Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : VN c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 894

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-739

ENTRE :

V. N.

Appelante

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Intimé


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


DÉCISION RENDUE PAR : Kate Sellar
DATE DE LA DÉCISION : Le 14 octobre 2020

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] Je rejette la demande de changement (annulation ou modification) de la décision de la division d’appel. Les motifs qui suivent expliquent pourquoi.

Contexte

[2] V. N. (requérante) travaillait à temps plein à son domicile pour un centre d’appel comme représentante du service à la clientèle jusqu’en 2016. Elle a cessé de travailler en raison de douleurs dans le dos dues à une discopathie dégénérative. Elle est atteinte de douleurs chroniques, de troubles de l’adaptation, de dépression majeure et de troubles d’anxiété.

[3] La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) en septembre 2016. Le ministre a rejeté cette demande initialement et après révision. La requérante a interjeté appel devant ce Tribunal. La division générale a rejeté l’appel.

[4] La requérante a interjeté appel de la décision de la division générale. J’ai conclu que la division générale avait commis une erreur de droit. J’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre : la requérante a démontré qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC. Elle a prouvé qu’elle était admissible à une pension d’invalidité au mois de septembre 2019 lorsqu’elle a fourni la preuve médicale à l’appui de son trouble de douleur chronique et de ses troubles psychologiques. La décision de la division d’appel explique les raisons pour lesquelles j’ai déterminé que la requérante était atteinte d’invalidité grave et prolongée à partir de septembre 2019Note de bas de page 1.

[5] La requérante a déposé une demande afin de changerNote de bas de page 2 la décision de la division d’appel. J’appellerai cette demande, dans la présente décision, « demande sur le fondement de faits nouveaux ». La requérante soutient que la décision devrait indiquer que son invalidité était grave et prolongée à partir d’avril 2016.

[6] Je rejette la demande sur le fondement de faits nouveaux de la requérante. Les éléments de preuve fournis par la requérante à l’appui de sa demande n’établissent pas de fait nouveau et essentiel.

Questions en litige

[7] Voici les questions :

  1. Y a-t-il des faits nouveaux qui me permettraient de modifier la date de l’invalidité dans la décision initiale?
  2. S’il n’y a pas de faits nouveaux, y a-t-il un autre moyen de modifier la date de l’invalidité?

Analyse

Ce qu’une partie ne peut pas faire si elle n’est pas satisfaite d’une décision de la division d’appel

[8] Une fois qu’une ou un membre de la division d’appel rend une décision finale, elle ou il a accompli ce qui doit être fait pour les parties dans l’affaire. Son rôle dans l’examen de l’affaire et dans la prise de décision est terminé. Le terme latin pour décrire une ou un membre du tribunal dans cette situationNote de bas de page 3 est « functus officio ». Il est important pour les tribunaux de pouvoir s’appuyer sur une décision qui soit définitive.

[9] Par conséquent, la loi ne prévoit aucun moyen qui permette à une partie insatisfaite de demander à la division d’appel de [traduction] « tout recommencer » afin de réexaminer sa décision de façon générale.

[10] De même, la loi ne prévoit aucun moyen qui permette de faire appel à la présidence du Tribunal pour faire modifier le résultat.

Ce qu’une partie peut faire si elle n’est pas satisfaite d’une décision de la division d’appel

[11] Si une partie requérante, ou le ministre, n’est pas satisfaite d’une décision de la division d’appel, il existe alors quatre options juridiques.

[12] Premièrement, la loiNote de bas de page 4 permet à une partie insatisfaite de demander à la Cour d’appel fédérale de revoir la décision. Dans ce cas, la Cour d’appel fédérale décide si la décision de la division d’appel était raisonnableNote de bas de page 5.

[13] Deuxièmement, la Cour suprême du Canada a confirmé que si une partie est insatisfaite d’une décision :

  • parce que la décideuse ou le décideur n’a pas tranché une question; et
  • cette question a été soulevée à juste titre lors de la procédure; et
  • la décideuse ou le décideur du tribunal avait le pouvoir de trancher cette question dans la législation;

alors la décideuse ou le décideur devrait être autorisé à terminer le travail et à trancher cette questionNote de bas de page 6.

[14] Troisièmement, dans une affaire concernant une pension d’invalidité (comme celle de la requérante), la loiNote de bas de page 7 permet à une partie insatisfaite de demander à la division d’appel d’annuler ou de modifier (changer) sa décision. C’est ce que j’appelle une « demande sur le fondement de faits nouveaux ». Dans ce cas, la division d’appel détermine si la partie requérante a présenté :

  • un fait nouveau et essentielNote de bas de page 8;
  • qui n’aurait pas pu être découvert au moment de l’audience en faisant preuve d’une diligence raisonnable.

[15] Quatrièmement, il existe une façon pour une partie insatisfaite de demander à la division d’appel de publier un corrigendum. Un corrigendum est la correction d’une erreur dans la décision. Le Tribunal dispose d’une directive du présidentNote de bas de page 9 qui décrit comment et quand une partie insatisfaite peut demander à la division d’appel de fournir un corrigendum. Les informations générales sur l’option du corrigendum indiquent qu’il « sert habituellement à corriger des erreurs mineures comme une date ou l’orthographe du nom d’une personne ». La possibilité de demander un corrigendum est conforme à la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, qui confirme qu’une fois que les juges ou les arbitres ont rendu une décision finale, on ne peut pas rouvrir l’affaire sauf si :

  • un « lapsus » s’est glissé dans la formulation, ou
  • la rédactrice ou le rédacteur a fait une erreur dans l’expression de son intention claire ou évidenteNote de bas de page 10.

Un corrigendum permet aux parties insatisfaites de demander à la division d’appel de corriger ce type d’erreurs.

[16] Cette décision portera sur les troisième et quatrième options précitéesNote de bas de page 11.

La requérante a-t-elle fait valoir un fait nouveau?

[17] La requérante n’a fait valoir aucun fait nouveau à l’appui de sa demande fondée sur des faits nouveaux. Par conséquent, cette demande ne donne pas à la requérante le moyen de modifier la date de son invalidité.

[18] La requérante demande à la division d’appel de modifier sa décision afin de corriger une erreur concernant sa date d’invalidité. La requérante fait valoir que la division d’appel a omis par inadvertance des parties pertinentes et importantes du dossier médical qui justifient une date d’invalidité d’avril 2016. La requérante demande que sa date d’invalidité soit corrigée à avril 2016 sur la base des éléments de preuve médicale et que :

[traduction]
… l’on reconnaisse que la date d’un diagnostic d’invalidité attribuable à la douleur chronique n’est jamais la date de début de l’affection. Il existe des éléments de preuve médicale suffisants de la « douleur aiguë » [de la requérante] à partir d’avril 2016, et par la suiteNote de bas de page 12.

[19] La requérante fait valoir que la division d’appel dispose d’une « grande latitude » pour rendre ses décisions. La requérante souligne que le Tribunal rend des décisions sur l’accès aux prestations [traduction] « en vue de mieux satisfaire aux besoins de la population canadienneNote de bas de page 13 ».

[20] La requérante souligne également que lorsqu’un article, un règlement ou une règle du tribunal ne traite pas d’une situation particulière, le règlement est interprété de façon à permettre d’apporter [traduction] « une solution à l’appel ou à la demande qui soit juste et la plus expéditive et économique possibleNote de bas de page 14 ».

[21] Le ministre fait valoir que la requérante n’a fourni aucun nouvel élément de preuve à l’appui de la demande sur le fondement de faits nouveaux. Tous les éléments de preuve auxquels la requérante fait référence dans sa demande se trouvaient à la division d’appel. Le ministre note que le Tribunal n’a pas le pouvoir de modifier une décision dans le cadre d’une demande sur le fondement de faits nouveaux sans fait nouveau et essentielNote de bas de page 15.

[22] La requérante n’a présenté aucun fait nouveau à l’appui de cette demande, de sorte que je ne peux pas accorder une demande sur le fondement de faits nouveaux pour pouvoir déterminer une autre date d’invalidité pour elle. Tous les éléments de preuve que la requérante invoque étaient des éléments de preuve dont disposait la division générale (et donc la division d’appel aussi). Ils ne sont pas nouveauxNote de bas de page 16. La requérante semble me demander d’examiner à nouveau les éléments de preuve existants et d’arriver à une conclusion différente. Ce n’est pas ainsi que se déroule une demande sur le fondement de faits nouveaux. Alors que la plupart des demandes s’enlisent dans une discussion pour déterminer si les faits nouveaux sont essentiels ou s’ils peuvent être découverts comme l’exige la loi, il faut au moins qu’il y ait des faits nouveaux à prendre en considération.

Y a-t-il un autre moyen pour que je puisse modifier la date d’invalidité?

[23] Il n’y a pas d’autre moyen pour que je puisse modifier la date d’invalidité.

[24] Je ne peux pas changer la date en examinant à nouveau la question de la date de l’invalidité (comme une certaine forme de pouvoir de réexamen général). J’ai rendu une décision motivée qui couvre la question de la date d’invalidité. La législation me donne le pouvoir de rendre des décisions, mais je n’ai pas la « grande latitude » dont parle la requérante.

[25] Je ne peux pas modifier la date de l’invalidité au moyen d’un corrigendum. À mon avis, le corrigendum est un moyen de corriger le genre d’erreurs mineures que la Cour suprême qualifiait de « lapsus » ou d’erreur dans l’expression d’une intention claire ou évidente.

[26] La requérante utilise un langage qui suggère que la date d’invalidité que j’ai déterminée correspond peut-être au type de lapsus qui nécessite simplement une correction. Cependant, la date d’invalidité faisait partie de ma décision initiale et j’ai fourni les motifs pour lesquels j’ai déterminé cette date préciseNote de bas de page 17. Il ne saurait s’agir d’une erreur mineure comme l’orthographe du nom d’une personne. Ce n’était pas une erreur de rédaction ou un exemple d’erreur dans l’expression de mon intention claire ou évidente. La directive du président mentionne bien la notion de correction d’une date. Toutefois, dans ce cas, il ne s’agit pas d’une date que j’aurais écrite incorrectement par erreur. J’ai communiqué la date que j’avais l’intention de communiquer.

Conclusion

[27] Je rejette la demande de la requérante d’annuler ou de modifier la décision de la division d’appel. Je ne peux pas, dans ce cas, émettre un corrigendum pour modifier la date de l’invalidité. Je ne dispose d’aucun autre moyen pour modifier la date de l’invalidité dans ma décision.

 

Mode d’instruction :

Sur la foi du dossier

Représentants :

Stephen Yormak, représentant de l’appelante

Hilary Perry, représentante de l’intimé

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