une l’abus d’alcool ou de droguesNote de bas page 13.

[17] Dans sa lettre datée d’août 2008 à Service Canada, R. Annette Surette, la travailleuse de soutien en santé mentale de la requérante, a mentionné que la requérante est atteinte depuis longtemps d’une maladie psychiatrique, qui remonte à 1994Note de bas page 14.

[18] Étant donné qu’aucun élément de preuve médicale ne permet d’établir que la requérante était atteinte d’une invalidité grave à la date de fin de la PMA, il n’est pas nécessaire que j’applique l’approche du « contexte réaliste »Note de bas page 15. Je reconnais que la requérante est peu scolarisée et a des antécédents professionnels limités se résumant à des emplois physiques qui n’exigent pas de qualification. Elle a, depuis toujours, un trouble d’apprentissage. Elle a terminé ses études en 9e année seulement, et elle devait être intégrée à une classe en éducation spécialisée. Cependant, en l’absence d’une preuve médicale en date de la PMA, je ne peux pas tenir compte de ces facteurs.

[19] Je compatis avec la situation de la requérante, toutefois je suis lié par les dispositions du RPC. Le Tribunal est un décideur établi par une loi et je suis tenu d’interpréter et d’appliquer les dispositions telles qu’elles sont énoncées dans le RPC. Je n’ai pas le pouvoir de déroger aux dispositions du RPC, ni de rendre une décision fondée sur l’équité, la compassion ou des circonstances atténuantes.

[20] La requérante n’a pas démontré qu’il est plus probable que le contraire qu’elle était atteinte d’une invalidité grave conformément aux exigences du RPC.

[21] Étant donné qu’elle n’a pas établi qu’elle était atteinte d’une invalidité grave, il n’est pas nécessaire que je me prononce sur le caractère prolongé.

Conclusion

[22] L’appel est rejeté.

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