Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : D. O. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 797

Numéro de dossier du Tribunal: GP-20-206

ENTRE :

D. O.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Lianne Byrne
Date de la décision : Le 21 juillet 2020

Sur cette page

Introduction

[1] La présente demande concerne une requête d’annulation ou de modification d’une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (TSS).

[2] Le 20 février 2019, la division générale a conclu que la requérante ne satisfaisait pas aux dispositions d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) et qu’une modification de la date de début de ses prestations d’invalidité du RPC n’était pas justifiée. La demanderesse a déposé une demande d’annulation ou de modification de cette décision auprès de la division générale conformément à l’article 66 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) le 15 janvier 2020.

[3] L’audience de cette demande a été faite sous forme de questions et réponses écrites pour les raisons suivantes :

  • Les questions en litige ne sont pas complexes.
  • Les renseignements au dossier comportent des lacunes ou nécessitent une clarification, ou les deux.
  • La crédibilité ne figure pas au nombre des questions principales.
  • Ce mode d’instruction respecte l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Questions en litige

[4] Le Tribunal doit décider si la demande d’annulation ou de modification a été présentée plus d’un an après la date où la demanderesse a reçu communication de la décision de la division générale.

[5] Le Tribunal doit décider si la preuve déposée à l’appui de la demande d’annulation ou de modification confirme un fait nouveau et essentiel au sens de l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS.

[6] S’il établit qu’il s’agit d’un fait nouveau et essentiel au sens de l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS, le Tribunal devra ensuite décider si les faits nouveaux soutiennent la conclusion selon laquelle l’appel de la demanderesse avait une chance raisonnable de succès. 

Contexte et historique de l’instance

[7] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du RPC de la demanderesse le 8 février 2017. Le ministre a approuvé cette demande avec une date de début en novembre 2015, soit 15 mois avant la date de la demande. Le ministre a rejeté la demande de révision de la date de début présentée par la demanderesse. La demanderesse a interjeté appel de la décision découlant d’une révision au Tribunal de la sécurité sociale.

[8] La division générale du Tribunal de la sécurité sociale a rejeté son appel de façon sommaire au motif que la demanderesse n’avait pas satisfait aux dispositions relatives à l’incapacité telles qu’énoncées dans le RPC et a conclu qu’une modification de la date de début de sa pension d’invalidité du RPC n’était pas justifiée. La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale. Cet appel a été mis en suspens en attendant qu’une décision soit rendue quant à sa demande d’annulation ou de modification. 

Droit applicable

[9] L’article 66(1) de la Loi sur le MEDS se lit comme suit :

  1. 66. (1) Le Tribunal peut annuler ou modifier toute décision qu’il a rendue relativement à une demande particulière :
    1. a) dans le cas d’une décision visant la Loi sur l’assurance-emploi, si des faits nouveaux lui sont présentés ou s’il est convaincu que la décision a été rendue avant que soit connu un fait essentiel ou a été fondée sur une erreur relative à un tel fait;
    2. b) dans les autres cas, si des faits nouveaux et essentiels qui, au moment de l’audience, ne pouvaient être connus malgré l’exercice d’une diligence raisonnable lui sont présentés.
  2. (2) La demande d’annulation ou de modification doit être présentée au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision.
  3. (3) Il ne peut être présenté plus d’une demande d’annulation ou de modification par toute partie visée par la décision.
  4. (4) La décision est annulée ou modifiée par la division qui l’a rendue.

Documents présentés à titre de faits nouveaux

[10] La demanderesse a déposé les documents suivants à l’appui de la demande d’annulation ou de modification :

Observations

[11] Observations de la demanderesse :

  1. La Dre Barnett a fait une erreur dans un rapport médical. La demanderesse a déposé une autre déclaration d’incapacité de la Dre Barnett. Elle a également déposé des documents à l’appui du rapport médical corrigé de la Dre Barnett.
  2. L’erreur du rapport de la Dre Barnett a malencontreusement été manquée. 
  3. Cette information est essentielle au succès de son appel parce qu’on dit qu’elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande en raison du trouble de stress post-traumatique (TSPT). 

[12] Observations du défendeur :

  1. La requérante avait une copie du rapport original de la Dre Barnett daté du 20 avril 2018 avant l’audience du TSS. Les renseignements de ce rapport étaient mis à sa disposition aux fins d’examen puisqu’ils faisaient partie de la preuve documentaire qui lui avait été fournie par le TSS. Dans sa lettre du 4 février 2017, le Tribunal a clairement indiqué qu’il envisageait de rejeter son appel de façon sommaire entre autres parce que [traduction] « votre médecin de famille a déclaré que vous ne souffrez pas d’incapacité ». Une partie demanderesse qui est personnellement au courant de l’existence de nouveaux éléments de preuve ou de leur contenu au moment de l’audience initiale ne peut pas faire valoir avec succès que la preuve ne pouvait être découverte en exerçant une diligence raisonnable. 
  2. La demanderesse n’a fourni aucune explication concernant le reste des documents pour justifier pourquoi elle croyait que la preuve ne pouvait être découverte avant février 2019. 
  3. La preuve déposée à l’appui de la demande de modification ou d’annulation de la demanderesse ne confirme aucun fait nouveau au sens de l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS et, par conséquent, le Tribunal ne peut pas réexaminer la décision définitive du TSS.
  4. Dans l’éventualité où le Tribunal établit l’existence de faits nouveaux, ces faits nouveaux ne soutiennent pas la conclusion selon laquelle la demanderesse était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC et, en conséquence, ne satisfont pas aux dispositions relatives l’incapacité telle que définie au sens du RPC.

Analyse

[13] La demande d’annulation ou de modification a été déposée moins d’un an après que la requérante a reçu communication de la décision de la division générale. La décision de la division générale est datée du 20 février 2019. La demanderesse a présenté sa demande d’annulation ou de modification le 15 janvier 2020, soit moins d’un an après la date de la décision de la division générale. 

Demande d’annulation ou de modification – Possibilité de découverte et caractère substantiel

[14] La demanderesse doit prouver selon la prépondérance des probabilités que la preuve déposée à l’appui de la demande d’annulation ou de modification confirme un fait nouveau et essentiel au sens de l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS.

[15] Avant l’entrée en vigueur de l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS en avril 2013, la Cour d’appel fédérale (CAF) a établi le critère auquel doit satisfaire un élément de preuve pour être admis comme un « fait nouveau » par rapport à l’ancien article 84(2) du RPC :

  1. Il doit établir un fait (en général un état pathologique dans le contexte du RPC) qui existait au moment de la première audience, mais ne pouvait être découvert avant celle-ci en exerçant une diligence raisonnable (c’est le « critère de la possibilité de découverte »);
  2. Il doit être raisonnablement probable que cette preuve aurait influé sur la décision rendue à l’issue de la première audience (c’est le « critère du caractère substantiel »).

    (Canada (Procureur général) c Macrae, 2008 CAF 82)

[16] En outre, dans l’arrêt Carepa c Canada (Développement social), 2006 CF 1319, la Cour fédérale a statué qu’une partie demanderesse doit fournir la preuve des mesures qu’elle a pu prendre pour trouver le nouvel élément de preuve, et expliquer pourquoi elle n’aurait pas pu présenter la nouvelle preuve au moment de l’audience.

[17] Je vais d’abord examiner les documents datés d’avant février 2019 qui ont été présentés par la requérante avec sa demande d’annulation ou de modification. Ces documents comprennent ce qui suit :

  • Un rapport du Dr Malik daté du 7 octobre 2018Note de bas de page 8, qui signale qu’elle a été vue sur recommandation de la Dre Barnett. Ses symptômes sont compatibles avec un trouble de l’humeur ou trouble anxieux attribuable à des facteurs circonstanciels; historique de trouble de stress post-traumatique. 
  • Un rapport de la Dre Davie daté du 1er mai 2018Note de bas de page 9, qui énumère ses diagnostics comme étant le jeu d’argent pathologique, le TSPT, un trouble d’anxiété généralisée, la consommation d’alcool pathologique (légère) et un faible soutien social. 
  • Des notes d’évolution manuscrites datées du 8 mai 2018Note de bas de page 10 et du 15 mai 2018Note de bas de page 11 étaient également incluses.

[18] Je remarque que ces documents existaient en février 2019. Ils ne faisaient toutefois pas partie du dossier initial de l’audience. La requérante n’a pas expliqué les mesures, si c’est le cas, qu’elle a prises pour obtenir ses documents avant février 2019. Elle n’a pas expliqué pourquoi cette preuve ne pouvait pas être fournie au Tribunal avant février 2019. J’estime par conséquent qu’elle n’a pas démontré que ces faits ne pouvaient être découverts avant la première audience en exerçant une diligence raisonnable.

[19] De plus, la requérante a présenté trois documents qui sont datés d’après février 2019. Ils comprennent ce qui suit :

  • Déclaration d’incapacitéNote de bas de page 12 remplie le 29 juillet 2019 par la Dre Sabrina Tung Barnett, qui signale que son état de santé la rend incapable de formuler ou d’exprimer l’intention de faire une demande. La date à laquelle son incapacité a débuté était le 12 mai 2004, et cela continue. Ses troubles étaient le TSPT, la dépression et l’anxiété. 
  • Rapport de la Dre Barnett daté du14 mai 2019Note de bas de page 13, qui indique que la demanderesse est sa patiente depuis janvier 2017. La demanderesse a reçu une balle dans le visage durant un braquage à domicile le 12 mai 2004 et a souffert de TSPT, de dépression et d’anxiété. Ses symptômes ont été invalidants. À la connaissance de la Dre Barnett, ce n’est que récemment (dans la dernière année) que la demanderesse a été capable de remplir des formulaires pour essayer de recevoir une forme quelconque de compensation.
  • Rapport de la Dre Barnett daté du 31 juillet 2019Note de bas de page 14, qui demande que sa déclaration d’incapacité antérieure soit ignorée parce qu’elle avait mal compris la question. 

[20] La demanderesse soutient que la Dre Barnett a fait une erreur en remplissant la déclaration initiale d’incapacité datée du 20 avril 2018 et que cette erreur a malencontreusement été manquée en février 2019. Elle a donc présenté une déclaration d’incapacité mise à jour avec des documents supplémentaires pour appuyer l’opinion corrigée de la Dre Barnett. Elle fait aussi valoir que l’erreur du rapport de la Dre Barnett daté du 20 avril 2018 a malencontreusement été manquée.

[21] Je remarque, cependant, que la déclaration d’incapacité datée du 20 avril 2018 existait en février 2019 et faisait partie du dossier de l’audience. Comme le souligne le ministre dans ses observations, la demanderesse avait une copie du rapport de la Dre Barnett daté du 20 avril 2018 avant l’audience du TSS puisque cette information lui avait été fournie comme faisant partie de la preuve documentaire pour son appel au TSS. Le défendeur a également souligné que le TSS avait clairement indiqué que l’une des raisons pour lesquelles il envisageait de rejeter son appel de façon sommaire était une déclaration de sa médecin de famille selon laquelle elle n’avait aucune incapacité dans sa lettre du 4 février 2017. Je conviens avec le défendeur qu’une partie demanderesse qui est personnellement au courant de l’existence de nouveaux éléments de preuve ou de leur contenu au moment de l’audience initiale ne peut pas faire valoir avec succès que la preuve ne pouvait être découverte en exerçant une diligence raisonnable.

[22] Par ailleurs, la requérante n’a pas expliqué les mesures qu’elle a prises, le cas échéant, pour trouver le nouvel élément de preuve, et pourquoi elle n’aurait pas pu présenter la preuve au mois de février 2019. La déclaration d’incapacité datée du 20 avril 2018 faisait partie du dossier initial de l’audience et était mise à la disposition de la demanderesse. Il était possible de découvrir l’erreur de la Dre Barnett en lisant simplement le document. J’estime par conséquent que la requérante n’a pas démontré que ces faits ne pouvaient être découverts avant février 2019 en exerçant une diligence raisonnable.

[23] Puisque j’ai conclu que ces documents ne satisfont pas au critère de la possibilité de découverte, je n’examinerai pas la question de savoir s’ils ont satisfait au critère du caractère substantiel.

[24] Le Tribunal conclut que la preuve ne confirme pas un fait nouveau et essentiel au sens de l’article 66(1)(b) de la Loi sur le MEDS.

Conclusion

[25] La demande d’annulation ou de modification est rejetée.

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