Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : MG c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 895

Numéro de dossier du Tribunal: AD-19-461

ENTRE :

M. G.

Demandeur

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Défendeur


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


Décision relative à une demande de
permission d’en appeler rendue par :
Shirley Netten
Date de la décision : Le 15 octobre 2020

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] M. G. (requérant) a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) en juin 2016. Service Canada a rejeté sa demande en décembre 2016 et après révision, en janvier 2018Note de bas de page 1.

[3] En appel, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale a accordé la pension d’invalidité. Dans sa décision de janvier 2019, la division générale a conclu que le requérant avait satisfait au critère relatif à l’invalidité en septembre 2011. La division générale a précisé que la pension d’invalidité était payable à compter de juillet 2015, soit 11 mois avant la date de la demande.

[4] Pour donner suite à une demande d’Emploi et Développement social Canada, la division générale a rendu une décision corrigée le 5 avril 2019. L’issue de la nouvelle décision est restée la même : la pension est demeurée payable à compter de juillet 2015. Toutefois, la division générale a conclu que le requérant avait satisfait au critère relatif à l’invalidité en avril 2014 plutôt qu’en septembre 2011.

[5] Le requérant demande la permission d’interjeter appel de la décision d’avril 2019 de la division généraleNote de bas de page 2. Je refuse la permission d’en appeler parce que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[6] Voici la question en litige :

  • Le requérant a-t-il soulevé une cause défendable grâce à laquelle il pourrait avoir gain de cause en appel?

Critère de la permission d’en appeler

[7] La division d’appel n’est pas une tribune permettant aux parties de remettre en cause les questions tranchées par la division générale. Au contraire, la division d’appel n’intervient que si la division générale a commis certains types d’erreursNote de bas de page 3, et ce, seulement après avoir accordé la permission d’en appeler.

[8] En vertu de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), la division d’appel doit refuser la permission d’en appeler si elle est « convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 4 ». Le fait d’avoir une « chance raisonnable de succès » consiste à disposer d’une certaine cause défendable grâce à laquelle l’appel proposé pourrait être accueilliNote de bas de page 5. Voici comment la Cour fédérale l’a expliquéNote de bas de page 6 :

Cet appel est plutôt soumis à un processus d’examen préalable qui requiert que celle qui veut porter en appel une décision [de la division générale] satisfasse [la division d’appel] que l’un des motifs d’appel est présent et qu’il y a lieu de rejeter la permission [si elle] est convaincu[e] que l’appel n’a aucune chance de succès sur les motifs invoqués.

[9] Je dois décider si au moins l’un des moyens d’appel prévus par la Loi sur le MEDS pourrait s’appliquer. Si tel est le cas, je dois décider si ce moyen d’appel peut conférer à l’appel du requérant une chance raisonnable de succès.

Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur en écartant la question de savoir si le requérant était invalide en décembre 2003.

[10] Dans les observations qu’il a soumises à la division d’appel, le requérant soutient que la division générale [traduction] « aurait au moins dû tenir compte de la PMA qui prenait fin en décembre 2003Note de bas de page 7 ».

[11] L’un des moyens d’appel soulevés devant la division d’appel est que la division générale a « refusé d’exercer sa compétenceNote de bas de page 8 ». Cette erreur s’appliquerait si la division générale n’avait pas tranché une question qu’elle devait trancher.

[12] Le requérant a constamment répété à Service Canada et à la division générale qu’il était devenu invalide en septembre 2011Note de bas de page 9. Néanmoins, vers la fin de l’audience devant la division générale, le requérant a rapporté ses faibles revenus en 2006, 2007 et 2008 et a déclaré ceci : [traduction] « J’étais probablement déjà invalide en 1999 ».

[13] Pour donner suite à cette déclaration, la division générale a examiné la question de savoir si le requérant satisfaisait au critère relatif à l’invalidité avant décembre 2003, soit après son accident de la route survenu en 1999Note de bas de page 10. La division générale a conclu que la preuve n’appuyait pas le fait que le requérant était invalide à ce moment-là. Par conséquent, je ne crois pas qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de compétence en écartant la possibilité que le requérant soit devenu invalide avant 2003.

[14] Le requérant veut peut-être dire que la division générale n’a pas bien examiné la possibilité qu’il soit invalide en décembre 2003. Un autre moyen d’appel soulevé devant la division d’appel est que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée « sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 11 ».

[15] En écartant la possibilité que le requérant soit devenu invalide à la suite de son accident survenu en 1999, la division générale a mentionné le témoignage du requérant portant sur des douleurs chroniques, l’absence de preuve médicale et le fait que le requérant ait repris le travail pendant de nombreuses années. La division générale avait noté par le passé la preuve du requérant et de sa psychologue selon laquelle il ne pouvait plus travailler depuis septembre 2011, en raison d’un trouble dépressif majeur qui s’était développé en 2011. La division générale n’a pas précisément mentionné le revenu du requérant après son accident de la route, survenu en 1999.

[16] Un tribunal n’est pas tenu de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve qui lui ont été présentés. Il est présumé avoir tenu compte de l’ensemble de la preuve portée à sa connaissanceNote de bas de page 12. Cette présomption peut être réfutée si la décision ne mentionnait pas un élément de preuve essentiel qui est contraire à sa conclusion de fait. Je pourrais alors déduire de l’omission que la division générale n’a pas tenu compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 13. Plus un élément de preuve est important, plus il est probable que l’omission mène à la conclusion qu’il a effectivement été ignoréNote de bas de page 14.

[17] Il n’y a aucun fondement pour une telle conclusion dans la présente cause. Le revenu d’entreprise du requérant dans les années 2000 avait peu de valeur probante à la lumière des déclarations du requérant voulant qu’il ait réussi à reprendre le travail après l’accident de 1999Note de bas de page 15, que les documents et le témoignage aient précisé la date d’invalidité comme étant en septembre 2011Note de bas de page 16, et qu’il n’y avait aucune preuve médicale à l’appui d’une date d’invalidité antérieure. Toute personne qui demande la pension d’invalidité du RPC doit fournir une preuve médicale objective de son invalidité.Note de bas de page 17 Je ne crois pas qu’il est possible de soutenir que la division générale a rejeté une date d’invalidité antérieure sans tenir compte de la preuve.

[18] Étant donné que le requérant n’a soulevé aucune cause défendable en appel concernant l’examen de la division générale d’une date d’invalidité antérieure à décembre 2003, je n’ai pas besoin d’examiner si ce moyen d’appel confère à l’appel une chance de succès.Note de bas de page 18

Il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait en changeant la date de l’invalidité.

[19] Le requérant n’est pas non plus d’accord avec le changement de sa date d’invalidité qui est maintenant en avril 2014 plutôt qu’en septembre 2011.Note de bas de page 19 Il affirme qu’il serait satisfait si la date était rétablie à septembre 2011.

[20] Dans sa décision, la division générale fait constamment référence à la preuve du requérant et de sa psychologue selon laquelle le requérant ne pouvait plus travailler depuis septembre 2011.Note de bas de page 20 Pourtant, voici ce que précise la conclusion corrigée :

[traduction]
Le requérant était atteint d’une invalidité grave et prolongée en septembre 2011 avril 2014, date à laquelle il a cessé de travailler en raison d’un trouble dépressif majeur.

[21] Comme la preuve faisait constamment référence à septembre 2011 plutôt qu’à avril 2014 comme date d’invalidité, il est possible de soutenir que la division générale a changé sa conclusion de fait sans tenir compte de la preuve. L’un des moyens d’appel (erreur de fait) pourrait s’appliquer.

L’appel du requérant est voué à l’échec sur ce moyen d’appel.

[22] Maintenant que j’ai cerné un moyen d’appel possible, je dois examiner s’il confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Par « succès », je fais référence à l’issue souhaitée par le requérant : celui-ci veut recevoir la pension d’invalidité rétroactivement à compter de septembre 2011.

[23] Malheureusement, le requérant n’était pas assuré pour l’invalidité en vertu du RPC en 2011.

[24] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, toute partie requérante doit être invalide, être âgée de moins de 65 ans, ne pas recevoir une pension de retraite et avoir versé un certain montant de cotisations au RPCNote de bas de page 21. Le RPC explique l’exigence relative aux cotisations pour la pension d’invalidité, ainsi que la période cotisable :

  1. 44(2) Pour l’application de [la pension d’invalidité et la prestation d’enfant de cotisant invalide connexe] :
    1. a) le cotisant n’est réputé avoir versé des cotisations de base pendant au moins la période minimale d’admissibilité que s’il a versé des cotisations de base au cours de sa période cotisable sur des gains qui sont au moins égaux à son exemption de base, compte non tenu du paragraphe 20(2), selon le cas :
      1. (i) soit, pendant au moins quatre des six dernières années civiles comprises, en tout ou en partie, dans sa période cotisable, soit, lorsqu’il y a moins de six années civiles entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisable, pendant au moins quatre années,
      2. (i.1) pendant au moins vingt-cinq années civiles comprises, en tout ou en partie, dans sa période cotisable, dont au moins trois dans les six dernières années civiles comprises, en tout ou en partie, dans sa période cotisable,
      3. (ii) pour chaque année subséquente au mois de la cessation de la pension d’invalidité;
    2. b) la période cotisable d’un cotisant est la période qui :
      1. (i) commence le 1er janvier 1966 ou au moment où il atteint l’âge de dix-huit ans, en choisissant celle de ces deux dates qui est postérieure à l’autre,
      2. (ii) se termine avec le mois au cours duquel il est déclaré invalide dans le cadre de l’alinéa (1)b),
      3. […]
      4. [mis en évidence par la soussignée]

[25] L’article 44(2)(a)(i) s’applique dans la présente cause parce que le requérant n’a pas versé de cotisations de base pendant au moins 25 ansNote de bas de page 22. Pour être admissible à une pension d’invalidité, il aurait dû verser des cotisations de base pendant au moins quatre des six dernières années comprises, en tout ou en partie, dans sa période cotisable.

[26] Au titre de l’article 44(2)(b)(ii), la période cotisable du requérant aurait pris fin en septembre 2011, si la date de l’invalidité était en septembre 2011. Les six dernières années entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisable seraient 2006, 2007, 2008, 2009, 2010 et 2011.

[27] Le requérant espérait prolonger sa période de référence en soumettant ses déclarations de revenus pour 2006, 2007 et 2008. Toutefois, son revenu d’emploi pour ces années était inférieur au montant requis pour pouvoir verser des cotisations au RPC : après avoir déduit ses dépenses d’entreprise, le requérant a déclaré une perte d’entreprise pour chacune des trois annéesNote de bas de page 23. Comme confirmé dans un résumé des cotisations versées au RPC en janvier 2019, le requérant avait suffisamment cotisé au RPC en 2009 et 2010, mais pas en 2006, 2007, 2008 ou 2011Note de bas de page 24. Autrement dit, il ne comptait que deux années de cotisations de base au cours de cette période. Le requérant ne satisfaisait pas à l’exigence relative aux cotisations concernant les « quatre des six dernières années civiles » pour une date d’invalidité en septembre 2011.

[28] Par conséquent, le fait de rétablir la date de l’invalidité à septembre 2011 entraînerait la perte totale de la pension d’invalidité du requérant : il cesserait de recevoir sa pension d’invalidité et il devrait rembourser les versements qu’il a reçus jusqu’à maintenant. Non seulement il n’obtiendrait pas gain de cause en appel, mais la situation serait pire que ce qu’elle est présentement. Ce moyen d’appel ne confère à l’appel aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[29] Le requérant n’a pas soulevé une cause défendable grâce à laquelle son appel de la décision de la division générale pourrait être accueilli. Son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je dois donc rejeter sa demande de permission d’en appeler.

Représentant :

M. G., non représenté

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