Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : A. R. c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 747

Numéro de dossier du Tribunal: GP-20-996

ENTRE :

A. R.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Connie Dyck
Date de l’audience par
téléconférence :
Le 21 août 2020
Date de la décision : Le 22 août 2020

Sur cette page

Décision

[1] La requérante n’a pas droit à une période de rétroactivité plus longue pour sa pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] La requérante a subi un accident de voiture en novembre 2016. Le ministre a reçu sa demande de pension d’invalidité le 24 septembre 2019. Le ministre a approuvé la demande avec effet le 1er octobre 2018Note de bas page 1, qui est la rétroactivité maximale admissible. La requérante a demandé une révision de la date réputée de son invaliditéNote de bas page 2. Le ministre a maintenu sa décision. La requérante a interjeté appel de la décision découlant d’une révision au Tribunal de la sécurité sociale.

La requérante a obtenu la période maximale de rétroactivité admissible

[3] Le RPC prévoit qu’en aucun cas une personne n’est réputée être devenue invalide à une date antérieure de plus de 15 mois à la date de présentation d’une demandeNote de bas page 3. La requérante a demandé une pension d’invalidité en septembre 2019. Juin 2018 représente la période de quinze mois précédant cette date. La requérante affirme qu’elle était atteinte d’une invalidité en raison d’un accident de voiture survenu en novembre 2016 et que les versements devraient commencer à cette date. Malheureusement, ce n’est pas possible. Une personne ne peut être réputée être devenue invalide que 15 mois avant la réception de sa demande de pension d’invalidité par le ministre. Il existe une exception en cas d’« incapacité »; cependant, pour les raisons énoncées ci-dessous, la requérante ne satisfait pas à ce critère. Cela signifie que la date d’effet de sa pension d’invalidité du RPC ne peut pas être antérieure à juin 2018 (qui correspond à 15 mois avant la date de réception de la demande).

Le versement de la pension d’invalidité commence quatre mois après la date d’effet

[4] Le RPC prévoit par ailleurs que lorsque le versement de la prestation a été approuvé, la pension est payable pour chaque mois commençant avec le mois qui suit le mois au cours duquel est survenue l’invalidité de la partie requéranteNote de bas page 4. Quatre mois après juin 2018 correspond à octobre 2018, c’est-à-dire lorsque la requérante a commencé à toucher sa pension d’invaliditéNote de bas page 5.

[5] La prestation d’invalidité de la requérante a été correctement calculée en fonction de son revenu et de ses cotisationsNote de bas page 6. Sa période de cotisation a été établie de décembre 1994 (le mois suivant son 18e anniversaire) à juin 2018 (lorsqu’elle est réputée être devenue invalide).

Signification de l’exception en cas d’« incapacité »

[6] L’exception en cas d’« incapacité » permet aux personnes qui n’ont pas la capacité de présenter une demande de prestations de faire antidater leur demande à un moment où elles étaient encore capables de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demandeNote de bas page 7. Pour remplir le critère relatif à l’incapacité, une partie requérante doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande de prestations.

[7] La capacité de former l’intention de présenter une demande de prestations est semblable à la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent à la partie requérante demandant des prestations. La capacité doit être évaluée eu égard au sens ordinaire de ce terme et d’après la preuve médicale et les activités de la partie requéranteNote de bas page 8.

[8] Le libellé est clair et précis. Il ne requiert pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de pension d’invalidité, mais seulement la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une telle demande.

[9] J’ai pris en considération le fait qu’il est nécessaire d’examiner à la fois la preuve médicale et « les activités pertinentes de la personne en cause entre la date prétendue de début de l’invalidité et la date de la demande, ce qui nous informe sur la capacité de cette personne pendant la période en question de “former ou d’exprimer” l’intention de faire une demandeNote de bas page 9 ». Cette approche a été confirmée par la Cour d’appel fédérale dans les arrêts DanielsonNote de bas page 10 et KirklandNote de bas page 11. Cette approche est également en conformité avec le fait que « [l]a capacité de former l’intention de faire une demande de prestations n’est pas de nature différente de la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent au demandeur de prestations. Le fait que celui-ci n’ait pas l’idée d’exercer une faculté donnée en raison de sa vision du monde ne dénote pas chez lui une absence de capacité. » Par conséquent, « [c]es dispositions n’ont pas pour effet de nous obliger à donner au terme “capacité” un autre sens que son sens ordinaireNote de bas page 12  ».

[10] En ce qui concerne la requérante, la prétendue période d’incapacité dont il faut tenir compte va de novembre 2016 (lorsque la requérante déclare avoir été atteinte d’une incapacité en raison d’un accident de voiture) à septembre 2019 (la date à laquelle elle a demandé une pension d’invalidité).

La requérante avait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension d’invalidité

[11] La requérante est d’avis qu’elle était incapable d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité à compter du mois de novembre 2016.

[12] Elle affirme qu’elle vivait beaucoup de stress et qu’elle se concentrait sur sa guérison après l’accident. En outre, elle n’était pas au courant de la pension d’invalidité du RPC jusqu’à ce qu’une personne représentant l’Assured Income for the Severely Handicapped [programme de revenu assuré pour les personnes gravement handicapées de l’Alberta] lui conseille de présenter une demande. Malheureusement, un manque de connaissance quant à a l’admissibilité à une pension d’invalidité ne relève pas de la portée de l’incapacitéNote de bas page 13.

[13] J’éprouve de la sympathie envers la requérante; toutefois, la preuve démontre qu’elle avait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande. Voici pourquoi j’affirme cela.

Efforts déployés pour travailler

[14] Selon le témoignage de la requérante et ses antécédents professionnels, il est évident qu’elle possède une solide éthique de travail. Elle a déclaré qu’elle souhaiterait améliorer son état et être en mesure de retourner au travail plus tard. Ses efforts méritent des félicitations.

[15] Cependant, les efforts de la requérante pour travailler appuient le fait qu’elle avait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande. Cette intention n’est pas propre uniquement à une demande, mais aussi à d’autres choix de vie. La requérante a postulé un emploi chez X en 2017 et y a travaillé de façon régulière jusqu’au début de 2018. Cet emploi s’est terminé à cause d’un conflit personnel avec le propriétaire. Elle a ensuite fait une demande de prestations d’assurance-emploi. Elle croit qu’il s’agissait de prestations de maladie. Qu’il s’agisse de prestations régulières ou de maladie n’est pas important. Ce qui compte est le fait que la requérante avait la capacité de faire une demande pour ce type de prestations aux environs de mars 2018. Cela me montre qu’elle aurait eu la capacité de demander également une pension d’invalidité du RPC.

[16] La requérante a ensuite postulé un emploi chez X. Elle a affirmé qu’elle avait besoin de travailler pour des raisons financières. Ces décisions montrent aussi que la requérante aurait eu la capacité formuler l’intention de demander une pension d’invalidité.

Allocation de l’Assured Income for the Severely Handicapped

[17] La requérante a travaillé jusqu’au 31 décembre 2018. Elle a ensuite fait une demande d’Assured Income for the Severely Handicapped le 23 janvier 2019.Note de bas page 14 Elle a aussi signé un formulaire de consentement de déduction et de paiement le 1er mai 2019 pour effectuer des versements à l’Assured Income for the Severely HandicappedNote de bas page 15. La demande d’autres prestations appuie le fait que la requérante aurait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de demander une prestation d’invalidité du RPC comme elle l’a fait pour l’allocation d’Assured Income for the Severely Handicapped.

Questions juridiques

[18] La requérante a retenu les services d’un avocat en juillet 2017Note de bas page 16. Elle a dit que son avocat ne voulait pas qu’elle accepte le règlement. Cependant, elle voulait continuer sa vie et n’a pas suivi les conseils de celui-ci. Elle a affirmé que la poursuite a été réglée en 2018. Prendre la décision d’engager un avocat, entamer une poursuite judiciaire et décider des moyens de remédier à une poursuite sont des éléments de preuve qui démontrent que la requérante avait la capacité de former et d’exprimer une intention concernant des questions juridiques.

Preuve médicale

[19] La preuve médicale appuie le fait que la requérante était atteinte de limitations physiques et mentales après son accident de voiture. Il ne fait aucun doute qu’elle est invalide; c’est pourquoi le ministre a approuvé la pension d’invalidité du RPC. Le critère porté à ma connaissance n’est pas la question de savoir si la requérante est invalide, mais si elle avait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension d’invalidité du RPC.

[20] En août 2017, un rapport psychiatrique a été rempli par le Dr UllahNote de bas page 17. Depuis son accident de voiture en novembre 2016, la requérante a eu de la douleur continue, ce qui avait un effet sur son humeur, causant de la dépression et de l’anxiété.

[21] La preuve médicale montre que la requérante participait activement à ses soins médicaux. Elle a pris des décisions concernant la prise de médicaments et les traitements. La requérante a dit à son médecin de famille en 2017 qu’elle ne voulait pas de médicaments antidépresseurs. Elle préférait les médecines douces. La requérante a fait de la physiothérapie et de la massothérapie. Le Dr Ullah a affirmé que la requérante était [traduction] « motivée pour continuer la psychothérapie de façon continueNote de bas page 18 ».

[22] La requérante a rencontré le Dr Gross en août 2017. Elle lui a dit vouloir être guidée jusqu’au retour à un environnement de travail qu’elle pourrait effectuer. Elle a aussi demandé de l’ergothérapie en ce qui concerne une sangle de ceinture de sécurité qui serait plus confortableNote de bas page 19.

[23] L’intention de faire une demande de prestations n’est pas de nature différente de la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent à une partie requérante. La participation active de la requérante à la prise de décisions sur ses traitements médicaux me montre qu’elle en était capable.

Aperçu

[24] Bien que je comprenne la situation de la requérante, y compris ses difficultés financières, je suis liée par les dispositions législatives du RPC. La requérante a obtenu la rétroactivité maximale de 15 mois. En outre, j’estime que la requérante n’a pas prouvé l’incapacité au sens du RPC puisqu’elle a pris des décisions de façon régulière et continue en ce qui concerne sa vie de tous les jours, des questions juridiques, des questions d’emploi et ses soins de santé. Pour ces raisons, l’appel est rejeté.

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