Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : SS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 1160

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-999

ENTRE :

S. S.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Jackie Laidlaw
Représentant de la requérante : Frank Van Dyke
Date de l’audience par
vidéoconférence :
Le 22 septembre 2020
Date de la décision : Le 5 octobre 2020

Sur cette page

Décision

[1] La requérante n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] La requérante a travaillé comme adjointe administrative pour Pêches et Océans Canada à partir de juin 2014 et jusqu’à ce qu’elle cesse de travailler, en février 2016. Elle a cessé de travailler parce qu’elle s’était évanouie deux fois au travail et avait dû être transportée par ambulance à l’hôpital. Elle avait aussi cessé de travailler parce qu’elle avait des problèmes avec une direction abusive et qu’elle était devenue anxieuse et déprimée. Elle n’a occupé aucun emploi depuis en raison d’une fréquence cardiaque rapide et de problèmes de tachycardie et de dépression. La requérante est très instruite. Elle possède plusieurs diplômes et parle cinq langues.

[3] Pour avoir droit à une pension d’invalidité du RPC, la requérante doit remplir les conditions énoncées dans le RPC. Plus précisément, elle doit être déclarée invalide au sens du RPC à l’échéance de sa période minimale d’admissibilité (PMA) ou avant cette date. Le calcul de la PMA repose sur les cotisations que la requérante a versées au RPC. Je constate que la PMA de la requérante a pris fin le 31 décembre 2019.

Questions en litige

[4] La tachycardie, l’angine de poitrine, l’apnée du sommeil, les problèmes de santé mentale et la dépression de la requérante donnaient-ils lieu à une invalidité grave, c’est-à-dire qu’ils la rendaient régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en date du 31 décembre 2019?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité de la requérante était-elle également d’une durée longue, continue et indéfinie en date du 31 décembre 2019?

Analyse

[6] Une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès. La personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Autrement dit, si la requérante satisfait seulement à un volet, elle n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

La preuve ne permet pas de conclure à un problème de santé grave.

[7] La requérante a énuméré un certain nombre de problèmes qui l’ont rendue incapable de travailler. Toutefois, les nombreux éléments de preuve fournis ne montrent pas que l’un ou l’autre de ces problèmes entraîne une invalidité importante, que ce soit individuellement ou en regardant l’ensemble des problèmes de santé de la requérante.

[8] Elle a une légère apnée du sommeilNote de bas de page 2. Le Dr Dales, pneumologue, a effectué une étude sur le sommeil en décembre 2018 et a souligné que la requérante ne tolérait pas le VPCC, mais que son échelle de somnolence était normale, que l’apnée était légère et que le traitement n’était pas recommandé. Il lui a recommandé de ne pas prendre de poids. Il ne s’agit pas d’un problème grave.

[9] Elle a déclaré faire de l’asthme; cependant, elle ne présentait aucun symptôme respiratoire en 2009Note de bas de page 3 lorsqu’elle a été évaluée pour voir si son asthme était intermittent et léger ou persistant. On a constaté que son asthme était intermittent et léger et qu’elle était complètement asymptomatique entre les épisodes d’asthme peu fréquents. Aucun rendez-vous de suivi n’a été nécessaire. Elle n’a fourni aucune autre preuve montrant que son asthme se serait aggravé au fil des ans pour l’empêcher de travailler.

[10] Elle signale avoir reçu un diagnostic d’hypothyroïdie. Le Dr Grewal, cardiologue, a constaté en 2017Note de bas de page 4 que tout fonctionnait normalement sur le plan chimique (euthyroïdie) d’après son analyse sanguine de décembre 2016. Rien n’indique que l’hypothyroïdie nuise à sa capacité de travailler ou à d’autres problèmes de santé.

[11] Le principal problème de santé physique invoqué par la requérante est la tachycardie et, à l’audience, elle a aussi fait allusion à une angine. À l’audience, elle a convenu qu’elle n’avait pas reçu de diagnostic d’angine et qu’il s’agissait de douleurs thoraciques. Les douleurs thoraciques ont continuellement été considérées comme un symptôme de sa tachycardie. Par conséquent, je vais considérer ce symptôme dans le cadre de sa tachycardie.

[12] La requérante a dit que sa tachycardie mettait sa vie en danger. Le Dr O’Donnell, un médecin de famille qu’elle a consulté de février 2018 à 2019, l’a souligné. Il n’était pas son médecin de famille au moment où elle a cessé de travailler. Dans sa lettre du 16 juillet 2018Note de bas de page 5, le Dr O’Donnell indique qu’elle a des crises incontrôlables de tachycardie, puis déclare que la pathologie sous-jacente reste toujours à déterminer, deux ans après son arrêt de travail. J’estime que lorsqu’il a décrit la tachycardie comme étant une maladie grave pouvant mettre la vie en danger, il parlait de la tachycardie en général. La requérante n’a jamais reçu de diagnostic de tachycardie grave. Je ne peux donc pas accepter  que sa tachycardie est grave, comme le prétend la requérante. Dans les paragraphes qui suivent, je décrirai les examens médicaux concernant ses problèmes de santé au moment où elle a cessé de travailler et jusqu’à aujourd’hui.

[13] La requérante affirme qu’elle a cessé de travailler en février 2016 parce qu’elle s’était évanouie deux fois au travail et qu’elle avait été envoyée à l’hôpital. Elle a déclaré qu’elle ne s’était pas évanouie depuis au point de devoir aller à l’hôpital, quoiqu’elle était tombée à quelques reprises quelques semaines plus tôt et une fois l’an dernier. La première fois qu’elle était tombée était en septembre 2015, un vendredi, et elle était retournée au travail le lundi. La deuxième fois était en janvier 2016. Elle affirme que son médecin de famille de l’époque, le Dr Ritsma, lui avait dit de ne pas travailler pendant quelques semaines. Apparemment, le Dr Ritsma lui avait dit de prendre un congé de maladie en février 2016. La requérante a déclaré que l’employeur avait refusé deux notes médicales du Dr Ritsma. Il n’y a aucune note du Dr Ritsma ni de l’employeur à ce sujet. Je trouve peu probable que son employeur, le gouvernement du Canada, dans un milieu syndiqué, rejette deux notes de médecin pour un congé de maladie.

[14] En novembre 2015, elle a consulté un cardiologue, le Dr Jean-Francois Marquis, après qu’elle se soit évanouie pour la première foisNote de bas de page 6. Le Dr Marquis a découvert qu’elle avait eu deux épisodes de douleur thoracique au repos et que tous ses tests étaient normaux. Il l’a testée trois fois pour une fréquence cardiaque rapide, qui s’est révélée normale. Il a effectué deux EGC et une échocardiographie d’effort, sans trouver d’indice de tachycardie.

[15] En janvier 2016, elle a participé à une autre étude de cardiologie avec le Dr Dighe qui a révélé qu’elle avait une tachycardie sinusaleNote de bas de page 7. Il s’agit d’un rythme cardiaque rapide intermittent. Elle a subi d’autres tests au cœur et aux poumons, qui ont donné des résultats normauxNote de bas de page 8.

[16] Elle a consulté un autre cardiologue, le Dr Anand, en septembre 2016Note de bas de page 9. La requérante a décrit des symptômes qui nuisaient de façon importante à sa qualité de vie, mais il n’y avait pas de preuve objective d’arythmie (palpitation ou accélération du rythme cardiaque), de cardiopathie ou d’ischémie causée par l’exercice (baisse du débit sanguin vers le cœur).

[17] Au cours d’un suivi effectué en mars 2017Note de bas de page 10 pour ses symptômes de la tachycardie, la requérante a voulu que le Dr Anand autorise une prolongation de son arrêt de travail. Bien qu’il ait conclu qu’elle avait une tachycardie sinusale qui n’était pas d’origine organique, il a refusé sa demande, car il ne voyait aucune raison qui l’empêchait de travailler. Il souligne que la requérante a nié qu’elle s’était évanouie dans le passé; la raison précise pour laquelle elle affirme avoir cessé de travailler. Le Dr Anand a également précisé qu’elle a refusé de prendre des bêta-bloquants.

[18] À l’heure actuelle, la requérante prend des bêta-bloquants et a affirmé avoir été vue récemment par un cardiologue, qui prend en sa charge sa tachycardie. La requérante a affirmé, tout comme son mari, M. Hamand, qu’elle ne fait rien, dort mal et est incapable de prendre sa place. Bien qu’elle puisse ressentir de la fatigue, il n’y a aucun signe de problème cardiaque autre que la tachycardie sinusale, qui est contrôlée selon ses propres dires.

[19] À la même période que sa dernière consultation avec le Dr Anand en 2017, elle est allée voir un psychiatre pour la première fois. Elle a été recommandée par le Dr Ritsma et a eu un rendez-vous avec le Dr Abdul Kahn, psychiatre, le 27 mars 2017Note de bas de page 11. Elle a déclaré au Dr Khan qu’elle avait cessé de travailler en raison d’une direction abusive, méchante et blessante, qui l’avait rendue anxieuse, déprimée, suicidaire et effrayée et l’a obligée à prendre un congé de maladie. Elle n’a presque pas parlé d’un problème cardiaque pour lequel elle voit un cardiologue. Le Dr Khan indique une raison complètement différente pour son congé de maladie. La preuve du Dr Ritsma ne démontre pas qu’elle avait cessé de travailler en raison d’une dépression ou d’anxiété. Les rapports médicaux du Dr O’Donnell pour la demande de pension d’invalidité ne mentionnaient pas non plus une dépressionNote de bas de page 12.

[20] Elle n’a vu le Dr Khan qu’une seule fois en 2017. Il ne pensait pas qu’elle avait besoin d’un rendez-vous de suivi, car elle a dit qu’elle ne se sentait pas déprimée et son diagnostic était une réaction dépressive. Il a recommandé une psychothérapie. Elle n’en a pas suivi. Elle a déclaré avoir suivi dix séances de counseling, et non de thérapie, auprès de deux conseillers du PAE en 2018 et en 2019. Elle avait essayé un antidépresseur à faible dose il y a cinq ans, soit avant ou juste après avoir cessé de travailler. Elle ne les a pas pris longtemps et ne prend plus de médicaments pour la dépression.

[21] En 2018, elle a de nouveau tenté de faire approuver une demande de prestations d’invalidité par un autre cardiologue, le Dr Higginson, sur la base d’une tachycardie et d’autres anomalies cardiaques Note de bas de page 13. Il a découvert qu’elle n’avait qu’une tachycardie sinusale, qu’elle n’avait pas d’épisodes d’évanouissement, qu’elle n’avait jamais reçu de diagnostic d’infarctus du myocarde et qu’elle était normale au moment de l’examen. Il n’a rien trouvé qui laisse croire à une anomalie cardiaque importante pour expliquer ses symptômes. Le Dr Higginson n’a trouvé aucune preuve, ni dans ses antécédents ou ni dans l’épreuve d’effort, qu’elle avait besoin d’une coronarographie en août 2018Note de bas de page 14, la dernière fois qu’il l’a vue. Elle n’a jamais eu besoin d’une coronarographie.

[22] J’estime qu’il n’y a pas d’éléments de preuve au moment où elle a cessé de travailler, ou pendant qu’elle travaillait, pour appuyer le fait qu’elle était atteinte d’un problème de santé mentale qui nuisait à sa capacité de travailler. Le rapport du Dr Khan est fondé sur le compte rendu oral de la requérante et n’est corroboré par aucun autre document de spécialiste en santé mentale de la même époque. Elle a déclaré qu’elle est triste et qu’elle pleure facilement, mais elle consulte son nouveau médecin de famille, le Dr Chukho, qu’elle décrit comme [traduction] « à l’écoute », seulement tous les mois ou deux mois. En ce moment, elle n’est pas déprimée, ne prend pas de médicaments et ne reçoit aucun traitement, que ce soit à l’heure actuelle ou au moment de sa PMA. La preuve ne démontre aucun problème de santé mentale qui l’empêche de travailler.

[23] La requérante s’appuie sur le rapport médical du Dr O’DonnellNote de bas de page 15, ainsi que sur la lettre envoyée à la Sun Life en juillet 2018, dont il a déjà été question dans cette décision. Je trouve que son rapport médical est trompeur. Il signale qu’il lui a recommandé de cesser de travailler à partir de février 2016, mais il n’était pas son médecin de famille à l’époque. Il souligne alors qu’elle est complètement incapable de travailler, malgré le fait que les nombreux éléments de preuve de spécialistes au fil des ans n’appuient pas cette opinion. De plus, il a déclaré que [traduction] « si une intervention pour traiter un problème cardiaque donne de bons résultats, nous en informerons le RPC ». La requérante a déclaré que sa tachycardie est maintenant contrôlée et qu’elle prend des médicaments grâce à un nouveau cardiologue traitant, qu’elle voit depuis le Dr Higginson en 2018. Par conséquent, au moment où il a rédigé son rapport en 2018, il restait encore des traitements à fournir qui se sont avérés efficaces pour stabiliser la maladie au moment de la PMA de la requérante.

La requérante n’a pas prouvé qu’elle ne peut pas occuper un emploi convenable.

[24] Il semble y avoir deux versions différentes expliquant pourquoi la requérante est partie en congé de maladie en février 2016. La première, mentionnée par la requérante dans son témoignage et dans une lettre au Dr O’DonnellNote de bas de page 16, est que le Dr Ritsma l’a mise en congé de maladie après avoir quitté le travail deux fois en ambulance.

[25] Elle a bel et bien pris un congé de maladie, bien qu’elle ait déclaré que son employeur ne voulait pas accepter les lettres du Dr Ritsma. Le congé de maladie n’a pas été prolongé lorsque le Dr Anand a refusé de le faire en mars 2017. Depuis, elle ne s’est jamais évanouie de nouveau comme les fois où elle a dû se rendre à l’hôpital. Elle a subi de nombreux tests, dont aucun n’a prouvé qu’elle avait un problème qui l’empêcherait de travailler. Le rapport le plus important est celui du Dr Anand du 29 mars 2017, dans lequel il a expressément déclaré qu’il n’avait trouvé aucune raison qui empêchait la requérante de travailler.

[26] La preuve du Dr Khan de mars 2017 précise que la raison pour laquelle la requérante est partie en congé de maladie était sa mauvaise relation avec son patron, qui lui a causé de l’anxiété, de la dépression et des pensées suicidaires. Il n’y a pas de note du Dr Ritsma à cette époque indiquant qu’elle devait quitter le travail en raison de ces problèmes de santé. Elle ne recevait pas de traitement en santé mentale et ne consultait pas de spécialiste. Interrogée à ce sujet à l’audience, elle a déclaré qu’elle était devenue déprimée lorsqu’elle s’était rendu compte que son rythme cardiaque augmentait sans que les tests ne trouvent pourquoi. Je reconnais que cette situation causerait de l’anxiété et de l’inquiétude; cependant, les éléments de preuve démontrent qu’elle recevait des soins de plusieurs cardiologues, mais pas de spécialiste de la santé mentale. Si elle est partie en raison de mauvaises relations au travail, cela l’empêcherait vraisemblablement de travailler à son lieu habituel de travail, mais pas ailleurs. De plus, au moment où elle a consulté le Dr Khan, elle n’était plus déprimée. Elle a reçu un diagnostic de réaction dépressive à son milieu de travail du Dr Khan. Par conséquent, si elle est partie en raison de mauvaises relations de travail dans ce bureau particulier, qui ont causé de la dépression et de l’anxiété, son problème s’était réglé en 2017. De plus, elle serait capable de travailler ailleurs, car ses problèmes de santé étaient reliés à ce milieu de travail en particulier.

[27] Je m’appuie sur l’opinion du Dr Anand selon laquelle rien ne l’empêchait de travailler d’un point de vue physique. Je me fie également à l’opinion du Dr Khan selon laquelle elle n’était plus déprimée en mars 2017, ce qui indique qu’ aucune raison de santé mentale ne l’aurait empêchée de travailler.

[28] La requérante s’appuie sur l’évaluation psychiatrique de la Dre Vania en novembre 2019Note de bas de page 17 et sur une lettre du Dr Adel KyrollosNote de bas de page 18, spécialiste en médecine interne, en juin 2020. La requérante s’appuie également sur les opinions du Dr O’Donnell, dont j’ai déjà parlé.

[29] Le représentant de la requérante a reconnu que l’évaluation de la Dre Mariam Vania a été produite aux fins d’un litige. La Dre Vania n’était pas sa médecin traitante. À l’époque, elle n’était traitée par aucun spécialiste de santé mentale. Malgré cela, la Dre Vania a constaté qu’elle avait des problèmes médicaux et psychologiques qui l’empêchaient de travailler. Toutefois, le rapport ne fait état d’aucun symptôme actuel grave. La tachycardie est traitée avec du propranolol. La médecin l’a trouvée modérément déprimée. Son évaluation était principalement fondée sur les propos de la requérante sur la façon dont elle avait été traitée au travail et sur ses problèmes de santé physique. Le rapport est clairement rédigé dans le cadre du litige entre la requérante et son employeur. La recommandation portait sur la psychothérapie continue, mais elle n’en a jamais reçu, et elle n’en a pas reçu à ce jour. Elle ne prend pas non plus de médicaments contre la dépression maintenant ou au moment de l’évaluation. Je n’accorde pas beaucoup de poids à ce rapport, car la Dre Vania n’est pas sa médecin traitante, et elle ne recevait pas de counseling psychologique ni d’intervention psychiatrique à l’époque. L’absence de traitement indique que sa santé mentale était, comme l’a souligné la Dre Vania, modérée et qu’elle ne nécessitait ni médicament ni traitement.

[30] Le destinataire de la lettre du Dr Kyrollos est « À qui de droit » et je présume donc que cette lettre a aussi été rédigée dans le cadre du litige. La requérante s’appuie sur l’opinion du Dr Kyrollos selon laquelle elle ne peut pas tolérer les médicaments. Sa lettre précise que plusieurs médicaments ont été essayés pour mieux contrôler sa tachycardie. Il n’y avait qu’un seul médicament qu’elle ne pouvait pas tolérer. Je n’accepte pas qu’il s’agisse d’un problème. De plus, le Dr Kyrollos a noté que sa tachycardie s’était améliorée, même si sa fréquence cardiaque était toujours supérieure à 100. Il l’a vue pour la première fois en janvier 2020, bien après qu’elle ait cessé de travailler. Elle n’a jamais travaillé pendant qu’il la traitait, alors il ne peut pas affirmer qu’elle ne peut pas tolérer le travail, car cela n’a pas été prouvé à ce moment‑là. Ce n’est que récemment qu’il l’a vue pour sa tachycardie. Après l’essai de différents médicaments, il a indiqué une amélioration de sa tachycardie. Il n’est pas spécialisé en psychiatrie ou en psychologie et n’est donc pas en mesure de se prononcer sur sa santé mentale. Je n’accorde pas beaucoup de poids à son opinion selon laquelle elle ne peut pas tolérer le stress physique et émotionnel du travail en raison de ses problèmes de santé actuels.

[31] Lorsqu’il existe une preuve de capacité de travailler, une personne doit montrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son état de santéNote de bas de page 19.

[32] Il est mentionné dans le rapport de mars 2017 du Dr Khan que le syndicat cherchait un autre emploi pour elle. J’estime qu’il s’agit d’une preuve de capacité de travail. Lorsqu’on lui a demandé ce qu’il était advenu de cet emploi, elle a déclaré qu’elle n’en avait aucune idée. Elle n’a tenté d’occuper aucun emploi, même si, en 2017, le Dr Anand avait constaté que rien ne l’empêcherait de travailler, et le Dr Khan avait conclu qu’elle n’était pas déprimée.

[33] J’estime que l’opinion du Dr Anand et le fait que le syndicat cherchait un autre emploi pour elle démontrent d’une capacité de travailler. La requérante n’a pas fait d’efforts pour obtenir et conserver un emploi et démontré que ses démarches avaient été infructueuses en raison de ses problèmes de santé.

[34] Je dois évaluer la gravité du critère dans un contexte réalisteNote de bas de page 20. Ainsi, pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs comme son âge, son niveau de scolarité, ses compétences linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie.

[35] La requérante était âgée de 57 ans à la fin de sa PMA. Bien que son âge puisse être un facteur dans la recherche d’un emploi, ses études et ses compétences linguistiques surpassent largement cette condition. Elle parle l’anglais et le français, les deux langues officielles du Canada, ainsi que l’espagnol, l’italien, l’allemand et l’arabe, soit plus de cinq langues en tout. Elle détient de nombreux diplômes, dont un baccalauréat en psychologie, un baccalauréat spécialisé en psychologie et en littérature anglaise et une maîtrise en criminologie, et elle a presque terminé un doctorat en psychologie. Elle a travaillé pour la Société d’aide à l’enfance pendant ses études universitaires. Elle a également travaillé au laboratoire de neuroanatomie et de comportement animal de l’Université d’Ottawa. Elle a travaillé pour la Société Elizabeth Fry et pour Probation et libération conditionnelle Ontario. Elle a travaillé au service de recherche du Secrétariat du solliciteur général et a fait un stage clinique au département de psychologie de la prison provinciale d’Ottawa. Elle a enseigné le français pour une entreprise privée. Elle a également fait du travail de secrétariat à différents endroits. Elle a été traductrice contractuelle. Elle a occupé de nombreux postes de consultante. Son dernier emploi a été celui d’adjointe administrative de direction des opérations de la Garde côtière canadienneNote de bas de page 21. Elle possède une variété de compétences transférables.

[36] Ses études supérieures, ses diverses compétences linguistiques et ses expériences passées de travail et de vie ne l’empêcheraient pas de trouver un emploi.

[37] Je ne conteste pasle diagnostic de tachycardie de la requérante. Toutefois, il ne met pas sa vie en danger. Il ne l’empêche pas non plus de travailler selon le Dr Anand. Elle ne s’est jamais évanouie de nouveau après les épisodes qui l’ont amenée à l’hôpital en 2016. Sa tachycardie est maintenant bien contrôlée grâce aux médicaments. Elle n’a toujours pas reçu de thérapie et ne prend pas de médicaments contre la dépression. Elle n’a tenté de reprendre aucune occupation et elle est qualifiée pour de nombreux emplois différents.

[38] Je conclus que la requérante n’a pas prouvé qu’elle est atteinte d’une invalidité grave qui la rende régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

Conclusion

[39] L’appel est rejeté.

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