Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : GB c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 995

Numéro de dossier du Tribunal: GP-20-1005

ENTRE :

G. B.

Appelant (requérant)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale — Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Nicole Zwiers
Date de l’audience par téléconférence : Le 6 octobre 2020
Date de la décision : Le 27 octobre 2020

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Décision

[1] Le requérant n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le requérant a cessé de travailler lorsque la saison de la construction a pris fin en novembre 2009. Il travaillait comme signaleur de chantier saisonnier. Le ministre a reçu la demande du requérant pour la pension d’invalidité le 26 juin 2018. Le ministre a rejeté la demande initialement et après révision. Le requérant a porté en appel la décision découlant de la révision au Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, le requérant doit satisfaire aux exigences énoncées dans le RPC. Plus précisément, il doit être déclaré invalide au sens du RPC au plus tard à la date marquant la fin de la période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations du requérant au RPC. Je constate que la PMA du requérant a pris fin le 31 décembre 2011.

Questions en litige

[4] Les problèmes de santé du requérant, à savoir des problèmes de genoux et de dos, ainsi que la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), ont-ils entraîné chez lui une invalidité grave, c’est-à-dire était-il régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice en date du 31 décembre 2011?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant semblait-elle aussi devoir durer pendant une période longue, continue et indéfinie en date du 31 décembre 2011?

Analyse

[6] Par invalidité, on entend une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une personne est considérée comme atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès. Une personne doit prouver que, selon la prépondérance des probabilités, son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Ainsi, si le requérant satisfait à un seul volet, il n’est pas admissible à des prestations d’invalidité.

Invalidité grave

Le requérant n’est pas atteint d’une invalidité grave

[7] Le requérant a déclaré qu’il occupait un emploi saisonnier comme signaleur de construction tenant un drapeau sur un chantier. Il a cessé de travailler lorsque la saison a pris fin en novembre 2009. Le requérant a affirmé que l’emploi exigeait qu’il se tienne debout 16 heures par jour et que ses genoux devenaient endoloris. Il a ensuite déclaré que son employeur n’avait pris aucune mesure d’adaptation et lui interdisait en tout temps de s’asseoir sur un tabouret. Il aurait dû faire une pause toutes les deux heures, mais cela n’arrivait pas souvent. 

[8] Le requérant a déclaré qu’en 2011, il voyait son médecin de famille, le Dr Slipp, et qu’on ne l’avait dirigé vers aucun spécialiste. Le requérant a affirmé avoir vu le Dr Slipp quelques fois au cours de l’année 2011, pour renouveler des prescriptions. Il n’a suivi aucun traitement pour ses genoux ou son dos parce qu’il n’en a pas les moyens. 

[9] Le requérant a décrit une journée type pour lui en 2011, à la date à laquelle sa PMA a pris fin. Il a déclaré qu’il vivait seul et qu’il se levait avec difficulté après deux ou trois tentatives entre six heures et sept heures du matin. Il se préparait du thé et un petit déjeuner. Il faisait ses propres repas et s’assoyait pour préparer la nourriture s’il en avait besoin. Il avait l’habitude de regarder la télévision et rendait visite à sa mère quotidiennement puisqu’elle habitait près de chez lui. La mère du requérant est décédée il y a quatre ans. Avant son décès, le requérant s’occupait de sa mère en préparant ses médicaments et en faisant des tâches ménagères comme la lessive et le ménage. Le requérant allait habituellement se coucher à 21 h. Il a déclaré qu’il éprouvait de la douleur aux genoux et qu’il trouvait que l’amitriptyline permettait de réduire la douleur et l’aidait à dormir. Il a cessé d’en prendre parce qu’il ne pouvait se payer le médicament. Le requérant a affirmé qu’il pouvait dormir quatre à cinq heures par nuit et qu’il se sentait habituellement reposé et n’avait pas besoin de sieste pendant la journée.

[10] Les éléments de preuve médicale du Dr Slipp aux environs de la PMA du requérant indiquent que ce dernier a été incapable de trouver du travail. Une note clinique du 31 août 2011 indique que le requérant n’avait pas réussi à obtenir du travail en raison de ses résultats scolaires médiocres. Le 13 décembre 2012, le Dr Slipp a écrit que le requérant voulait terminer sa demande de RPC, mais son médecin a fait remarquer que ce serait difficile puisque le requérant n’avait aucun problème de santé notable excepté des résultats scolaires médiocresNote de bas de page 2.

[11] Dans le rapport médical du RPC daté du 25 juin 2018, le Dr Slipp a diagnostiqué de la douleur aux deux genoux, de la douleur au dos et la BPCONote de bas de page 3. Le Dr Slipp a décrit les problèmes de santé du requérant comme étant des douleurs persistantes aux genoux, signalant que la radiographie indiquait que l’arthrose légère en était la cause. Le Dr Slipp a décrit le requérant comme étant un homme pâle et mince ayant des caries dentaires, la voix rauque et la poitrine dégagéeNote de bas de page 4. Il a été signalé que le requérant prenait deux inhalateurs et de l’amitriptylineNote de bas de page 5. Le pronostic du Dr Slipp pour le requérant était une progression graduelle de la douleur aux genoux et au bas du dosNote de bas de page 6. Le Dr Slipp a indiqué qu’il avait commencé à traiter le principal problème invalidant du requérant en novembre 2009. Une radiographie des deux genoux du requérant en mars 2017 a montré de l’arthrose légère dans les deux genoux et dans le compartiment de l’articulation médianeNote de bas de page 7.

[12] Dans ses observations cliniques datées du 25 juin 2018, le Dr Slipp a souligné que le requérant était non employable sur le marché du travail ordinaire en raison de sa douleur lombaire et de sa BPCONote de bas de page 8.

[13] Le Dr Slipp a écrit une lettre à Service Canada datée du 10 mars 2019. Il a indiqué que le requérant a une dixième année d’études, mais qu’il fonctionne à un niveau équivalant à la sixième année. Il a décrit le requérant comme étant de plus en plus inapte au travail de signaleur parce que la douleur articulaire qu’il éprouve aux poignets et aux genoux est telle qu’il ne peut pas se tenir debout toute la journée. Le Dr Slipp a écrit qu’il estimait que le requérant était digne des prestations d’invalidité du RPCNote de bas de page 9.

[14] Dans son questionnaire du RPC, le requérant a répondu qu’il ne pouvait plus travailler à compter du 25 avril 2010 en raison de son état de santé. Il a décrit son trouble comme étant des problèmes de genoux et de dos. Il a expliqué que sa déficience était qu’il trouvait difficile de se tenir debout pendant de longues périodes. Le requérant a aussi fait référence à sa BPCO comme une entrave liée à la santéNote de bas de page 10. Il a décrit ses limitations fonctionnelles ainsi : il peut s’asseoir sans problème; il ne peut pas être debout trop longtemps; il peut marcher sur de courtes distances, il peut soulever ou transporter environ 10 livres sur trois pieds; il peut se pencher à moitié; il dort de trois à quatre heures par nuit; sa respiration est peu profonde et il trouve difficile de respirer et il n’a pas de permis de conduire. Le requérant a décrit toutes les autres fonctions comme étant bonnesNote de bas de page 11. Il a indiqué que son médecin traitant était le Dr Slipp.

[15] En me fondant sur l’ensemble de la preuve, j’estime que les documents médicaux n’étayent pas la conclusion selon laquelle le requérant était atteint d’une invalidité grave à la date à laquelle la PMA a pris fin, soit le 31 décembre 2011. Les documents du Dr Slipp montrent que le requérant avait de l’arthrose légère dans les genoux, de la douleur au dos et une BPCO. Ces problèmes de santé ne faisaient pas obstacle à la capacité de travailler du requérant à la date de fin de sa PMA. Selon son témoignage, le requérant aidait régulièrement sa mère vieillissante avec ses médicaments, sa lessive, son ménage et sa cuisine jusqu’au moment de son décès il y a quatre ans. Les faits montrent que le requérant gérait ses problèmes de santé à la fin de sa PMA et avait la capacité de travailler comme je l’ai expliqué ci-dessous.

Le requérant avait la capacité de travailler

[16] Je dois évaluer l’aspect du critère ayant trait à la gravité dans un contexte réalisteNote de bas de page 12. Cela signifie que, pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie. Le requérant avait 43 ans à la date à laquelle sa PMA a pris fin, soit le 31 décembre 2011. Il a une 10e année et a occupé une série de postes de main-d’œuvre non qualifiée depuis qu’il a cessé de fréquenter l’école secondaire. La preuve fournie à l’audience indique que le requérant a cessé de travailler en novembre 2009, lorsque la saison de construction a pris fin. À cette époque, il avait de l’arthrose légère dans les deux genoux et de la douleur aux genoux et au dos. Il avait aussi une BPCO.

[17] À l’audience, le requérant a déclaré qu’il n’avait aucune difficulté d’apprentissage particulière lorsqu’il était à l’école. Il a arrêté l’école après la 10e année parce que sa mère avait besoin de son soutien financier. Le requérant a affirmé n’avoir aucun intérêt à retourner aux études ou à se recycler. Le Dr Slipp a également fait état du manque d’intérêt du requérant envers la poursuite de ses études dans les notes cliniques. Le requérant a déclaré qu’il avait bien tenté un retour à l’école pour obtenir son diplôme d’études secondaires, mais il l’a fait uniquement parce qu’il le devait afin de continuer à recevoir de l’aide sociale. Le requérant a affirmé qu’il n’aime pas se trouver dans des foules, y compris dans une salle de classe, parce qu’il devient nerveux.  Il n’y a aucun autre élément de preuve d’un diagnostic médical ou d’un traitement de l’anxiété liée à la nervosité.

[18] Le requérant a déclaré que l’apprentissage de l’informatique ne l’intéresse pas et qu’il le ferait uniquement s’il s’agissait d’une obligation afin de continuer à recevoir de l’aide sociale. À l’audience, le requérant a reconnu qu’il aurait pu effectuer du travail lui permettant de s’asseoir, mais qu’il ne pouvait pas faire cela dans son poste de signaleur, qui exigeait de se tenir debout.

[19] La preuve montre que le requérant avait la capacité de travailler ou de se recycler à la fin de sa PMA. Le Dr Slipp a activement essayé de l’encourager à poursuivre ses études pour lui permettre de trouver du travail. De plus, les notes cliniques du DrSlipp révèlent que le médecin ne croyait pas que le requérant était incapable de travailler à la fin de sa PMA. Le Dr Slipp pensait que le requérant ne serait pas un bon candidat pour le RPC parce que sa faible scolarité l’empêchait de trouver du travail à ce moment-là. Je comprends que les problèmes d’arthrose et de BPCO du requérant se détériorent progressivement. La preuve indique qu’au moment de sa PMA, le requérant était capable de travailler et qu’il était un candidat adéquat pour une formation de recyclage. D’après le témoignage du requérant et la preuve médicale, il aurait également pu conserver son emploi de signaleur si des mesures d’adaptation lui avaient permis de prendre des pauses et de s’asseoir de temps en temps.

[20] Le critère permettant d’évaluer si une invalidité est « grave » ne consiste pas à savoir si une personne a de graves affections, mais plutôt à savoir si son invalidité l’empêche de gagner sa vie. Il ne s’agit pas de savoir si une personne est incapable d’exercer son emploi ordinaire, mais plutôt si elle est incapable d’exercer un travail véritablement rémunérateurNote de bas de page 13. À la date à laquelle sa PMA a pris fin, les problèmes de santé du requérant ne l’empêchaient pas de gagner sa vie.

[21] Je dois évaluer l’état de santé du requérant dans sa totalité, ce qui signifie que je dois tenir compte de toutes les déficiences possibles, et non pas uniquement de celles qui sont les plus importantes ou les principalesNote de bas de page 14. La preuve médicale et la preuve fournie par le requérant indiquent que les problèmes de santé sur lesquels il fonde sa demande du RPC sont les suivants : douleur aux genoux et au dos et BPCO. Considérant ces trois problèmes de santé dans leur ensemble, je ne peux conclure que le requérant était atteint d’une invalidité grave ou qu’il était incapable de travailler à la date à laquelle sa PMA a pris fin.

[22] Lorsqu’il existe une preuve de capacité de travailler, une personne doit montrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son état de santéNote de bas de page 15. Le requérant n’a pas travaillé depuis qu’il a arrêté le travail en novembre 2009. Le requérant a cessé de travailler à la fin de la saison, et non en raison de ses problèmes de santé. Il a apporté de l’aide à sa mère de façon régulière pour ses soins de santé à domicile jusqu’au décès de celle-ci en 2016 environ. Cela incluait la cuisine, le ménage, la lessive et la gestion de ses médicaments. Les faits montrent que le requérant avait la capacité de travailler, mais qu’il n’a pas tenté de trouver un emploi. Il n’a pas démontré qu’obtenir un emploi et le conserver a été infructueux à cause de ses problèmes de santé.

[23] Je conclus que le requérant avait la capacité de travailler à la date à laquelle sa PMA a pris fin et qu’il n’était pas atteint d’une invalidité grave. Puisque j’ai conclu qu’il n’était pas atteint d’une invalidité grave, il n’est pas nécessaire que je traite de la question de savoir si le requérant a montré qu’il était atteint d’une invalidité prolongée.

Conclusion

[24] L’appel est rejeté.

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